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16/11/2010 | FRANCE | N°09-70300

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 16 novembre 2010, 09-70300


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Met hors de cause sur sa demande la société Martinique TV câble ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Martinique câble multimédia (société MCM), contrôlée par la société Martinique TV câble (société MTVC), a conclu avec la société Compagnie générale d'informatique et de technologie (société CGIT) un contrat d'assistance technique ; que cette dernière société, s'estimant créancière de la société MCM pour des prestations non réglées et prétendant, en outre, être victime de

la rupture brutale du contrat liant les parties, a obtenu une ordonnance d'injonction de ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Met hors de cause sur sa demande la société Martinique TV câble ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Martinique câble multimédia (société MCM), contrôlée par la société Martinique TV câble (société MTVC), a conclu avec la société Compagnie générale d'informatique et de technologie (société CGIT) un contrat d'assistance technique ; que cette dernière société, s'estimant créancière de la société MCM pour des prestations non réglées et prétendant, en outre, être victime de la rupture brutale du contrat liant les parties, a obtenu une ordonnance d'injonction de payer, à laquelle la société MCM a formé opposition, avant d'être mise en liquidation judiciaire par jugement du 12 novembre 2002, qui a désigné M. X..., en qualité de liquidateur ; qu'après reprise de l'instance sur l'opposition en cours devant le tribunal mixte de commerce, celui-ci a fixé, en présence de M. X..., ès qualités, les créances de la société CGIT, rejetant toute condamnation de la société MTVC, également mise en cause ; que la société CGIT a interjeté appel et assigné en intervention forcée M. X..., pris en son nom personnel, en vue de rechercher sa responsabilité civile professionnelle pour n'avoir pas donné suite à des demandes de renseignements complémentaires présentées par M. Y..., expert-comptable désigné par le juge-commissaire de la liquidation judiciaire de la société MCM, en vue de déterminer les causes des difficultés de l'entreprise ;
Sur les deuxième et troisième moyens :
Attendu que ces moyens ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles 333 et 555 du code de procédure civile, ensemble l'article 174 du décret du 27 décembre 1985 ;
Attendu que la recevabilité de l'intervention forcée en appel n'est pas subordonnée à la compétence territoriale ou d'attribution du premier juge à l'égard du tiers mis en cause, lorsque la cour d'appel connaît aussi, en raison de la matière, des décisions de la juridiction qui aurait été compétente ;
Attendu que, pour déclarer irrecevable devant la cour d'appel la demande en intervention forcée dirigée à l'encontre de M. X..., pris en son nom personnel, l'arrêt retient d'abord que les actions en responsabilité civile à l'encontre d'un mandataire judiciaire ne relèvent en première instance que du tribunal de grande instance ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que, si l'action en responsabilité civile personnelle à l'encontre de M. X... ressortissait, en première instance, à la compétence d'attribution du tribunal de grande instance, et non à celle du tribunal mixte de commerce, cette action pouvait, par voie d'intervention forcée, être portée devant elle, dès lors qu'elle était juridiction d'appel des deux tribunaux, la cour d'appel a violé le deuxième texte susvisé par refus d'application et les deux autres par fausse application ;
Et sur le même moyen, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que pour justifier l'irrecevabilité de la demande en intervention forcée, l'arrêt, après avoir énoncé que l'article 555 du code de procédure civile subordonne la recevabilité en appel d'une telle intervention à l'évolution du litige, retient encore que le rapport de l'expert Y..., connu de la société CGIT depuis novembre 2002, soit avant le prononcé du jugement entrepris, ne constitue pas un élément nouveau ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que M. X... ne contestait pas que la société CGIT n'avait eu connaissance du rapport de M. Y... que postérieurement au jugement déféré, la cour d'appel, qui avait elle-même constaté que c'était un précédent expert, M. Z..., qui avait déposé un pré-rapport le 8 novembre 2002, tandis