Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Martial X...,- M. Thierry Y..., prévenu et partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PAU, chambre correctionnelle, en date du 4 février 2010, qui a notamment condamné le second, pour défaut de maîtrise, à 200 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
I-Sur le pourvoi formé par M. Y... :
Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;
II-Sur le pourvoi formé par M. X... :
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1 et 4 de la loi du 5 juillet 1985, R. 413-17 du code de la route, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt a déclaré M. X... responsable du préjudice subi par M. Y... ;
" aux motifs que, sur la culpabilité de M. X..., il résulte de l'enquête effectuée par les services de police de Mont-de-Marsan que M. X... réside au ... et qu'il souhaitait le 11 décembre 2007 à 17h50 traverser cette avenue pour rejoindre le boulevard des Pyrénées qui se trouve dans l'axe de son domicile lorsqu'est survenu l'accident ; que la sortie du domicile de M. X... se trouve au milieu d'un carrefour avec à sa gauche un feu tricolore réglementant la circulation de l'avenue J. F. Kennedy dans le sens de la rocade/ centre-ville de Mont-de-Marsan, à sa droite un autre feu tricolore règlementant la circulation des véhicules dans le sens centre-ville/ rocade et enfin un feu tricolore pour les véhicules situés sur le boulevard des Pyrénées ; qu'il ressort de l'enquête que M. X... ne bénéficie compte tenu de la configuration des lieux d'aucune priorité de passage puisque les véhicules de chaque voie de circulation sont alternativement prioritaires en fonction du feu tricolore et que donc, à moins de ne pas disposer de véhicule ou bien de ne pas sortir de chez soi avec un véhicule, cette configuration des lieux oblige tout conducteur sortant du ... à la plus grande prudence ;
qu'en l'espèce, M. X... a indiqué qu'en sortant de son domicile il avait attendu au niveau de son portail que la circulation sur l'avenue Kennedy soit dégagée, qu'il avait regardé à gauche et à droite et ne voyant personne arriver il s'était engagé dans l'avenue, son intention étant de rejoindre l'avenue Kennedy pour gagner le boulevard des Pyrénées qui se trouve quasiment dans l'axe de sortie de son domicile ; qu'interrogé sur la position des feux tricolores au moment où il sortait de son domicile, M. X... précisait qu'il n'avait pas fait attention à la position des feux tricolores, qu'il ne pouvait dire si le feu était vert car il était concentré sur la circulation mais pas sur les feux et expliquait qu'en règle générale il ne pouvait se fier à ceux-ci étant donné que quand il sort au milieu du carrefour il n'est sûr à aucun moment qu'aucun véhicule ne peut arriver d'en face ou de chaque côté du fait du passage au vert d'un des trois feux ; qu'il ressort de l'enquête que l'accident s'est produit alors même que M. Y... était sur une voie prioritaire et que le feu réglementant la circulation sur l'avenue J. F. Kennedy était vert ; qu'il est établi par l'enquête et plus précisément par les constatations matérielles, les auditions, ainsi que l'examen technique de M. Z..., expert près la cour d'appel de Pau, que la motocyclette conduite par M. Y... roulait à une vitesse excessive et que la vitesse trop élevée de la motocyclette n'a pas permis à M. X... de freiner pour éviter la collision ; que toutefois, en procédant aux manoeuvres sus décrites, M. X... n'a pas fait preuve de la vigilance nécessaire puisqu'il a commis un refus de priorité à la motocyclette conduite par M. Y... constitutif d'une faute de conduite génératrice pour partie de l'accident dont a été victime M. Y... qui présente, selon le certificat médical en date du 14 janvier 2008 un traumatisme crânien ainsi que diverses fractures ayant entraîné une incapacité totale de travail de six mois ;
qu'en conséquence, il convient de confirmer la décision de culpabilité à l'encontre de M. X... du chef des infractions de blessures involontaires avec incapacité supérieure à trois mois et refus de priorité ; que, sur la culpabilité de M. Y..., aux termes de l'article R. 413-17 du code de la route, les vitesses maximales autorisées par les dispositions du présent code ainsi que celles plus réduites éventuellement prescrites par les autorités investies du pouvoir de police de la circulation ne s'entendent que dans des conditions optimales de circulation : bonnes conditions atmosphériques, trafic fluide, véhicule en bon état ; qu'elles ne dispensent en aucun cas le conducteur de rester