La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/09/2010 | FRANCE | N°08-44063

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 septembre 2010, 08-44063


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé en qualité de directeur commercial par la société Y... Biotec à compter du 1er septembre 1998 ; que sa rémunération était composée d'un salaire fixe et d'une part variable ; que le 5 avril 2005, M. X... a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de rappel de salaires au titre de la rémunération variable et au titre d'heures supplémentaires ; qu'il a été licencié par lettre en date du 22 juillet 2005 et a ajouté à ses demandes initiales une de

mande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé en qualité de directeur commercial par la société Y... Biotec à compter du 1er septembre 1998 ; que sa rémunération était composée d'un salaire fixe et d'une part variable ; que le 5 avril 2005, M. X... a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de rappel de salaires au titre de la rémunération variable et au titre d'heures supplémentaires ; qu'il a été licencié par lettre en date du 22 juillet 2005 et a ajouté à ses demandes initiales une demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal de la société Y... Biotec :
Attendu que ce moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le premier moyen de pourvoi incident du salarié, pris en sa première branche :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement d'heures supplémentaires et d'indemnités pour travail dissimulé, alors, selon le moyen, que toute modification de son contrat de travail doit être acceptée par le salarié, l'acceptation ne pouvant résulter du simple silence du salarié ou de la poursuite du contrat de travail ; qu'en l'espèce, il expliquait qu'il n'avait jamais accepté la modification de son contrat de travail qui avait fait de lui un cadre de direction ; que pour lui dénier tout droit à paiement de ses heures supplémentaires, la cour d'appel s'est contentée de se fonder sur le fait qu'il n'avait pas contesté le titre et la fonction de cadre de direction qui lui avait été octroyés à compter de septembre 2002 ; qu'en statuant par un tel motif, inopérant à caractériser l'acceptation par le salarié des fonctions de cadre de direction, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil et de l'article L. 212-15-1, devenu l'article L. 3111-2, du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant relevé que M. X... qui exerçait depuis septembre 2002, les fonctions de directeur de la société Y... Biotec, avait une grande liberté dans son emploi du temps, un niveau très élevé de responsabilité puisqu'il était habilité à prendre des décisions de façon largement autonome et bénéficiait de la rémunération la plus élevée au sein de la filiale qu'il dirigeait, la cour d'appel a pu en déduire qu'il occupait un poste de cadre dirigeant et se trouvait ainsi exclu de la réglementation en matière d'heures supplémentaires pour la période postérieure au mois de septembre 2002 ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen du pourvoi incident :
Attendu que ce moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi incident, pris en sa seconde branche :
Vu l'article L. 3171-4 du code du travail ;
Attendu que pour débouter M. X... de l'intégralité de sa demande en paiement d'heures supplémentaires et d'indemnités pour travail dissimulé l'arrêt énonce, après avoir retenu que le salarié avait la qualité de cadre dirigeant depuis septembre 2002, qu'il se trouvait ainsi exclu de la réglementation en matières d'heures supplémentaires ;
Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs inopérants pour la période antérieure au mois de septembre 2002 alors que la demande du salarié portait sur des heures supplémentaires effectuées de 2001 à 2005, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé ;
