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03/11/2010 | FRANCE | N°09-16326

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 03 novembre 2010, 09-16326


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 4 juin 2009), que M. X..., locataire gérant d'un fonds de commerce bar-PMU, appartenant à M. Y..., a déposé, le 18 septembre 1996, dans un compte ouvert à son nom à la caisse régionale de crédit agricole Nord de France (la banque), plusieurs chèques dont un chèque d'un montant de 300 000 francs (45 734, 71 euros) émis à son profit par Mme Z..., qui lui avait été remis par le fils du tireur ; qu'en raison d'une opposition pour perte formée p

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 4 juin 2009), que M. X..., locataire gérant d'un fonds de commerce bar-PMU, appartenant à M. Y..., a déposé, le 18 septembre 1996, dans un compte ouvert à son nom à la caisse régionale de crédit agricole Nord de France (la banque), plusieurs chèques dont un chèque d'un montant de 300 000 francs (45 734, 71 euros) émis à son profit par Mme Z..., qui lui avait été remis par le fils du tireur ; qu'en raison d'une opposition pour perte formée par le tireur, le paiement de ce chèque a été rejeté et la banque n'a pas procédé à sa contre-passation intégrale, le compte étant devenu débiteur par l'effet de retraits préalables ; qu'assigné en 2005 en paiement d'une certaine somme par la banque, M. X...s'y est opposé en soulevant plusieurs contestations ;
Attendu que M. X...fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la banque la somme de 32 319, 54 euros outre intérêts, d'avoir condamné la banque à lui payer la seule somme de 1 500 euros à titre de dommages-intérêts, outre intérêts, d'avoir ordonné la compensation entre les deux sommes, alors, selon le moyen :
1°/ que si conformément aux dispositions de l'article L. 131-59 du code monétaire et financier, la prescription laisse subsister au profit du porteur une action subsidiaire à la disparition de son recours cambiaire contre le co-obligé injustement enrichi, le porteur qui entend exercer cette action a la charge de prouver que ce dernier s'est injustement enrichi ; qu'en retenant, pour décider que l'action de la banque, fondée sur les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 131-59 du code monétaire et financier était recevable, que M. X...endosseur des chèques litigieux, ne rapportait pas la preuve de ce que les retraits effectués sur le compte n° 335 790 D correspondaient à des virements effectués au profit du compte PMU de M. Y..., la cour d'appel, qui a fait peser sur l'endosseur des chèques la charge de la preuve de l'absence de l'enrichissement injuste, a inversé la charge de la preuve et ainsi violé l'article 1315 du code civil ;
2°/ que seul un fait contesté étant matière à preuve, dès lors que la banque ne contestait nullement devant les juges d'appel le fait invoqué par M. X...selon lequel il bénéficiait d'une procuration sur le compte PMU n° 264162 C ouvert au nom de M. Y..., propriétaire du fonds de commerce qu'il exploitait, la réalité de ce fait était ainsi établie ; qu'en imposant néanmoins à M. X... de justifier de ce qu'il bénéficiait d'une procuration sur le compte de M. Y..., la cour d'appel a derechef violé l'article 1315 du code civil ;
3°/ qu'en se fondant, pour décider que l'action de la banque en paiement de la somme de 32 319, 54 euros était recevable, sur le circonstance déduite de ce que les opérations litigieuses avaient été effectuées sur le compte personnel n° 335 790 D de M. X... alors que pour les besoins de ses activités de ce dernier avait un compte professionnel n° 280 499 C, sans s'expliquer sur le fait invoqué par M. X..., dans ses conclusions d'appel, tiré de ce que ce compte n° 335 790 D était un compte spécial de transfert, que la banque lui avait demandé d'ouvrir afin de faire transiter les sommes correspondant à la contre valeur des chèques litigieux et qui devaient ensuite être versées sur le compte PMU n° 26 4162 C de M. Y...afin d'apurer celui-ci, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 131-59 du code monétaire et financier et 1134 du code civil ;
4°/ que le banquier commet une faute qui lui interdit de contre-passer lorsque l'effet n'est pas recouvré, s'il a porté le remettant à croire en l'absence de risque de non paiement de l'effet ou en la vérification par la banque de l'existence de la provision ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'il lui était demandé, si la banque n'avait pas commis une faute lui interdisant de contre-passer les effets litigieux en demandant à M. X..., dès que le compte de transfert avait été crédité de la contre-valeur de ces derniers, d'approvisionner le compte PMU n° 26 4162 C de M. Y...afin d'apurer le découvert de celui-ci, en sorte qu'il avait pu croire qu'il n'y avait pas de risque de non-paiement lié à une opposition du tireur ou en raison de la vérification par la banque de la provision, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1134, 1135 et 1147 du code civil ;
