LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que lors de la collecte de palettes appartenant à la société IPP Logipal, la société Roulinter a récupéré et détenu des palettes des sociétés Chep France (la société Chep) et Gespalets qui ont été mélangées avec celles de la société IPP Logipal sur des sites de distribution ; que constatant leur désaccord avec la société Roulinter, les sociétés Chep et Gespalets l'ont assignée aux fins de restitution de leurs palettes et de dommages-intérêts, tandis que la société Roulinter a demandé reconventionnellement le paiement des dépenses utiles et nécessaires à la conservation des palettes ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Roulinter fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il a mis à la charge de la société Roulinter une obligation de tri et de mise à disposition des palettes et en ce qu'il a rejeté la demande de la société Roulinter en paiement au titre des frais de conservation des palettes, et, condamnant celle-ci à restituer les palettes détenues depuis le jugement, d'avoir dit que la société Roulinter devait, dans ce cadre, trier et mettre les palettes à disposition des intimées en vue de leur enlèvement et aviser les sociétés Chep et Gespalets de la mise à disposition des palettes, alors, selon le moyen :
1°/ que les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; qu'en énonçant qu' "en vertu du contrat de transport", il appartient aussi au transporteur "de s'assurer de la conformité du chargement avec l'ordre de collecte et donc d'écarter les palettes n'appartenant pas à son donneur d'ordre", et que la situation résultant des erreurs dans le tri des palettes par certaines grandes surfaces, erreurs dont elle déclare les sociétés Chep France et Gespalets responsables à l'égard des tiers, "n'est ni imprévisible, ni irrésistible et n'exonère pas le transporteur de son obligation de veiller à la conformité de son chargement", pour condamner sans contrepartie la société Roulinter à procéder au tri des palettes des sociétés Chep France et Gespalets, tandis que la société Roulinter est un tiers vis-à-vis des sociétés Chep France et Gespalets, et n'est pas liée par un contrat de transport avec elles, mais avec la société IPP Logipal, la cour d'appel a violé l'article 1165 du code civil ;
2°/ qu'en se bornant à énoncer par motifs adoptés que les factures émises par la société Roulinter font état de la collecte de deux mille trois cent trois palettes, pour en tirer que "ce grand nombre de palettes ne peut résulter seulement du fait qu'il existe un inévitable risque de mélange lors du chargement" et "que la société Roulinter a donc agi par négligence en chargeant des palettes sans se soucier de leur origine" pour mettre sans contrepartie à la charge de cette société une obligation de tri des palettes, sans prendre en considération la durée particulièrement longue pendant laquelle ces palettes avaient été collectées, la société Roulinter faisant valoir qu'elle avait collecté mille sept cent une palettes depuis 2001 jusqu'au 31 mars 2005, soit trois palettes par jour ouvrable, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des dispositions de l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu que le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage ; que l'arrêt énonce d'abord qu'en vertu du contrat de transport, il appartient au transporteur de s'assurer de la conformité du chargement avec l'ordre de collecte et donc d'écarter les palettes n'appartenant pas à son donneur d'ordre ; qu'il retient ensuite que la présence des palettes Chep ou Gespalets avec les palettes IPP Logipal n'est ni imprévisible, ni irrésistible et n'exonère pas la société Roulinter de son obligation de veiller à la conformité de son chargement ; qu'en l'état de ces énonciations et appréciations, desquelles il résulte que la société Roulinter a commis un manquement contractuel causant un dommage aux sociétés Chep et Gespalets, la cour d'appel, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la seconde branche, a exactement décidé que la société Roulinter devait restituer les palettes en les triant et en les mettant à disposition des sociétés Chep et Gespalets qu'elle devait aviser ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen en ce qu'il critique le rejet de la demande de la société Roulinter en paiement du transport :