constamment maître de sa vitesse et de régler cette dernière en fonction de l'état de la chaussée, des difficultés de la circulation et des obstacles prévisibles ; que l'examen technique et scientifique de M. Z..., expert près la cour d'appel de Pau, pratiqué après étude des éléments fournis, examen des plans, des photographies prises sur les lieux lors de l'examen et examen des véhicules indique que la collision s'est produite perpendiculairement entre la roue avant de la motocyclette et la roue avant droite et l'aile avant droite du véhicule Peugeot 206 souligne que la violence de l'impact a entraîné le pivotement du véhicule Peugeot 206 vers la gauche d'un angle supérieur à 90° et évalue la vitesse de la moto au moment du choc à 80 km/ h au vu des écrasements affectant le véhicule peugeot 206, les déformations de la moto et la projection des deux véhicules ;
que malgré l'imperfection de cet examen technique souligné par la défense de M. Y... dans ses conclusions écrites ou à l'audience il n'en demeure pas moins que la vitesse excessive du cyclomoteur mise en avant comme une des causes de l'accident est corroborée par le témoignage de Mme A... qui affirme que le motocycliste circulait à vive allure, indiquant même que celui-ci a actionné au moins trois fois la poignée de gaz en faisant rugir son moteur lors de l'arrêt ajoutant que le conducteur de la motocyclette est « parti à toute vitesse en accélération » ; qu'interrogé sur la vitesse du motocycliste, le témoin ajoutait que M. Y... dépassait largement la vitesse de 50 km/ h ; qu'à supposer le fait que M. Y... roulait à la vitesse autorisée à cet endroit de ville soit 50 km/ h cela ne le dispensait pas de réduire sa vitesse compte tenu d'une intersection qui par nature peut se révéler dangereuse et qui oblige à une vigilance redoublée même si l'on circule sur une route prioritaire d'autant qu'il faisait nuit, que la visibilité n'était pas bonne et que la circulation était dense aux dires du témoin M. B... ; qu'en conséquence, la présence du véhicule de M. X... ne peut être considérée comme un obstacle prévisible et M. Y... en circulant à vive allure comme il le faisait au moment de l'accident n'est donc pas resté maître de sa vitesse ; que la décision du premier juge sur la culpabilité doit être confirmée ; que sur l'action civile, il convient de confirmer les dispositions civiles du jugement en ce qu'il a reçu M. Y... en sa constitution de partie civile et déclaré M. X... responsable du préjudice de la partie civile ;
" alors que toute faute commise par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur exclut ou limite son droit à indemnisation dans une proportion souverainement appréciée par les juges du fond ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt qu'« il est établi par l'enquête (…) que la motocyclette conduite par M. Y... roulait à une vitesse excessive », ce dernier ayant été déclaré coupable de l'infraction de « conduite d'un véhicule à une vitesse excessive eu égard aux circonstances » ; qu'en déclarant néanmoins « M. X... responsable du préjudice de la partie civile », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les textes visés au moyen " ;
Vu l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985 ;
Attendu que, selon ce texte, la faute commise par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'un accident de la circulation s'est produit le 11 décembre 2007 entre l'automobile conduite par M. X... et la motocyclette pilotée par M. Y... ; que ce dernier a été blessé ; qu'ils ont tous deux été poursuivis devant le tribunal correctionnel ;
Attendu qu'après avoir déclaré M. X... coupable de blessures involontaires ainsi que de refus de priorité et M. Y... coupable de défaut de maîtrise, sa vitesse excessive ayant été une des causes de l'accident, les juges déclarent le premier entièrement responsable du préjudice du second ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans limiter ou exclure l'indemnisation des dommages subis par le conducteur-victime, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
I-Sur le pourvoi formé par M. Y... :
LE REJETTE ;
II-Sur le pourvoi formé par M. X... :
CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Pau, en date du 4 février 2010, en ses seules dispositions relatives aux intérêts civils, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Bordeaux, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Pau et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Roth conseiller rapporteur, M. Palisse conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.