5°/ que l'obligation d'information et de conseil existe à l'égard du client professionnel dans la mesure où la compétence de ce dernier ne lui donne pas les moyens d'apprécier les risques inhérents aux opérations bancaires ; qu'ayant constaté que M. X...était gérant d'un café PMU ce dont il s'évinçait que l'obligation d'information, de conseil et de vigilance de la banque jouait à l'endroit de ce dernier, lequel n'avait aucune connaissance en matière de technique bancaire, la cour d'appel qui a néanmoins décidé qu'en tant que professionnel, gérant d'un café PMU, M. X... était réputé rompu ou à tout le moins avisé en matière de techniques comptables et bancaires et qu'il ne pouvait ignorer que la remise d'un chèque à l'encaissement ne valait pas paiement, en sorte que la banque n'était tenue à aucune obligation d'information de conseil et de vigilance à cet égard, n'a pas tiré les conséquences légales qui s'imposaient de ses constatations et a ainsi violé les articles 1134, 1135 et 1147 du code civil ;
6°/ qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si eu égard à l'importance des chèques en cause, le devoir de prudence du banquier ne se trouvait pas aggravé en sorte que ce dernier ne pouvait accepter de procéder à un paiement sur le compte de M. X... sans l'informer précisément des risques encourus en cas d'impayé ou d'opposition, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1134, 1135 et 1147 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt, après avoir constaté que le compte personnel, et non pas professionnel, de M. X... sur lequel celui-ci, en sa qualité d'endosseur, avait remis le chèque en cause, a fait l'objet de retraits importants dans les jours qui ont suivi, de sorte que le chèque revenu impayé, n'a pas pu être contre-passé intégralement, relève que M. X... conteste qu'il se soit agi de retraits en numéraires à son profit, en prétendant avoir procédé à des virements au profit du compte de M. Y... propriétaire du fonds, sans pour autant produire aucune pièce de nature à l'établir ; que la cour d'appel, abstraction faite du motif surabondant évoqué à la deuxième branche et sans inverser la charge de la preuve, qui a apprécié souverainement le sens et la portée des preuves qui lui étaient soumises sans avoir à s'expliquer sur celles qu'elle écartait, a pu retenir, qu'était caractérisé l'enrichissement injuste au sens de l'article L. 131-59 du code monétaire et financier et juger recevable l'action de la banque ;
Attendu, en second lieu, que ne commet aucune faute la banque, qui, ayant porté le montant d'un chèque au crédit du compte de son client, dès la remise de l'effet pour encaissement, et permis à ce client d'utiliser l'avance ainsi consentie, lui en demande le remboursement le jour où elle s'est vue refuser le paiement du chèque faute de provision ; que l'arrêt retient que la banque qui a porté le montant des chèques en cause au crédit du compte de son client, dès leur remise, consentant ainsi seulement une avance pour encaissement, peut, si les chèques reviennent impayés à la suite d'une opposition pour perte ou d'une insuffisance de provision, procéder à la contre-passation des écritures autant que la provision le lui permet, sans manquer à ses obligations légales ; qu'il retient encore que M. X... ne peut reprocher à la banque son manque de diligence dans la mesure où il s'est écoulé entre l'inscription au crédit du compte des chèques et leur contre-passation au débit du compte un délai compris entre six et huit jours, habituel en la matière à cette époque ; qu'il retient enfin que les motifs de rejets des chèques litigieux, principalement celui relatif à l'opposition pour perte, ont bien été portés à la connaissance de M. X... au vu des coupons annexés aux chèques, et que les courriers échangés entre les parties mettent en évidence qu'elles se sont mutuellement informées des actions engagées pour préserver leurs droits respectifs ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, abstraction faite du motif surabondant visé à la cinquième branche, la cour d'appel, qui n'avait pas à répondre à une affirmation sans offre de preuve visée à la quatrième branche, a pu retenir qu'aucun manquement à l'obligation d'information ou de conseil ne pouvait être reproché à la banque ;