Attendu que la société Roulinter fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :
1°/ que la remise indue d'une chose est la condition du droit de celui qui la restitue à être indemnisé des dépenses nécessaires et utiles qui ont été faites pour sa conservation ; que, par suite, la cour d'appel, qui, pour débouter la société Roulinter de sa demande indemnitaire, a énoncé que les palettes qui lui avaient été indûment remises "n'auraient pas dû quitter les sites de distribution", a violé les articles 1379 et 1381 du code civil ;
2°/ que les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; que si la cour d'appel a entendu retenir qu' "en vertu du contrat de transport", il appartient aussi au transporteur "de s'assurer de la conformité du chargement avec l'ordre de collecte et donc d'écarter les palettes n'appartenant pas à son donneur d'ordre", et que la situation résultant des erreurs dans le tri des palettes par certaines grandes surfaces, erreurs dont elle déclare les sociétés Chep et Gespalets responsables à l'égard des tiers, "n'est ni imprévisible, ni irrésistible et n'exonère pas le transporteur de son obligation de veiller à la conformité de son chargement", pour débouter la société Roulinter de sa demande indemnitaire, tandis que cette dernière est un tiers vis-à-vis des sociétés Chep et Gespalets, et n'est pas liée par un contrat de transport avec celles-ci, mais avec la société IPP Logipal, la cour d'appel a violé l'article 1165 du code civil, ensemble les articles 1379 et 1381 du même code ;
3°/ que la société Roulinter soutenait dans ses conclusions d'appel que la société Chep avait adressé à l'ensemble des recycleurs un contrat par lequel elle offrait de les indemniser à concurrence d'un euro par grande palette et grand conteneur plastique, cinquante centimes par demi-palette et vingt cinq centimes par bac plastique repliable ; que la cour d'appel, qui a constaté que la société Chep avait diffusé une telle proposition de contrat, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1101 et 1134 du code civil en déboutant la société Roulinter de sa demande en paiement, sans dire pourquoi la société Chep n'était pas tenue par son offre ;
Mais attendu qu'ayant relevé que les frais exposés à l'occasion du déplacement des palettes litigieuses ne constituaient en rien des frais nécessaires et utiles pour leur conservation qui n'était pas menacée, la cour d'appel, sans avoir à répondre au moyen inopérant visé par la troisième branche, a par ces seuls motifs, et abstraction faite de ceux, surabondants, que critiquent la deuxième branche, légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que la société Roulinter fait grief à l'arrêt d'avoir condamné la société Roulinter à payer aux sociétés Chep et Gespalets une certaine somme à titre de dommages-intérêts, en réparation des préjudices subis du fait du retard dans la restitution des palettes, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en mettant à la charge de la société Roulinter une obligation d'information qu'elle aurait méconnue, sans préciser le fondement juridique de sa décision, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 12 du code de procédure civile ;
2°/ qu'ayant confirmé le jugement de première instance mettant à la charge de la société Roulinter seulement "une obligation de tri et de mise à disposition des palettes sur son site", et à la charge des sociétés Chep et Gespalets "l'obligation de procéder à l'enlèvement des palettes, à leur frais", et ayant ainsi décidé que la société Roulinter était tenue de conserver les palettes jusqu'à ce que les sociétés Chep et Gespalets en prennent possession, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres énonciations en faisant grief à la société Roulinter d'avoir "conservé par-devers elle les palettes présentes et à venir" pour la condamner à indemniser les sociétés Chep et Gespalets "du retard dans la restitution des palettes", et a, par suite, violé l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt relève que ce n'est qu'au mois de juin 2004 que la société Roulinter a informé la société Chep qu'elle détenait des palettes de la société Gespalets, filiale de la société Chep, accumulées depuis l'année 2002 et, que du fait du litige sur la rémunération réclamée par cette dernière, la société Roulinter a conservé les palettes présentes et à venir ; que de ces appréciations et constatations faisant ressortir que la société Roulinter avait engagé sa responsabilité délictuelle du fait du retard dans la restitution des palettes, la cour d'appel, qui n'a pas condamné la société Roulinter à conserver les palettes mais à les mettre à la disposition des société Chep et Gespalets, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le deuxième moyen en ce qu'il critique le rejet de la demande de la société Roulinter de paiement du tri et du stockage des palettes des sociétés Chep et Gespalets, pris en sa première branche :
