LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant retenu, par motifs adoptés, que l'assignation introductive d'instance avait été publiée à la Conservation des hypothèques d'Annecy le 25 mars 1987 dépôt n° 722-1507, volume 104/96 n° 6, la cour d'appel en a exactement déduit que l'action des consorts X... était recevable ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant souverainement retenu, par motifs propres et adoptés, que les témoins, lors de l'acte du 16 novembre 1981 n'avaient pas précisé de quels actes de possession accomplis par la commune ils avaient été les témoins et que leurs déclarations relatives au non-paiement des impôts fonciers par les consorts Y... étaient contredites par les reçus de règlement des taxes foncières pour les années 1954 à 1958 que ces derniers avaient produits aux débats, que François Y..., alléguant qu'il réglait les impôts fonciers pour le compte d'Hector Z..., produisait copie des avertissements à lui délivrés par le directeur des contributions directes, perception de Thorens à Annecy pour les années 1954, 1955, 1956, 1957 et 1958 avec copie des reçus, que les avertissements établis par l'administration des impôts ne mentionnaient pas les références cadastrales des parcelles imposées et les chiffres retenus mais seulement les numéros d'articles du rôle général de la commune d'Aviernoz à ne pas confondre avec les numéros cadastraux et que par suite l'article 103 ou l'article 95 ne désignaient pas les numéros cadastraux des parcelles imposées et que la commune produisait un bail conclu le 14 novembre 1972 avec Rémi A... pour l'exploitation d'une carrière sur la part inscrite au cadastre sous le numéro 92 de la section A, lieudit "Les Lapiaz" appartenant à la commune d'Aviernoz et sous les numéros 92p, 95 et 96, section A appartenant à Rémi A..., la cour d'appel qui n'était pas tenue de s'expliquer sur les éléments de preuve qu'elle écartait, sans dénaturation et procédant aux recherches demandées, a pu en déduire la nullité de l'acte du 16 novembre 1981 ;
Sur le troisième moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant retenu que la commune reprochait à M. B..., notaire, d'avoir rédigé l'acte du 15 février 1971 sans faire de recherche de propriété trentenaire et en se bornant à reprendre un acte de donation-partage du 2 mars 1958 qui serait erroné sans indiquer en quoi cet acte, auquel elle n'était pas partie, lui causait un préjudice, la cour d'appel a pu en déduire que la demande de garantie formée contre M. B... devait être rejetée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la commune Aviernoz aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la commune Aviernoz à payer aux consorts C... et D... la somme globale de 2 300 euros et aux consorts X..., E..., F..., Y..., G... et H... la somme globale de 2 500 euros et à M. B... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de Commune Aviernoz ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf octobre deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Vier, Barthélemy et Matuchansky, avocat aux Conseils, pour la commune d'Aviernoz
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la commune d'AVIERNOZ à payer aux requérants ou à leurs ayant-droits la somme de 176.060,38 euros avec intérêts à compter du jugement ;
AU MOTIF QUE les demandeurs sont recevables à agir ;
ALORS QUE, D'UNE PART, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ; que les fins de non-recevoir ne sont pas limitativement énumérées ; que le défaut de publication d'une demande tendant à la résolution, la révocation, la rescision ou l'annulation de droits résultant d'actes soumis à publicité constitue une fin de non-recevoir ; qu'en s'abstenant totalement de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'assignation introductive d'instance des consorts Y... avait été publiée à la conservation des hypothèques et si leur demande n'était pas irrecevable faute d'avoir été publiée, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 122 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, sont obligatoirement publiées au bureau des hypothèques de la situation des immeubles les demandes en justice tendant à obtenir, et les actes et décisions constatant la résolution, la révocation, l'annulation ou la rescision d'une convention ou d'une disposition à cause de mort ; que les demandes tendant à faire prononcer la résolution, la révocation, l'annulation ou la rescision de droits résultant d'actes soumis à publicité ne sont recevables devant les tribunaux que si elles ont été elles-mêmes publiées et s'il est justifié de cette publication par un certificat du conservateur ou la production d'une copie de la demande revêtue de la mention de publicité ; qu'en déclarant recevable la demande des consorts Y... sans constater que ceux-ci justifiaient de la publication de l'acte en produisant un certificat du conservateur ou une copie de la demande revêtue de la mention de publicité, la cour d'appel a violé par refus d'application les articles 28 et 30 du décret du 4 janvier 1955 ;
