LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 4 mai 2009), que M. X..., engagé à compter du 26 février 2001 en qualité de chef d'équipe par la société Sitral industrie, a été en arrêt de travail du 29 septembre 2004 au 30 avril 2005 ; qu'il a été licencié pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement, le 13 juin 2005 ; qu'il avait présenté une demande de reconnaissance de maladie professionnelle portée à la connaissance de l'employeur, le 17 janvier 2005 ; que le 22 août 2005, la caisse primaire d'assurance maladie a décidé de la prise en charge de la maladie de M. X... au titre de la législation relative aux accidents du travail et maladies professionnelles ; que, contestant le bien-fondé de son licenciement, M. X... a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement de diverses sommes ;
Attendu que la société Sitral industrie fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. X... des sommes pour défaut de consultation des délégués du personnel, indemnité de préavis, et complément d'indemnité de licenciement, alors, selon le moyen :
1°/ que la mise en oeuvre des règles spécifiques de l'article L. 1226-10 du code du travail est subordonnée à la constatation de l'origine professionnelle de l'inaptitude ; qu'en estimant que la société Sitral industrie aurait dû consulter les délégués du personnel avant de procéder au licenciement pour inaptitude de M. X..., au seul motif que l'employeur était averti au jour du licenciement de la demande de reconnaissance de maladie professionnelle émise par le salarié, cependant qu'elle constatait que le licenciement était intervenu en l'état d'un avis d'inaptitude pour cause de maladie non professionnelle, cette qualification n'ayant été reconnue par la caisse que plusieurs mois après la rupture du contrat de travail, ce dont il résultait nécessairement que la consultation des délégués du personnel n'était pas requise, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 1226-10 du code du travail ;
2°/ qu'en déclarant irrégulier le licenciement intervenu, au motif que la société Sitra industrie avait eu connaissance de la demande de reconnaissance de maladie professionnelle adressée par M. X... à son organisme de sécurité sociale et que, dans l'incertitude du sort de cette demande, l'employeur aurait dû, soit consulter à toutes fins les délégués du personnel, soit différer sa décision de licencier dans l'attente de la décision de la caisse, sans constater la connaissance qu'aurait eu effectivement l'employeur du caractère professionnel de la maladie du salarié, seule circonstance justifiant la consultation des délégués du personnel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-10 du code du travail ;
Mais attendu que les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement ; que l'application de l'article L. 1226-10 du code du travail n'est pas subordonnée à la reconnaissance par la caisse primaire d'assurance maladie du lien de causalité entre l'accident du travail et l'inaptitude ;
Et attendu qu'ayant relevé que le salarié, en conséquence de l'arrêt de travail du 29 septembre 2004, avait présenté, le 17 janvier 2005, une demande de reconnaissance de maladie professionnelle auprès de la caisse primaire d'assurance maladie portée à la connaissance de l'employeur, la cour d'appel, qui a constaté que les examens médicaux de reprise du travail par le médecin du travail, les 2 et 16 mai 2005, étaient intervenus consécutivement à l'arrêt de travail du 29 septembre 2004 au 30 avril 2005, et que les mentions de l'avis d'inaptitude délivré par le médecin du travail correspondaient à la nature des lésions se rapportant à la maladie professionnelle dont la reconnaissance était sollicitée par le salarié, en a justement déduit que les règles protectrices des salariés victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle étaient applicables, peu important que la maladie professionnelle n'ait été reconnue par la caisse primaire d'assurance maladie que postérieurement au licenciement ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Sitral industrie aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société Sitral industrie à payer à la SCP Le Griel la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente novembre deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour la société Sitral industrie
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la Société SITRAL INDUSTRIE à payer à Monsieur X... les sommes de 21.950,16 € pour défaut de consultation des délégués du personnel, de 3.658,38 € brut au titre de l'indemnité de préavis et de 777,40 € à titre de complément d'indemnité de licenciement ;