Vu l'article 1381 du code civil ;
Attendu que le remboursement des impenses nécessaires ou utiles est dû même au possesseur de mauvaise foi ;
Attendu que pour statuer ainsi, l'arrêt relève, par motifs propres, que les palettes n'auraient pas dû quitter les sites de distribution et, par motifs adoptés, qu'il a été démontré que les palettes étaient stockées dans des conditions ne les mettant pas à l'abri des intempéries et que la société Roulinter n'apporte pas la preuve des dépenses dont elle se prévaut en produisant uniquement ses propres factures afin d'établir la réalité des dites dépenses ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la société Roulinter soutenait qu'elle avait fait toutes les dépenses utiles et nécessaires pour la conservation des palettes, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a confirmé le jugement en ce que celui-ci avait rejeté la demande de la société Roulinter de paiement au titre des frais de conservation des palettes, en ce qu'il a dit que les sociétés Chep et Gespalets ne sont pas débitrices des factures FA 3633, 3730, 3783, 3840, 3916, 4074, 4190 et 4399 émises par la société Roulinter postérieurement au jugement déféré, l'arrêt rendu le 6 novembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne les sociétés Chep France et Gespalets aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société Roulinter la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
.Moyens produits par la SCP Laugier et Caston, avocat aux Conseils, pour la société Roulinter.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement de première instance en ce qu'il a mis à la charge de la société ROULINTER une obligation de tri et de mise à disposition des palettes et en ce qu'il a débouté la société ROULINTER de sa demande en paiement au titre des frais de conservation des palettes, et, condamnant celle-ci à restituer les 435 palettes détenues depuis le jugement déféré, d'AVOIR dit et jugé que la société ROULINTER devra, dans ce cadre, trier et mettre les palettes à disposition des intimées en vue de leur enlèvement et aviser les intimées de la mise à disposition des palettes ;
AUX MOTIFS QU'il n'incombe en rien au transporteur de procéder, sur les sites d'enlèvement des palettes, aux opérations matérielles de tri et de regroupement des palettes par propriétaires ; que les piles de palettes triées sont préparées par le personnel des grandes surfaces, à la demande des sociétés de location, en vue de leur enlèvement par les transporteurs ; qu'il est constant que, malgré les signes distinctifs apposés sur les palettes, des erreurs de tri sont possibles en raison de certaines similitudes de couleur et de format, de sorte que, marginalement, certaines palettes peuvent être mêlées aux piles de palettes appartenant à une autre société de location ; que ces contingences matérielles sont parfaitement connues des sociétés de location, et notamment de la société CHEP qui a diffusé aux entreprises de collecte de palettes une plaquette d'information sur le statut juridique des palettes et une proposition de contrat définissant la conduite à tenir en cas d'entrée en possession indue de palettes lui appartenant à l'occasion des opérations de collecte ; que lorsque le transporteur se présente sur les lieux d'enlèvement, il lui incombe de procéder au chargement des palettes de son client ; mais qu'en vertu du contrat de transport, il lui appartient aussi de s'assurer de la conformité du chargement avec l'ordre de collecte et donc d'écarter les palettes n'appartenant pas à son donneur d'ordre ; qu'il résulte de l'ensemble des considérations qui précèdent, et du rôle et des obligations de chacun des intervenants aux opérations de collecte des palettes, auxquelles sont parties prenantes les sociétés de location par les