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16/11/2010 | FRANCE | N°09-42337

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 novembre 2010, 09-42337


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 27 janvier 2009) que Mme
X...
employée comme responsable de la comptabilité, de la gestion administrative et de l'administration des ventes par la société Pharmethica (la société) depuis le 31 août 2000, a refusé le 26 janvier 2006 de suivre l'entreprise qui déménageait de Saint-Ouen l'Aumône à Chambly et a été licenciée pour faute lourde le 13 mars 2006 ; qu'elle a saisi le conseil de prud'hommes de diverses demandes ;
Sur le moyen unique du pourvoi inc

ident de la salariée, qui est préalable :
Attendu que Mme
X...
fait grief à...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 27 janvier 2009) que Mme
X...
employée comme responsable de la comptabilité, de la gestion administrative et de l'administration des ventes par la société Pharmethica (la société) depuis le 31 août 2000, a refusé le 26 janvier 2006 de suivre l'entreprise qui déménageait de Saint-Ouen l'Aumône à Chambly et a été licenciée pour faute lourde le 13 mars 2006 ; qu'elle a saisi le conseil de prud'hommes de diverses demandes ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident de la salariée, qui est préalable :
Attendu que Mme
X...
fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et de la débouter de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif, alors, selon le moyen, que le salarié subit une modification de son contrat de travail dès lors que sa nouvelle affectation est dans un secteur géographique différent ; qu'il appartient aux juges du fond de caractériser en quoi le nouveau lieu de travail du salarié est situé dans le même secteur géographique que le précédent ; que la cour d'appel s'est bornée à relever que la nouvelle affectation de la salariée, distante de 43 kms et accessible par le train et le bus, était située dans le même secteur géographique, de sorte que le refus de la salariée d'accepter un changement de ses conditions de travail justifiait son licenciement ; que la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé en quoi le nouveau lieu de travail de la salariée se situait dans le même secteur géographique que le précédent, lors même qu'elle relevait que les communes de Saint-Ouen l'Aumône (ancienne affectation) et celle de Chambly (nouvelle affectation) étaient situées dans des départements différents, ce dont il s'induisait que l'employeur avait procédé à une modification unilatérale du contrat de travail, a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'en l'état de ses constatations relatives à la distance entre les deux sites et aux moyens de transport les desservant, la cour d'appel a fait ressortir que le nouveau lieu de travail se situait dans le même secteur géographique que l'ancien et a pu décider que le changement de lieu de travail ne constituait qu'une modification des conditions de travail qui relevait du pouvoir de direction de l'employeur ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Attendu que la societé fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement de Mme
X...
est justifié par une cause réelle et sérieuse et de la condamner à lui payer l'indemnité de préavis et les congés payés afférents, alors, selon le moyen :
1°/ que si le refus par un salarié d'un simple changement de ses conditions de travail n'est plus nécessairement constitutif d'une faute grave, encore faut-il que les juges exposent ce qui leur a permis d'écarter une telle qualification ; que la cour d'appel qui, constatant que Mme
X...
avait refusé le changement de ses conditions de travail décidé par la société Pharmetica dans l'exercice de son pouvoir de direction, changement de lieu de travail dont elle avait été avisée depuis longtemps et qui la rapprochait de son domicile, a considéré qu'en s'opposant à cette mesure, elle avait commis une faute justifiant son licenciement, s'est néanmoins contentée d'indiquer, pour écarter la qualification de faute grave, que " le refus par un salarié d'accepter une modification de ses conditions de travail n'est pas constitutif d'une faute grave mais constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement " ; qu'en statuant de la sorte, sans même préciser ce qui lui permettait d'exclure en l'occurrence une telle qualification, elle a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 ancien article L. 121-1 du code du travail ;
2°/ que le deuxième grief invoqué par la société Pharmetica à l'encontre de Mme
X...