D'où il suit que le moyen, qui ne peut être accueilli en ses deuxième et cinquième branches, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et attendu que le moyen en ses septième, huitième et neuvième branches ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à la caisse régionale de crédit agricole mutuel Nord de France la somme de 1 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois novembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Roger et Sevaux, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné Monsieur Francis X...à payer à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Nord de France la somme de 32. 319, 54 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 5 octobre 2004 et la somme de 3. 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, dit que conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil, les intérêts dus pour une année entière seront capitalisés, condamné la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Nord de France à payer à Monsieur X... la seule somme de 1. 500 euros à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, ordonné la compensation entre ces deux sommes, et d'avoir rejeté le surplus des demandes de Monsieur X...;
Aux motifs que l'action de la CRCAM Nord de France est à titre principal fondée sur l'article L. 13l-59, dernier alinéa, du Code monétaire et financier lequel dispose que « en cas de déchéance ou de prescription, il subsiste une action contre le tireur qui n'a pas fait provision ou les coobligés qui se seraient enrichis injustement » ; que Monsieur et Madame X...-A... sont titulaires d'un compte personnel n° 335790 D ouvert dans les livres de la CRCAM ; que l'examen de ce compte permet de constater qu'entre le 18 septembre 1996 et le 25 septembre 1996, 4 chèques ont notamment été remis à l'encaissement par Monsieur X... qui, à cet effet, les a préalablement endossés et a, ce faisant, acquis la qualité de co-obligé au sens du texte précité, ces 4 chèques ayant été par ailleurs portés au crédit dudit compte ; que c'est donc vainement que Monsieur X... tentera de se prévaloir de l'irrecevabilité tirée de la prescription prévue au premier alinéa de l'article L. 13l-59 du Code monétaire et financier ; que ces 4 chèques avaient été remis à Monsieur X...par Monsieur Noël Z...en paiement de dettes de jeux de ce dernier ; qu'ils étaient émis par deux tireurs distincts Madame Huguette Andrée Z...et Madame Françoise B...respectivement mère et concubine de ce dernier ; que trois de ces chèques n'ont pu être honorés ; que le premier émis par Madame Z...de 300. 000 francs ou 45. 734, 71 euros déposé le 16 septembre 1996, porté au crédit du compte de Monsieur X... le 18 septembre 1996 est revenu impayé le 23 septembre 1996 et a été contrepassé à la date du 25 septembre 1996, le motif en étant l'opposition au paiement faite par le tireur en raison de la perte du chèque ; que les deux autres émis par Madame B...sont revenus impayés faute de provision suffisante ; qu'il s'agit des chèques de 90. 000 francs ou 13. 720, 41 euros porté au crédit du compte de Monsieur X... le 24 septembre 1996 et revenu impayé le 1er octobre 1996, et de 146. 608 franc ou 22. 350, 25 euros crédité le 25 septembre 1996 et revenu impayé le 1er octobre 1996 ; que l'examen de ce même compte révèle que dans un même laps de temps, 4 retraits importants avaient notamment été effectués de respectivement 257. 000 francs ou 39. 179, 40 euros le 18 septembre 1996, 75. 000 francs ou 11. 433, 49 euros le 20 septembre 1996, 10. 000 francs ou 1. 524, 49 euros le 20 septembre 1996, 102. 400 francs ou 15. 610, 18 euros le 23 septembre 1996, de telle sorte que, lorsque les chèques sont revenus impayés pour défaut de provision ou opposition, la situation comptable du compte n'a pas permis à la banque de procéder à leur contre-passation dans leur intégralité sur ce compte en raison des insuffisances de provision sur celui-ci ; qu'en conformité avec les règles bancaires en la matière, ces chèques ont donc fait l'objet d'une inscription sur un compte interne de transfert dénommé « impayés non contrepassables » ; que par ailleurs, les sommes mentionnées au paragraphe 4 figurent au débit du compte n° 335790 D sous la dénomination de retrait ; que, pour la banque, il s'agit de retraits nécessairement en numéraires et au seul profit de Monsieur X... ; que, pour ce dernier, ce sont des virements effectués au profit du compte de Monsieur Y..., propriétaire du fonds de commerce pris par lui en location-gérance ; qu'or, pour étayer son