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16/11/2010 | FRANCE | N°09-69722

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 16 novembre 2010, 09-69722


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 23 juin 2009), que M. X... a obtenu du Crédit industriel de l'Ouest (la banque), lors de l'ouverture d'un compte titres, conclu pour une durée indéterminée, des conditions tarifaires avantageuses, confirmées par lettre du 16 février 1999 ; qu'à la suite du refus de M. X... d'accepter la modification de ces conditions, la banque lui a notifié, le 13 décembre 2005, la résiliation de la convention de titres ; que M. X... a assigné la banque en

indemnisation de son préjudice moral et financier résultant de cette ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 23 juin 2009), que M. X... a obtenu du Crédit industriel de l'Ouest (la banque), lors de l'ouverture d'un compte titres, conclu pour une durée indéterminée, des conditions tarifaires avantageuses, confirmées par lettre du 16 février 1999 ; qu'à la suite du refus de M. X... d'accepter la modification de ces conditions, la banque lui a notifié, le 13 décembre 2005, la résiliation de la convention de titres ; que M. X... a assigné la banque en indemnisation de son préjudice moral et financier résultant de cette rupture ainsi qu'en remboursement de divers frais prélevés par cette dernière ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir limité la condamnation de la banque au paiement de la somme de 1 002,43 euros et rejeté ses autres demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que la résiliation d'un contrat à durée indéterminée, qui revêt un caractère abusif, expose son auteur au paiement de dommages-intérêts ; qu'elle peut, même si le préavis est respecté, revêtir un caractère abusif en raison des circonstances particulières qui accompagnent cette rupture ; qu'il est constant en l'espèce que la banque était liée à M. X... par un engagement l'exonérant du paiement de droits de garde «sans limitation dans le temps» ; que la cour d'appel a constaté, par adoption des motifs du premier juge, qu'il n'est pas douteux que la banque n'aurait pas procédé à la résiliation du compte si M. X... avait accepté des conditions tarifaires plus onéreuses pour lui ; qu'il en résultait que la résiliation du compte titres prononcée par la banque était faite en méconnaissance de son engagement de maintenir l'exonération du paiement de droit de garde sans limitation dans le temps; que de telles circonstances rendent la résiliation abusive ; qu'en statuant en sens contraire, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du code civil ;
2°/ que par conclusions régulièrement signifiées le 15 avril 2009, M. X... faisait valoir que l'engagement pris par la banque, stipulant une durée «sans limitation dans le temps» pour les conditions tarifaires dérogatoires s'appliquant au compte titres présentait un caractère «viager», ce qui ne conférait par conséquent pas à la convention liant les parties une quelconque durée indéterminée résiliable à tout moment ou encore une hypothèse d'engagement perpétuel prohibé ; qu'il a ainsi été notamment expressément soutenu que s'obliger sans limitation dans le temps, c'est promettre l'exécution de ses obligations sans limite de durée, et non point se réserver d'y mettre fin à sa guise ; que, à cela, la banque se borne à opposer la prohibition de l'engagement perpétuel et la faculté de résiliation de toute convention à durée indéterminée ; mais attendu, sur le premier point, qu'il est pour le moins audacieux de faire état de la prohibition d'un engagement perpétuel là où il s'agissait tout simplement d'un engagement à titre viager ; qu'il n'a jamais été prétendu que la banque pouvait être engagée de façon perpétuelle par une convention qui ne pouvait bénéficier qu'au concluant personnellement ; que consentir à une convention pour la durée de la vie du cocontractant, ce n'est certes pas s'engager de façon perpétuelle, mais seulement à titre viager; que c'est en l'absence de toute stipulation particulière qu'il peut être mis fin à tout moment à une convention de durée indéterminée ; mais que, déjà, une convention consentie à titre viager n'est pas de durée indéterminée au sens juridique du terme ; et que s'engager à titre viager, ce n'est pas se réserver la faculté de résilier la convention à tout moment ; et que c'est donc contre la nature même de l'obligation qu'il est prétendu à la faculté de résiliation ; qu'en se contentant de retenir que la convention de compte titres était conclue à durée indéterminée et que, par adoption des motifs du premier juge, chacune des parties contractantes avait la faculté de résilier la convention de compte titres "à tout moment" à la seule condition de respecter la procédure de résiliation, c'est-à-dire sans répondre au moyen pertinent exposé par M. X..., la cour d'appel a violé les articles 455 et 458 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir relevé, par motifs adoptés, que si les deux conventions peuvent être qualifiées de distinctes, il n'en demeure pas moins qu'elles sont étroitement liées, que les conditions tarifaires sont l'annexe de la convention principale de compte titres et que cette convention tarifaire portant la mention sans limitation dans le temps doit s'entendre comme s'appliquant aussi longtemps que M. X... sera déposant auprès de la banque, l'arrêt retient que l'engagement portant sur les conditions tarifaires ne peut pas entraver la faculté de résiliation du contrat d'ouverture de compte à durée indéterminée, dont la banque a usé dans les conditions prévues à la convention et que cette résiliation ne résulte pas d'un abus du droit de la banque de mettre un terme à ses relations contractuelles à durée indéterminée, ni ne présente un caractère illégitime, dès lors qu'elle est intervenue plus de six années après l'accord sur les conditions tarifaires ; que de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a pu déduire que la résiliation du compte titres n'était pas fautive; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par de la SCP Tiffreau et Corlay, avocat aux Conseils pour M. X...