, la cour d'appel a constaté que cette dernière avait effectivement eu une attitude insolente à l'égard de son employeur et qu'elle n'avait pas été en mesure d'établir qu'elle aurait réellement averti l'entreprise de son retard ; qu'en refusant néanmoins de conclure à l'existence d'une faute grave justifiant son licenciement immédiat sans rechercher si cette attitude fautive de la salariée ajoutée au fait qu'elle avait également refusé un simple changement de ses conditions de travail, ne justifiait pas la qualification de faute grave dont se prévalait son employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base ;
Mais attendu que la cour d'appel a exactement retenu que le refus par la salariée d'un changement de ses conditions de travail ne constitue pas à lui seul une faute grave, et a pu décider que, compte tenu des circonstances particulières de l'espèce, son comportement du 28 février ne rendait pas non plus impossible son maintien dans l'entreprise, en sorte que les faits qui lui étaient reprochés constituaient une cause réelle et sérieuse justifiant son licenciement ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi principal qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi :
REJETTE les pourvois tant principal qu'incident ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits AU POURVOI PRINCIPAL par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Pharmethica.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le licenciement de Mme
X...
était justifié par une cause réelle et sérieuse et non par une faute grave et d'avoir, en conséquence, condamné la Société PHARMETHICA à lui verser les sommes de 8. 400 € à titre d'indemnité de préavis et de 840 € au titre des congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QUE, sur le licenciement, Mme
X...
a été licenciée pour le motif énoncé en ces termes par la lettre du 13 mars 2006, qui fixe les limites du litige (…) ; que par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 27 décembre 2005, l'employeur a informé la salariée que le siège social de l'entreprise sera transféré à CHAMBLY (60) dans la zone des Portes de l'Oise dans le courant du mois de février 2006 et lui a demandé dans le cas où elle refuserait de suivre ce déménagement de bien vouloir l'en informer par écrit avant le 15 janvier 2006, ajoutant que sans réponse de sa part avant cette date, il considérerait qu'elle accepte de poursuivre son contrat de travail dans les nouveaux locaux ; que par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 11 janvier 2006, rappelant la précédente lettre, l'employeur a informé la salariée que le délai pour l'informer de son éventuel refus était prorogé jusqu'au 31 janvier 2006, précisant encore que sans réponse de sa part avant cette date, il considérerait qu'elle accepte de poursuivre son contrat de travail dans les nouveaux locaux ; que par lettre du 26 janvier 2006, la salariée a confirmé qu'elle ne souhaitait pas suivre le déménagement à CHAMBLY et a demandé à bénéficier d'un licenciement pour modification du contrat de travail ; qu'en réponse au courrier de l'employeur du 3 février 2006 indiquant qu'il n'y avait aucune modification de son contrat de travail, la salariée, le 6 février 2006, a maintenu sa demande en évoquant le fait qu'elle déposait son mari dans la zone industrielle de SAINT-OUEN L'AUMONE tous les matins pour éviter de prendre deux véhicules et, s'agissant de son lieu de travail, le fait que son contrat de travail stipule qu'il est conclu avec la société PHARMETHICA dont le siège social est situé à SAINT OUEN L'AUMONE ; que Mme
X...
soutient que l'employeur, qui par deux fois, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, lui a indiqué le changement de siège en lui demandant de lui faire connaître par écrit son éventuel refus, a ainsi mis en oeuvre la procédure prévue par l'article L. 321-1-2 du Code du travail et a nécessairement considéré que la proposition de changement de lieu de travail constituait une modification de son contrat de travail qu'elle était libre de refuser ; que le contrat de travail de Mme
X...
, ni aucun de ses avenants, ne fixe le lieu de travail de la salariée, l'adresse de l'employeur mentionnée dans la désignation des parties au contrat ne pouvant être considérée comme le lieu contractualisé de travail de l'intéressée, ce qu'elle ne prétend d'ailleurs plus ; qu'il ne résulte pas des courriers précités des 27 décembre 2005 et 11 janvier 2006 que l'employeur a entendu engager la procédure prévue par l'article L. 321-1-2 du Code du travail, ni qu'il considérait la modification du lieu de travail de la salariée comme une modification de son contrat de travail, ce qui ne peut se déduire du seul fait qu'il a demandé à la salariée de faire connaître son éventuel refus dans un délai déterminé, dont la durée au demeurant est inférieure au mois prévu par le texte précité et qu'il a adressé ses courriers par voie recommandée, aucun motif économique n'ayant par ailleurs été allégué ; que l'employeur l'a confirmé dans son courrier du 3 février 2006 en réponse à celui du 26 janvier 2006 de la salariée en lui indiquant qu'il n'y avait aucune modification de son contrat de travail ; que le changement de lieu de travail ne constitue pas une modification du contrat de travail lorsque le nouveau lieu de travail se situe dans le même secteur que le précédent, la définition du secteur géographique s'appréciant de façon objective et non pas en considération de la situation personnelle du salarié ; que le fait que le domicile de Mme
X...
