COUR DE CASSATION 09 CRD 073Audience publique du 14 juin 2010Prononcé au 20 septembre 2010
La commission nationale de réparation des détentions instituée par l'article 149-3 du code de procédure pénale, composée lors des débats de M. Breillat, président, M. Straehli, Mme Leroy-Gisssinger, conseiller référendaire, en présence de M. Charpenel, avocat général et avec l'assistance de Mme Bureau, greffier, a rendu la décision suivante :
INFIRMATION sur le recours formé par Brahim X..., Contre la décision du premier président de la cour d'appel de Douai en date du 20 octobre 2009 qui a déclaré sa requête irrecevable.
Les débats ayant eu lieu en audience publique le 14 juin 2010 le demandeur ne s'y étant pas opposé ;
Vu les dossiers de la procédure de réparation et de la procédure pénale ;
Vu les conclusions de Me Steclebout, avocat au barreau de Lille, représentant M. X... ;
Vu les conclusions de l'agent judiciaire du Trésor ;
Vu les conclusions de M. le procureur général près la Cour de cassation ;
Vu les conclusions en réponse de Me Steclebout ;
Vu la notification de la date de l'audience, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, au demandeur, à son avocat, à l'agent judiciaire du Trésor et à son avocat, un mois avant l'audience ;
Monsieur Brahim X... comparaît personnellement.
Sur le rapport de Mme le conseiller Leroy-Gissinger, les observations de M. X... comparant et de Me Couturier-Heller, avocat représentant l'agent judiciaire du Trésor, les conclusions de M. l'avocat général Charpenel, le demandeur ayant eu la parole en dernier ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi, la décision étant rendue en audience publique ;
LA COMMISSION NATIONALE DE REPARATION DES DETENTIONS,
Attendu que, par décision du 20 octobre 2009, le premier président de la cour d'appel de Douai, saisi par Brahim X... d'une requête en réparation du préjudice subi à raison d'une détention provisoire effectuée du 6 janvier 2007 au 25 janvier 2007, pour des faits pour lesquels il a bénéficié d'une ordonnance de non-lieu le 14 mai 2008, a déclaré la requête irrecevable, au motif qu'elle avait été reçue au greffe le 26 novembre 2008, alors que le délai pour former la demande d'indemnisation expirait le 24 novembre 2008 ;
Attendu que M. X..., par l'intermédiaire de son avocat, a formé un recours régulier contre cette décision, en soutenant que la requête était recevable pour avoir été expédiée avant le 24 novembre 2008 et en sollicitant l'octroi de la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice, toutes causes confondues, outre celle de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre du recours exercé devant la Commission nationale ;
Attendu que l'agent judiciaire du Trésor a conclu au rejet du recours et, subsidiairement, à l'allocation de la somme de 2 000 euros au titre du préjudice moral et de celle de 500 euros en réparation du préjudice matériel du requérant ;
Attendu que l'avocat général, qui a conclu à la recevabilité de la requête, a estimé que le préjudice de M. X... serait justement réparé par l'octroi d'une somme de 100 euros par jour de détention ;
Sur la recevabilité de la requête :
Attendu que, selon l'article 149-4 du code de procédure pénale, le premier président de la cour d'appel et la Commission nationale statuent en tant que juridictions civiles ; que selon l'article R. 26 du même code, la requête en indemnisation est remise ou adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; qu'aux termes de l'article 668 du code de procédure civile, la date de notification par voie postale est, à l'égard de celui qui y procède, celle de l'expédition ;
Attendu que M. X... justifie qu'il a formé sa requête en indemnisation par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, expédiée le 22 novembre 2008, soit avant l'expiration du délai pour former cette demande ;
D'où il suit que le requête est recevable :
Sur le fond :
Vu les articles 149 et 150 du code de procédure pénale :
Attendu qu'une indemnité est accordée, à sa demande, à la personne ayant fait l'objet d'une détention provisoire terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive ; que cette indemnité est allouée en vue de réparer intégralement le préjudice personnel, matériel et moral directement causé par la privation de liberté ;
Attendu que M. X..., qui a été détenu pendant vingt jours, était âgé de 23 ans au moment de sa mise en détention, qu'il demeurait chez ses parents et travaillait et qu'il n'avait jamais été incarcéré ; qu'en considération de ces éléments et au vu des justificatifs produits, relatifs à sa situation professionnelle, il y a lieu de lui allouer la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice personnel et celle de 500 euros au titre de son préjudice matériel ;
Sur la demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile :
Attendu qu'il convient d'allouer à M. X... la somme de 1 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens qu'il a encourus ;
PAR CES MOTIFS :
ACCUEILLE le recours de Brahim X..., et statuant à nouveau ;
DECLARE la requête en indemnisation recevable ;
ALLOUE à Brahim X... la somme de 5 500 euros (cinq mille cinq cents euros) en réparation de ses préjudices ;
Lui ALLOUE la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
LAISSE les dépens à la charge du Trésor public ;
Ainsi fait, jugé et prononcé en audience publique le 20 septembre 2010 par le président de la commission nationale de réparation des détentions ;
En foi de quoi la présente décision a été signée par le président, le rapporteur et le greffier présent lors des débats et du prononcé.