argumentaire Monsieur X..., qui soutient également détenir sur le compte de Monsieur Y...une procuration, ne justifie pas plus de ce document qu'il ne produit de pièces établissant l'ordre de virement qu'il n'a pas manqué d'établir eu égard aux montants en jeu ou le justificatif du dépôt de ces sommes sur le compte de Monsieur Y...; qu'en outre, alors que la banque, au motif qu'elle est tenue par le secret professionnel, refuse de produire les relevés de compte de Monsieur Y..., Monsieur X... n'a pas estimé utile de produire une attestation de celui-ci ou, à défaut, de l'appeler en la cause ; que surabondamment il sera observé que le seul virement apparaissant sous cette dénomination dans les relevés de compte de Monsieur X... est celui effectué par Monsieur Y...le 21 octobre 1996 pour un montant de 10. 000 francs et dont la banque a tenu compte dans le décompte du 31 mai 2008 ; qu'enfin, alors que pour les besoins de ses activités Monsieur X... a un compte professionnel n° 280499 C devenu 50280499003 ouvert dans les livres de la banque, les opérations litigieuses ont été effectuées sur un compte personnel n° 335790 D devenu 50335790004 ; que l'ensemble de ces circonstances, nonobstant le débat sur l'existence de fautes de la banque ou le caractère liquide de sa créance, suffit à caractériser l'enrichissement injuste au sens du texte précité justifiant que l'action de la CRCAM soit déclarée recevable ; qu'au soutien de sa demande en paiement la CRCAM Nord de France verse désormais, outre les relevés du compte des époux X...-A... (n° 335790 D devenu 50335790004) et ceux du compte dénommé « Grand livre mensuel-Impayés non contrepassables », un décompte des sommes dues arrêté au 31 mai 2008 (pièce 28) qui, à la différence des décomptes précédents, fait clairement apparaître les modalités, les montants et les comptes sur lesquels chaque écriture créditrice ou débitrice a été passée ou contrepassée et à quelle date ; que l'examen de ce décompte permet de constater que la CRCAM Nord de France a exactement évalué sa créance à la somme de 32. 319, 54 euros (ou 212. 002, 29 francs) arrêtée au 31 mai 2008 ; qu'en effet, Monsieur X..., qui ne justifie pour sa part d'aucun paiement libératoire ou versement qui n'aurait pas été pris en compte par la banque dans ce décompte, oppose toutefois à cette demande en paiement les fautes commises par la banque dans la gestion du compte en général et de l'incident en particulier ; que préalablement à l'examen de ces griefs il sera tout d'abord rappelé que si le litige actuel porte sur le fonctionnement d'un compte personnel, celui-ci apparaît toutefois en lien avec les activités de gérance d'un café PMU qu'exerce par ailleurs Monsieur X...; que les impayés litigieux proviennent en effet de chèques mis en paiement de dettes de jeu ; qu'il sera ensuite et en tout état de cause observé que Monsieur X..., qui exerce à titre professionnel une activité commerciale, est réputé rompu ou à tout le moins avisé en matière de techniques comptables et bancaires si ce n'est complexes ou moins simples comme en l'espèce ainsi que dans les conséquences des impayés et les premières mesures conservatoires à prendre ; que dans ce contexte la banque ne saurait être tenue à son égard à une obligation de mise en garde particulière ; que Monsieur X...reproche à la CRCAM Nord de France les manquements à ses obligations d'information et de conseil mais aussi de vigilance ; que bien qu'il ne verse pas la convention d'ouverture du compte litigieux, sans toutefois prétendre qu'elle ne lui a pas été remise, et qu'il ne vise aucune stipulation ou manquement précis de la banque à une de ses obligations contractuelles, il sera constaté, eu égard aux pièces au dossier des parties, que la banque agit en l'espèce à l'égard de Monsieur X...en tant que gestionnaire d'un compte de dépôt de fonds tenue au seul respect des dispositions légales en cette matière ; que Monsieur X..., client avisé pour gérer une activité commerciale avec notamment des paris, ne peut ignorer que la remise d'un chèque à l'encaissement ne vaut pas paiement et que son inscription en compte au crédit du déposant, ne peut, sauf convention expresse, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, constituer non pas une provision disponible mais tout au plus une avance à l'encaissement ; que la banque, qui n'est ni juge des motifs d'une opposition ni responsable du défaut de provision du compte du tireur, est donc toujours en droit de lui réclamer le remboursement, et ce, quelle que soit par ailleurs la nature de l'endossement pouvant les lier au regard de la convention d'ouverture du