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09/11/2010 | FRANCE | N°09-66207

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 novembre 2010, 09-66207


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé par la société Millau Cars Keolis Aveyron Cariane en qualité de conducteur receveur par contrat de travail le 1er décembre 2003, s'estimant victime d'un harcèlement moral de la part de son employeur, a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes salariales et indemnitaires ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le d

euxième moyen :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que po...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé par la société Millau Cars Keolis Aveyron Cariane en qualité de conducteur receveur par contrat de travail le 1er décembre 2003, s'estimant victime d'un harcèlement moral de la part de son employeur, a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes salariales et indemnitaires ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le deuxième moyen :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour débouter M. X... de sa demande tendant à l'annulation de la mise à pied du 19 mars 2007, l'arrêt se borne à énoncer que celle-ci est fondée sur des éléments objectifs et que la sanction est proportionnée aux faits reprochés ;

Qu'en statuant ainsi, par ces seuls motifs qui ne permettent pas à la Cour de cassation d'exercer son contrôle, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

Et sur le troisième moyen :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour débouter M. X... de sa demande en dommages-intérêts pour harcèlement moral, l'arrêt énonce qu'hormis l'avertissement annulé, l'ensemble des courriers adressés à M. X... étaient destinés soit à rappeler à plusieurs salariés dont M. X... les règles applicables dans l'entreprise, soit à répondre à des demandes concernant l'indemnisation du temps de coupure ou la détermination du lieu de remise des recettes ; que la télécopie du 1er août 2006 dans laquelle l'employeur insiste sur la nécessité de permettre aux passagers de pouvoir disposer des toilettes pendant le trajet constituait un simple rappel des règles applicables sur les lignes TER et non un avertissement comme le prétendait M. X... ; que ces seuls éléments ne constituent pas des agissements constitutifs de harcèlement moral ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions du salarié qui faisait valoir, au nombre des agissements répétés de harcèlement moral imputés à l'employeur, qu'entre l'avertissement du 2 février 2007 et la mise à pied du 19 mars 2007, l'employeur l'avait convoqué à un entretien préalable à un licenciement pour faute et laissé sous la menace d'un licenciement pendant plus d'un mois avant d'abandonner la procédure en reconnaissant que les griefs n'étaient pas fondés, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de sa demande tendant à l'annulation de mise à pied du 19 mars 2007 et de sa demande en dommages-intérêts pour harcèlement moral, l'arrêt rendu, le 11 février 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;

Condamne la société Millau Cars Keolis Aveyron Cariane aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par de la SCP Monod et Colin, avocat aux Conseils pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande tendant à ce que la société MILLAU CARS soit condamnée à lui payer, à titre de complément d'indemnisation de temps de coupure, les sommes de 15.480,38 € pour les années 2003 à 2006 et 1.531,64 € pour la période du 15 janvier 2006 au 9 janvier 2008 ;

AUX MOTIFS QUE qu'il résulte de l'article 17 de l'accord du 18 avril 2002 que pour les salariés soumis à un régime de modulation du temps de travail et percevant un salaire fixé sur la base d'un horaire théorique déterminé, cette rémunération comprend tous les éléments, y compris les indemnités de coupure ; qu'ainsi les temps de coupure doivent être pris en compte dans le décompte du temps de travail ; qu'en application de l'article 7.3 de la convention collective des transports routiers, les taux d'indemnisation du temps de coupure sont de 25 % lorsque le salarié peut bénéficier d'un dépôt aménagé et dédié aux conducteurs de l'entreprise et de 50 % dans les autres cas ; que M. X... qui assurait la ligne St Affrique-Montpellier et avait une coupure à Montpellier de 10h10 à 16h45, soutient qu'il n'aurait pu bénéficier du local aménagé à Montpellier appartenant à la société des Courriers du Midi qui était mis à la disposition des autres conducteurs d'autres filiales du groupe KEODIS LANGUEDOC, comme le confirme M. Y..., directeur de la société des Courriers du Midi ; que M. X... était parfaitement informé de l'accord existant entre son employeur et la société des Courriers du Midi, comme en atteste un courrier adressé par l'intimée le 31 mai 2005, et qu'il n'établit pas que l'accès à ces locaux lui ait été refusé par des conducteurs salariés des Courriers du Midi ou qu'il n'ait pu en disposer ; que l'employeur ayant rémunéré l'ensemble des temps de coupure à 25%, M. X... ne saurait obtenir un rappel de salaire sur un taux supérieur ;