, à HEDOUVILLE soit à 7, 4 km des nouveaux locaux de la Société à CHAMBLY alors qu'il était à 17 km des anciens locaux, à SAINT OUEN L'AUMONE, est donc inopérant ; que, bien que situées dans des départements différents, les communes de SAINT OUEN L'AUMONE et de CHAMBLY, au nord de PARIS, distantes de 43 km et accessibles, selon les éléments produits, par le train et le bus, sont situées dans le même secteur géographique ; que le changement de lieu de travail du fait du transfert de l'entreprise constituait donc une modification des conditions de travail et non pas une modification du contrat de travail ; que cependant, le refus par un salarié d'accepter une modification de ses conditions de travail n'est pas constitutif d'une faute grave, mais constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'il ne peut être déduit du licenciement pour faute grave, comme le fait la salariée, qu'elle a été remplacée dès cette date, la preuve d'une décision déjà prise par l'employeur avant l'entretien préalable n'étant ni alléguée ni démontrée ; que la légèreté blâmable de l'employeur alléguée par la salariée qui résulterait de ce que l'employeur ne se serait pas expliqué sur les motifs provoquant le changement de lieu de travail ce qui rendrait son licenciement sans cause réelle et sérieuse n'est pas fondée ; qu'en effet, Mme
X...
n'ayant pu, compte tenu de ses fonctions, ainsi que l'indique l'employeur, ignorer les dépenses relatives à l'achat du terrain de CHAMBLY et à la construction des locaux, devant la Cour, s'il ne l'avait fait devant le Conseil de prud'hommes, l'employeur justifie le transfert de son activité à CHAMBLY par les locaux plus spacieux et plus adaptés au développement de son activité et dans son courrier du 3 février 2006 adressé à la salariée, l'employeur, qui n'a pas agi avec précipitation, évoquait le caractère plus spacieux et plus fonctionnels des locaux ; qu'enfin le fait que M. Y..., qui a également refusé de suivre l'entreprise à CHAMBLY, n'a pas été licencié pour faute ne rend pas sans cause réelle et sérieuse le licenciement de Mme
X...
; que l'employeur ayant également licencié M Y...a pu, pour prendre sa décision, prendre en considération la situation de chacun des salariés licenciés, en tenant compte de ce que le transfert de l'activité à CHAMBLY éloignait encore le nouveau lieu de travail de M. Y...de son domicile, déjà très éloigné, ce qui n'était pas le cas pour Mme
X...
, dont le lieu de travail se trouvait au contraire rapproché de son domicile, outre qu'elle n'invoquait pas de circonstances familiales impérieuses justifiant son refus ; Que, s'agissant des faits du 28 février 2006, Mme
X...
fait valoir qu'elle a été contrainte ce jour là de se rendre à la Poste pour retirer la lettre recommandée de son employeur du 24 février, ce dont elle avait prévenu téléphoniquement le matin ; que produisant une attestation de Mme Z..., salariée du 13 février au 2 juin 2006, de la Société STERALIS qui occupait les mêmes locaux que la Société PHARMETHICA, Mme
X...
ne peut valablement contester la valeur probante de l'attestation produite par l'employeur de M. A..., au motif que ce dernier n'est pas salarié de la Société PHARMETHICA mais de la Société STERALIS ; que Mme Z...atteste que le 28 février 2006, M.
B...
ayant de manière agressive demandé à Mme
X...
« C'est à cette heure là que tu arrives ? » la salariée lui a répondu « qu'au lieu de lui adresser deux courriers successifs, il aurait pu la convoquer à son entretien préalable dans le courrier reçu le samedi » et qu'elle avait averti de son retard M. C...; que le ton n'ayant cessé de monter, à M.