Et sur le deuxième moyen du pourvoi incident :
Vu les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
Attendu que peuvent constituer un harcèlement moral des agissements ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts à titre de harcèlement moral, la cour d'appel a retenu que si les pièces qu'il produisait, établissaient un climat tendu entre la société Y... Biotec et son salarié, elles ne constituaient pas des agissements répétés pouvant constituer un harcèlement ; qu'en effet certaines pièces étaient inexploitables s'agissant de courriels en anglais non traduits ; qu'une autre pièce pouvait s'analyser en une consultation juridique non susceptible de caractériser un élément de harcèlement ; que deux attestations n'étaient pas circonstanciées tandis qu'une autre faisait référence à la notion de harcèlement mais relatait en fait les litiges opposant M. X... à la société Y... Biotec ;
Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs inopérants, alors que le salarié invoquait le refus persistant de son employeur de lui verser sa rémunération variable, des tentatives d'isolement, des actes de dénigrement, des menaces de licenciement et des injures, autant d'actes ayant selon lui gravement altéré sa santé physique et morale et compromis son avenir professionnel, la cour d'appel, qui devait rechercher si de tels éléments étaient établis et, dans l'affirmative, s'ils étaient de nature à faire présumer un harcèlement moral au sens des textes précités, n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires pour la période antérieure au mois de septembre 2002, et de sa demande de dommages-intérêts à titre de harcèlement moral, l'arrêt rendu le 12 juin 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne la société Y... Biotec aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Y... Biotec ; la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils pour la société Y... Biotec.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Y... BIOTEC à payer à M. Marc X..., en deniers ou quittances valables, la somme de 272. 373 € à titre de rappel de salaires pour les années 2002 à 2005 et la somme de 27. 237 € au titre des congés payés y afférents, outre la somme de 3. 000 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile et d'avoir condamné la société à remettre à M. X... un certificat de travail, des bulletins de salaires et une attestation ASSEDIC conformes au dispositions de l'arrêt,
AUX MOTIFS QUE « sur l'exécution du contrat de travail Sur les demandes formées au titre des rappels de salaire et commissions Que les seuls documents contractuels qui définissent la rémunération de M. Marc X... sont d'une part le contrat de travail en date du 14 août 1998 – pièce 1- (lequel prévoit que le salarié percevra une rémunération variable complémentaire correspondant à un intéressement de 10-20 % du salaire fixe en fonction des objectifs atteints, et qui seront fixés préalablement chaque année d'un commun accord) et d'autre part l'avenant régularisé le 31 janvier 2001 (pièce 52-54) ; qu'aucun document postérieur revêtu de la signature des parties n'est versé aux débats ; qu'en l'absence d'une autre convention entre les parties, conformément au contrat qui ne prévoyait que la seule modification des objectifs et non celle de la méthode de calcul, le seul accord permettant de procéder au calcul de la part variable est celui conclu le 31 janvier 2001 ; que sur la base des chiffres non contestés par les parties et selon la méthode de calcul retenue (cumulant le pourcentage en cas d'atteinte de l'objectif et le pourcentage additionnel en cas d'objectif dépassé) M. Marc X... est en droit de percevoir les sommes suivantes :

