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12/07/2010 | FRANCE | N°09-42379

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 juillet 2010, 09-42379


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 mars 2009) que madame
X...
, salariée de la société Monoprix exploitation qui l'employait en qualité de vendeuse caissière, a été licenciée pour faute grave par lettre du 14 avril 2006 ;

Attendu que la société Monoprix exploitation fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré le licenciement de la salariée dépourvu de cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1° / que la cause du licenciement s'apprécie au

regard de l'ensemble des motifs invoqués dans la lettre de licenciement, qui fixe les limites du lit...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 mars 2009) que madame
X...
, salariée de la société Monoprix exploitation qui l'employait en qualité de vendeuse caissière, a été licenciée pour faute grave par lettre du 14 avril 2006 ;

Attendu que la société Monoprix exploitation fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré le licenciement de la salariée dépourvu de cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1° / que la cause du licenciement s'apprécie au regard de l'ensemble des motifs invoqués dans la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige ; que le licenciement ayant été notifié pour plusieurs motifs, dont l'insulte proférée par la salariée à l'encontre du directeur du magasin, qualifié de « raciste », en ne prononçant pas sur le caractère fautif de cette injure ainsi proférée par la salariée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1, L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail ;

2° / que commet une faute grave justifiant la rupture immédiate de la relation de travail la salariée qui insulte son employeur ; qu'il est constant qu'en l'espèce, deux témoins, en ce compris M.
Y...
, directeur de magasin, ayant attesté que la salariée avait injurié ce dernier en le traitant de « raciste », et cette injure étant constitutive d'une faute grave, en disant le licenciement contesté dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail ;

3° / qu'à titre subsidiaire, qu'est justifié par une cause réelle et sérieuse le licenciement prononcé à raison de l'insulte proférée par une salariée à l'endroit de son employeur ; qu'en l'espèce, deux témoins, en ce compris M.
Y...
, directeur de magasin, ayant attesté que la salariée avait injurié ce dernier en le traitant de « raciste », en disant le licenciement contesté dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail.

Mais attendu qu'après avoir longuement analysé et comparé les attestations produites de part et d'autre, la cour d'appel constate qu'aucun des faits invoqués dans la lettre de licenciement n'est établi ; que le moyen qui, en ses trois branches revient à remettre en cause le pouvoir souverain d'appréciation de la cour d'appel de la valeur probante des pièces produite aux débats est mal fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Monoprix exploitation aux dépens ;

Vu les articles 700 du code de procédure civile, et 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société Monoprix exploitation à payer la somme de 2 500 euros à la SCP Defrenois et Levis ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Carbonnier, avocat aux Conseils pour la société Monoprix exploitation.

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de madame
X...
est sans cause réelle et sérieuse,

