LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique,3 octobre 2006, pourvoi n° U 04-17.628), que la société Cerruti, concessionnaire de la société Nissan France, a consenti à la société Garage Reybert (la société Reybert) un contrat de sous-concession à durée indéterminée ; que, le 11 février 1999, la société Cerruti a notifié au sous-concessionnaire sa décision de mettre fin au contrat avec un préavis de 24 mois ; que le 3 février 2000, la société Cerruti a cédé son fonds de commerce à la société CAP Janet automobiles (la société Cap Janet) qui, le 5 février 2001, a confirmé à la société Reybert la résiliation de son contrat à la date du 11 février 2001 ; que, soutenant que la société Cap Janet avait mis fin de manière fautive à une nouvelle convention conclue tacitement avec elle postérieurement à la cession, la société Reybert l'a assignée en paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que pour condamner la société Cap Janet à payer à la société Reybert la somme de 150 000 euros à titre de dommages-intérêts, l'arrêt retient que si le contrat de sous-concession a été cédé à celle-ci lors de son acquisition du fonds de commerce de la société Cerruti, il n'était pas justifié que le sous-concessionnaire ait été avisé de cette cession et l'ait acceptée, l'acceptation obligatoire du cédé ne pouvant résulter, contrairement à celle du concessionnaire, de la poursuite de la relation commerciale laquelle ne constitue pas une acceptation non équivoque d'une cession non dénoncée ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la société Reybert, qui aurait poursuivi l'exécution du contrat de sous-concession aux mêmes conditions qu'auparavant pendant plusieurs mois avec la société Cerruti, n'aurait pas accepté tacitement la cession du contrat, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le19 février 2009 , entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;
Condamne la société Garage Reybert aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société Cap Janet automobiles la somme de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze septembre deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire, avocat aux Conseils pour la société Cap Janet automobiles.
PRIS DE CE QUE l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation d'un précédent arrêt de la même Cour d'appel du 13 janvier 2004, a condamné la société CAP JANET AUTOMOBILES à payer à la société GARAGE REYBERT une somme de 150 000 euros à titre de dommages et intérêts et 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « si la cession d'un fonds de commerce n'implique pas nécessairement la cession de tous les contrats liés audit fonds, il est certain que la S.A. CERRUTI ne pouvait plus, à compter de la cession de ce fonds, honorer le contrat de sous-concession qui la liait au GARAGE REYBERT puisqu 'elle perdait sa qualité de concessionnaire NISSAN mais que la seule perte de cette qualité ne peut suffire à caractériser la cession du contrat et l'acceptation de cette cession par son co-contractant ; que cependant il ne peut être sérieusement contesté que le contrat de sous-concessionnnaire est un élément essentiel du fonds de commerce et qu'il a donc été cédé à l'intimée lors de la cession du fonds de commerce et que cette cession a été tacitement acceptée par elle puisqu'elle a continué à honorer ce contrat et en revendique aujourd'hui encore le bénéfice ; que par contre il n 'est nullement justifié que le cédé, c'est-à-dire le sous-concessionnaire, ait été avisé de la cession de ce contrat et l'ait acceptée ; que l'acceptation du cédé, obligatoire en application des dispositions de l'article 1134 du Code civil, ne peut résulter, contrairement à celle du cessionnaire, de la poursuite de la relation commerciale qui ne constitue pas une acceptation non équivoque d'une cession non dénoncée ; que dès lors, et en l'absence de cession acceptée par le sous-concessionnaire, la cession n'était pas opposable à ce dernier, et la SA CAP JANET ne pouvait prétendre reprendre à son compte l'acte de résiliation du 11 février 1999 ; qu'en conséquence, la résiliation des relations commerciales qu'elle avait liées avec la Sari GARAGE REYBERT a présenté un caractère brusque et non motivé qui justifie l'indemnisation du préjudice subi par cette société en application de l'article 1147 du Code civil, l'intimée n 'ayant pas expressément demandé à la Cour de déclarer sa demande irrecevable et ayant répliqué sur ce fondement contractuel » ;
ALORS QUE, après avoir énoncé que le contrat de sous-concessionnaire a été cédé à la société CAP JANET AUTOMOBILES lors de la cession du fonds de commerce et que cette cession a été « tacitement acceptée » par cette société puisqu'elle a continué à honorer ce contrat et en revendique aujourd'hui le bénéfice -, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision en se bornant à déclarer, pour justifier son allégation, « qu'il n 'est nullement justifié que le cédé, c'est-à-dire le sous-concessionnaire, ait été avisé de la cession de ce contrat et l'ait accepté » -, « que l'acceptation du cédé, obligatoire en matière de dispositions de l'article 1134 du Code civil, ne peut résulter, contrairement à celle du concessionnaire, de la poursuite de la relation commerciale qui ne constitue pas une acceptation non équivoque d'une cession non dénoncée », alors que, ainsi que l'a fait valoir la société CAP JANET AUTOMOBILES dans ses conclusions délaissées : « tout en exigeant le consentement du co-contractant cédé au transfert du contrat, la jurisprudence admet que celui-ci soit tacite à condition que la manifestation de sa volonté soit certaine et non équivoque, ... que le consentement implicite de la Sari REYBERT est indéniable du fait de la poursuite, sans réserve et des mois durant, de l'exécution du contrat de sous-concession -, le règlement et l'encaissement des factures mensuelles des commissions et de fournitures - la demande d'intervention des services techniques du cessionnaire, ... que la cession du contrat est acceptée sans aucun doute par la société GARAGE REYBERT puisqu 'elle a poursuivi la relation contractuelle qu 'elle entretenait précédemment avec la société CERR UTI et ce aux mêmes conditions préalablement convenues avec cette dernière, précisément plus de douze mois ...» ; qu'en statuant au regard desdites conclusions par la simple affirmation que « la poursuite des relations commerciales peut constituer une acceptation non équivoque d'une cession », la Cour d'appel a assurément privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;
ALORS QUE, en tout état de cause,, et dans la mesure où l'arrêt attaqué aurait voulu affirmer en principe que l'acceptation du cédé ne peut, en tout état de cause, « résulter de la poursuite de la relation commerciale qui ne constitue pas une acceptation non équivoque d'une cession non dénoncée », la Cour aurait alors entaché sa décision d'une pure erreur de droit en violant l'article 1134 du Code civil.