Année 2002 objectif résultat dépassement prime

Recherche 1. 392. 621 2. 602. 578 1. 209. 957 69. 061

Clinique 340. 876 548. 591 207. 715 8. 327

Total

77. 654

payé 17. 519 solde solde 60. 135

Année 2003 objectif résultat dépassement prime

Recherche 1. 392. 621 2. 446. 787 1. 054. 166 61. 272

Clinique 340. 876 447. 794 106. 918 5. 303

Total

66. 575

payé 1. 030 solde solde 65. 545

Année 2004 objectif résultat dépassement prime

Recherche 1. 392. 621 3. 113. 572 1. 720. 951 94. 611

Clinique 340. 876 662. 692 321. 816 11. 750

Total

106. 361

Payé 3. 192 solde solde 103. 169

Payés après la conciliation 5. 111 € solde 98. 058
Tableau prorata temporis à 6 mois (date mise à pied)

Année 2005 objectif De janvier à juin 2005 résultat De janvier à juin 2005 dépassement prime

Recherche 696. 310 1. 409. 614 713. 304 39. 947

Clinique 170. 130 483. 869 313. 439 10. 451

Total

50. 398

Payé 1. 763 solde solde 48. 635

(arrêt p. 4 et 5)
1°) ALORS QUE la société Y... BIOTEC faisait valoir, dans ses conclusions sur ce point demeurées sans réponse, qu'un accord était intervenu entre la société et M. X... quant aux augmentations de salaire et à la fixation des objectifs et bonus des années 2002 et 2003 et que les plans de rémunération variable définis pour ces deux années avaient été exécutés sans contestation du salarié jusqu'à sa saisine du Conseil de Prud'hommes en 2005, peu important, en l'absence de formalisme exigé, que ce dernier n'ait pas apposé sa signature sur les lettres de confirmation des accords conclus pour les années 2002 et 2003, adressées par l'employeur au début des années concernées ; qu'en se fondant, pour accorder à M. X... un rappel de rémunération variable au titre des années 2002 et 2003, sur la lettre de l'employeur du 31 janvier 2001 définissant la rémunération de M. X... pour la seule année 2001, au motif qu'il s'agissait de l'unique document revêtu de la signature du salarié, sans répondre au moyen précité de l'exposante qui excluait tout rappel dû au titre des années 2002 et 2003, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de Procédure Civile ;
2°) ALORS QUE lorsque le droit à une rémunération variable résulte du contrat de travail qui renvoie à un accord annuel entre l'employeur et le salarié la fixation de son taux et des objectifs à atteindre en fonction desquels elle est calculée, il incombe au juge, en l'absence d'accord entre les parties, de déterminer la rémunération variable en fonction des critères visés au contrat et des éléments de la cause ; qu'en se fondant, pour fixer la rémunération variable de M. X... pour les années 2004 et 2005, exclusivement sur l'accord conclu le 31 janvier 2001 relatif à la rémunération de la seule année 2001, sans rechercher si la rémunération variable de M. X..., dont la méthode de calcul n'a jamais varié, n'avait pas été fixée chaque année depuis l'embauche, en fonction des objectifs de chiffres d'affaires de la société qu'il contribuait lui-même à définir puisqu'il en était le directeur depuis 2002, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code Civil ;
3°) ALORS QUE le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi ; qu'en exigeant a posteriori, pour les années 2002 à 2005, le paiement d'un intéressement calculé sur des objectifs de chiffres d'affaires figés en 2001 et prévus pour cette seule année, quand il avait lui-même, en sa qualité de directeur de la société française Y... BIOTEC, fixé des objectifs de chiffres d'affaires de la société en augmentation au titre des années suivantes compte tenu de la forte croissance du marché, M. X... a manqué à son obligation d'exécuter le contrat de travail de bonne foi, en violation de l'article L 1222-1 (anciennement L 120-4) du Code du Travail, ensemble de l'article 1134 du Code Civil.
4°) ALORS QUE, SUBSIDIAIREMENT, la société Y... BIOTEC concluait que les tableaux communiqués par M. X... étaient entachés de multiples erreurs et contestait les chiffres qu'il présentait quant aux résultats « recherche » et « clinique » de la société au titre des années concernées et quant aux primes perçues et produisait son propre tableau récapitulatif (conclusions p. 10 et pièce 47) ; qu'en se fondant sur les seuls tableaux établis par le salarié et dont elle a entériné les chiffres en énonçant que ceux-ci n'étaient pas contestés, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du Code de Procédure Civile. Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande en paiement d'heures supplémentaires et d'indemnités pour travail dissimulé,