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité la condamnation de la Banque CREDIT INDUSTRIEL DE L'OUEST (CIO) au paiement de la somme de 1.002,43 euros et débouté Monsieur X... de ses autres demandes ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « les moyens développés en appel ne font que réitérer sous une forme nouvelle mais sans aucune justification complémentaire pertinente, ceux dont le premier juge a connus et auxquels il a répondu par des motifs que la cour adopte ; qu'en effet, d'une part, l'engagement du 16 février 1999 portant sur les conditions tarifaires ne peut pas entraver la faculté de résiliation du contrat d'ouverture de compte à durée indéterminée, dont la banque a usé dans les conditions prévues à la convention ; que d'autre part, la résiliation ne résulte pas d'un abus du droit de la banque de mettre un terme à ses relations contractuelles à durée indéterminée, ni ne présente un caractère illégitime, dès lors qu'elle est intervenue plus de six années après l'accord sur les conditions tarifaires valables sans limitation de temps ; que l'appel de Gilles X... doit ainsi être rejeté ; (…) que, cependant, la convention résiliée prévoit (art 8.4) que le transfert causé par la dénonciation du contrat donne lieu à la perception de frais au tarif en vigueur ; que Gilles X... n'est donc pas fondé à contester les frais de transfert prélevés sur son compte bancaire pour la somme de 66,50 € ; que le jugement qui a inclus cette somme dans le montant de la restitution mise à la charge du Crédit industriel de l'Ouest sera réformé sur ce seul point »
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « au vu des pièces produites aux débats, les relations contractuelles existant entre le CIO et Monsieur X... reposent sur deux contrats : - la convention de compte titres signée par les parties le 8 février 1999, portant conditions particulières et à laquelle sont annexées les conditions générales, - la convention tarifaire afférente à l'ouverture de ce portefeuille de titres matérialisée par une lettre du 16 février 1999 du CIO dans laquelle ce dernier confirme son accord pour faire application de conditions de tarification dérogatoires et exceptionnelles (droits de garde : néant, et frais de courtage : 0,45% hors taxe par opération) "valables sans limitation dans le temps" ; que si ces deux conventions peuvent être qualifiées de distinctes, il n'en demeure pas moins qu'elles sont étroitement liées, que les conditions tarifaires sont l'annexe de la convention principale de compte titres et que cette convention tarifaire portant la mention "sans limitation dans le temps" doit s'entendre comme s'appliquant aussi longtemps que Monsieur X... sera déposant de titres auprès du CIO ; qu'or, en vertu de l'article 27 de la convention de compte titres, cette dernière "peut être résiliée à tout moment, par l'une ou l'autre des parties par lettre recommandée avec accusé de réception" et "en cas de résiliation de la présente convention le client devra indiquer, dans un délai de 30 jours, au CIO toutes les informations utiles pour que ce dernier puisse procéder au transfert des titres et espèces appartenant au client. A défaut, la banque pourra procéder, sur sa seule initiative, à la vente des titres appartenant au client…" ; que c'est en application de cette clause contractuelle que le CIO , par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 décembre 2005, a informé Monsieur X... de sa volonté de résilier la convention de compte titres et lui a indiqué qu'il disposait d'un délai de 30 jours pour lui communiquer ses instructions afin de transférer les titres dans l'Etablissement de son choix ; que le problème est de savoir si le CIO a abusé de sa faculté de résiliation et a fait preuve de mauvaise foi, dès lors que cette résiliation est intervenue après plusieurs propositions de souscrire des conditions tarifaires plus avantageuses pour la Banque et des refus successifs de Monsieur X... et que ce dernier a perdu tout avantage tarifaire et a été obligé de transférer ses titres dans un autre Etablissement bancaire moyennant le versement de frais de garde ; qu'il est vrai et sans ambiguïté qu'après avoir fait bénéficier Monsieur X... de dispense de frais de garde et de courtage minimes de ses titres pendant plus de six années, le CIO a voulu mettre fin à ces conditions exceptionnelles et dérogatoires à sa pratique habituelle et a tenté sous plusieurs formes de faire adhérer son client à de nouvelles conditions tarifaires conformes à ce qu'elle propose habituellement ; qu'il est non moins vrai que, devant le refus d'adhésion de Monsieur X... et étant dans l'impossibilité de lui imposer ce qui ne peut résulter que d'un accord entre les parties, elle a fait le choix de résilier la convention de compte titres et ce, en respectant la procédure contractuellement prévue à cet effet ; qu'on ne voit pas en quoi cette démarche, dès lors que la dénonciation du compte titres s'est opérée en toute validité, revêtirait un caractère