B...
qui lui disait qu'il savait qu'elle pouvait aller voir son médecin pour se faire arrêter, Mme
X...
a répondu qu'en effet, si son état de santé le nécessitait, elle y retournerait ; que c'est alors que « M.
B...
lui a dit qu'elle pouvait repartir de la Société, car nous étions bien mieux sans elle et cela au moins à deux reprises » ; que selon M. A..., Mme
X...
est arrivée avec deux heures de retard en le justifiant par le fait qu'elle avait dû aller chercher un courrier recommandé ; que suite à une remarque sans aucune agressivité de M.
B...
lui demandant la cause de son retard et n'acceptant pas celle-ci, Mme
X...
a répliqué qu'elle n'aurait aucun problème à obtenir un arrêt de travail par son médecin ; que le ton de Mme
X...
est très vite monté voulant significativement provoquer M.
B...
; que celui-ci est malgré tout resté courtois ; que Mme
X...
a finalement quitté la Société sans aucune raison ; que la seule question de M.
B...
rapportée par Mme Z...n'étant pas en soi agressive mais traduisant le mécontentement de l'employeur confirmé par M. A..., et l'agressivité de l'accueil par M. B... de Mme X...n'étant pas autrement décrit par Mme Z..., la réponse de Mme
X...
est pour le moins insolente ; que si l'avis de réception de la convocation à l'entretien préalable a été effectivement présentée à la salariée le 28 février 2006, le fait allégué par Mme X...qu'elle avait averti M. C...de son retard n'est pas justifié, même par l'attestation de M. C...; qu'hormis que le ton est monté entre M.
B...
et Mme
X...
, pour le surplus des faits rapportés par les attestations, rien ne permet d'accorder plus de crédit à l'une plutôt qu'à l'autre ; qu'étant relevé que les pièces de la procédure n'établissent pas le caractère de complaisance de l'arrêt de travail prescrit à la salariée le 28 février 2006, la réaction insolente de Mme
X...
et le fait qu'elle n'ait pas prévenu de son retard le 28 février 2006, pouvaient motiver une sanction mais, dans les circonstances particulières de l'espèce, ne peuvent être considérés comme constituant une cause sérieuse de licenciement ; qu'enfin, s'agissant du dernier grief, si M. C...ayant été licencié pour faute grave, son attestation ne présente pas de garanties suffisantes pour être retenue, l'employeur ne fournit aucun élément de preuve établissant le grief ; qu'en conséquence, le licenciement de Mme
X...
ayant une cause réelle et sérieuse, le jugement qui a retenu l'existence d'une faute grave sera infirmé ; que la demande de Mme
X...
en paiement d'une indemnité de préavis de 8. 400 € et l'indemnité de congés payés afférents, est justifiée ;
ALORS, D'UNE PART, QUE si le refus par un salarié d'un simple changement de ses conditions de travail n'est plus nécessairement constitutif d'une faute grave, encore faut-il que les juges exposent ce qui leur a permis d'écarter une telle qualification ; que la Cour d'appel qui, constatant que Mme
X...
avait refusé le changement de ses conditions de travail décidé par la Société PHARMETHICA dans l'exercice de son pouvoir de direction, changement de lieu de travail dont elle avait été avisée depuis longtemps et qui la rapprochait de son domicile, a considéré qu'en s'opposant à cette mesure, elle avait commis une faute justifiant son licenciement, s'est néanmoins contentée d'indiquer, pour écarter la qualification de faute grave, que « le refus par un salarié d'accepter une modification de ses conditions de travail n'est pas constitutif d'une faute grave mais constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement » ; qu'en statuant de la sorte, sans même préciser ce qui lui permettait d'exclure en l'occurrence une telle qualification, elle a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 ancien article L. 121-1 du Code du travail ;
ET ALORS, D'AUTRE PART, QU'appréciant le deuxième grief invoqué par la Société PHARMETHICA à l'encontre de Mme
X...
