LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 14 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Stylor a fait l'objet d'une décision de dissolution anticipée, Mme X... étant désignée liquidatrice ; qu'après la clôture de la liquidation, la société Montblanc France (la société Montblanc) a fait assigner Mme X..., prise en sa qualité de liquidatrice de la société Stylor, et demandé qu'elle soit condamnée à lui payer un certaine somme à titre de dommages-intérêts ; que le tribunal a accueilli cette demande en retenant que Mme X... avait, dans l'exercice de ses fonctions de liquidatrice de la société Stylor, commis une faute en ne payant pas une dette de cette société envers la société Montblanc ;
Attendu que pour confirmer cette décision, l'arrêt, après avoir énoncé que le liquidateur amiable est en vertu des dispositions de l'article L. 237-12 du code de commerce responsable à titre personnel des fautes commises dans le cadre de ses fonctions, retient que la circonstance que l'assignation vise les fonctions occupées par Mme X... et que le jugement condamne personnellement Mme X... pour des fautes commises dans le cadre de ces fonctions n'est donc pas une cause de nullité de l'assignation et du jugement, étant en outre observé que le dispositif de l'assignation vise la condamnation de Mme X... à titre personnel, et non ès qualités, et que Mme X... a conclu devant le tribunal comme devant la cour d'appel à titre personnel ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que l'assignation avait été délivrée à Mme X... prise en sa qualité de liquidatrice de la société Stylor, ce dont il résultait que Mme X... n'était pas personnellement partie à l'instance, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 mai 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare irrecevable la demande de la société Montblanc France ;
Condamne la société Montblanc France aux dépens exposés tant devant la Cour de cassation que devant les juges du fond ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze septembre deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour Mme X....
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir jugé recevable la demande d'indemnisation formée par la Société MONTBLANC FRANCE à l'encontre de Madame Martine X..., et d'avoir en conséquence condamné personnellement Madame X... à payer à la Société MONTBLANC FRANCE la somme de 56.055,03 euros ;
Aux motifs que «le liquidateur amiable est en vertu des dispositions de l'article L. 237-12 du Code de commerce responsable à titre personnel des fautes commises dans le cadre de ses fonctions ; que la circonstance que l'assignation vise les fonctions occupées par Mme X... et que le jugement condamne personnellement Mme X... pour des fautes commises dans le cadre de ces fonctions n'est donc pas une cause de nullité de l'assignation et du jugement, étant en outre observé d'une part que le dispositif de l'assignation visait la condamnation de M. X... à titre personnel, et non ès-qualité et, d'autre part, que Mme X... a conclu devant le Tribunal de commerce comme devant la Cour à titre personnel» ;
Alors que, de première part, sort des limites du litige le juge qui, saisi d'une action dirigée contre un liquidateur amiable, pris en cette qualité, le condamne à titre personnel ; qu'en écartant la fin de non-recevoir soulevée par Mme X..., tirée de l'irrecevabilité de la demande de condamnation à titre personnel formée à son encontre par la Société MONTBLANC FRANCE qui l'avait assignée en sa qualité de liquidatrice de la Société STYLOR, au motif que « la circonstance que l'assignation vise les fonctions occupées par Mme X... et que le jugement condamne personnellement Mme X... pour des fautes commises dans le cadre de ces fonctions n'est pas une cause de nullité de l'assignation et du jugement », alors qu'elle constatait dans les motifs de son arrêt que « par acte du 18 décembre 2006 la Société MONTBLANC a fait assigner Mme X..., prise en sa qualité de liquidatrice associée de la Société STYLOR, pour la voir condamner au paiement de la somme de 56.055,03 euros à titre de dommages-intérêts», la Cour d'appel, qui est sortie des limites du litige, a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
Alors que, de seconde part, nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée ; qu'en rejetant la fin de non-recevoir soulevée par Mme X..., tirée de l'irrecevabilité de la demande de condamnation à titre personnel formée à son encontre par la Société MONTBLANC FRANCE qui l'avait assignée en sa qualité de liquidatrice de la Société STYLOR, et en condamnant personnellement Mme X..., à la suite des premiers juges, tout en constatant non seulement que «l'assignation vise les fonctions occupées par Mme X...» mais encore que «par acte du 18 décembre 2006 la Société MONTBLANC a fait assigner Mme X..., prise en sa qualité de liquidatrice associée de la Société STYLOR (…) pour la voir condamner au paiement de la somme de 56.055,03 euros à titre de dommages-intérêts», la Cour d'appel, qui a méconnu les droits de la défense, a violé l'article 14 du Code de procédure civile ;