compte (escompte-encaissement) ; qu'elle peut donc, comme en l'espèce, procéder à la passation et contre-passation d'écritures à cet effet, autant que la provision du compte le lui permet, sans manquer à ses obligations légales vis à vis de ce dernier et notamment pas à une obligation de vérification en qualité de banque dépositaire ; que par ailleurs l'examen des relevés des comptes produits permet de constater qu'entre la date des dépôts des chèques auprès de l'agence gestionnaire du compte de Monsieur X... , leur inscription au crédit du compte, puis leur retour pour opposition ou défaut de provision, et donc leur contre-passation au débit du compte, il s'est écoulé un délai de 6 à 8 jours, habituel en la matière et à cette époque, et sans qu'en conséquence Monsieur X..., qui ne peut se prévaloir des règlements des chambres de compensation interbancaires, puisse à ce stade valablement reprocher à la banque son manque de diligence ; qu'enfin, les motifs des rejets des chèques litigieux et principalement celui relatif à l'opposition pour perte de chèque, ont bien été porté à la connaissance du bénéficiaire des chèques (cf les coupons annexés aux chèques ou les mentions au dos) ; qu'en outre les multiples courriers échangés entre les parties attestent non seulement que Monsieur X...a bien été avisé de ces rejets, il avait d'ailleurs saisi un avocat dès décembre 1996 (cf la pièce 13), mais qu'au surplus les parties se sont mutuellement tenues informées des actions qu'elles engageaient pour préserver leurs droits respectifs ; que l'intimé ne peut donc pas plus reprocher à la CRCAM Nord de France un manquement à une obligation d'information ou de conseil ; que la créance de la CRCAM Nord de France doit donc être fixée à la somme de 32. 319, 54 euros (ou 212. 002, 29 francs) arrêtée au 31 mai 2008 ; que le jugement sera infirmé et Monsieur X... condamné au paiement de cette somme ; que Monsieur X..., au visa des dispositions des articles L 131-49 du Code monétaire et financier, 1134, 1146 et 1147 du Code civil, reproche également à la CRCAM les fautes commises par cette dernière dans sa gestion de l'opposition irrégulière formalisée par Madame Z...au chèque de 45. 734, 7 euros (ou 300. 000 francs) ; qu'il réclame à ce titre la somme de 32. 064, 84 euros à titre de dommages et intérêts outre celle de 22. 000 euros au titre de la perte financière que lui a occasionné l'absence de cette somme au crédit de son compte ; que la banque s'oppose à ces demandes qui ne sont fondées ni en droit ni en fait ; qu'il ressort des pièces aux dossiers des parties et notamment de la banque que celle-ci, qui ne peut-être tenue responsable de l'opposition irrégulière d'un tireur, dont elle ne gère de surcroît pas le compte, a engagé dans des délais normaux les procédures cambiaire et personnelle notamment pénale s'offrant à elle ; que cependant dès lors que la banque prend l'initiative d'une action, quelle que soit l'obligation pouvant ou non peser sur elle, elle doit tout mettre en oeuvre pour la mener à bien ; qu'or il apparaît à la lecture de l'arrêt de la Cour d'appel de Bordeaux que si la constitution de partie civile de la CRCAM est déclarée recevable, celle-ci a néanmoins été déboutée de ses demandes, faute pour elle de produire des pièces et un décompte précis et clair permettant à la Cour de vérifier le bien fondé des sommes réclamées et notamment qu'« elle n'a pas depuis obtenu la totalité de la somme qu'elle sollicite » ; qu'elle a ce faisant perdu une chance de recouvrer la somme due sur le tireur et corrélativement, fait également perdre une chance à Monsieur X...; qu'en effet, le Tribunal correctionnel du Tribunal de grande instance de Bordeaux relève dans son jugement du 19 mars 1999 que « Madame Z...a formé opposition pour perte le 19 septembre 1996 » lorsqu'elle a été « avisée par sa banque, la Caisse d'Epargne Aquitaine du Nord, de la présentation d'un chèque de 300. 000 francs qui ne pouvait être honoré » ; qu'il s'infère de cette mention, en l'absence d'autres pièces au dossier des parties et notamment de Monsieur X..., que Madame Z...n'aurait sans doute pas pu s'acquitter en une fois de la somme de 300. 000 francs ; qu'il sera de plus observé que Monsieur X..., qui disposait également contre le tireur d'une action personnelle ne l'a pas engagée, ou à tout le moins qu'il n'en justifie pas à ce stade de la procédure ; qu'il a en outre procédé à des retraits importants sur son compte sans attendre le paiement effectif du chèque litigieux ; qu'il a ce faisant participé à son propre préjudice ; que dès lors le préjudice résultant de cette faute de la banque, compte tenu des pièces comptables au dossier des parties sera fixé à la somme de 1. 