LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé que la promesse de vente prévoyait que l'acte authentique "devra être réalisé au plus tard le 14 mai 2005" et réservait deux cas de prorogation, le premier ne pouvant excéder le 31 mai 2005 pour le cas où le notaire n'aurait pas reçu le 14 mai toutes les pièces administratives nécessaires à la passation de l'acte, le second en cas de recours des tiers contre le permis de construire et pour la durée de la procédure, la cour d'appel qui, effectuant la recherche prétendument omise, a souverainement retenu que la date de régularisation authentique était le terme ferme de validité de la convention dès lors que celle-ci envisageait une prorogation de "sa durée" ou "de ses effets" seulement dans deux cas limitativement définis par avance et présentant la particularité commune, révélatrice de la commune intention des parties, de se référer à des événements totalement indépendants de leurs volonté et diligence, en a exactement déduit, nonobstant l'absence de clause expresse de caducité, qu'à la date du 15 mai 2005, la convention était expirée sans avoir atteint sa perfection ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Torrens Immobilier aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept septembre deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour la société Torrens immobilier
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir jugé que la condition suspensive d'obtention du permis de construire n'était pas réalisée à la date du 14 mai 2005 prévue par la convention de vente des 10 et 26 juillet 2004, que la convention portant vente des 10 et 26 juillet 2004 est devenue caduque le 14 mai 2005 et d'avoir débouté en conséquence la société TORRENS IMMOBILIER de sa demande tendant au paiement de la commission prévue au mandat de vente du 23 février 2004,
AUX MOTIFS QUE ; «Attendu, sur le droit à commission de l'agent immobilier, que le premier juge en a exactement analysé les conditions de principe ;
Mais attendu que seuls deux corps de stipulations sont susceptibles de concerner la solution du litige ;
Attendu que la première concerne la substance de la condition suspensive d'obtention d'un permis de construire, expressément désignée comme essentielle par l'acquéreur ;
Que c'est par une exacte application de la convention des parties que le premier juge a retenu que, comme le soutient l'appelant, sa réalisation s'entendait d'un permis de construire accordé par l'autorité administrative définitif et purgé des recours ;
Que la convention précise bien en effet d'une part que les autorisations administratives seront considérées comme «définitivement obtenues» lorsque 'aucun recours ou retrait n'aura été enregistré dans les délais légaux de quatre mois à partir de l'affichage, affichage qui est expressément autorisé par les vendeurs, d'autre part qu'en cas de recours des tiers, les effets de la convention sont prorogés de la durée de la procédure ;
Attendu qu'il en résulte cette première conséquence que la seule décision accordant le permis de construire, en l'occurrence obtenue le 12 mai 2005, ne suffisait pas à réaliser la condition selon la convention ;
Qu'en vue de l'exécution de la convention, l'acquéreur a d'ailleurs entrepris d'afficher cette décision ;
Mais attendu qu'il n'est pas exact de soutenir, comme le fait l'appelant, que le permis de construire devait nécessairement être obtenu au plus tard le 12 janvier 2005 pour que la condition suspensive puisse se réaliser ;
Attendu en effet que la convention des parties prévoyait seulement, en termes de délais, que l'acte authentique nécessaire «devra être régularisé au plus tard le 14 mai 2005» et réservait deux cas de prorogation, le premier ne pouvant excéder le 31 mai 2005 pour le cas où le notaire n'aurait pas reçu le 14 mai toutes les pièces administratives nécessaires à la passation de l'acte, le second en cas de recours des tiers contre le permis de construire et pour la durée de la procédure ;
Attendu que, contrairement à ce que soutient la SARL TORRENS IMMOBILIER et qu'a retenu le premier juge, la rédaction de ces clauses, que ne complète aucune autre et qui renferment donc la totalité des prévisions des parties à cet égard, désigne la date de régularisation authentique comme le terme ferme de validité de la convention («devra») auquel sera appréciée la réalisation ou non de l ‘ensemble des conditions suspensives nécessaires à sa perfection, dès lors qu'elle envisage une prorogation de «sa durée» ou de «ses effets», ce qui implique nécessairement a contrario qu'à défaut, elle n'en a plus, et seulement dans deux cas limitativement définis par avance, qui présentent d'ailleurs la particularité commune, révélatrice de la commune intention des parties, de se référer à des événements totalement indépendants de la volonté ou de la diligence des parties ;
Attendu que le 14 mai 2005, la décision accordant le permis de construire venait d'être prise depuis seulement deux jours, la condition suspensive relative à l'obtention d'une autorisation de construire définitive et purgée des recours n'était donc pas matériellement réalisée ;
