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12/07/2010 | FRANCE | N°09-41490

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 juillet 2010, 09-41490


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 2411-8 du code du travail ;
Attendu que les dispositions législatives soumettant à l'autorisation préalable de l'inspecteur du travail le licenciement des salariés investis de fonctions représentatives, ont institué, au profit de tels salariés et dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, une protection exceptionnelle et exorbitante du droit commun, qui interdit par suite à l'employeur de poursuivre par d'autres moyens la rupture du contrat

de travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme

X...
a été eng...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 2411-8 du code du travail ;
Attendu que les dispositions législatives soumettant à l'autorisation préalable de l'inspecteur du travail le licenciement des salariés investis de fonctions représentatives, ont institué, au profit de tels salariés et dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, une protection exceptionnelle et exorbitante du droit commun, qui interdit par suite à l'employeur de poursuivre par d'autres moyens la rupture du contrat de travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme

X...
a été engagée le 8 novembre 1979, en qualité d'employée de libre service par la société Sodirodez ; que son contrat de travail a été transféré en 1985 à la société Sebadis, exploitant un hypermarché à l'enseigne « E. Leclerc » ; qu'en novembre 2005, la salariée a été élue membre titulaire du comité d'entreprise ; qu'elle a, par lettre du 31 août 2006, présenté sa démission pour "des raisons personnelles" et demandé à être dispensée d'effectuer la totalité de son préavis afin de cesser ses fonctions le samedi 9 septembre 2006 ; qu'un accord transactionnel destiné à mettre fin au litige opposant les parties a été signé le 7 septembre 2006, la société Sebadis s'engageant à verser la somme de 7928,00 euros à titre d'indemnité forfaitaire, globale et définitive à Mme
X...
qui s'estimait remplie de ses droits et renonçait à contester la rupture de son contrat de travail ; que le 7 novembre 2006, la salariée a saisi la juridiction prud'homale en vue d'obtenir notamment la requalification de cette rupture en un licenciement nul pour violation du statut protecteur ;
Attendu que pour débouter la salariée de ses demandes indemnitaires, la cour d'appel relève que la légitimité de la rupture consécutive à la démission ne peut être remise en cause dès lors que la lettre de démission est sans réserve, que si l'accord transactionnel fait état
d'une situation professionnelle devenue délicate, liée à des relations conflictuelles de la salariée avec ses supérieurs hiérarchiques, dont celle-ci avait fait part au dirigeant de la société, et à divers problèmes d'organisation de son travail, pour autant l'intéressée n'y a exprimé aucun reproche précis à l'encontre de l'employeur ; que l'existence d'un litige avec lui, antérieur ou contemporain de la démission et à l'origine de celle-ci, n'est pas davantage établie, l'avertissement délivré le 30 mars 2006 pour non-respect des horaires n'ayant fait l'objet d'aucune contestation ; enfin, que la transaction visait clairement à régler le différend né entre les parties après que Mme

X...
eut fait part de sa volonté de contester judiciairement la démission en vue d'obtenir la réparation du préjudice que lui causait le fait de quitter la société, compte tenu de son ancienneté ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la démission de la salariée, membre titulaire du comité d'entreprise, et la transaction subséquente n'étaient pas intervenues frauduleusement pour permettre à l'employeur de rompre le contrat de travail sans autorisation préalable de l'inspecteur du travail, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 février 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;
Condamne la société Sebadis aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Sebadis à payer à Mme

X...
la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils pour Mme

Y...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté madame
X...
de ses demandes tendant à ce qu'il soit jugé que la rupture du contrat de travail intervenue le 31 août 2006 s'analysait en un licenciement et que la transaction du 7 septembre 2006 était nulle et d'AVOIR débouté en conséquence la salariée de ses demandes d'indemnité forfaitaire égale à la rémunération qui lui était due jusqu'à l'expiration de la période de protection attachée à son mandant de représentant du personnel, d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité conventionnelle de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
AUX MOTIFS QUE, appelée à statuer sur la validité d'une transaction, la juridiction prud'homale ne peut, sans heurter l'autorité de la chose jugée attachée à la transaction, trancher le litige que celle-ci avait précisément pour objet de clore en procédant à un examen des éléments de fait et de preuve ; qu'en l'occurrence, madame