500 euros ; qu'eu égard aux développements qui précèdent, le préjudice financier à hauteur de la somme de 25. 000 euros n'est pas établi et sera rejeté ; que le jugement, sur ce chef des demandes de Monsieur X..., sera infirmé ; que Monsieur X..., au visa des dispositions des articles 1235, 1376 et 1377 du Code civil, réclame au titre de la répétition de l'indu la somme de 19. 696, 88 euros et celle de 22. 000 euros au titre de la perte financière que lui a occasionné l'absence de cette somme au crédit de son compte ; que la banque s'oppose à ces demandes qui ne sont fondées ni en droit ni en fait ; que l'action de la banque et les opérations de passation et contrepassation d'écritures qu'elle a effectuées sont justifiées par la circonstance que Monsieur X...a procédé, ainsi qu'il l'a été rappelé précédemment (§ 3), à des retraits équivalents au montant du chèque litigieux dès le surlendemain de son dépôt ; que l'action de la banque trouve donc sa cause dans ces prélèvements ; que c'est donc vainement que Monsieur X... tentera d'invoquer ces dispositions ; que Monsieur X... formait les même demandes pécuniaires à titre subsidiaire sur les dispositions des articles 1134, 1146 et 1147 du Code civil ; que toutefois il résulte amplement des développements antérieurs que l'action de la banque était fondée dans son principe et son montant de telle sorte que là encore ce moyen sera rejeté ;

Alors, de première part, que si, conformément aux dispositions de l'article L. 131-59 du Code monétaire et financier, la prescription laisse subsister au profit du porteur une action subsidiaire à la disparition de son recours cambiaire contre le co-obligé injustement enrichi, le porteur, qui entend exercer cette action a la charge de prouver que ce dernier s'est injustement enrichi ; qu'en retenant, pour décider que l'action de la banque, fondée sur les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 131-59 du Code monétaire et financier, était recevable, que Monsieur X..., endosseur des chèques litigieux, ne rapportait pas la preuve de ce que les retraits effectués sur le compte n° 335790 D correspondaient à des virements effectués au profit du compte PMU de Monsieur Y..., la Cour d'appel, qui a fait peser sur l'endosseur des chèques la charge de la preuve de l'absence d'enrichissement injuste, a inversé la charge de la preuve et ainsi violé l'article 1315 du Code civil, ensemble l'article précité ;
Alors, de deuxième part, que seul un fait contesté étant matière à preuve, dès lors que la banque ne contestait nullement devant les juges d'appel le fait invoqué par Monsieur X... selon lequel il bénéficiait d'une procuration sur le compte PMU n° 26. 4162 C ouvert au nom de Monsieur Y..., propriétaire du fonds de commerce qu'il exploitait, la réalité de ce fait était ainsi établie ; qu'en imposant néanmoins à Monsieur X... de justifier de ce qu'il bénéficiait d'une procuration sur le compte de Monsieur Y..., la Cour d'appel a, derechef, violé l'article 1315 du Code civil ;
Alors, de troisième part, qu'en se fondant, pour décider que l'action de la banque en paiement de la somme de 32. 319, 54 euros était recevable, sur la circonstance déduite de ce que les opérations litigieuses avaient été effectuées sur le compte personnel n° 335 790 D de Monsieur X... alors que pour les besoins de ses activités ce dernier avait un compte professionnel n° 280 499 C, sans s'expliquer sur le fait invoqué par Monsieur X..., dans ses conclusions d'appel, tiré de ce que ce compte n° 335 790 D était un compte spécial de transfert que la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Nord de France lui avait demandé d'ouvrir afin de faire transiter les sommes correspondant à la contre valeur des chèques litigieux et qui devaient ensuite être versées sur le compte PMU n° 26. 4162 C de Monsieur Y...afin d'apurer celui-ci, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 131-59 du Code monétaire et financier et 1134 du Code civil ;
Alors, de quatrième part, que le banquier commet une faute qui lui interdit de contre-passer lorsque l'effet n'est pas recouvré, s'il a porté le remettant à croire en l'absence de risque de non-paiement de l'effet ou en la vérification par la banque de l'existence de la provision ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'il lui était demandé, si la banque n'avait pas commis une faute lui interdisant de contre-passer les effets litigieux en demandant à Monsieur X..., dès que le compte de transfert avait été crédité de la contre-valeur de ces derniers, d'approvisionner le compte PMU n° 26. 4162 C de Monsieur Y...afin d'apurer le découvert de celui-ci, en sorte qu'il avait pu croire qu'il n'y avait pas de risque de non-paiement lié à une opposition du tireur ou en raison de la vérification par la banque de la provision, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1134, 1135 et 1147 du Code civil ;