, la Cour d'appel a constaté que cette dernière avait effectivement eu une attitude insolente à l'égard de son employeur et qu'elle n'avait pas été en mesure d'établir qu'elle aurait réellement averti l'entreprise de son retard ; qu'en refusant néanmoins de conclure à l'existence d'une faute grave justifiant son licenciement immédiat sans rechercher si cette attitude fautive de la salariée ajoutée au fait qu'elle avait également refusé un simple changement de ses conditions de travail, ne justifiait pas la qualification de faute grave dont se prévalait son employeur, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1234-1 ancien article L. 122-6 du Code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la Société PHARMETHICA à verser à Mme X...les sommes de 5. 404 € à titre de rappel de 13ème mois et de 540 € au titre des congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QUE sur la demande en paiement d'un rappel de treizième mois, le contrat de travail de Mme
X...
prévoyait le versement d'un treizième mois payé mensuellement à raison de un douzième par mois ; qu'alors que la salariée soutient qu'elle n'a plus perçu ce treizième mois à compter du mois de mars 2004, l'employeur fait valoir que cette prime qui faisait l'objet d'une ligne distincte sur le bulletin de paie a été intégrée dans le salaire ; que l'intégration de la prime de treizième mois contractuelle qui modifie la structure de la rémunération de la salariée constitue une modification du contrat de travail à laquelle ne pouvait procéder l'employeur sans l'accord, lequel ne peut se déduire de l'acceptation sans protestation des bulletins de paie, de l'intéressée ; que faute d'avoir recueilli l'accord de la salariée sur l'intégration dans son salaire de base de la prime de treizième mois, l'employeur devra verser à Mme
X...
la prime correspondante réclamée, soit 5. 404 €, dont le montant est justifié, outre l'indemnité de congés payés afférents de 540 €.
ALORS QU'en affirmant que l'intégration du 13ème mois dans le salaire de Mme
X...
constituait une modification de son contrat de travail qui ne pouvait lui être imposée sans son accord, alors que l'intégration de la prime contractuelle de 13ème mois, réglée jusqu'en mars 2004 en 12 versements mensuels, au salaire contractuel de base de la salariée n'avait modifié ni le montant de la « rémunération contractuelle globale » qui était demeuré inchangé, ni sa structure puisqu'au salaire de base s'ajoutait bien un douzième de mois, la Cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 ancien article L. 121-1, alinéa 1er du Code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la Société PHARMETHICA à verser à Mme X...les sommes de 15. 777, 70 € à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, de 1. 577, 77 € au titre des congés payés afférents et de 16. 800 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé ;

AUX MOTIFS QUE sur la demande en paiement d'heures supplémentaires et d'indemnité pour travail dissimulé, il résulte de l'article L. 212-1-1, devenu l'article L. 3171-4, du Code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; que toutefois, il appartient à ce dernier de fournir préalablement des éléments de nature à étayer sa demande ; que Mme
X...
soutient que depuis le mois de mars 2001, elle effectuait 169 heures mensuelles de travail au lieu de 134 heures figurant sur ses bulletins de paie ; que ce n'est qu'à compter du mois de septembre 2003 que l'employeur a mentionné sur ses bulletins de paie et lui a réglé 169 heures par mois ; qu'il s'est sciemment dispensé de mars 2001 à août 2003 de lui régler 35 heures par mois ; que l'employeur fait valoir que par avenant du 1er novembre 2000, la durée du travail de la salariée a été portée de 82 heures à 134 heures par mois et à compter du 1er septembre la salariée a travaillé 151, 67 heures plus 17, 33 heures supplémentaires payées comme telles, soit 169 heures ; qu'aux termes de l'avenant du 31 octobre 2000, applicable à compter du 1er novembre, l'horaire de travail de Mme
X...
était du lundi au jeudi de 9h à 12 h et de 13 h à 16h30 et le vendredi de 9h à 12 h et de 13 h à 15 h ; que la baisse du salaire horaire de la salariée au mois de septembre 2003 par rapport au salaire horaire du mois d'août 2003 ressortant de ses bulletins de paie ne démontre en rien, contrairement à ce qu'elle prétend, qu'antérieurement elle effectuait 169 heures, durée de travail mentionnée sur ses bulletins de paie à partir du mois de septembre 2003 ; que Mme
X...
produit quatre attestations de Mme F..., M. G..., Mme H...et M. I...qui n'indiquent pas le nom de leur employeur qui serait voisin de la Société PHARMETHICA ; que s'il est peu crédible que chacune de ces personnes aient pu constater l'horaire effectif de travail de Mme
X...