relations ad'hoc qu'elles établissent avec les grandes surfaces à cette fin, que le chargement par la société ROULINTER de palettes CHEP, en quantité marginale et mélangées aux palettes IPP LOGIPAL procède d'un ensemble d'erreurs imputables à l'ensemble des intervenants ; qu'en effet, les « grandes surfaces », qui agissent simultanément pour le compte de plusieurs sociétés de location, sont défaillantes dans leur obligation de tri et de regroupement des palettes ; à l'égard des tiers, les sociétés CHEP et GESPALETS sont donc responsables des éventuelles conséquences de ces erreurs ; qu'en l'espèce, l'anormalité consiste dans la présence des palettes CHEP ou GESPALETS avec les palettes IPP LOGIPAL, et cette anormalité résulte d'une erreur des opérations de tri accomplies pour le compte des sociétés CHEP ou GESPALETS et IPP LOGIPAL ; que cependant cette situation n'est ni imprévisible, ni irrésistible et n'exonère pas le transporteur de son obligation de veiller à la conformité de son chargement ; qu'il convient de tirer toutes les conséquences de droit des considérations qui précèdent, ainsi qu'il suit ;
ET AUX MOTIFS QU'il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société ROULINTER à restituer immédiatement les palettes litigieuses et dit que l'enlèvement des palettes litigieuses s'effectuera sur le site de la société ROULINTER aux frais des sociétés CHEP et GESPALETS qui, à travers la défaillance des « grandes surfaces » agissant à leur demande, ont contribué à l'enlèvement indu des palettes litigieuses ; qu'il sera constaté que cette restitution des palettes, en exécution du jugement assorti de l'exécution provisoire, est intervenue les 18, 19 et 20 juin 2006 ; qu'il est constant que depuis le jugement déféré, la société ROULINTER détient 435 nouvelles palettes des sociétés intimées ; que la société ROULINTER sera condamnée à restituer lesdites palettes dans le mois de la signification du présent arrêt, sous astreinte de 0,03 euros par palette et par jour de retard ; que la société ROULINTER devra, dans ce cadre, trier et mettre les palettes à disposition des intimées en vue de leur enlèvement et aviser les intimées de la mise à disposition des palettes ; que les intimées devront procéder à cet enlèvement dans les 15 jours de l'avis reçu, à leur frais ;
ET ENCORE AUX MOTIFS ADOPTES QUE la partie défenderesse soutient que les palettes se sont retrouvées fortuitement dans ses entrepôts suite à un chargement sur le site d'une grande surface ; qu'il est patent que dans le cadre de leur activité, les grandes surfaces ne prennent pas soin de trier de manière précise les palettes ; qu'un faible taux de mélange des palettes ne relève donc nullement de la responsabilité du transporteur chargé de leur enlèvement ; que toutefois, les photographies versées aux débats par la société ROULINTER font apparaître un très grand nombre de palettes se trouvant sur son site et qu'en outre, les factures émises par elle et versées aux débats font précisément état de la collecte de 2303 palettes ; qu'en tout état de cause, ce grand nombre de palettes ne peut résulter seulement du fait qu'il existe un inévitable risque de mélange lors du chargement ; que la société ROULINTER a donc agi par négligence en chargeant des palettes sans se soucier de leur origine ;
1°) ALORS QUE les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; qu'en énonçant qu'« en vertu du contrat de transport », il appartient aussi au transporteur « de s'assurer de la conformité du chargement avec l'ordre de collecte et donc d'écarter les palettes n'appartenant pas à son donneur d'ordre », et que la situation résultant des erreurs dans le tri des palettes par certaines grandes surfaces, erreurs dont elle déclare les sociétés CHEP et GESPALETS responsables à l'égard des tiers, « n'est ni imprévisible, ni irrésistible et n'exonère pas le transporteur de son obligation de veiller à la conformité de son chargement », pour condamner sans contrepartie la société ROULINTER à procéder au tri des palettes des sociétés CHEP et GESPALETS, tandis que la société ROULINTER est un tiers vis à vis des sociétés CHEP et GESPALETS, et n'est pas liée par un contrat de transport avec elles, mais avec la société IPP LOGIPAL, la Cour d'appel a violé l'article 1165 du Code civil ;