Alors, de cinquième part, que l'obligation d'information et de conseil du banquier existe à l'égard du client professionnel dans la mesure où la compétence de ce dernier ne lui donne pas les moyens d'apprécier les risques inhérents aux opérations bancaires ; qu'ayant constaté que Monsieur X... était gérant d'un café PMU, ce dont il s'évinçait que l'obligation d'information, de conseil et de vigilance de la banque jouait à l'endroit de ce dernier, lequel n'avait aucune connaissance en matière de technique bancaire, la Cour d'appel qui a néanmoins décidé qu'en tant que professionnel, gérant d'un café PMU, Monsieur X... était « réputé rompu ou à tout le moins avisé en matière de techniques comptables et bancaires » et qu'il « ne pouvait ignorer que la remise d'un chèque à l'encaissement ne valait pas paiement », en sorte que la banque n'était tenue à aucune obligation d'information, de conseil et de vigilance à cet égard, n'a pas tiré les conséquences légales qui s'imposaient de ses constatations et a ainsi violé les articles 1134, 1135 et 1147 du Code civil ;
Alors, de sixième part, qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si eu égard à l'importance des chèques en cause, le devoir de prudence du banquier ne se trouvait pas aggravé en sorte que ce dernier ne pouvait accepter de procéder à un paiement sur le compte de Monsieur X... sans l'informer précisément des risques encourus en cas d'impayé ou d'opposition, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1134, 1135 et 1147 du Code civil ;
Alors, de septième part, que l'auteur de la faute doit être condamné à réparation intégrale du dommage résultant des conséquences de son geste, sans lequel le dommage ne se serait pas produit ; qu'en limitant comme elle l'a fait les dommages et intérêts alloués à Monsieur X..., après avoir néanmoins constaté la faute commise par la banque dans la conduite de son action menée contre Madame Andrée Z..., à l'origine du préjudice subi par ce dernier, la Cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale du préjudice ;
Alors, de huitième part, que Monsieur X... exposait, dans ses conclusions récapitulatives d'appel signifiées le 9 mars 2009, que la banque n'avait exercé aucun recours cambiaire contre Madame Andrée Z..., tireur du chèque de 300. 000 francs, au préjudice de ses intérêts et qu'il avait ainsi directement perdu une chance que la créance de la banque soit recouvrée ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions déterminantes pour la solution du litige, la Cour d'appel a privé sa décision de tout motif en méconnaissance des exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
Alors, de neuvième part, qu'en se bornant, pour condamner Monsieur X... à payer à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Nord de France la somme de 32. 319, 54 euros, à affirmer péremptoirement, d'une part que l'examen du décompte des sommes dues, versé aux débats par la banque, permettait de constater que cette dernière avait exactement évalué sa créance à la somme de 32. 319, 54 euros, et d'autre part qu'« en conformité avec les règles bancaires en la matière », les chèques revenus impayés avaient fait l'objet d'une inscription sur un compte interne de transfert dénommé « impayés non contrepassables », sans déduire aucun motif à l'appui de ces deux allégations et expliquer, d'une part en quoi elle considérait que le décompte de la banque établissait que la créance de celle-ci s'élevait effectivement à la somme de 32. 319, 54 euros, et d'autre part quelles étaient les « règles bancaires » auxquelles elle se référait et en quoi elles consistaient, alors pourtant que ces deux affirmations étaient très sérieusement contestées par Monsieur X... dans ses conclusions d'appel, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 131-59 du Code monétaire et financier ;


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 09-16326
Date de la décision : 03/11/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 04 juin 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 03 nov. 2010, pourvoi n°09-16326


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, SCP Roger et Sevaux

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.16326
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