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23/11/2010 | FRANCE | N°09-40993

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 novembre 2010, 09-40993


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 30 août 1994 par la société Réjan en qualité de responsable de magasin ; que son contrat de travail stipulait une rémunération brute mensuelle pour un horaire mensuel de 180 heures, étant précisé que cette rémunération était convenue compte tenu de la nature des fonctions et des responsabilités qui lui étaient confiées et qu'elle resterait indépendante du temps que l'intéressé consacrerait de fait à l'exercice de ses fonctions ; qu'à la

suite d'un accord collectif négocié sur la réduction du temps de travail en app...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 30 août 1994 par la société Réjan en qualité de responsable de magasin ; que son contrat de travail stipulait une rémunération brute mensuelle pour un horaire mensuel de 180 heures, étant précisé que cette rémunération était convenue compte tenu de la nature des fonctions et des responsabilités qui lui étaient confiées et qu'elle resterait indépendante du temps que l'intéressé consacrerait de fait à l'exercice de ses fonctions ; qu'à la suite d'un accord collectif négocié sur la réduction du temps de travail en application des lois du 13 juin 1998 et 19 janvier 2000, la durée du travail a été ramenée dans l'entreprise à 151,67 heures par mois ; qu'estimant que sa rémunération n'avait jamais été conforme au minimum conventionnel et que l'employeur avait procédé, à l'occasion du passage aux 35 heures, à la suppression unilatérale des heures supplémentaires prévues dans son contrat de travail ainsi que de diverses primes, M. X... a saisi la juridiction prud'homale de demandes de rappel de salaires ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la Société Rejan fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à M. X... certaines sommes à titre de rappel de salaires et d'heures supplémentaires ainsi que d'indemnité de congés payés afférents alors, selon le moyen, que la réduction de la durée du travail dans le cadre d'un accord collectif pris en application de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 ne constitue pas une modification du contrat de travail, sauf si elle s'accompagne d'une réduction de la rémunération du salarié ; qu'en estimant que la réduction à 35 heures hebdomadaires de l'horaire de travail de M. X... dans le cadre de cet accord collectif aurait dû faire l'objet d'un avenant au contrat de travail de celui-ci, dès lors que le salarié n'accomplissait plus les heures supplémentaires qu'il effectuait antérieurement à son accord, cependant qu'il était constant que M. X... n'avait subi aucune diminution de salaire lors de la réduction de son temps de travail et qu'aucune convention de forfait n'était par ailleurs caractérisée pour la période antérieure à la réduction du temps de travail, la cour d'appel a violé l'article L. 212-3 ancien du code du travail et l'article L. 121-1 du code du travail, devenu l'article L. 1221-1 du même code ;
Mais attendu que la cour d'appel ayant constaté, d'une part, l'existence d'une convention de forfait prévue par le contrat de travail correspondant à une durée de 169 heures et 11 heures supplémentaires et, d'autre part, que la rémunération du mois de décembre 2001 était inférieure à la rémunération minimale conventionnelle correspondant à sa classification augmentée des heures supplémentaires, le moyen manque en fait ;Mais sur le second moyen :
Vu les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
Attendu que pour condamner la société Rejan à payer à M. X... une certaine somme à titre de rappels de primes, la cour d'appel, après avoir relevé que les primes d'octobre et de décembre avaient bénéficié suffisamment longtemps au salarié pour acquérir un caractère de permanence et que le montant en était resté stable pendant plusieurs années, retient que les bulletins de salaires de trois autres salariés versés aux débats permettent de vérifier qu'ils percevaient également ces deux primes et qu'en conséquence, les conditions dont dépendait le droit aux primes litigieuses étaient remplies ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs insuffisants à caractériser la fixité et la généralité de l'usage dont le salarié revendiquait le bénéfice, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Rejan à payer à M. X... la somme de 9 354,30 euros à titre de rappel de primes, l'arrêt rendu le 9 janvier 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Reims ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois novembre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par de Me Balat, avocat aux Conseils pour la société Rejan
