Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 322-4-20 du code du travail alors applicable, ensemble la loi des 16-24 août 1790 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que MM. X..., Y..., F..., Z... et Mmes A..., B..., C..., D..., F..., E... ont été engagés par la Commune de Pointe-Noire (la commune) selon un contrat " emploi-jeune " du 4 janvier 1999 ; qu'après le terme des contrats intervenu le 31 décembre 2003, ces salariés ont été maintenus dans leurs fonctions jusqu'en avril 2004 ; qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale le 20 mars 2005 pour demander la requalification de la relation contractuelle et la réintégration dans leurs postes ;
Attendu que pour déclarer la juridiction prud'homale compétente pour connaître du litige, la cour d'appel a retenu qu'il résulte de l'article L. 322-4-20 ancien du code du travail concernant les contrats " emploi-jeune ", que ces contrats conclus, soit à durée déterminée, soit à durée indéterminée, pour cinq années relèvent du droit privé, que ce rattachement au droit du travail concerne la totalité des contrats bénéficiaires de ce dispositif d'aide de la puissance publique, y compris, selon le texte susvisé, lorsqu'ils sont conclus avec des collectivités territoriales, mais à la condition dans ce cas, qu'il ne s'agisse que de contrats à durée déterminée, que la cour ne peut que constater que les dix salariés ont saisi la juridiction prud'homale de demandes relatives à l'exécution de contrats emploi-jeune à durée déterminée et que, de ce fait, les questions posées relèvent du droit du travail, et qu'elle est compétente pour statuer sur l'exécution des contrats litigieux au regard des dispositions légales susvisées ;
Attendu cependant que, s'il appartient au juge judiciaire de se prononcer sur les litiges nés de la conclusion, de l'exécution, de la rupture ou de l'échéance du contrat emploi-jeune, même si l'employeur est une personne publique gérant un service public à caractère administratif, le juge administratif est seul compétent pour statuer sur la demande de requalification de la relation contractuelle, lorsque celle-ci s'est poursuivie avec la personne morale de droit public au delà du terme des contrats, ainsi que sur les conséquences de la rupture survenue après cette échéance ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte de ses constatations qu'après l'échéance du contrat emploi-jeune les liant à la commune, qui ne pouvait conclure avec eux qu'un contrat à durée déterminée, les intéressés ont continué leur service au bénéfice de la collectivité territoriale pendant une période de trois mois, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres moyens :
CASSE ET ANNULE dans toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 17 novembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit que les juridictions de l'ordre judiciaire sont incompétentes pour connaître du litige ;
Renvoie MM, X..., Y..., Z..., Dany F..., et Mmes B..., C..., D..., Ferdine F..., E..., A..., à mieux se pourvoir ;
Condamne les défendeurs aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize octobre deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de la commune de Pointe-Noire ;
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à la cour d'appel de Basse-Terre d'avoir retenu sa compétence matérielle pour statuer sur la demande de requalification de dix contrats emploi-jeune conclus par la commune de Pointe-Noire en contrats de travail de droit commun à durée indéterminée et pour statuer sur les conséquences de cette requalification ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'il résulte des dispositions de l'article L. 322-4-20 (ancien) du Code du travail, concernant spécifiquement les contrats de travail aidés par la puissance publique dénommés emploi-jeune que ces contrats conclus soit à durée déterminée, soit à durée indéterminée pour cinq années relèvent du droit privé ; que ce rattachement au droit du travail concerne la totalité des contrats bénéficiaires de ce dispositif d'aide de la puissance publique, y compris, selon le texte susvisé, lorsqu'ils sont conclus avec des collectivités territoriales, comme ici, mais à condition, dans ce cas, qu'il ne s'agisse que de contrats à durée déterminée ; que la cour ne peut que constater que les dix salariés intimés ont saisi la juridiction sociale de demandes relatives à l'exécution de contrats aidés, emploi-jeune, à durée déterminée et que de ce fait, les questions posées relèvent du droit du travail ; qu'il y a donc lieu de considérer que cette cour est compétente pour statuer sur l'exécution des contrats de travail litigieux au regard des dispositions légales susvisées ; que le jugement est confirmé sur ce point ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QU'il appert des pièces figurant au dossier qu'à l'exception des contrats d'adjoints de sécurité auprès des fonctionnaires actifs de la police nationale, les contrats de travail du programme nouveaux services-nouveaux emplois « contrat emploi-jeune » sont des contrats de droit privé soumis aux dispositions du Code du travail ; qu'il convient de rejeter l'exception d'incompétence soulevée par la partie défenderesse et de déclarer le conseil de prud'hommes compétent pour connaître de ces litiges ; que la cour d'appel par arrêt du 20 février 2006 a reconnu la compétence du conseil de prud'hommes pour connaître de ces demandes et a renvoyé les parties à mieux se pourvoir au fond ;
ALORS QUE la possibilité de conclure un contrat de travail de droit privé n'est ouverte aux collectivités territoriales que dans les cas spécifiés par la loi, desquels cas on ne compte pas la pérennisation par poursuite d'exécution du contrat de travail emploi-jeune de l'article L. 5134-9 du Code du travail, puisque, précisément, ce texte dispose que les collectivités territoriales ne peuvent conclure des contrats emploi-jeune qu'à durée exclusivement déterminée ; que dès lors qu'elle constatait que les contrats emploi-jeune convenus entre la commune de Pointe-Noire et dix jeunes salariés s'étaient poursuivis au-delà de leur terme, ces contrats avaient la nature d'engagements d'agents non-titulaires régis par le statut de la fonction publique territoriale, de sorte que les demandes de ces agents, portant sur les conditions de rupture de leurs contrats, relevaient de la compétence exclusive du tribunal administratif ; qu'en retenant néanmoins sa compétence pour statuer non seulement sur la requalification, mais en outre sur ses conséquences, la cour d'appel a violé, par fausse application, le texte susvisé, ensemble le principe général de la séparation des pouvoirs et l'article 13 de la loi des 16 et 24 août 1790.