, se prévalant de ce que dans ses écritures Mme
X...
indique qu'elle emmenait le matin son mari au travail et qu'elle allait le chercher le soir, la Société PHARMETHICA soutient que la salariée avait calqué ses horaires sur ceux de son mari et qu'elle ne saurait en porter la responsabilité ; que cependant, l'employeur ne peut se soustraire au paiement des heures effectuées au-delà de la durée convenue ou légale de travail dont il a connaissance ; que vainement la Société PHARMETHICA se prévaut-elle du fait que Mme
X...
passait de longues heures à gérer tout autre chose que ses tâches professionnelles, ce fait constituant un comportement fautif de la salariée qu'il lui appartenait de sanctionner ; que la demande de Mme
X...
est, par suite, bien fondée en son principe ; que compte tenu d'une réduction à 6. 364, 80 € (52 x 8 x 15, 30) de la demande pour la période de septembre 2002 à août 2003, l'employeur devra payer à Mme
X...
un rappel de salaire de 15. 777, 70 € auxquels s'ajoutent l'indemnité de congés payés afférents de 1. 577, 77 € ; que la durée pendant laquelle la salariée n'a pas été rémunérée des heures de travail effectuées qui n'ont pas été mentionnées sur ses bulletins de paie suffit à caractériser la volonté de l'employeur de dissimuler ces heures de travail ; que la Société PHARMETHICA devra donc en application de l'article L. 8223-1 du Code du travail une indemnité égale à 16. 800 €, Mme
X...
étant déboutée de sa demande d'indemnité de licenciement laquelle ne se cumule pas avec l'indemnité pour travail dissimulé ;

ALORS, D'UNE PART, QUE les heures supplémentaires correspondent aux périodes consacrées par un salarié, au-delà de la durée légale du travail, à l'exécution de sa prestation de travail et qui constituent, à ce titre, un temps de travail effectif ; que la Cour d'appel a, pour faire droit à la demande de rappels de salaire formulée par Mme
X...
au titre des heures supplémentaires qu'elle aurait effectuées, écarté l'argument avancé par la Société PHARMETHICA tiré de ce que la salariée consacrait une partie du temps passé dans l'entreprise à des activités extra-professionnelles, en retenant que le fait qu'elle ait passé de longues heures à gérer tout autre chose que ses tâches professionnelles constituait uniquement un comportement fautif de sa part qu'il appartenait à l'employeur de sanctionner ; qu'en statuant de la sorte alors que les activités personnelles auxquelles elle s'était livrée ne pouvaient être considérées comme du temps de travail effectif et rémunérées en conséquence comme des heures supplémentaires, la Cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants, a violé l'article L. 3171-4 ancien article L. 212-1-1 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, (et subsidiairement) QUE le salarié n'a droit au paiement que des heures supplémentaires accomplies avec l'accord au moins implicite de son employeur, seul un travail commandé par ce dernier étant susceptible d'être qualifié de travail effectif et de donner ainsi lieu à rémunération ; qu'en retenant, dès lors, que la durée mensuelle de travail de Mme
X...
de mars 2001 à août 2003 aurait été de 169 heures au lieu de 134 heures, de sorte qu'elle avait droit au paiement d'heures supplémentaires, sans même répondre au moyen des conclusions de la Société PHARMETHICA soulignant que la salariée n'était pas en mesure d'attester qu'elle aurait effectué des heures supplémentaires à la demande de son employeur, la Cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
ET ALORS, ENFIN, QU'en affirmant que la durée pendant laquelle Mme
X...