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché, à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la Société REJAN à payer à Monsieur X... les sommes de 1.033,36 € à titre de rappel de salaires, outre 103,33 € au titre des congés payés afférents, et de 12.141,86 € à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 1.214,18 € au titre des congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QUE le contrat de travail souscrit entre les parties le 30 août 2004 stipulait qu'en rémunération de ses services, Monsieur X... percevrait une rémunération brute mensuelle de 9.350 F à la date de signature du contrat, sur la base d'un horaire moyen mensuel de 180 heures ; qu'il était précisé que cette rémunération était convenue compte tenu de la nature des fonctions et des responsabilités confiées à Monsieur X... et qu'elle resterait indépendante du temps que le salarié consacrerait de fait à l'exercice de ses fonctions ; qu'alors que la durée légale du travail était fixée à 169 heures par mois, il résulte de ces stipulations contractuelles que Monsieur X..., qui avait le statut de cadre, percevait un salaire correspondant à un forfait horaire fixé à 180 heures, c'est-à-dire au salaire minimum prévu dans la convention collective comme étant celui d'un cadre de niveau VII auquel s'ajoutait le paiement d'heures supplémentaires comprises entre 169 et 180 heures, soit onze heures supplémentaires ; que l'accord négocié au mois de décembre 2001 au sein de l'entreprise sur la réduction du temps de travail, en application des lois du 13 juin 1998 et du 19 janvier 2000, prévoyait, s'agissant des cadres liés par une convention de forfait en heures, que la rémunération de ce forfait serait au moins égale à la rémunération qu'ils recevraient compte tenu du salaire minimum conventionnel applicable dans l'entreprise et des bonifications et majorations pour heures supplémentaires ; qu'il était précisé dans cet accord que les modalités de forfait retenues feraient l'objet d'un avenant au contrat de travail du salarié concerné ; que Monsieur X... soutient qu'à partir de l'application de cet accord, il a été rémunéré sur la base de 151,67 heures par mois et que les heures supplémentaires, qui faisaient partie de sa rémunération initiale, ont été supprimées sans son accord ; que la Société REJAN réplique que depuis l'entrée en vigueur de l'accord collectif de réduction du temps de travail, Monsieur X... n'a jamais effectué plus de 35 heures par semaine, qu'il a vu son salaire maintenu et n'a donc souffert aucune diminution de salaire ; que cependant, en l'absence de tout avenant à son contrat de travail, Monsieur X... était fondé à soutenir que la durée légale du travail, ayant été ramenée à 151,67 heures par mois, le forfait horaire prévu dans ce contrat devait être diminué d'autant et passer de 180 heures à 162,67 heures ; qu'à cet égard, la Société REJAN fait valoir vainement que son salarié ne faisait pas plus de trente-cinq heures par semaine ; qu'en effet, la convention ne stipulait aucun horaire et prévoyait au contraire qu'eu égard aux responsabilités de l'intéressé, sa rémunération était fixée de manière indépendante du temps qu'il consacrait à ses fonctions ; qu'en conséquence, alors que les bulletins de salaire versés aux débats font apparaître que la rémunération de Monsieur X... était calculée sur la base de 180 heures de travail jusqu'au 30 novembre inclus, puis sur la base de 151,67 heures à partir du 1er décembre 2002, date de l'entrée en vigueur de l'accord sur la réduction du temps de travail, au lieu de 162,67 heures, l'appelant est fondé à soutenir qu'il n'a pas été rempli de ses droits ; que sur ce point, le fait que la rémunération mensuelle brute du mois de novembre 2001, soit 11.360 €, ait été identique à celle du mois de décembre suivant ne suffit pas à justifier le refus de faire droit à la demande de rappel de salaire ; qu'en effet, cette somme de 11.360 F est inférieure à celle de 11.500 F qui correspondait, en vertu de l'avenant à la convention collective du 6 septembre 2001, à la rémunération minimale d'un salarié appartenant au niveau VII et devait donc être augmentée des onze heures supplémentaires qui faisaient partie du forfait prévu au contrat ; que le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a refusé de faire droit à la demande en paiement de rappel de salaire et d'heures supplémentaires formée, dans la limite de la prescription quinquennale, au titre de la période comprise entre le 1 er janvier 2002 et le 30 novembre 2008, étant précisé que, durant cette période, Monsieur X... a perçu une somme égale ou inférieure au salaire minimum conventionnel fixé par la convention collective, sauf durant la période du mois de février 2005 au mois de mai 2006, les bulletins de salaire afférents faisant apparaître un salaire brut de 1.757,78 €, supérieur au minimum conventionnel fixé à 1.753 € ; que s'agissant du taux applicable aux heures supplémentaires, Monsieur X... a reconnu, et modifié ses conclusions en ce sens, qu'elles devaient être calculées, non pas au taux de 25 %, mais à celui de 10 %, c'est-à-dire le taux applicable aux heures effectuées entre trente-cinq et trente-neuf heures dans les entreprises de moins de vingt salariés ;