AUX MOTIFS QU'à partir de septembre 2002, M. Marc X... a pris le titre de directeur, que sa fiche de paie laisse apparaître et son nouveau titre et le nouveau coefficient de rémunération 880, soit le plus haut coefficient prévu par la convention collective ; que nonobstant le désaccord sur la partie variable de la rémunération, M. Marc X..., qui ne justifie d'aucune contestation du titre et de la fonction qui lui étaient conférées, percevait en moyenne 8333 euros bruts par mois ; qu'en qualité de directeur de filiale, M. Marc X... relevait des dispositions de l'article L 212-15-1 applicables aux cadres de direction ; qu'en effet il exerçait des responsabilités impliquant une grande autonomie dans l'organisation de son emploi du temps, était habilité à prendre des décisions de façon largement autonome et bénéficiait de la rémunération la plus élevée au sein de la filiale qu'il dirigeait ; que M. Marc X... n'était pas astreint à des horaires précis, qu'en sa qualité de directeur de filiale, il lui était loisible d'organiser son temps de travail ; qu'ainsi M. Marc X... se trouvait exclu de la réglementation en matière d'heures supplémentaires et partant de l'application des dispositions de l'article L. 324-10 du code du travail relatives au travail dissimulé,
1- ALORS QUE toute modification de son contrat de travail doit être acceptée par le salarié, l'acceptation ne pouvant résulter du simple silence du salarié ou de la poursuite du contrat de travail ; qu'en l'espèce, Monsieur X... expliquait qu'il n'avait jamais accepté la modification de son contrat de travail qui avait fait de lui un cadre de direction ; que pour dénier au salarié tout droit à paiement de ses heures supplémentaires, la Cour d'appel s'est contentée de se fonder sur le fait qu'il n'avait pas contesté le titre et la fonction de cadre de direction qui lui avait été octroyés à compter de septembre 2002 ; qu'en statuant par un tel motif, inopérant à caractériser l'acceptation par le salarié des fonctions de cadre de direction, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil et de l'article L. 212-15-1, devenu l'article 3111-2, du Code du travail.
2- ALORS, en tout état de cause, QUE le juge ne peut pas statuer par un motif inopérant ; qu'en l'espèce, Monsieur X... réclamait le paiement d'heures supplémentaires qu'il avait effectuées depuis 2001 ; qu'en se fondant sur le simple fait que le salarié soit devenu cadre de direction à compter de septembre 2002 pour le débouter de sa demande, motif impropre à écarter la demande de paiement d'heures supplémentaires correspondant à la période antérieure au mois de septembre 2002, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 212-1-1 et L. 212-5, devenus les articles L. 3171-4 et L. 3121-22, du Code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
AUX MOTIFS QU'en cas de litige relatif à l'application des articles L. 122-46 et L. 122-49 du code du travail, il appartient au salarié d'établir des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, que si les pièces produites par M. Marc X... établissent un climat tendu entre la SAS Y... BIOTEC et son salarié, elles ne constituent pas des agissements répétés pouvant constituer un harcèlement, qu'en effet les pièces 13-14-15-30-57 produites par M. Marc X... sont inexploitables s'agissant de courriels en anglais non traduits ; que la pièce 59 peut s'analyser en une consultation juridique non susceptible de caractériser un élément de harcèlement ; que l'attestation de Madame Z...- pièce 49- de quelques lignes est non circonstanciée ; qu'il en est de même en ce qui concerne l'attestation de Madame A...- pièce 7- ; que seule l'attestation de Madame B...- pièce 13- fait référence à la notion de harcèlement, mais relate en fait les litiges opposant M. Marc X... à la SAS Y... BIOTEC,
1- ALORS QUE le juge, saisi d'une demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral subi par le salarié, doit examiner l'ensemble des griefs invoqués au soutien de cette demande ; qu'en l'espèce, Monsieur X..., au soutien de sa demande, se plaignait de sanctions financières injustifiées et de tentatives d'isolement, d'ordres donnés impossibles à exécuter pour le mettre en défaut, d'une communication systématique des documents le concernant personnellement sur le fax collectif de l'entreprise, de menaces de licenciement et d'injures, autant d'éléments ayant gravement altéré sa santé physique et morale et compromis son avenir professionnel, produisant de nombreuses attestations et certificats médicaux au soutien de ses dires ; qu'en se contentant d'examiner une fraction très partielle des mails et attestations produites, sans tenir compte de l'ensemble des éléments établis par le salarié et sans examiner l'ensemble des griefs par lui invoqués pour vérifier s'ils n'étaient pas de nature à faire présumer un harcèlement moral, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-49 et L. 122-52, devenus les articles L. 1152-1 et L. 1154-1, du Code du travail.