ALORS QU'il incombe à l'employeur qui indemnise le temps de coupure d'un conducteur au taux de 25 % seulement de rapporter la preuve que ce salarié bénéficie effectivement, durant son temps de coupure, de la possibilité réelle de disposer d'un dépôt aménagé ; qu'en déboutant M. X... de sa demande, faute pour lui d'établir que l'accès aux locaux appartenant à la société des Courriers du Midi lui ai été refusé ou qu'il n'a pas pu en disposer, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et ainsi violé les articles 1315 alinéa 2 du code civil et 7.3 de l'accord du 18 avril 2002 attaché à la convention collective nationale des transports routiers.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande tendant à l'annulation de la mise à pied du 19 mars 2007 ;

AUX MOTIFS QUE celle-ci est fondée sur des éléments objectifs et que la sanction est proportionnée au faits reprochés ;

ALORS d'une part QUE tout jugement doit être motivé ; qu'en omettant d'énoncer quels étaient les faits sanctionnés par la mesure de mise à pied litigieuse, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS d'autre part QUE M. X... soutenait qu'aux termes du courrier du 19 mars 2007, il lui était reproché d'avoir tenu des propos diffamatoires sur l'entreprise devant les clients, qu'il n'avait absolument pas tenu de tels propos, que ces accusations étaient mensongères et que l'employeur n'en rapportait pas la preuve (p. 11/12) ; qu'en se bornant à relever que la sanction est fondée sur des éléments objectifs et proportionnée aux faits reprochés, sans vérifier que l'employeur avait rapporté la preuve de la matérialité de ces faits contestés par le salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 1333-1 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande en dommages-intérêts pour harcèlement moral ;

AUX MOTIFS QUE si l'abus répété dans l'exercice du pouvoir de direction et disciplinaire consistant à multiplier les mises en garde et avertissements à l'égard du salarié dans le dessein de le déstabiliser, peut caractériser des agissements de harcèlement moral dès lors que ceux-ci ne sont pas étayés par des faits objectifs susceptibles d'être reprochés au salarié, en l'espèce, hormis l'avertissement annulé, l'ensemble des courriers adressés à M. X... étaient destinés soit à rappeler à plusieurs salariés dont l'intéressé les règles applicables dans l'entreprise, soit à répondre à ses demandes concernant l'indemnisation du temps de coupure ou la détermination du lieu de remise des recettes ; que la télécopie du 1er août 2006 où l'employeur insiste sur la nécessité de permettre aux passagers de pouvoir disposer des toilettes pendant le trajet constituait un simple rappel des règles applicables sur les lignes TER et non un avertissement comme le prétendait M. X... dans un courrier du 11 août 2006 dont la tonalité était assez critique à l'égard de l'employeur ; que ces seuls éléments ne constituent pas des agissements constitutifs de harcèlement moral ;

ALORS QUE la cassation à intervenir sur la base du deuxième moyen implique la censure du chef de dispositif relatif au harcèlement moral, dès lors que l'employeur qui prononce deux sanctions disciplinaires injustifiées à moins de deux mois d'intervalle, dont une mise à pied de deux jours, peut être regardé comme commettant un abus dans l'exercice de son pouvoir disciplinaire de nature à déstabiliser moralement le salarié ; que l'annulation par le juge de renvoi de la mise à pied du 19 mars 2007, en sus de celle de l'avertissement du 2 février 2007, entraînera donc, par voie de conséquence, la perte de fondement légal de la disposition attaquée au regard de l'article L 1152-1 du code du travail ;

Et ALORS en toute hypothèse QUE M. X... invoquait également, parmi les éléments caractérisant un abus répété dans l'exercice du pouvoir disciplinaire, l'engagement par l'employeur d'une procédure de licenciement pour faute, faisant valoir qu'après l'avoir convoqué le 9 février 2007 à un entretien préalable pour le 20 février, l'employeur lui avait adressé le 16 mars 2007 un courrier par lequel il reconnaissait que les griefs étaient infondés ; qu'en omettant de prendre en considération, dans son appréciation sur le comportement de l'employeur, la menace qu'il avait fait peser en engageant une procédure de licenciement, ce quelques jours après l'avertissement du 2 février 2007 annulé par la cour d'appel, procédure dont l'abandon avait d'ailleurs été aussitôt suivi par la mesure de mise à pied contestée par l'intéressé, du 19 mars 2007, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 1152-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-66207
Date de la décision : 09/11/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 11 février 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 nov. 2010, pourvoi n°09-66207


Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Monod et Colin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.66207
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