DEUXIÈME MOYEN, SUBSIDIAIRE, DE CASSATION
Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir requalifié en contrats de travail de droit commun à durée indéterminée les contrats emploi-jeune convenus entre la commune de Pointe-Noire d'une part, et Mlle Kelly A..., M. Thierry X..., Mme Sylvie B..., Mme Marie-France C..., M. Eric Alban Y..., Mlle Bénédicte Fernande D..., M. Dany F..., Mlle Ferdine Donatien F..., Mlle Franciane Sidoine E... et M. Didier Z... d'autre part ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'il résulte des dispositions de l'article L. 122-3-10 (ancien) du Code du travail que si la relation de travail se poursuit après l'échéance du terme du contrat, celui-ci devient un contrat à durée indéterminée ; qu'en l'occurrence, les salariés intimés soutiennent qu'à l'échéance du terme de leurs contrats de travail à durée déterminée, emploi-jeune, ceux-ci, par la volonté de la commune de Pointe-Noire, ont été reconduits, dans un premier temps, pour trois mois puis se sont poursuivis faute de rupture formalisée par l'employeur qui s'était placé, en ce qui concerne les salariés intimés, dans l'attente d'une approbation de l'administration pour maintenir ces emplois dans une durée déterminée, comme l'y autorisait la loi, pendant trois années supplémentaires ; que dès lors, la seule poursuite des contrats emploi-jeune pendant trois mois audelà du terme final de la relation de travail, sans acte de rupture, rend applicable le texte d'ordre public susvisé quand bien même l'employeur serait, comme ici, une collectivité territoriale ; que dans l'hypothèse de cette poursuite à durée devenue indéterminée, il aurait appartenu à la commune de Pointe-Noire de considérer les situations de chacun des salariés puisqu'au regard du droit public positif, la possibilité de maintenir des contrats de droit privé au sein de la collectivité territoriale n'est plus formellement exclue ; qu'en conséquence, il y a lieu de considérer que les contrats de travail à durée déterminée des dix salariés se sont poursuivis au-delà de leur terme et sont de ce seul fait requalifiés en contrats à durée indéterminée de droit commun ; que le jugement sera confirmé sur ce point ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QU'il ressort des éléments du débat, notamment des fiches de paie pour la période allant du 1er janvier 2004 au 30 avril 2004, que les salariés rapportent la preuve d'une relation salariale dûment établie au-delà de la date d'expiration de leur contrat à durée déterminée « emploi-jeune » ; que dans la réplique de la commune de Pointe-Noire, qui tente de rendre responsables les requérants de la présente instance, de la non poursuite de leurs contrats de travail, il ressort que, selon extrait du procès verbal de la commune en date du 30 janvier 2004, tous les pouvoirs avaient été donnés à Monsieur le Maire pour la conclusion d'un contrat d'une durée maximale de trois mois, et non trois ans comme semble l'affirmer la commune ; que la commune de Pointe-Noire n'a pas cru devoir donner suite au courrier du 9 mars 2004 du préfet de région qui demandait des éléments d'information permettant de constater l'occupation effective par les personnes concernées des postes prévus par la convention initiale (fiche de poste – affectation notamment) ; que la commune de Pointe-Noire donne une explication chronologique des faits tendant à imputer aux demandeurs une certaine dérive de la situation qui aurait abouti à la rupture des contrats de travail, mais n'en rapporte pas la preuve ; que les contrats sont soumis aux dispositions du Code du travail relatives à la conclusion, l'exécution et la rupture, y compris lorsque l'employeur est un organisme de droit public ; qu'il s'en évince qu'en application de l'article L. 122-3-10 du Code du travail, la poursuite du contrat au-delà de son échéance le transforme automatiquement en contrat à durée indéterminée ; qu'attendu les dispositions des articles L. 122-2-10 et L. 122-3-13 du Code du travail, le conseil dit et juge de la requalification des contrats de travail à durée déterminée en contrats de travail à durée indéterminée pour l'ensemble des requérants et de la poursuite de leurs activités au sein de la commune de Pointe-Noire ;
ALORS QUE l'article L. 5134-9 du Code du travail n'autorise les collectivités territoriales à conclure des contrats aidés emploi-jeune que si ces contrats sont à durée déterminée ; qu'en requalifiant les contrats emploijeune convenus entre la commune de Pointe-Noire et dix jeunes salariés en contrats de droit commun à durée indéterminée du seul fait que ces contrats se sont poursuivis au-delà de leur terme, la cour d'appel a violé, par refus d'application, le texte susvisé.
