LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 4 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 ;
Attendu que lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de la circulation, chaque conducteur a droit à l'indemnisation des dommages qu'il a subis, sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice ; qu'il appartient alors au juge d'apprécier souverainement si cette faute a pour effet de limiter son droit à indemnisation ou de l'exclure ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... circulait au volant de son scooter lorsqu'il a chuté sur la chaussée et a été heurté par un camion, assuré auprès de la société Axa France IARD (l'assureur) ; que M. X..., amputé d'une jambe, a été placé sous l'administration légale de sa mère, Mme Y..., en raison de séquelles psychologiques ; que celle-ci, agissant en qualité d'administratrice légale sous contrôle judiciaire des biens de son fils, a assigné l'assureur devant un tribunal de grande instance en indemnisation des préjudices subis ;
Attendu que pour débouter Mme Y..., ès qualités, de sa demande en indemnisation, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que le cumul des fautes de M. X... est la cause exclusive de l'accident ce qui le prive de tout droit à indemnisation ; que le déport du camion qui n'aurait pas respecté sa voie de circulation est infirmé par les déclarations du témoin et ne résulte d'aucune pièce de la procédure pénale ; que dès lors, les circonstances de cet accident sont bien établies ; qu'en conséquence, la responsabilité de M. X... dans l'accident survenu le 16 mai 2000 est entière ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle n'avait pas à rechercher si la faute du conducteur victime était la cause exclusive de l'accident et ni à prendre en considération le comportement de l'autre conducteur impliqué, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 avril 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Papeete ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Papeete, autrement composée ;
Condamne la société Axa France IARD aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Axa France IARD ; la condamne à payer la somme de 2 500 euros à Mme Y... en qualité d'administratrice légale sous contrôle judiciaire de son fils ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept octobre deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour Mme Y...
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande en indemnisation de Madame Y..., agissant en qualité d'administrateur légal sous contrôle judiciaire des biens de son fils, Monsieur Arnaud X..., victime d'un accident de la circulation ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE le fait que Arnaud X... ait tenté de s'accrocher au véhicule de gauche démontre qu'il ne circulait pas sur une voie de circulation mais se faufilait entre les véhicules, comme il l'a reconnu ; qu'or le fait de circuler entre deux files est contraire au code de la route, comme le rappelle justement la compagnie AXA, qui cite l'article 9 de la délibération du 24 juin 1985, aux termes de laquelle "sur les routes à plus de deux voies, lorsque la circulation, en raison de sa densité, s'établit en files ininterrompues sur toutes les voies, les conducteurs doivent rester dans leur file ; qu'ils ne peuvent en changer que pour préparer un changement de direction .... " ; qu'en l'espèce, il est établi que la circulation était dense, que Arnaud X... ne changeait pas de direction mais cherchait à gagner du temps en effectuant un dépassement en se faufilant entre deux files de véhicules au mépris des dispositions ci-dessus ; que de plus tout conducteur doit à tout moment rester maître de sa vitesse et de son véhicule ; que le fait de porter une rame devant lui, qui n'était pas fixée à l'engin et qu'il devait donc maintenir entre ses jambes d'une manière ou d'une autre, et dont il reconnaît qu'elle dépassait à droite, est de nature à faire perdre au conducteur du scooter la maîtrise de son véhicule (même s'il n'est pas établi formellement que c'est la rame qui a accroché le camion et a déséquilibré la victime) ; qu'il s'ensuit que c'est sa perte de maîtrise de son engin qui l'a fait chuter sous le camion ; que ce cumul de fautes de Arnaud X... (non respect des règles relatives aux voies de circulation, défaut de maîtrise à cause de la rame) est la cause exclusive de l'accident ce qui le prive de tout droit à indemnisation ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU' il résulte des pièces versées à la procédure, et notamment des déclarations des parties, du témoin et du croquis joint, que Monsieur X... circulait à vive allure à bord de son scooter, sur l'avant duquel il avait entreposé une rame, lorsqu'il a entrepris le dépassement de la file de droite, passant ainsi entre deux files de véhicules ; que sa rame qui dépassait sur le côté droit a heurté le camion et a entraîné le déséquilibre du conducteur ; que Monsieur X... a entrepris une manoeuvre de dépassement dangereuse à l'origine directe de sa chute, puis du choc par le camion qui arrivait ; qu'il n'a pas pris les précautions nécessaires alors, d'une part, que la circulation était dense, et d'autre part, qu'il tenait une rame installée à l'avant de son engin et qui dépassait légèrement sur le côté droit ; qu'il a précisé dans ses déclarations, ainsi que le chauffeur du camion l'a confirmé, que cette rame a touché le camion sur sa partie latérale gauche ; que le déport du camion qui n'aurait pas respecté sa voie de circulation est infirmé par les déclarations du témoin et ne résulte d'aucune pièce de la procédure pénale ; que dès lors, les circonstances de cet accident sont bien établies ; qu'en conséquence, la responsabilité de Monsieur X... dans l'accident survenu le 16 mai 2000 est entière ; que les fautes à la charge du conducteur du scooter sont la cause exclusive du dommage et sont de nature à exclure tout droit à indemnisation ; qu'il y a lieu, par conséquent, de rejeter les demandes de Monsieur X... ;
ALORS QUE lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de la circulation, chaque conducteur a droit à l'indemnisation des dommages qu'il a subis, sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice ; qu'il appartient alors au juge d'apprécier si cette faute a pour effet de limiter l'indemnisation ou de l'exclure ; que pour débouter Madame Y..., agissant en qualité d'administrateur légal sous contrôle judiciaire des biens de son fils, Monsieur Arnaud X..., de sa demande en indemnisation du préjudice causé par l'accident de ce dernier, la Cour d'appel a énoncé qu'il n'était pas démontré que le conducteur de l'autre véhicule impliqué dans l'accident ait commis une faute, que la faute de la victime était la cause exclusive de l'accident et qu'elle était de nature à exclure intégralement son droit à indemnisation ; qu'en statuant comme elle l'a fait alors qu'elle n'avait pas à prendre en considération le comportement de l'autre conducteur impliqué, et qu'elle n'avait pas non plus à rechercher si la faute du conducteur victime était la cause exclusive de l'accident, la Cour d'appel a violé l'article 4 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes des accidents de la circulation.