2°) ALORS QU' en se bornant à énoncer par motifs adoptés que les factures émises par la société ROULINTER font état de la collecte de 2303 palettes, pour en tirer que « ce grand nombre de palettes ne peut résulter seulement du fait qu'il existe un inévitable risque de mélange lors du chargement » et « que la société ROULINTER a donc agi par négligence en chargeant des palettes sans se soucier de leur origine » pour mettre sans contrepartie à la charge de cette société une obligation de tri des palettes, sans prendre en considération la durée particulièrement longue pendant laquelle ces palettes avaient été collectées, la société ROULINTER faisant valoir qu'elle avait collecté 1701 palettes depuis 2001 jusqu'au 31 mars 2005, soit 3 palettes par jour ouvrable, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des dispositions de l'article 1382 du Code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la société ROULINTER de sa demande en paiement du transport, du tri et du stockage des palettes des sociétés CHEP et GESPALETS ;
AUX MOTIFS QU'il n'incombe en rien au transporteur de procéder, sur les sites d'enlèvement des palettes, aux opérations matérielles de tri et de regroupement des palettes par propriétaires ; que les piles de palettes triées sont préparées par le personnel des grandes surfaces, à la demande des sociétés de location, en vue de leur enlèvement par les transporteurs ; qu'il est constant que, malgré les signes distinctifs apposés sur les palettes, des erreurs de tri sont possibles en raison de certaines similitudes de couleur et de format, de sorte que, marginalement, certaines palettes peuvent être mêlées aux piles de palettes appartenant à une autre société de location ; que ces contingences matérielles sont parfaitement connues des sociétés de location, et notamment de la société CHEP qui a diffusé aux entreprises de collecte de palettes une plaquette d'information sur le statut juridique des palettes et une proposition de contrat définissant la conduite à tenir en cas d'entrée en possession indue de palettes lui appartenant à l'occasion des opérations de collecte ; que lorsque le transporteur se présente sur les lieux d'enlèvement, il lui incombe de procéder au chargement des palettes de son client ; mais qu'en vertu du contrat de transport, il lui appartient aussi de s'assurer de la conformité du chargement avec l'ordre de collecte et donc d'écarter les palettes n'appartenant pas à son donneur d'ordre ; qu'il résulte de l'ensemble des considérations qui précèdent, et du rôle et des obligations de chacun des intervenants aux opérations de collecte des palettes, auxquelles sont parties prenantes les sociétés de location par les relations ad'hoc qu'elles établissent avec les grandes surfaces à cette fin, que le chargement par la société ROULINTER de palettes CHEP, en quantité marginale et mélangées aux palettes IPP LOGIPAL procède d'un ensemble d'erreurs imputables à l'ensemble des intervenants ; qu'en effet, les « grandes surfaces », qui agissent simultanément pour le compte de plusieurs sociétés de location, sont défaillantes dans leur obligation de tri et de regroupement des palettes ; à l'égard des tiers, les sociétés CHEP et GESPALETS sont donc responsables des éventuelles conséquences de ces erreurs ; qu'en l'espèce, l'anormalité consiste dans la présence des palettes CHEP ou GESPALETS avec les palettes IPP LOGIPAL, et cette anormalité résulte d'une erreur des opérations de tri accomplies pour le compte des sociétés CHEP ou GESPALETS et IPP LOGIPAL ; que cependant cette situation n'est ni imprévisible, ni irrésistible et n'exonère pas le transporteur de son obligation de veiller à la conformité de son chargement ; qu'il convient de tirer toutes les conséquences de droit des considérations qui précèdent, ainsi qu'il suit ;
ET AUX MOTIFS QUE la société ROULINTER a fondé sa demande de paiement des frais de collecte, de transport, de stockage et de gardiennage des palettes sur l'article 1381 du Code civil qui dispose que celui auquel la chose est restituée doit tenir compte, même au possesseur de mauvaise foi, de toutes les dépenses nécessaires et utiles qui ont été faites pour la conservation de la chose ; que cependant, les frais exposés à l'occasion du déplacement des palettes litigieuses, de leur tri et de leur stockage ne constituent en rien des frais nécessaires et utiles pour la conservation des palettes, alors que ces palettes, dont la conservation n'était pas menacée, n'auraient pas dû quitter les sites de distribution ;