TROISIÈME MOYEN, SUBSIDIAIRE, DE CASSATION
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir alloué la somme de 10. 000 € de dommages et intérêts à Mlle Kelly A..., à M. Thierry X..., à Mme Sylvie B..., à Mme Marie-France C..., à M. Eric Alban Y..., à Mlle Bénédicte Fernande D..., à M. Dany F..., à Mlle Ferdine Donatien F..., à Mlle Franciane Sidoine E... et à M. Didier Z... ;
AUX MOTIFS QUE, se plaçant sous l'empire des dispositions de l'article L. 122-14-4 (ancien) du Code du travail (ancienneté de plus de deux années et collectivité employant au moins dix salariés) et considérant à juste titre que la rupture des contrats de travail devenus à durée indéterminée par pérennisation de contrats emploi-jeunes de l'article L. 322-4-20 (ancien) du Code du travail est intervenue sans que la cause en ait été légalement énoncée par l'employeur et sans que la procédure préalable ait été respectée par celui-ci, les salariés intimés demandent à la cour d'être indemnisés des conséquences de cette rupture en l'analysant en un licenciement illégitime et irrégulier ; que la commune de Pointe-Noire met, subsidiairement, en évidence le caractère exorbitant des demandes présentées par les intimés et sollicite leur réduction, tout en concluant principalement au rejet ; que les montants sollicités à ce titre et l'application du minimum indemnitaire prévu par le texte applicable (environ 5 à 6. 000 € en moyenne), la cour se doit de prendre en compte l'absence d'éléments complémentaires susceptibles de qualifier le préjudice subi par les jeunes salariés qui ne peuvent, dans ce cadre procédural de requalification des contrats, demander leur réintégration ; qu'il convient donc de tenir compte des circonstances propres au présent dossier ; qu'en effet, force est de constater que la commune de Pointe-Noire, après avoir employé ces jeunes salariés pendant cinq ans, en se conformant aux termes du contrat aidé, a cherché réellement à les proroger en accord avec la loi et l'autorité administrative, certes sous la pression de mouvements revendicatifs, mais aussi par des prises de positions objectives (maintien des contrats pendant trois mois dans l'attente du feu vert de la préfecture) et que les quelques embauches possibles sous une autre forme contractuelle ont été faites pour d'autres salariés issus d'emploi-jeune ; que pour tenir compte de cette attitude de l'employeur mais aussi du préjudice réel nécessairement subi par les jeunes salariés intimés dans l'attente légitime de pérennisation de la relation contractuelle les liant à la collectivité territoriale, la cour, par voie de réformation de la décision entreprise, dit qu'ils doivent être indemnisés par l'octroi à chacun de la somme de 10. 000 € à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article L. 122-14-4 du Code du travail, étant observé que les sommes réclamées à ce titre en appel ont été présentées de manière globale par les salariés qui se sont abstenu de véritablement les expliciter quant à leurs composantes ;
ALORS QUE l'article L. 5134-18 du Code du travail dispose que la dénonciation du contrat emploi-jeune du fait de son non-respect par l'employeur ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts correspondant au préjudice subi ; qu'en allouant des dommages et intérêts à dix salariés dont les contrats emploijeune avaient été requalifiés de contrats à durée indéterminée en se fondant sur l'article L. 1235-3 (L. 122-14-4 ancien) du Code du travail, la cour d'appel a violé, par refus d'application, le texte susvisé ;
ALORS QUE l'article L. 5134-18 du Code du travail dispose que la dénonciation du contrat emploi-jeune du fait de son non-respect par l'employeur ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts correspondant au préjudice subi ; qu'en allouant des dommages et intérêts à dix salariés dont les contrats emploijeune avaient été requalifiés de contrats à durée indéterminée sans préciser la nature et l'étendue du préjudice subi par ces salariés, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé, ensemble l'article 9 du Code de procédure civile.