que M. Y... n'avait été désigné que dans le cadre de la procédure collective de la société MCM, ouverte le 12 novembre 2002, a méconnu l'objet du litige ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande en intervention forcée dirigée par la société Compagnie générale d'informatique et de technologie à l'encontre de M. X..., pris en son nom personnel, l'arrêt rendu le 3 juillet 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens exposés par la société Compagnie générale d'informatique et de technologie et condamne cette société aux dépens exposés par la société Martinique TV câble ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Compagnie générale d'informatique et de technologie et la condamne à payer à la société Martinique TV câble la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Spinosi, avocat aux Conseils, pour la société Compagnie générale d'informatique et de technologie
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable l'intervention forcée dirigée par la société CGIT à l'encontre de Me X... pris en son nom personnel ;
Aux motifs que « l'action engagée en cause d'appel par la société CGIT à l'encontre de Maître X..., assigné en intervention forcée, tend à voir dire que celui-ci, en s'abstenant de donner suite au demandes de l'expert Y... quant à la consultation de la comptabilité clients de la société MARTINIQUE TV CABLE, commettait une faute personnelle faisant grief à la société CGIT puisque l'expert aurait pu mettre en évidence des écritures conduisant le tribunal à engager une action en comblement de passif à l'encontre des dirigeants de la société MCM et de la société MARTINIQUE TV CABLE ;
Il convient d'observer que les actions en responsabilité civile à l'encontre d'un mandataire judiciaire, ne relèvent en première instance que du tribunal de grande instance ;
De plus, aux termes de l'article 555 du code de procédure civile, la recevabilité de l'intervention est subordonnée à l'évolution du litige. Or le rapport de l'expert Y..., connu de la société depuis novembre 2002, ne constitue pas un élément nouveau » ;

Alors, d'une part, que l'assignation en intervention forcée d'une partie en cause d'appel n'est pas soumise aux règles de compétence propres à la première instance ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel, pour déclarer irrecevable l'assignation en intervention forcée en cause d'appel de la société CGIT à l'encontre de Me X... pris en son nom personnel, a considéré que les actions en responsabilité civile à l'encontre d'un mandataire judiciaire ne relèvent en première instance que du tribunal de grande instance ; qu'en statuant ainsi, quand une telle disposition ne pouvait pourtant s'appliquer à l'intervention forcée effectuée en cause d'appel, la Cour d'appel a violé par fausse application l'article 174 du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985 (devenu R. 662-3 du Code de commerce), ensemble l'article 555 du code de procédure civile ;
Alors, d'autre part, que le juge ne peut dénaturer l'objet du litige tel qu'il est déterminé par les prétentions des parties ; qu'en l'espèce, il ressort des conclusions de la CGIT, non contestées sur ce point par les écritures adverses de Me X..., que la société exposante n'avait eu connaissance du rapport de M. Y... que lors de sa communication en juin 2006 ; que dès lors, en déclarant irrecevable l'intervention forcée en retenant que l'exposante avait eu connaissance du rapport de M. Y... dès novembre 2002, la Cour d'appel a violé l'article 4 du Code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la CGIT de ses demandes de dommages-intérêts à l'encontre de la société MTVC ;
Aux motifs que « la société CGIT n'a en aucune manière contracté avec la société MARTINIQUE TV CABLE. Le fait que la société MARTINIQUE TV CABLE et la société MCM ait eu des dirigeants communs est dénué d'intérêt dans les rapports entre la société CGIT et la société MARTINIQUE TV CABLE dés lors que la CUIT ne présente aucun élément, même de nature pré-contractuelle, permettant de penser qu'elle s'est engagée à conclure le contrat de prestation de service avec la société MCM sous la condition d'une garantie solidaire ou autonome, ou d'une promesse de faire ou ne pas faire donnée par la société MARTINIQUE TV CABLE.
Bien au contraire l'expert Z..., dans la présentation des sociétés concernées, montre que les sociétés MCM, MTVC (Martinique) et WSG (Guadeloupe) sont des sociétés soeurs, filiales d'une holding ICC implantée dans les Iles Vierges.