X...
a adressé, le 31 août 2006, à son employeur une lettre de démission sans réserve, dans laquelle elle demandait à être dispensée d'effectuer la totalité de son préavis afin de cesser ses fonctions le samedi 9 septembre 2006 ; que, certes, il résulte des termes mêmes de la transaction signée le 7 septembre 2006 que sa décision de démissionner était consécutive à une situation professionnelle devenue délicate, liée à des relations conflictuelles avec ses supérieurs hiérarchiques, dont elle avait fait part au PDG de la société Sebadis, monsieur
Z...
, ainsi qu'à divers problèmes d'organisation de son travail ; que pour autant, la salariée n'y avait exprimé aucun reproche précis à l'encontre de l'employeur, se rattachant à un manquement de sa part à ses obligations contractuelles, de nature à conclure au caractère équivoque de sa démission ; que l'existence d'un litige avec l'employeur, antérieur ou contemporain de la démission et à l'origine de celle-ci, n'est pas davantage établie ; que l'avertissement lui ayant été délivré le 30 mars 2006 pour un non-respect des horaires de travail n'a ainsi fait l'objet d'aucune contestation de sa part ; qu'il convient d'ailleurs de relever qu'elle a été embauchée peu de temps après, suivant contrat en date du 25 septembre 2006, en qualité de manager de rayon par une SAS Solmar, exploitant un supermarché à l'enseigne « Super U », moyennant un salaire supérieur à celui qu'elle percevait au sein de la société Sebadis ; que la transaction, qui a été conclue, vise clairement à régler le différend né entre les parties, après que madame
X...
ait fait part à son employeur de sa volonté de contester sa démission devant la juridiction prud'homale en vue d'obtenir la réparation du préjudice que lui causait le fait de quitter la société, compte tenu de son ancienneté (sic) ; que dans ce contexte, la légitimité de la rupture consécutive à la démission ne saurait être remise en cause ; que dès lors, l'engagement de la société Sebadis de verser à la salariée une indemnité forfaitaire et définitive de 7928,00 euros nette de CSG et de CRDS en contrepartie de sa renonciation à contester la rupture de son contrat de travail, ne peut être regardée comme une concession dérisoire, la démission étant, en effet, privative des indemnités de rupture ; qu'à supposer même que les difficultés exprimées par madame
X...
auprès de l'employeur, comme étant à l'origine de sa décision de démissionner, soient de nature à caractériser une démission équivoque de sa part s'analysant en une prise d'acte de la rupture, rien n'interdisait aux parties de transiger sur cette base afin d'éviter un litige au cours duquel le juge prud'homal aurait eu à apprécier les manquements imputés à la société Sebadis et à qualifier la rupture soit de licenciement si les faits invoqués la justifiaient, soit de démission dans le cas contraire ; que la transaction devant être tenue pour valable, c'est donc à juste titre que le premier juge a débouté madame
X...
de l'ensemble de ses demandes ;
1°) ALORS QUE la juridiction appelée à statuer sur la validité d'une transaction réglant les conséquences d'une démission doit, pour apprécier si des concessions réciproques ont été faites et si celle de l'employeur n'est pas dérisoire, vérifier si le salarié a exprimé dans la lettre de démission sa volonté claire et non équivoque de démissionner ; qu'en retenant, pour apprécier la réalité des concessions consenties dans la transaction, que la salariée n'avait exprimé aucun reproche précis à l'encontre de l'employeur dans la lettre de démission de nature à conclure à son caractère équivoque, tout en constatant que la transaction visait « à régler le différend né entre les parties, après que madame

X...
ait fait part à son employeur de sa volonté de contester sa démission » et que la démission était consécutive aux « relations conflictuelles de l'intéressée avec ses supérieurs hiérarchiques (…) ainsi qu'à divers problèmes d'organisation de son travail » (arrêt p. 4 § 2 et 6), la cour d'appel a violé les articles 2044 du code civil et L. 1237-1 et L. 1237-2 du code du travail ;
2°) ALORS QUE la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; qu'elle ne doit pas être sollicitée par l'employeur ou consentie en contrepartie de la signature d'une transaction ; que le vice du consentement affectant la démission entâche de nullité la transaction conclue afin d'en régler les conséquences ; que madame

X...
a soutenu dans ses conclusions d'appel avoir démissionné à la demande de l'employeur en contrepartie de la promesse de signature de la transaction, ce dernier désirant contourner la législation sur le licenciement des salariés protégés, ce qui viciait son consentement et entachait de nullité la transaction ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-41490
Date de la décision : 12/07/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 04 février 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 jui. 2010, pourvoi n°09-41490


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.41490
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