2- ALORS, en tout état de cause, QUE l'attestation de Madame B..., visée par la Cour d'appel, témoignait de l'existence d'un harcèlement moral de Monsieur X... qui s'était traduit par un « isolement par son supérieur hiérarchique », puis par un « dénigrement de Marc X... auprès des personnes en Allemagne », par des « pressions et surcharge de travail » lesquelles se traduisaient par des « horaires injustifiés, objectifs intenables, attribution d'un matériel informatique incompatible », par des « sanctions injustifiées », par la relation d'un entretien particulièrement houleux au cours duquel le supérieur hiérarchique avait « dénigré Marc X... en lui faisant comprendre qu'il avait besoin d'un psychiatre », avait « poursuivi Marc X... dans le couloir avec un appareil photo et ce devant les personnes du service administratif » et avait informé le personnel du licenciement de Monsieur X... avant même qu'il n'en soit au courant, enfin que les mails de la direction visaient à « accabler Marc X... » pour « remettre en question l'image de Marc X... vis-à-vis de son équipe et avait pour but de le dénigrer », communication violente qui avait eu pour objectif de « mettre la pression à Marc X... pour le faire craquer (e-mails incendiaires et accusations) », la communication étant redevenue « correcte depuis son départ » ; qu'en jugeant pourtant qu'il n'y avait là que relation des litiges opposant Monsieur X... et son employeur, et non allégation d'agissements répétés pouvant constituer un harcèlement, la Cour d'appel a dénaturé cette attestation, violant ainsi l'article 1134 du Code civil.
3- ALORS, à tout le moins, QUE dans ses conclusions d'appel, Monsieur X... expliquait que les augmentations budgétées pour les années 2004 et 2005 avaient été accordées à tous les salariés à sa seule exception, produisant pour étayer ses dires les ordres de paiement de salaires annulés, ce qui avait constitué une sanction financière prohibée, au titre de laquelle il réclamait l'allocation d'une somme de 20. 408 € ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen déterminant des conclusions de l'exposant, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement ayant retenu que le licenciement de Monsieur X... était fondé sur une cause réelle et sérieuse,
AUX MOTIFS PROPRES QUE, sur l'inscription d'une provision comptable de 388. 700 euros sur la seule initiative de M. Marc X... et correspondant au montant estimé du litige avec la SAS MILTENVI BIOTEC, il n'est pas contesté que M. Marc X..., directeur commercial, a pris seul la décision d'inscrire dans les comptes consolidés de la société Française la provision litigieuse de 388. 770 euros correspondant aux sommes qui, selon lui, lui étaient dues par son employeur ; que, contrairement à ce que soutient M. Marc X..., cette décision ne relevait pas sa compétence mais de la seule responsabilité de la SAS en la personne de M. Stefan Y... son représentant légal ; que l'avenant au contrat de travail en date du 13. 9. 2002- pièce 2- est une délégation de pouvoir qui ne confère pas à M. Marc X... la possibilité d'inscrire dans les comptes de la société une telle provision ; que les conditions dans lesquelles cette provision a été inscrite dans les comptes 2004 a été immédiatement contestée par la SAS Y... BIOTEC ; que s'il apparaît souhaitable qu'une provision soit constituée en vue d'un litige, il appartient au seul représentant légal d'en déterminer le montant ; qu'en l'espèce la provision a été inscrite dans les comptes 2004, alors que l'instance prud'homales a été engagée en avril 2005 ; que le Président de la société ne pouvant approuver les comptes sollicitait par voie de requête auprès du Tribunal de Commerce le report de la tenue de l'assemblée destinée à approuver les comptes de l'exercice 2004 et le dépôt des comptes au Tribunal de Commerce (pièces 43 et 45) ; que de surcroît, s'agissant de l'expression d'un désaccord profond avec son employeur, M. Marc X... se devait d'en informer préalablement M. Y... ou d'attirer son attention sur ce point ; que M. Marc X... ne justifie pas d'avoir attiré l'attention du siège sur les comptes de reporting qui lui étaient adressés ; qu'en particulier, M. Marc X... qui a effectué cette provision en septembre 2004 ne justifie d'aucun courriel ou courrier circonstancié accompagnant l'envoi de ces documents ; qu'ainsi le grief visé à la lettre de licenciement est bien établi constitue une méconnaissance grave du lien de subordination et, partant, une cause réelle et sérieuse justifiant le licenciement sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres griefs allégués,
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'en vertu des articles L. 122-14-2 et L. 122-14-3 du Code du travail : « L'employeur est tenu d'énoncer le ou les motifs du licenciement dans la lettre de licenciement mentionnée à l'article L. 122-14-1 … » ; « En cas de litige, le Juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles … », que la lettre de licenciement sus-visée fait état de divers griefs invoqués par l'employeur qui se résument comme suit : « les difficultés relatives à l'inscription à votre seule initiative d'une provision comptable d'un montant de 388. 