LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 552-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Attendu que le premier président, saisi de l'appel d'une ordonnance du juge des libertés et de la détention statuant sur la prolongation de la rétention, doit statuer dans le délai de quarante-huit heures de sa saisine ;
Attendu que M. X..., de nationalité palestinienne, en situation irrégulière en France, qui avait fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière et d'une décision de maintien en rétention, a interjeté appel, le 19 avril 2008, à 12 heures 36 d'une ordonnance d'un juge des libertés et de la détention rejetant les exceptions de nullité qu'il avait soulevées et ordonnant la prolongation de sa rétention pour une durée de quinze jours ;
Attendu que, pour considérer que sa décision, rendue le 21 avril 2008 à 13 heures 45, l'avait été en temps utile et confirmer l'ordonnance, le premier président retient que l'audience avait débuté avant l'heure limite et avait été suspendue en raison de difficultés indépendantes de la volonté du magistrat en charge de l'audience, à savoir la mauvaise volonté de l'avocat qui avait manifestement mis tout en oeuvre pour paralyser l'audience afin d'arriver à expiration du délai accordé à la cour pour rendre sa décision ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'expiration du délai précité insusceptible d'interruption ou de suspension entraînait son dessaisissement et qu'il ne pouvait, en conséquence, se prononcer sur la prolongation de la rétention de M. X..., le premier président a violé le texte susvisé ;
Vu l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Et attendu que les délais légaux de rétention étant expirés, il ne reste plus rien à juger ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen qui est subsidiaire :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'ordonnance n° 167/2008 rendue le 21 avril 2008, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile et l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de la ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six octobre deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'ordonnance présidentielle attaquée d'avoir refuser de constater le dessaisissement de la juridiction et d'avoir dit que la prolongation de son maintien en rétention dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire prendra fin au plus tard le 3 mai 2008 à 15h10 ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'il convient de rappeler que l'audience de la cour - particulièrement chargée, avait débuté, en ce qui concerne les dossiers soutenus par Me Y..., vers 11h, d'autres affaires ayant été examinées auparavant ; que cet avocat avait été invité à plaider, la Cour lui rappelant toutefois les délais auxquels elle était tenue dans les cinq affaires appelées en ce qui le concerne, et notamment en ce qui concerne le dossier de M. X... ; que Me Y... ; que Me Y... a déclaré qu'il allait « prendre tout son temps », comme cela était son droit ; que la cour a alors interrompu l'examen des affaires de cet avocat, afin d'examiner d'autres affaires aussi urgentes et a suspendu l'audience à 11H30 pour la reprendre à 13 heures, afin de permettre que soient rendues les autres décisions dont elle était saisie ; que dans ces conditions, et compte tenu de la mauvaise volonté de cet auxiliaire de justice, qui a manifestement tout mis en oeuvre pour paralyser l'audience afin d'arriver à expiration du délai accordé à la Cour pour rendre sa décision, il y a lieu de considérer que la décision a bien été rendue en temps utile, l'audience ayant débuté avant l'heure limite, et ayant du être suspendue en raison de difficultés indépendantes de la volonté du magistrat en charge de ladite audience ;
ALORS QUE lorsque plus de 48 heures se sont écoulées depuis la déclaration d'appel de l'ordonnance autorisant la prolongation de la rétention de l'étranger, la juridiction est dessaisie et le juge ne peut plus statuer sur la demande ; qu'en l'espèce, le délai pour statuer sur l'appel de M. X... formé contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention le 19 avril 2008 à 12h36, expirait le 21 avril suivant, à la même heure ; qu'en statuant à 13h, après avoir refusé de constater son dessaisissement, motif pris que l'attitude du conseil de M. X... à l'audience justifiait de considérer qu'il avait été statué en temps utile, l'audience ayant commencé avant l'heure limite, le délégué du premier président a violé l'article L.552-9 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)IL EST FAIT GRIEF à l'ordonnance présidentielle confirmative attaquée d'avoir rejeté les exceptions de nullité soulevées par M. X... et dit que la prolongation de son maintien en rétention dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire prendra fin au plus tard le 3 mai 2008 à 15h10 ;
AUX MOTIFS ADOPTES QUE le défendeur est présent à l'audience et assisté de son avocat, d'où il résulte implicitement mais nécessairement qu'il a été satisfait aux dispositions de l'article R. 552-5 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susvisé concernant l'avis d'audience donné à l'intéressé et à son conseil ; que cet avis du reste, n'est pas soumis à un formalisme particulier, et peut être donné par tout moyen notamment verbal ou téléphonique ;
ALORS QUE la convocation écrite adressée par le greffe à l'étranger, qui l'avise du jour et de l'heure de l'audience fixée par le juge de la détention et des libertés pour statuer sur la requête du préfet en prolongation de la rétention, ne peut être établie qu'au vu et après réception de cette requête; qu'il résulte des motifs propres et adoptés de l'ordonnance attaquée que l'avis d'audience a été adressé à M. X... le 17 avril 2008 bien que la requête du Préfet a été enregistrée le 18 avril suivant ; qu'en considérant la convocation de l'étranger régulière dès lors que sa présence à l'audience suffisait à établir qu'il avait été informé, le délégué du premier président a violé l'article R.552-5 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.