LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses première et deuxième branches :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 13 octobre 2005 par la société Pressor en qualité de directeur commercial du département tri, son contrat de travail prévoyant, outre une rémunération mensuelle, une prime correspondant à 1,2 % du chiffre d'affaires généré par le département tri, attribuée en fonction de la réalisation d'objectifs déterminés au mois d'octobre de chaque année pour l'année suivante ; que le salarié a démissionné par courrier du 3 mai 2006 et a définitivement quitté l'entreprise le 28 juillet suivant ; que s'estimant non rempli de ses droits, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que pour condamner l'employeur au paiement de la prime d'objectif au prorata de la présence dans l'entreprise du salarié au cours de ses deux années d'activité, l'arrêt retient que le contrat de travail n'a pas prévu de dispositions particulières pour le salarié arrivant ou quittant l'entreprise en cours d'exercice, qu'il revient donc au juge d'interpréter la clause contractuelle relative à la part variable de sa rémunération, et que celle-ci ne restreint pas ses effets dans l'hypothèse d'une présence du salarié sur un exercice incomplet ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si le droit au paiement prorata temporis de la prime annuelle d'objectif au salarié étant entré ou ayant quitté l'entreprise en cours d'exercice, résultait d'une convention ou d'un usage, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 février 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six octobre deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Pressor.
Le pourvoi fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'avoir condamné la Société PRESSOR à verser à Monsieur Daniel X... des sommes à titre de rappel de commissions de 44.800 € pour le centre de tri RENNES, 2.280 € pour le contrat de THAON LES VOSGES, 888 € pour le contrat de CAGNES SUR MER et de 1.440 € à titre pour le contrat de LIMOGES ;
AUX MOTIFS QUE « le contrat de travail de M. X... qui décrit les fonctions confiées au salarié, à compter du 1er octobre 2005, précise que sa rémunération sera composée d'un salaire annuel fixe augmenté d'une prime de 1,2 % du chiffre d'affaires du département tri, attribuée en fonction de la réalisation des objectifs déterminées au mois d'octobre de chaque année pour l'année suivante ; que le contrat de travail ne comporte pas de précisions sur les modalités d'application de cette clause relative à la part variable de rémunération du salarié ; qu'il n'est pas pris en considération notamment l'arrivée en cours d'exercice dans l'entreprise du salarié en cours d'exercice ; or, qu'en l'espèce, arrivé dans l'entreprise le 13 octobre 2005 et parti le 28 juillet 2006, M. X... n'y a pas exercé pendant un exercice entier ; qu'il revient donc au juge d'interpréter ladite clause pour en déduire les conditions d'application qu'ont souhaité leur donner les parties ; qu'en l'espèce, compte tenu des termes de cette clause, qui ne restreint pas ses effets dans l'hypothèse d'une présence du salarié sur un exercice incomplet, il y a lieu de considérer que M. X..., entré et sorti de l'entreprise en cours d'exercice, a droit à une prime variable en fonction es objectifs déterminés au mois d'octobre de chaque année pour l'année suivante visés au contrat de travail ; or, qu'aucun élément n'est versé aux débats établissant qu'au mois d'octobre 2005, ont été fixés des objectifs à M. X... ; que, dans ces conditions, la société PRESSOR ne peut valablement soutenir qu'elle a bien fixé des objectifs qui n'ont pas été atteints par son salarié, en se prévalant d'un document élaboré ultérieurement en février 2006, intitulé « budget 2006 », ce, sans même qu'il y ait lieu de se prononcer sur la nature et la portée de ce document ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments qu'à défaut d'objectifs fixés à M. X..., et en application de la clause contractuelle litigieuse, il convient de dire que M. X... a droit à une prime s'élevant à 1,2 % du chiffre d'affaires du département tri réalisé du 13 octobre 2005, date de son embauche, au 28 juillet 2006, date de sa démission ; que le chiffre d'affaires de l'entreprise sur cette période n'étant pas communiqué, il convient d'appliquer le taux précité au montant des ventes réalisées sur la dite période, lesquelles sont déterminées par la date du contrat de vente signé par la société PRESSOR ; qu'il convient donc de constater que :
- le 2 décembre 2005, a été conclu le contrat de réalisation d'un ensemble industriel avec la société Netra pour un montant de 3,74 millions d'euros (Rennes) ;
- le 27 janvier 2006, a été conclu un contrat similaire avec la société Onyx Est pour un montant de 190.000 € (Thaon les Vosges) ;
- le 9 mai 2006, a été commandé par l'agence EMCO Méditerranée, un convoyeur pour un montant de 74.000 € ;
- le 24 juillet 2006, a été commandé du matériel par la société SVE de Limoges pour un montant de 130.000 € ;