Il précise le champ d'action de la société MARTINIQUE TV CABLE comme centré sur le réseau câblé filaire destiné à diffuser un bouquet de chaînes de télévision et MCM comme couvrant le champ d'Internet et de la téléphonie par le réseau commuté.
Le contrat d'assistance technique convenu entre la société CUIT et la société MCM précise spécifiquement au point 1-4 que les services d'assistance technique objet du contrat ne s'appliquent qu'aux clients de MCM connectés à Internet seulement par le téléphone ou au moyen d'un modem 56K et que " sont exclus de ce contrat les clients connectés à Internet via le câble, le satellite ou tout autre moyen d'accès ". Il ne rentrait donc pas dans les prévisions des parties que la société CGIT puisse intervenir pour le compte de la société MARTINIQUE TV CABLE.
De ce fait, même si la société CGIT a pu, avant de contracter, apprécier la surface financière et commerciale de la société MCM en tenant compte de son appartenance à un groupe industriel, la société MARTINIQUE TV CÂBLE reste un tiers à son égard ; aucun élément du dossier n'établit une immixtion de la société MARTINIQUE TV CABLE dans la gestion de la société MCM ; si le rapport Y... mentionne que M. B... et CHARLES C..., dirigeants de la société MARTINIQUE TV CABLE, occupaient des fonctions similaires chez MCM et donc intervenaient dans la gestion administrative, commerciale et stratégique de celle-ci, ceci ne peut suffire à caractériser l'immixtion de la société MARTINIQUE TV CABLE dans la gestion de la société MCM » ;
Alors que l'exposante faisait valoir dans ses conclusions d'appel que la société MTVC avait soit procédé à l'acquisition régulière du fonds de commerce dans la seconde partie de l'année 2000, et qu'à ce titre elle était tenue des obligations du contrat conclu entre CGIT et MCM, soit procédé à une appropriation irrégulière du fonds de commerce, de nature à fonder une action en responsabilité contractuelle sur le fondement des articles L. 624-3 et L. 624-5 du Code de commerce (conclusions d'appel de l'exposante, p. 30) ; qu'en l'espèce, en se contentant de relever, pour débouter la société exposante de ses demandes à l'encontre de la société MTVC, que la société CGIT n'avait pas contracté avec la société MARTINIQUE TV CABLE, sans répondre au moyen péremptoire de l'exposante sur l'acquisition de la qualité de cocontractant pas la société MTVC en cours d'exécution du contrat, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir limité la fixation de la créance de la CGIT à la somme de 142. 368, 43 euros ;
Aux motifs que « le premier juge a fixé la créance de la société CUIT à l'encontre de cette société à la somme de 89. 714, 29 euros se décomposant en un solde de 12 factures restant impayées pour 57. 700 euros et une somme de 32. 014, 29 euros au titre de dommages intérêts pour brusque rupture. La société CGIT critique ce chiffrage en retenant que l'expert avait constaté l'existence de factures complémentaires non prises en compte ; en outre elle estime insuffisante la réparation du préjudice lié à la rupture en ce qu'elle n'a pas pris en considération le gain manqué alors que la société CGIT avait engagé des investissements pour accompagner le développement prévisible de l'activité de réseau câblé filaire de la société MARTINIQUE TV CABLE, avant que celle-ci ne change brutalement de stratégie.
L'existence de factures restées impayées dans la période courant d'octobre 1999 à mars 2000 n'est pas contestable à hauteur de 294. 487, 12 francs étant souligné que les sommes sont exprimées en francs dans le rapport d'expertise.
L'expert relève dans son rapport, après avoir collecté plus d'une centaine de " bons d'intervention " que diverses factures entre le 20 juillet 1998 et le 23 mars 19999 sont restés impayées pour un total de 347. 310, 22 francs.
Or, on ne trouve pas trace dans ce rapport de justificatifs venant étayer les 3 factures de vente de matériel que la société CGIT présente pour un total de 36. 348, 43 francs.