Alors que, de troisième part, est irrecevable toute prétention émise contre une personne dépourvue du droit d'agir ; qu'en écartant la fin de non-recevoir soulevée par Mme X..., tirée de l'irrecevabilité de la demande de condamnation à titre personnel formée à son encontre par la Société MONTBLANC FRANCE qui l'avait assignée en sa qualité de liquidatrice de la Société STYLOR, au motif que «la circonstance que l'assignation vise les fonctions occupées par Mme X... et que le jugement condamne personnellement Mme X... pour des fautes commises dans le cadre de ces fonctions n'est pas une cause de nullité de l'assignation et du jugement », alors qu'elle constatait que « l'assignation vise les fonctions occupées par Mme X...», et plus précisément encore que « par acte du 18 décembre 2006, la Société MONTBLANC a fait assigner Mme X..., prise en sa qualité de liquidatrice associée de la Société STYLOR (…) pour la voir condamner au paiement de la somme de 56.055,03 euros à titre de dommages-intérêts», la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 31, 32 et 122 du Code de procédure civile ;
Alors que, de quatrième part, subsidiairement et en tout état de cause, Mme X... demandait dans ses conclusions à la Cour d'appel non seulement d'« annuler le jugement rendu le 1er février 2008 par le Tribunal de commerce de Grenoble en ce qu'il a condamné Mme X..., en son nom personnel, à payer à la SA MONTBLANC FRANCE une somme de 56.055,03 euros», mais encore de «dire que les demandes de la SA MONTBLANC FRANCE dirigées par son assignation introductive d'instance à l'encontre de Mme X... ès-qualité de liquidatrice de la SARL STYLOR, sont irrecevables à l'encontre de Mme X... prise en son nom personnel » ; qu'en condamnant Mme X... au motif que la circonstance selon laquelle l'assignation la visait en sa qualité de liquidatrice de la Société STYLOR et selon laquelle elle était personnellement condamnée n'était « pas une cause de nullité de l'assignation et du jugement », la Cour d'appel, qui a en tout état de cause omis de répondre au moyen d'irrecevabilité soulevé dans les écritures délaissées de Mme X..., a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
Alors que, de cinquième part, les juges ne peuvent dénaturer les actes de procédure de la cause ; que le dispositif d'une assignation a pour seule fonction d'énoncer les chefs de demande, indépendamment de toute précision de la qualité en laquelle son destinataire est poursuivi ; qu'en rejetant la fin de non-recevoir soulevée par Mme X... au motif que « le dispositif de l'assignation visait la condamnation de M. X... à titre personnel, et non ès-qualité », alors que l'assignation du 18 décembre 2006 était donnée à « Madame X... (…) prise en sa qualité de liquidatrice associée de la SARL STYLOR », et que la Société MONBLANC FRANCE y concluait l'exposé des causes de sa demande par l'indication « en raison de cette faute de Mme X..., en tant que liquidatrice de la Société STYLOR et de M. X..., en tant qu'associé de cette société, et conformément aux dispositions de l'article L. 237-12 du Code de commerce, la Société MONTBLANC est bien fondée à demander à ce qu'ils soient condamnés in solidum au paiement de la somme de 56.055,03 euros à titre de dommagesintérêts », la Cour d'appel a dénaturé l'assignation qu'a fait délivrer le 18 décembre 2006 la Société MONTBLANC FRANCE à Mme X..., en violation de l'article 4 du Code de procédure civile ;
Alors que, de sixième part, est irrecevable toute prétention émise contre une personne dépourvue du droit d'agir ; qu'en rejetant la fin de non-recevoir soulevée par Mme X... au motif que «Mme X... a conclu devant le Tribunal de commerce comme devant la Cour à titre personnel », alors qu'elle constatait par ailleurs que «l'assignation vise les fonctions occupées par Mme X... » et plus précisément encore que «la Société MONTBLANC a fait assigner Mme X..., prise en sa qualité de liquidatrice associée de la Société STYLOR (…) pour la voir condamner au paiement de la somme de 56.055,03 euros à titre de dommagesintérêts», ce qui impliquait que Mme X... défendait nécessairement en qualité de liquidatrice de la Société STYLOR et non en son nom personnel, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 31, 32 et 122 du Code de procédure civile.