n'avait pas été rémunérée des heures de travail effectuées qui n'avaient pas été mentionnées sur ses bulletins de paie suffisait à caractériser la volonté de l'employeur de dissimuler ces heures de travail de sorte qu'il devait être condamné à une indemnité de 16. 800 € à ce titre, alors qu'il ressortait des éléments versés aux débats que la salariée, engagée en qualité de Responsable de la comptabilité, de la gestion administrative et de l'administration des ventes et qui était à ce titre chargée de l'établissement des bulletins de paie de ses collègues ainsi que des siens, n'avait ni déclaré à son employeur avoir effectué des heures supplémentaires de mars 2001 à août 2003, ni réclamé leur paiement, ni a fortiori mentionné ces heures sur ses fiches de paie de sorte que l'absence de mention en ce sens sur ces documents ne pouvait être imputée à son employeur et ne pouvait caractériser de sa part une intention de dissimuler le temps de travail réellement effectué, la Cour d'appel a violé l'article L. 8223-1 ancien article L. 324-11-1 du Code du travail. Moyen produit AU POURVOI INCIDENT par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour Mme
X...
.
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué ;
D'AVOIR dit que le licenciement de la salariée reposait sur une cause réelle et sérieuse, et de l'avoir en conséquence, débouté de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;
AUX MOTIFS QUE « sur le licenciement, Mme
X...
a été licenciée pour le motif énoncé en ces termes par la lettre du 13 mars 2006, qui fixe les limites du litige (...) ; que par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 27 décembre 2005, l'employeur a informé la salariée que le siège social de l'entreprise sera transféré à CHAMBLY (60) dans la zone des Portes de l'Oise dans le courant du mois de février 2006 et lui a demandé dans le cas où elle refuserait de suivre ce déménagement de bien vouloir l'en informer par écrit avant le 15 janvier 2006, ajoutant que sans réponse de sa part avant cette date, il considérerait qu'elle accepte de poursuivre son contrat de travail dans les nouveaux locaux ; que par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 11 janvier 2006, rappelant la précédente lettre, l'employeur a informé la salariée que le délai pour l'informer de son éventuel refus était prorogé jusqu'au 31 janvier 2006, précisant encore que sans réponse de sa part avant cette date, il considérerait qu'elle accepte de poursuivre son contrat de travail dans les nouveaux locaux ; que par lettre du 26 janvier 2006, la salariée a confirmé qu'elle ne souhaitait pas suivre le déménagement à CHAMBLY et a demandé à bénéficier d'un licenciement pour modification du contrat de travail ; qu'en réponse au courrier de l'employeur du 3 février 2006 indiquant qu'il n'y avait aucune modification de son contrat de travail, la salariée, le 6 février 2006, a maintenu sa demande en évoquant le fait qu'elle déposait son mari dans la zone industrielle de SAINT-OUEN L'AUMONE tous les matins pour éviter de prendre deux véhicules et, s'agissant de son lieu de travail, le fait que son contrat de travail stipule qu'il est conclu avec la société PHARMETHICA dont le siège social est situé à SAINT OUEN L'AUMONE ; que Mme
X...
soutient que l'employeur, qui par deux fois, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, lui a indiqué le changement de siège en lui demandant de lui faire connaître par écrit son éventuel refus, a ainsi mis en oeuvre la procédure prévue par l'article L. 321-1-2 du Code du travail et a nécessairement considéré que la proposition de changement de lieu de travail constituait une modification de son contrat de travail qu'elle était libre de refuser ; que le contrat de travail de Mme
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, ni aucun de ses avenants, ne fixe le lieu de travail de la salariée, l'adresse de l'employeur mentionnée dans la désignation des parties au contrat ne pouvant être considérée comme le lieu contractualisé de travail de l'intéressée, ce qu'elle ne prétend d'ailleurs plus ; qu'il ne résulte pas des courriers précités des 27 décembre 2005 et 11 janvier 2006 que l'employeur a entendu engager la procédure prévue par l'article L. 321-1-2 du Code du travail, ni qu'il considérait la modification du lieu de travail de la salariée comme une modification de son contrat de travail, ce qui ne peut se déduire du seul fait qu'il a demandé à la salariée de faire connaître son éventuel refus dans un délai déterminé, dont la durée au demeurant est inférieure au mois prévu par le texte précité et qu'il a adressé ses courriers par voie recommandée, aucun motif économique n'ayant par ailleurs été allégué ; que l'employeur l'a confirmé dans son courrier du 3 février 2006 en réponse à celui du 26 janvier 2006 de la salariée en lui indiquant qu'il n'y avait aucune modification de son contrat de travail ; que le changement de lieu de travail ne constitue pas une modification du contrat de travail lorsque le nouveau lieu de travail se situe dans le même secteur que le précédent, la définition du secteur géographique s'appréciant de façon objective et non pas en considération de la situation personnelle du salarié ; que le fait que le domicile de Mme