ALORS QUE la réduction de la durée du travail dans le cadre d'un accord collectif pris en application de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 ne constitue pas une modification du contrat de travail, sauf si elle s'accompagne d'une réduction de la rémunération du salarié ; qu'en estimant que la réduction à 35 heures hebdomadaires de l'horaire de travail de Monsieur X... dans le cadre de cet accord collectif aurait dû faire l'objet d'un avenant au contrat de travail de celui-ci, dès lors que le salarié n'accomplissait plus les heures supplémentaires qu'il effectuait antérieurement à cet accord, cependant qu'il était constant que Monsieur X... n'avait subi aucune diminution de salaire lors de la réduction de son temps de travail et qu'aucune convention de forfait n'était par ailleurs caractérisée pour la période antérieure à la réduction du temps de travail, la cour d'appel a violé l'article L.212-3 ancien du Code du travail et l'article L.121-1 du Code du travail, devenu l'article L.1221-1 du même Code.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la Société REJAN à payer à Monsieur X... la somme de 9.354,30 € à titre de rappel de primes ;
AUX MOTIFS QUE s'agissant de la prime dite d'octobre, les bulletins de salaire de Monsieur X... permettent de constater qu'elle lui a été versée régulièrement à compter de l'année 1995 pour un montant initial de 3.000 F, porté à 5.000 F, puis à 7.500 F, somme à laquelle elle s'est stabilisée jusqu'en 2003, avant d'être ramenée à 600 € en 2004, et de disparaître en 2005 ; qu'il en va de même de la prime de décembre qui apparaît sur les bulletins de salaire dès l'année 1994 pour un somme dont le montant initial fixé à 9.500 F a progressé pour se stabiliser à la somme de 11.000 F de 1998 à 2001, avant de fluctuer entre 5.000 F et 9.000 F, de baisser jusqu'à 400 € en 2006 et de disparaître en 2007 ; que ces éléments révèlent que ces deux primes ont bénéficié suffisamment longtemps au salarié pour acquérir un caractère de permanence, et que le montant en est resté stable pendant plusieurs années, de 1998 à 2003 pour la prime d'octobre, et de 1996 à 2001 pour la prime de décembre ; qu'en conséquence, alors que l'appelant verse aux débats les bulletins de salaire d'autres salariés, Mesdemoiselles Z... et A... et Monsieur C..., permettant de vérifier qu'ils percevaient également ces deux primes, il convient de constater que, contrairement à ce qu'ont décidé les premiers juges, les conditions dont dépendait le droit aux primes litigieuses étaient remplies en l'espèce ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le paiement d'une prime n'est obligatoire pour l'employeur que lorsque son versement résulte d'un usage répondant aux caractères de constance, généralité et fixité ; que le caractère habituel du versement d'une prime est insuffisant en l'absence de fixité et de généralité à créer une obligation pour l'employeur ; qu'en estimant que les primes d'octobre et de décembre avaient le caractère d'un complément de salaire pour Monsieur X..., tout en constatant que la prime d'octobre avait fluctué chaque année, connaissant une forte baisse en 2004 pour disparaître en 2005, et que la prime de décembre avait également fluctué avant baisser fortement en 2006 pour disparaître en 2007 (arrêt attaqué, p. 6 § 7 et 8), ce dont il s'évinçait nécessairement que les primes en cause ne répondaient pas aux critères de constance et de fixité, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1134 du Code civil et l'article L.1221-1 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE pour répondre au caractère de généralité, la gratification doit être attribuée à l'ensemble du personnel ou tout au moins à une catégorie bien déterminée ; qu'en estimant que les primes d'octobre et de décembre avaient un caractère de généralité, au seul motif qu'elles étaient perçues par trois salariés, outre Monsieur X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil et de l'article L.1221-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-40993
Date de la décision : 23/11/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 09 janvier 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 nov. 2010, pourvoi n°09-40993


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.40993
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