qu'il s'ensuit que M. X... a droit à une rémunération complémentaire de 1,2 % sur chacun de ces contrats, représentant respectivement les montants suivants : 44.880 €, 2.280 €, 888 € et 1.560 € ; qu'il convient donc de faire droit à la demande de M. X... et de confirmer partiellement le jugement déféré ; que, corrélativement, il convient de débouter la société PRESSOR de sa demande reconventionnelle en remboursement des sommes versées au salarié au titre de l'exécution provisoire du jugement déféré » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le droit au paiement prorata temporis d'une prime annuelle d'objectifs d'un salarié ayant quitté l'entreprise avant le terme de l'exercice, ne peut résulter que d'une convention expresse ou d'un usage en ce sens ; qu'au cas présent, le contrat de travail conclu entre la société PRESSOR et Monsieur X... stipulait que la prime contractuelle serait « attribuée en fonction de la réalisation des objectifs déterminés au mois d'octobre de chaque année, pour l'année suivante » ; que Monsieur X..., qui avait rompu le contrat de travail le 3 mai 2006, ne pouvait donc percevoir la prime d'objectifs contractuelle au titre de l'année 2006 qu'à condition de démontrer l'existence d'une clause ou d'un usage prévoyant la possibilité d'un paiement prorata temporis ; qu'en allouant des sommes à Monsieur X... au titre de la prime annuelle d'objectifs prévue dans son contrat de travail, sans constater l'existence d'une disposition prévoyant la possibilité d'un paiement prorata temporis de cette prime, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU' en s'abstenant de répondre au moyen tiré de ce que le salarié ne pouvait prétendre au paiement prorata temporis d'une prime annuelle d'objectifs en l'absence d'une convention ou d'un usage en ce sens, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS, DE TROISIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT, QUE lorsque le droit à une rémunération variable résulte du contrat de travail qui renvoie à un accord entre l'employeur et le salarié sur le montant de cette rémunération, il incombe au juge de la déterminer en fonction des critères visés au contrat et, à défaut, des éléments de la cause ; qu'en considérant que l'absence de fixation des objectifs en octobre 2005 ouvrait automatiquement droit à Monsieur X... de prétendre au paiement d'une commission de 1,2% pour toutes les affaires réalisées par le service placé sous sa responsabilité, sans déterminer, au regard des éléments de la cause, l'objectif qu'il aurait été nécessaire d'atteindre pour justifier l'application de ce commissionnement de 1,2%, la cour d'appel a méconnu son office et violé l'article L. 1221-1 du Code du travail ;
ALORS, DE QUATRIEME PART, QUE le contrat de travail conclu entre la Société PRESSOR et Monsieur X... prévoyait le versement d'une « prime de 1,2% du chiffre d'affaires du département tri, attribuée en fonction de la réalisation des objectifs déterminés au mois d'octobre de chaque année, pour l'année suivante » ; que cette stipulation ne prévoyait aucunement un droit à commission sur chacune des affaires réalisée par le département tri, mais uniquement le versement d'une prime annuelle d'un montant déterminé à l'avance et subordonné à la réalisation d'objectifs ; qu'en allouant des « rappels de commissions » d'une valeur égale à 1,2 % sur toutes les affaires réalisées pendant l'exercice en cours, cependant qu'il lui appartenait de déterminer, en fonction des éléments de la cause, quels étaient les objectifs qui pouvaient être fixés et de comparer ces derniers avec les résultats effectifs obtenus par l'intéressé, la cour d'appel a méconnu les dispositions claires et précises du contrat de travail et a violé l'article 1134 du Code civil ;
ALORS, DE CINQUIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT, QU'en l'absence d'accord des parties sur les objectifs susceptibles de donner droit à une prime d'objectifs prévus par le contrat, il incombe au juge de fixer lui-même des objectifs au regard des éléments de la cause et d'en vérifier la réalisation ; que le contrat de travail conclu entre la Société PRESSOR et Monsieur X... stipulait que la prime contractuelle serait « attribuée en fonction de la réalisation des objectifs déterminés au mois d'octobre de chaque année, pour l'année suivante » ; qu'il résultait donc des termes clairs et précis de cette stipulation que Monsieur X..., embauché au mois d'octobre 2005, ne pouvait en toute hypothèse prétendre au versement de cette prime qu'au titre d'objectifs atteints au cours de l'année 2006 ; que la cour d'appel, à qui il incombait de fixer le montant de la prime d'objectifs en l'absence d'accord des parties, ne pouvait statuer qu'en se fondant sur des éléments relatifs à l'exercice 2006 ; qu'en prenant en compte, pour calculer le montant dû à Monsieur X... au titre de la prime d'objectifs prévus par son contrat de travail, une commande dont elle avait elle-même relevé qu'elle avait été passée le 2 décembre 2005, la cour d'appel a là encore méconnu les dispositions claires et précises du contrat de travail et a violé les articles L. 1221-1 du Code du travail et 1134 du Code civil.