Que l'acquéreur n'avait pas renoncé à son bénéfice, ce qu'il ne s'était d'ailleurs pas réservé dans la convention où il l'avait décrite comme essentielle, et que ne démontre pas le fait apparu postérieurement qu'il ait tenté d'afficher le permis de construire, action qui indique seulement qu'il persistait à poursuivre l'exécution de ses obligations contractuelles ;
Qu'aucune prorogation n'avait été convenue entre les parties par application de l'article 1134 alinéa 2 du code civil, ce à quoi rien ne les obligeait, et qu'aucun des deux cas de prorogation réservés par la convention ne s'était alors manifesté ;
Attendu que «la durée» de la convention était donc expirée, «ses effets»
avaient pris fin, en d'autres termes celle-ci était caduque sans avoir atteint sa perfection ;
Que ce faisant, les époux Y... ne prétendent pas se prévaloir de la condition suspensive stipulée dans l'intérêt de l'acquéreur mais du terme fixé par la convention et de l'expiration de son délai de validité ;
Attendu qu'il ne peut donc être fait grief aux vendeurs de s'être opposés à l'affichage du permis de construire sur le terrain le 26 mai 2005, et de la sorte postérieurement à la caducité de la vente ;
Que c'est seulement dans le cas où le délai aurait été prorogé au 31 mai qu'il aurait pu être fait grief aux époux Y... d'avoir fait obstacle à la réalisation de la convention dans la mesure où un recours aurait théoriquement pu être formé entre le 26 et le 31 mai par un tiers contre la décision accordant le permis de construire, auquel cas la convention n'aurait pas été caduque mais ses effets prorogés de la durée de la procédure ;
Mais que le cas de prorogation au 31 mai, limité à la réception par le notaire de toutes les pièces administratives – telles celles relatives à la purge des droits de préemption– ne s'est pas présenté, de sorte que la date de caducité à prendre en considération est bien le 14 mai ;
Que le fait qu'ils aient manqué à deux rendez-vous avec l'acquéreur au cours de l'automne 2004 pour une présentation préalable du projet de construction ne démontre pas une obstruction causale de leur part dès lors qu'il est constant que la demande de permis de construire avait été déposée au préalable et dans les délais prévus par la convention ;
Attendu qu'en application des dispositions des articles 6 de la loi du 2 janvier 1970 et 74 du décret du 20 juillet 1972, il résulte de l'absence de réalisation de la condition suspensive dans les délais prévus par la convention que le droit à commission de l'agent immobilier n'est pas né ;
Que la réformation du jugement est donc à bon droit poursuivie ;
ALORS D'UNE PART QU' en application de l'article 1583 du Code civil, il est de jurisprudence constante qu'en l'absence de stipulation particulière expresse des parties, le terme fixé pour la signature de l'acte authentique n'entraîne pas la caducité de la promesse de vente valant vente ; en considérant que la date butoir du 14 mai 2005 fixée pour la régularisation par acte authentique constituait le terme ferme de validité de la convention de vente de sorte que cette dernière était caduque sans avoir atteint sa perfection alors que le terme fixé n'est absolument pas assorti d'une stipulation particulière expresse prévoyant la sanction de caducité de la promesse de vente, la Cour a violé de façon flagrante l'article 1583 du Code civil.
ALORS (subsidiairement) D'AUTRE PART QU' en ne procédant pas à la recherche, pourtant essentielle à la solution du litige, permettant de déterminer si les parties avaient entendu faire de la réitération par acte authentique un élément constitutif de leur consentement à la vente ou une simple modalité d'exécution du contrat de vente qui était d'ores et déjà formé, la Cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1583 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la société TORRENS IMMOBILIER de sa demande de dommages et intérêts formée au titre de son action en responsabilité dirigée à l'encontre de l'acquéreur, la société COGEDIM PAUL MATEU,
AUX MOTIFS QUE ; «Attendu qu'il découle nécessairement des motifs qui précèdent qu'il ne peut être fait grief à la société COGEDIM PAUL MATEU de n'avoir pas tenté d'agir en justice en vue de contraindre les époux Y... à la vente de sorte que la prétention subsidiaire de la SARL TORRENS IMMOBILIER est privée de fondement de ce chef ;
Qu'elle ne démontre pas, charge qui lui incombe, et ce qu'aucune circonstance résultant des débats ne fait apparaître, que c'est par l'effet d'une carence fautive de sa part que la date d'obtention du permis de construire a été trop tardive pour permettre la vente de se réaliser dans les délais impartis ;»,
ALORS QU' aux termes de l'article 624 du Code de procédure civile, la cassation est limitée à la portée du moyen qui constitue la base de la cassation, sauf le cas d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; en application de ces dispositions, la cassation prononcée sur le fondement du premier moyen de cassation s'étendra automatiquement au chef de l'arrêt précité ayant débouté la société TORRENS IMMOBILIER de sa demande subsidiaire en responsabilité dirigée à l'encontre de la société COGEDIM PAUL MATEU dont le lien de dépendance a été affirmé par la Cour.