AUX MOTIFS QUE : « tout licenciement doit avoir une cause réelle et sérieuse ; que la faute grave est définie comme un manquement du salarié à ses obligations tel que la rupture immédiate du contrat est justifiée ; qu'il appartient à l'employeur de rapporter la preuve de la faute grave qu'il invoque ; que les faits invoqués doivent être matériellement vérifiables ; qu'en application de l'article L. 1232-6 du code du travail, la motivation de la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement du 14 avril 2006 énonce les griefs suivants à l'encontre de madame
X...
: " le vendredi 31 mars 2006 à 13h00, Mme
A...
, chef de caisse adjointe, vous a indiqué le poste de caisse que vous deviez prendre. Vous avez refusé en disant que ce n'était pas juste. Le samedi 1er avril 2006 vers 14h00, alors que Mme
A...
sortait du sas, vous l'avez menacée. Vous avez crié contre elle, sur la surface de vente, devant nos clients, tout en tapant violemment du poing sur votre caisse. Vous avez ensuite menacé les autres caissières. Lorsqu'à la demande de Mme
B...
, vous êtes descendue à mon bureau, vous m'avez insulté en me traitant de raciste. Ce comportement inacceptable ne peut permettre votre maintien dans notre magasin … votre mise à pied conservatoire ne vous sera pas rémunérée... " ; que Mme
X...
conteste les griefs invoqués et produit au soutien de ses contestations des attestations de clients du magasin ; qu'il ressort des débats que l'origine du conflit qui s'est élevé entre Mme
X...
et Mme
A...
réside dans le changement de caisse qui a été demandé à Mme
X...
afin d'accéder à sa demande d'exercer son activité à temps complet après l'avoir effectuée à temps partiel ; qu'il apparaît qu'affectée aux caisses du soir, Mme
X...
souhaitait retrouver la caisse du matin qu'elle occupait lorsqu'elle était à temps partiel ; que s'en est suivi un échange de courriers entre la société Monoprix Exploitation (MPX) et Mme
X...
, celle-ci revendiquant avec insistance un poste en matinée ; qu'en premier lieu, il convient de constater qu'aucun élément n'est produit aux débats concernant les faits reprochés datés du 31 mars 2006 ; que le bien fondé du premier grief invoqué n'est donc pas établi ; qu'en second lieu, il convient de constater que l'attestation de Mme
A...
qui apparaît comme la supérieure hiérarchique de Mme
X...
à laquelle elle donne des consignes, ne peut être prise en compte dans le cadre du présent litige qui oppose Mme
X...
à son employeur ; qu'en outre, les attestations de M.
C...
, de Mme
D...
du 1er mars 2006 concernent des faits que ces témoins situent en janvier et février 2006 ; que ces deux témoignages n'ont donc aucune valeur probante concernant les faits reprochés datés du 31 mars et du 1er avril 2006 ; que la société Monoprix Exploitation (MPX) produit d'autres attestations : une autre attestation de M.
C...
et de Mme
D...
datées du 1er avril 2006, une attestation de M.
E...
et de M.
F...
, tous collègues de Mme
X...
, dans le même magasin ; qu'elle produit également deux attestations de Mme
G...
, une client et Mme
H...
, dont la qualité n'est pas précisée ; que de ces quatre attestations, une seule est circonstanciée, celle de Mme
D...
; que les autres exposent " avoir entendu des propos menaçants de vengeance de Mme
X...
envers Mme
A...
" en ajoutant selon certains " moi, je suis une vraie Kabile cela ne va pas se passer comme ça " ; que ces témoignages sont imprécis quant aux propos entendus ; qu'ils ne les datent pas non plus et n'en précisent pas les circonstances ; que ces témoignages sont donc très fragiles ; que Mme
D...
relate quant à elle les faits suivants : " le 1er avril 2006, à sa prise de poste, Mme
A...
et moi-même avons dit à Mme
X...
de s'installer aux caisses panier car c'étaient les seules qui me restaient de libres à cette heure ci, elle installe sa caisse puis part se promener dans le magasin, puis ensuite elle attend Mme
A...
qui sort du sas convoyeur pour l'insulter et s'en prend également aux clients ainsi qu'aux caissiers présents en les menaçant " ; que Mme
G...
confirme que Mme
X...
" a menacé verbalement sa responsable, … Mme
A...
ainsi que les caissiers qui se trouvaient à leur poste de travail. Les menaces étaient si fortes que les clients qui attendaient ont pu entendre " les propos " moi, je suis Kabile vous allez voir ce que vous allez voir " et Mme
H...
indique que le 1er avril il lui a été demandé " d'intervenir auprès du service caisse et de calmer Mme
X...
qui proférait des injures envers Mme
A...
, sa hiérarchie ; puis elle s'est placée derrière les caisses et devant la clientèle médusée a vociféré des menaces contre ses collègues s'ils allaient témoigner contre elle " ; que dans une autre attestation, Mme
D...
indique que Mme
X...
a traité le directeur du magasin de raciste ; qu'outre une pétition réclamant que Mme
X...
soit rétablie dans ses droits, signée par nombreuses personnes, Mme
X...
produit aux débats treize attestations de clients qui relatent les faits du 1er avril 2006 de la façon qui suit : vers 14h30 Mme
A...
s'est avancée vers la caisse de Mme
X...
en l'insultant en faisant des gestes menaçants vers son visage et en criant très fort devant tous les clients et les caissières, faits auxquels Mme
X...
n'a pas riposté, ni répondu ; que sont ensuite arrivés deux responsables qui lui ont compté la caisse et lui ont dit de quitter son travail ; que ces clients, ainsi que d'autres ont attesté du sérieux et du caractère agréable de Mme
X...
avec eux ; que les attestations de ces clients très nombreux sont très précises, circonstanciées et concordantes ; qu'en outre, émanant de clients qui sont sans lien ni avec le magasin ni avec ses employés, ces attestations présentent de bonnes garanties d'objectivité et de sincérité ; qu'il convient donc de considérer leur valeur probante bien supérieure à celle des attestations produites par l'employeur qui proviennent, sauf une, de salariés du magasin, dont l'objectivité est, en conséquence, incertaine en raison du lien de dépendance existant avec l'employeur ; que ces attestations sont en outre, à part l'une d'elle, peu circonstanciées, et très peu précises ; qu'il convient donc de retenir les attestations produites aux débats par la salariée et d'en déduire que c'est elle qui a été molestée par Mme
A...
; qu'il ressort des éléments de la cause, y compris du témoignage de Mme
G...
, qu'il n'est pas exclu que Mme
X...
ainsi provoquée se soit défendue verbalement, ce qui ne saurait lui être reproché ; qu'il s'ensuit que le bien fondé des griefs invoqués contre Mme
X...
n'est pas établi et que la preuve de la faute grave qui incombe à l'employeur n'est pas rapportée ; qu'il s'ensuit que le licenciement de Mme
X...
est sans cause réelle et sérieuse » ;

1°) ALORS QUE la cause du licenciement s'apprécie au regard de l'ensemble des motifs invoqués dans la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige ; Que le licenciement ayant été notifié pour plusieurs motifs, dont l'insulte proférée par la salariée à l'encontre du directeur du magasin, qualifié de « raciste », en ne prononçant pas sur le caractère fautif de cette injure ainsi proférée par la salariée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1, L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail ;

2°) ALORS QUE commet une faute grave justifiant la rupture immédiate de la relation de travail la salariée qui insulte son employeur ; Qu'il est constant qu'en l'espèce, deux témoins, en ce compris monsieur
Y...
, directeur de magasin, ayant attesté que la salariée avait injurié ce dernier en le traitant de « raciste », et cette injure étant constitutive d'une faute grave, en disant le licenciement contesté dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail ;

3°) ALORS, à titre subsidiaire, QU'est justifié par une cause réelle et sérieuse le licenciement prononcé à raison de l'insulte proférée par une salariée à l'endroit de son employeur ; Qu'en l'espèce, deux témoins, en ce compris monsieur
Y...
, directeur de magasin, ayant attesté que la salariée avait injurié ce dernier en le traitant de « raciste », en disant le licenciement contesté dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-42379
Date de la décision : 12/07/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 24 mars 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 jui. 2010, pourvoi n°09-42379


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : Me Carbonnier, SCP Defrenois et Levis

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.42379
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