1°) ALORS QUE la remise indue d'une chose est la condition du droit de celui qui la restitue à être indemnisé des dépenses nécessaires et utiles qui ont été faites pour sa conservation ; que, par suite, la Cour d'appel, qui, pour débouter la société ROULINTER de sa demande indemnitaire, a énoncé que les palettes qui lui avaient été indûment remises « n'auraient pas dû quitter les sites de distribution », a violé les articles 1379 et 1381 du Code civil ;
2°) ALORS QUE les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; que si la Cour d'appel a entendu retenir qu'« en vertu du contrat de transport », il appartient aussi au transporteur (ici la société ROULINTER) « de s'assurer de la conformité du chargement avec l'ordre de collecte et donc d'écarter les palettes n'appartenant pas à son donneur d'ordre », et que la situation résultant des erreurs dans le tri des palettes par certaines grandes surfaces, erreurs dont elle déclare les sociétés CHEP et GESPALETS responsables à l'égard des tiers, « n'est ni imprévisible, ni irrésistible et n'exonère pas le transporteur de son obligation de veiller à la conformité de son chargement », pour débouter la société ROULINTER de sa demande indemnitaire, tandis que cette dernière est un tiers vis à vis des sociétés CHEP et GESPALETS, et n'est pas liée par un contrat de transport avec celles-ci, mais avec la société IPP LOGIPAL, la Cour d'appel a violé l'article 1165 du Code civil, ensemble les articles 1379 et 1381 du même Code ;
3°) ALORS QUE la société ROULINTER soutenait dans ses conclusions d'appel que la société CHEP avait adressé à l'ensemble des recycleurs un contrat par lequel elle offrait de les indemniser à concurrence d'un euro par grande palette et grand conteneur plastique, 0,50 € par demi-palette et 0,25 € par bac plastique repliable ; que la Cour d'appel, qui a constaté que la société CHEP avait diffusé une telle proposition de contrat, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1101 et 1134 du Code civil en déboutant la société ROULINTER de sa demande en paiement, sans dire pourquoi la société CHEP n'était pas tenue par son offre.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société ROULINTER à payer aux sociétés CHEP et GESPALETS la somme de 2.000 € à titre de dommages-intérêts, en réparation des préjudices subis du fait du retard dans la restitution des palettes ;
AUX MOTIFS QU'ayant contribué à la réalisation de leurs propres préjudices, et ne rapportant pas la preuve de dégradations imputables à la société ROULINTER, les intimées seront déboutées de l'ensemble de leurs demandes d'indemnisation à l'exception de celle relative à l'indemnisation du retard dans la restitution des palettes ; qu'à cet égard, il faut relever que ce n'est qu'au mois de juin 2004 que la société ROULINTER, manifestement informée des liens existant entre les deux sociétés, a informé la société CHEP qu'elle détenait des palettes « GESPALETS » (environ 760) accumulées depuis l'année 2002 ; puis du fait du litige sur la rémunération réclamée par elle, la société ROULINTER a conservé par-devers elle les palettes présentes et à venir ; qu'il lui sera alloué une somme de 2.000 euros tous chefs de préjudices confondus ;
1°) ALORS QU' en mettant à la charge de la société ROULINTER une obligation d'information qu'elle aurait méconnue, sans préciser le fondement juridique de sa décision, la Cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 12 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QU' ayant confirmé le jugement de première instance mettant à la charge de la société ROULINTER seulement « une obligation de tri et de mise à disposition des palettes sur son site », et à la charge des sociétés CHEP et GESPALETS « l'obligation de procéder à l'enlèvement des palettes, à leur frais », et ayant ainsi décidé que la société ROULINTER était tenue de conserver les palettes jusqu'à ce que les sociétés CHEP et GESPALETS en prennent possession, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres énonciations en faisant grief à la société ROULINTER d'avoir « conservé par-devers elle les palettes présentes et à venir » pour la condamner à indemniser les sociétés CHEP et GESPALETS « du retard dans la restitution des palettes », et a, par suite, violé l'article 1382 du Code civil ;