AUX MOTIFS QU'il ressort de la demande de reconnaissance de maladie professionnelle du 17 janvier 2005 du salarié en cause et plus précisément du certificat médical du 13 janvier 2005 établi par le docteur Jean Z... que la demande du salarié concerne une pathologie «lombo sciatiques hernie discale L.4.L.5» relevant de la maladie professionnelle n° 98 et ayant eu pour conséquences l'arrêt du travail du 29 septembre 2004 ; que la Société SITRAL INDUSTRIE reconnaît dans ses écritures que le salarié a été en arrêt de travail du 29 septembre 2004 jusqu'au 30 avril 2005 pour maladie ; qu'il apparaît dans ces conditions que faute par la Société SITRAL INDUSTRIE de fournir des éléments de nature à établir le contraire, c'est pour la même pathologie ayant entraîné l'arrêt de travail du 29 septembre 2004 que Monsieur X... a été en arrêt de travail jusqu'au 30 avril 2005, laquelle pathologie est bien celle ayant été reconnue comme maladie professionnelle par la CPAM le 22 août 2005 ; que la Société SITRAL INDUSTRIE reconnaît dans ses écritures que les visites de reprise des 2 et 16 mai 2005 sont bien intervenues consécutivement à l'arrêt de travail du salarié du 29 septembre 2004 au 30 avril 2005 ; que par ailleurs, dans l'avis d'inaptitude du 16 mai 2005, le médecin du travail caractérise bien celle-ci comme étant l'incapacité de faire des efforts de manutention manuelle de plus de dix kgs et des efforts de manutention répétitifs ; que précisément, les travaux caractérisant l'inaptitude de Monsieur X... correspondent bien à la nature des travaux générateurs de la maladie professionnelle n° 98 du tableau des maladies professionnelles reconnue au salarié en cause, à savoir des travaux de manutention manuelle, habituelle de charges lourdes, qui nécessairement ne peuvent qu'être interdits aux salariés atteints de cette maladie ; qu'en conséquence, il apparaît que l'inaptitude de Monsieur X... caractérisée par la fiche de visite du 16 mai 2005 est bien imputable à la maladie professionnelle qui lui a été reconnue par la CPAM le 22 août 2005 ; que dès lors que, précédemment au licenciement, la Société SITRAL INDUSTRIE avait été avertie de ce que le salarié avait fait une demande de reconnaissance de maladie professionnelle, ainsi qu'il résulte du courrier de la CPAM du 26 janvier 2005, il appartenait à l'employeur qui licenciait Monsieur X... de mettre en oeuvre les règles de protection des salariés en matière de maladie professionnelle ou de différer sa décision de le licencier jusqu'à ce que la CPAM l'informe du sort de la demande présentée par Monsieur X... ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la mise en oeuvre des règles spécifiques de l'article L.1226-10 du Code du travail est subordonnée à la constatation de l'origine professionnelle de l'inaptitude ; qu'en estimant que la Société SITRAL INDUSTRIE aurait dû consulter les délégués du personnel avant de procéder au licenciement pour inaptitude de Monsieur X..., au seul motif que l'employeur était averti au jour du licenciement de la demande de reconnaissance de maladie professionnelle émise par le salarié (arrêt attaqué, p. 5 § 9), cependant qu'elle constatait que le licenciement était intervenu en l'état d'un avis d'inaptitude pour cause de maladie non professionnelle, cette qualification n'ayant été reconnue par la caisse que plusieurs mois après la rupture du contrat de travail (arrêt attaqué, p. 4 § 4, 6 et 10), ce dont il résultait nécessairement que la consultation des délégués du personnel n'était pas requise, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L.1226-10 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en déclarant irrégulier le licenciement intervenu, au motif que la Société SITRA INDUSTRIE avait eu connaissance de la demande de reconnaissance de maladie professionnelle adressée par Monsieur X... à son organisme de sécurité sociale et que, dans l'incertitude du sort de cette demande, l'employeur aurait dû, soit consulter à toutes fins les délégués du personnel, soit différer sa décision de licencier dans l'attente de la décision de la caisse (arrêt attaqué, p. 5 § 9), sans constater la connaissance qu'aurait eu effectivement l'employeur du caractère professionnel de la maladie du salarié, seule circonstance justifiant la consultation des délégués du personnel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1226-10 du Code du travail.