fautif, même s'il n'est pas douteux que le CIO n'y aurait pas procédé si Monsieur X... avait accepté des conditions tarifaires plus onéreuses pour lui ; que chacune des parties contractantes avait la faculté de résilier la convention de compte titres "à tout moment" à la seule condition de respecter la procédure de résiliation et on ne saurait reprocher à la Banque d'y avoir recouru et d'avoir ainsi de facto mis fin à la convention tarifaire dont la convention de compte titres était nécessairement le support, et alors qu'elle s'était appliquée et avait bénéficié à Monsieur X... pendant près de sept années ; que le fait que Monsieur X... ait été contrait, dans un délai minimum, de transférer ses titres à la BNP PARIBAS, pour éviter la vente forcée de son portefeuille et de supporter pour l'avenir une tarification moins intéressante, est une conséquence de la résiliation, mais ne saurait être en soi constitutif d'une faute du CIO ; que dès lors, les demandes en indemnisation de Monsieur X..., au titre d'un préjudice financier et d'un préjudice moral seront rejetées »
ALORS QUE 1°) la résiliation d'un contrat à durée indéterminée, qui revêt un caractère abusif, expose son auteur au paiement de dommages et intérêts ; qu'elle peut, même si le préavis est respecté, revêtir un caractère abusif en raison des circonstances particulières qui accompagnent cette rupture ; qu'il est constant en l'espèce que le CIO était lié à M. X... par un engagement l'exonérant du paiement de droits de garde « sans limitation dans le temps » ; que la Cour d'appel a constaté par adoption des motifs du premier juge (jugement entrepris, p. 5, alinéa 4 in fine) que « (…) il n'est pas douteux que le CIO n'y aurait pas procédé à la résiliation du compte si Monsieur X... avait accepté des conditions tarifaires plus onéreuses pour lui » ; qu'il en résultait que la résiliation du compte titres prononcée par le CIO était faite en méconnaissance de son engagement de maintenir l'exonération du paiement de droit de garde sans limitation dans le temps ; que de telles circonstances rendent la résiliation abusive ; qu'en statuant en sens contraire, la Cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du Code civil
ALORS QUE 2°) par conclusions régulièrement signifiées le 15 avril 2009, Monsieur X... faisait valoir que l'engagement pris par le CIO stipulant une durée « sans limitation dans le temps » pour les conditions tarifaires dérogatoires s'appliquant au compte titres présentait un caractère « viager», ce qui ne conférait par conséquent pas à la convention liant les parties une quelconque durée indéterminée résiliable à tout moment ou encore une hypothèse d'engagement perpétuel prohibé ; qu'il a ainsi été notamment expressément soutenu (v. p. 7 et 8) «(…) que s'obliger sans limitation dans le temps, c'est promettre l'exécution de ses obligations sans limite de durée, et non point se réserver d'y mettre fin à sa guise ; que, à cela, le CIO se borne à opposer la prohibition de l'engagement perpétuel et la faculté de résiliation de toute convention à durée indéterminée ; Mais attendu, sur le premier point, qu'il est pour le moins audacieux de faire état de la prohibition d'un engagement perpétuel là où il s'agissait tout simplement d'un engagement à titre viager ; qu'il n'a jamais été prétendu que le CIO pouvait être engagé de façon perpétuelle par une convention qui ne pouvait bénéficier qu'au concluant personnellement ; que consentir à une convention pour la durée de la vie du cocontractant, ce n'est certes pas s'engager de façon perpétuelle, mais seulement à titre viager ; (…) que c'est en l'absence de toute stipulation particulière qu'il peut être mis fin à tout moment à une convention de durée indéterminée ; Mais que, déjà, une convention consentie à titre viager n'est pas de durée indéterminée au sens juridique du terme ; Et que s'engager à titre viager, ce n'est pas se réserver la faculté de résilier la convention à tout moment ; Et que c'est donc contre la nature même de l'obligation qu'il est prétendu à la faculté de résiliation» ; qu'en se contentant de retenir que la convention de compte titres était conclue à durée indéterminée et que, par adoption des motifs du premier juge (v. jugement entrepris, p. 5, alinéa 5) « chacune des parties contractantes avait la faculté de résilier la convention de compte titres "à tout moment" à la seule condition de respecter la procédure de résiliation », c'est-à-dire sans répondre au moyen pertinent exposé par Monsieur X..., la Cour d'appel a violé les articles 455 et 458 du Code de procédure civile


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 09-69722
Date de la décision : 16/11/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 23 juin 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 16 nov. 2010, pourvoi n°09-69722


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Tiffreau et Corlay, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.69722
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