770 € au mois d'Avril 2005 et correspondant au litige que vous avez vous-même introduit à l'encontre de la société. Votre refus d'informer et de rendre compte de votre activité et sur la situation de la Société Française. Je citerai également la réunion du 29 juin 2005 à PARIS au cours de laquelle vous avez contesté la légitimité de ma présence et de ma visite en tant que président de la SAS Y... BIOTEC et vous êtes livré à des débordements totalement inacceptables en présence de Nadine B... et de Norbert C.... Les pressions très négatives que vous entretenez sur le personnel en diffusant au sein de celui-ci que le management de la Société basée en ALLEMAGNE emploierait des méthodes illégales et ne respecterait pas les lois locales » ; qu'il y a lieu de constater que ces griefs démontrent une mésentente certaine entre Monsieur X... et son employeur ; que les pièces produites dans les dossiers respectifs montrent que cette mésentente à conduit Monsieur X... à adopter une attitude qui a manifestement méconnu gravement son devoir de loyauté envers son employeur ; que les insinuations de Monsieur X... concernant la violation du droit français par la société mère, qui aurait engagé sa responsabilité, ne reposent sur aucun document sérieux produit à son dossier ; qu'il apparaît que Monsieur X... s'est servi de sa position dans l'entreprise pour amener ses subordonnés à faire pression sur son employeur, notamment en tentant de déclencher un mouvement de grève du personnel ; que les revendications émises à ce propos avaient pour effet de faire prendre en compte le conflit personnel que Monsieur X... avait engendré avec sa direction ; que de ce fait Monsieur X... a méconnu le lien de subordination qui le liait à son employeur ; se ce qui précède, il ressort que le Conseil considère que le licenciement de Monsieur X... revêt bien une cause réelle et sérieuse et qu'il sera débouté des demandes de ce chef,
1- ALORS QUE ne commet aucune faute le salarié qui demande au service comptabilité de l'entreprise d'inscrire dans les comptes une provision justifiée par un litige né ou à naître, dès lors que le choix final d'inscrire ou non la provision appartient en tout état de cause à l'employeur ; qu'en l'espèce, d'une part il s'évince des constatations de la Cour d'appel que la provision dont l'inscription avait été demandée par Monsieur X... était justifiée, la Cour ayant condamné l'employeur à payer au salarié la somme de 272. 373 € à titre de rappel de salaires, outre 27. 237 € au titre des congés payés afférents, soit une charge de 388. 770 € pour l'entreprise en incluant les charges patronales, d'autre part la Cour d'appel a constaté que le choix d'inscrire une telle provision dans les comptes de l'entreprise appartenait au seul employeur, qui l'avait finalement refusé ; qu'en jugeant pourtant que Monsieur X... avait commis une faute en demandant l'inscription d'une provision justifiée que son employeur pouvait en tout état de cause finalement refuser d'inscrire, la Cour d'appel a violé l'article L. 122-14-3, devenu l'article L. 1232-1, du Code du travail.
2- ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en jugeant d'une part que Monsieur Y... n'avait pas été informé de l'existence de la provision litigieuse par Monsieur X..., d'autre part que cette provision avait été « immédiatement contestée » par l'employeur, lequel avait refusé d'approuver les comptes, preuve qu'il avait été informé de l'existence de la provision, la Cour d'appel a entaché sa décision d'une irréductible contradiction de motifs, violant ainsi l'article 455 du Code de procédure civile.
3- ALORS, en tout état de cause, QU'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté d'une part que la provision litigieuse avait été inscrite dans les comptes de la société en septembre 2004 et que l'employeur l'avait « immédiatement contestée », preuve qu'il en avait eu immédiatement connaissance, d'autre part que la procédure de licenciement n'avait été engagée que le 19 juillet 2005 ; qu'en se fondant pourtant sur la seule prétendue faute relative à l'inscription de la provision, qui ne pouvait plus donner lieu à poursuites disciplinaires en juillet 2005, la Cour d'appel a violé l'article L. 122-44, devenu l'article L. 1332-4, du Code du travail.
4- ET ALORS QUE le juge ne peut statuer par voie de simple affirmation, sans préciser les documents sur lesquels il fonde son analyse ; qu'en jugeant que Monsieur X... aurait gravement manqué à son devoir de loyauté envers son employeur et aurait poussé les membres du personnel à la grève pour appuyer des revendications qui lui auraient été personnelles, sans prendre à aucun moment le soin de viser les documents permettant d'asseoir une telle affirmation, quand tous les salariés de l'entreprise témoignaient du contraire, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 122-14-3, devenu l'article L. 1232-1, du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-44063
Date de la décision : 28/09/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 juin 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 sep. 2010, pourvoi n°08-44063


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Hémery et Thomas-Raquin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.44063
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award