En ce qui concerne les prestations réalisées par la société CGIT toute l'année 1999 et jusqu'en juin 2000, l'expert estime qu'il convient de prévoir un complément de règlement à hauteur de 378. 000 francs. Cependant le contrat de prestation de service du 28 avril 1998 prévoit expressément les règles de rémunération de l'assistance technique assurée par la société CGIT dans son article 3-2 : redevance périodique, et diverses factures discutées ci-avant, correspondent à cette rémunération mensuelle fixée à la somme de 10. 117, 80 francs ; C'est le cas des mois de juin, juillet, septembre, octobre 1998.
L'existence d'une facture du 23 mars 1999 répertoriée " solde année 1998 " conduit à limiter ces redevances à recouvrer de janvier 1999 jusqu'au départ de M. D...de la société MCM fin avril 2000 ; c'est en effet sa présence en tant que détenteur du savoir-faire qui sous-tendait l'économie du contrat de prestation de services. Ce poste sera arrêté à la somme de 161. 884, 80 francs ;
Et que « la convention du 28 avril 1998 a été conclue pour une durée d'une année renouvelable par tacite reconduction avec résiliation éventuelle deux mois avant la date anniversaire. L'indemnisation de la brusque rupture d'une relation commerciale établie donnant à l'un des partenaires une exclusivité de fait pour la fourniture de biens ou d'un service se détermine au regard du temps nécessaire à la reconstitution d'une activité équivalente à celle perdue du fait de la résiliation fautive.
Dans le cas d'espèce M. D...; dirigeant social de la société CGIT, était directeur opérationnel de la société MCM depuis le 1 er mars 2008. Lors de la mise en place de l'accord du 28 avril 1998 le délai normal de préavis a été fixé à 2 mois, la société CGIT convenant implicitement mais nécessairement qu'un tel délai était suffisant pour faire face à la perte de chiffre d'affaire découlant d'une cessation des relations mutuelles.
Il ressort des éléments du contentieux prud'homal ayant opposé la société MCM et M. D...que ce dernier a été convoqué à un entretien préalable le 15 mars 2000. Dés cette date le sort du contrat d'assistance technique était scellé et la société CUIT était en mesure de s'organiser pour pallier à la perte de cette branche d'activité : Cependant la société MCM, en ne tirant pas les conséquences de ses choix managériaux, a laissé la société CG1T dans l'expectative faute de dénoncer la convention du 28 avril 1998 et manqué ainsi à l'obligation d'exécution de bonne foi.
Le préjudice en résultant pour la société CGIT sera fixé à la somme de 40. 480 francs.
L'expert évoque les investissements réalisés par la société CGIT ainsi que le coût d'un déménagement consécutif à la conclusion du contrat de prestation de service convenu avec la société MCM.
Cependant la convention du 28 avril 1998, simple contrat de prestation de service, ne prévoit en aucune manière une quelconque prise en charge, même partielle, de tels postes ;
Le montant total de la créance de la société CGIT à l'encontre de la société MCM sera donc arrêté à la somme de 933. 876, 43 francs soit 142. 368, 43 euros » ;
Alors que l'exposante faisait valoir dans ses conclusions d'appel que la rupture abusive du contrat lui avait occasionné un manque à gagner de l'ordre de 9. 078. 000 francs (1. 383. 932 euros) relatif aux royalties non versées et attendues sur le contrat à échéance en avril 2001 (conclusions d'appel, p. 41) ; qu'en se bornant à examiner le coût des investissements, des licenciements et du déménagement pour fixer la créance de la CGIT à la somme de 142. 368, 43 euros, sans répondre au moyen péremptoire de l'exposante sur le manque à gagner qu'elle avait subi du fait de la rupture du contrat, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 09-70300
Date de la décision : 16/11/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Fort-de-France, 03 juillet 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 16 nov. 2010, pourvoi n°09-70300


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Tiffreau et Corlay

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.70300
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