ALORS QU'ENFIN, le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé ; que l'omission de statuer donne ouverture à cassation lorsqu'elle s'accompagne d'une violation de la loi ; qu'en s'abstenant totalement de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune d'AVIERNOZ aux demandeurs, la cour d'appel a violé l'article 5 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la commune d'AVIERNOZ à payer aux requérants ou à leurs ayant-droits la somme de 176.060,38 euros avec intérêts à compter du jugement ;
AUX MOTIFS QUE selon les énonciations de l'acte du 16 novembre 1981, les témoins se sont bornés à déclarer que depuis 1946, la commune avait la possession de la parcelle et que depuis la même année, l'impôt foncier dû par M. Z... et succession n'avait pas été payé ; que ces personnes n'ont pas précisé de quels actes de possession accomplis par la commune ils avaient été témoins ; que leurs déclarations relatives au non-paiement des impôts fonciers par les consorts Y... sont contredites par les reçus de règlements des taxes foncières pour les années 1954 à 1958 que ces derniers ont produites ; qu'en revanche, il est établi que les consorts Y..., dont les droits avaient été reconnus par l'administration en 1944, se sont comportés après cette date en propriétaires de la parcelle litigieuse ; qu'en effet, dans le cadre d'un litige relatif au volume de matériaux extraits de la carrière «de Lapiaz» qui opposait M. Y... et d'autres à la société Entreprise
I...
, le 21 janvier 1956, M. I... devait verser une somme «aux propriétaires de la carrière» ; que dès le 12 avril 1981, les consorts Y... ont adressé au préfet une lettre pour protester contre le projet d'extension de la carrière exploitée par M. A... en faisant valoir que le terrain concerné était leur propriété indivise ; que le premier juge a donc annulé à bon droit l'acte du 16 novembre 1981 et réintégré les consorts Y... dans leurs droits ; que n'est pas contestée la somme de 176.060,38 euros outre intérêts que le jugement a allouée aux consorts Y... en réparation du préjudice causé par l'extraction des matériaux du sol de la parcelle dont ils sont propriétaires ; que la commune est responsable de ce préjudice puisqu'elle a rendu possible cette extraction en se prétendant faussement propriétaire de cette parcelle et en accordant à M. A... un bail alors qu'elle n'avait pas qualité pour le faire ; qu'elle doit donc être condamnée à payer ladite somme ;
ALORS QUE, D'UNE PART, il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause et notamment de restreindre ou, au contraire, de compléter le contenu de l'acte soumis à son examen ; qu'en affirmant néanmoins que, selon les énonciations de l'acte du 16 novembre 1981, les témoins se sont bornés à déclarer que depuis 1946, la commune avait la possession de la parcelle et que depuis la même année, l'impôt foncier dû par M. Z... et succession n'avait pas été payé et que leurs déclarations relatives au non-paiement des impôts fonciers par les consorts Y... sont contredites par les reçus de règlements des taxes foncières pour les années 1954 à 1958 que ces derniers ont produites, alors qu'il résulte de l'acte du 16 novembre 1981 que les témoins ont précisé «que cet impôt a été admis en irrecouvrable par la Direction des Impôts», qu' «à l'appui de leurs déclarations, les déclarants ont représenté une lettre de M. le Percepteur d'Annecy IIème division en date du 7 octobre 1980 attestant que l'impôt foncier dû par M. Hector Z... et succession n'était pas payé depuis l'année 1946» et que cette pièce, comportant exactement les termes rapportés par les témoins a d'ailleurs été annexée à la minute de l'acte, la cour d'appel a dénaturé par omission l'acte du 16 novembre 1981 et le document annexé, en violation du principe de l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, il est interdit au juge de dénaturer par omission les documents de la cause ; qu'il ressortait d'une attestation du 8 août 1986 de Madame Evelyne K..., née Z..., fille de M. Z..., totalement négligée par la cour d'appel, qu' «à la suite du classement