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, à HEDOUVILLE soit à 7, 4 km des nouveaux locaux de la Société à CHAMBLY alors qu'il était à 17 km des anciens locaux, à SAINT OUEN L'AUMONE, est donc inopérant ; que, bien que situées dans des départements différents, les communes de SAINT OUEN L'AUMONE et de CHAMBLY, au nord de PARIS, distantes de 43 km et accessibles, selon les éléments produits, par le train et le bus, sont situées dans le même secteur géographique ; que le changement de lieu de travail du fait du transfert de l'entreprise constituait donc une modification des conditions de travail et non pas une modification du contrat de travail ; que cependant, le refus par un salarié d'accepter une modification de ses conditions de travail n'est pas constitutif d'une faute grave, mais constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'il ne peut être déduit du licenciement pour faute grave, comme le fait la salariée, qu'elle a été remplacée dès cette date, la preuve d'une décision déjà prise par l'employeur avant l'entretien préalable n'étant ni alléguée ni démontrée ; que la légèreté blâmable de l'employeur alléguée par la salariée qui résulterait de ce que l'employeur ne se serait pas expliqué sur les motifs provoquant le changement de lieu de travail ce qui rendrait son licenciement sans cause réelle et sérieuse n'est pas fondée ; qu'en effet, Mme
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n'ayant pu, compte tenu de ses fonctions, ainsi que l'indique l'employeur, ignorer les dépenses relatives à l'achat du terrain de CHAMBLY et à la construction des locaux, devant la Cour, s'il ne l'avait fait devant le Conseil de prud'hommes, l'employeur justifie le transfert de son activité à CHAMBLY par les locaux plus spacieux et plus adaptés au développement de son activité et dans son courrier du 3 février 2006 adressé à la salariée, l'employeur, qui n'a pas agi avec précipitation, évoquait le caractère plus spacieux et plus fonctionnels des locaux ; qu'enfin le fait que M. Y...qui a également refusé de suivre l'entreprise à CHAMBLY, n'a pas été licencié pour faute ne rend pas sans cause réelle et sérieuse le licenciement de Mme
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; que l'employeur ayant également licencié M Y...a pu, pour prendre sa décision, prendre en considération la situation de chacun des salariés licenciés, en tenant compte de ce que le transfert de l'activité à CHAMBLY éloignait encore le nouveau lieu de travail de M. Y...de son domicile, déjà très éloigné, ce qui n'était pas le cas pour Mme
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, dont le lieu de travail se trouvait au contraire rapproché de son domicile, outre qu'elle n'invoquait pas de circonstances familiales impérieuses justifiant son refus ».
ALORS QUE le salarié subit une modification de son contrat de travail dès lors que sa nouvelle affectation est dans un secteur géographique différent ; qu'il appartient aux juges du fond de caractériser en quoi le nouveau lieu de travail du salarié est situé dans le même secteur géographique que le précédent ; que la Cour d'appel s'est bornée à relever que la nouvelle affectation de la salariée, distante de 43 kms et accessible par le train et le bus, était située dans le même secteur géographique, de sorte que le refus de la salariée d'accepter un changement de ses conditions de travail justifiait son licenciement ; que la Cour d'appel, qui n'a pas caractérisé en quoi le nouveau lieu de travail de la salariée se situait dans le même secteur géographique que le précédent, lors même qu'elle relevait que les communes de Saint Ouen l'Aumône (ancienne affectation) et celle de Chambly (nouvelle affectation) étaient situées dans des départements différents, ce dont il s'induisait que l'employeur avait procédé à une modification unilatérale du contrat de travail, a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 1221-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-42337
Date de la décision : 16/11/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 27 janvier 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 nov. 2010, pourvoi n°09-42337


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.42337
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