en forêt de protection en 1944 (son) père Z... Hector (…) avait renoncé à la propriété de la parcelle 92 et refusait de régler les impôts rapportant chaque année les feuilles d'impôts à la mairie d'AVIERNOZ», que «les reçus délivrés par la perception à cette époque -ci-joints démontrent qu'aucun impôt n'a été payé par (son) père sur la parcelle 92» et qu'«après le décès de (son) père, elle a continué à rapporter à la mairie les feuilles d'impôts, toujours impayées pour la parcelle 92» ; qu'en se déterminant néanmoins au motif que les déclarations des témoins entendus dans l'acte du 16 novembre 1981 relatives au non-paiement des impôts fonciers par les consorts Y... sont contredites par les reçus de règlements des taxes foncières pour les années 1954 à 1958 que ces derniers ont produits, la cour d'appel, en s'abstenant totalement de prendre en considération l'attestation précitée, pourtant régulièrement produite et expressément visée par la commune d'AVIERNOZ dans ses conclusions d'appel et récapitulatives, la cour d'appel a dénaturé par omission ce document de la procédure, en nouvelle violation du principe de l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ;
ALORS QUE, DE TROISIEME PART, méconnaissant les exigences de l'article 455 du code de procédure civile, la cour d'appel s'est abstenue de répondre à cet égard au moyen déterminant des conclusions d'appel et récapitulatives de la commune d'AVIERNOZ (p.15, alinéas 4 à 11) pris de ce que les impôts payés par les consorts Y... et Z... correspondent à d'autres parcelles que la parcelle litigieuse 92, les règlements n'ayant été effectués que pour la parcelle 103-devenue 83- et la parcelle 95 incluse dans la parcelle 93, personne n'ayant payé d'impôt sur la parcelle 92 depuis 1944 ;
ALORS QU'ENFIN, la propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous sauf à satisfaire aux autorisations administratives résultant des lois et règlements ; qu'en condamnant la commune d'AVIERNOZ à réparer le préjudice qui a été causé aux consorts Y... par l'extraction des matériaux du sol de la parcelle 92 dont ils sont propriétaires, au motif qu'elle a rendu possible l'extraction en cause en se prétendant faussement propriétaire de cette parcelle, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si le litige portant sur l'exploitation de la carrière ne portait pas sur d'autres parcelles que la parcelle 92, à savoir les parcelles 95, 92 p1, 92 p2 et 92 p3 appartenant à M. A..., ce dont il résultait que la commune d'AVIERNOZ était étrangère à toute exploitation desdites parcelles, les autorisations administratives d'exploiter ayant été d'ailleurs accordées par la préfecture de Haute-Savoie, la cour d'appel a privé son arrêt de base au regard de l'article 552 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré non fondée la demande de la commune d'AVIERNOZ dirigée contre Maître B... et d'AVOIR condamné la commune d'AVIERNOZ à payer à celui-ci deux indemnités de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE la commune prétend être garantie par M. B... au motif que ce notaire a rédigé l'acte du 15 février 1971 sans faire de recherche de propriété trentenaire et en se bornant à reprendre un acte de donation-partage du 2 mars 1958 qui serait erroné ; que toutefois, elle n'indique pas en quoi cet acte, auquel elle n'est pas partie, lui cause préjudice ;
ALORS QUE le notaire est tenu, en vertu de sa qualité d'officier public, d'assurer l'efficacité et la sécurité des actes qu'il instrumente ; qu'il doit notamment vérifier la qualité des parties à l'acte qu'il établit et engage sa responsabilité en se bornant à reprendre, d'un acte antérieur, une origine de propriété qui se révèle erronée ; qu'il suffit que le préjudice soit certain et que la victime ne peut se voir imposer, à la suite de la faute commise par le notaire, l'exercice d'une autre voie de droit que l'action en responsabilité ; que dans les litiges relatifs à la preuve de la propriété, un préjudice certain existe du seul fait de la production par l'autre partie d'un titre de propriété erroné susceptible d'avoir une influence sur l'issue du litige ; qu'en déboutant cependant la commune d'AVIERNOZ de sa demande en garantie contre le notaire au motif inopérant qu'elle n'indique pas en quoi l'acte notarié litigieux, auquel elle n'est pas partie, lui cause préjudice, alors que ce préjudice résultait du seul fait de l'absence par le notaire de recherche d'origine de propriété sérieuse lors de l'établissement de son acte, la cour d'appel a violé par refus d'application l'article 1382 du code civil.