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08/07/2010 | FRANCE | N°08-45478

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 juillet 2010, 08-45478


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Boyer le 5 juillet 2000, en qualité de conducteur de travaux, position cadre niveau B, moyennant une rémunération comprenant un salaire mensuel forfaitaire brut de 17 000 francs rémunérant globalement les heures normales et les heures supplémentaires, une prime de fin d'année, une prime d'objectif annuelle éventuelle et les congés payés afférents ; que le salarié licencié par lettre du 5 mai 2004, a saisi la juridiction prud'homal

e aux fins d'obtenir le paiement d'heures supplémentaires pour les années ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Boyer le 5 juillet 2000, en qualité de conducteur de travaux, position cadre niveau B, moyennant une rémunération comprenant un salaire mensuel forfaitaire brut de 17 000 francs rémunérant globalement les heures normales et les heures supplémentaires, une prime de fin d'année, une prime d'objectif annuelle éventuelle et les congés payés afférents ; que le salarié licencié par lettre du 5 mai 2004, a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir le paiement d'heures supplémentaires pour les années 2000 à 2004, un rappel de primes, des sommes à titre de repos compensateurs, les congés payés afférents et enfin de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 3121-22 du code du travail ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'heures supplémentaires, de congés payés afférents et repos compensateurs pour les années 2000 à 2004, l'arrêt retient que l'emploi occupé par M. X... comporte une grande part d'activité en dehors des bureaux de la société et de fréquents déplacements, hors de tout contrôle de l'employeur, que cette autonomie justifie la classification du salarié au statut cadre et l'insertion au contrat de travail d'une clause spécifique de rémunération au forfait mois, conformément aux dispositions relatives à l'encadrement contenues dans l'accord du 6 novembre 1998 relatif à la durée du travail dans le BTP, complétant la convention collective du 30 avril 1951, stipulant que le salarié n'est pas soumis à un horaire de travail précis, que la rémunération forfaitaire est indépendante du nombre d'heures de travail accomplis pendant la période de paie considérée et que cette rémunération forfaitaire mensuelle est identique d'un mois sur l'autre ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le paiement des heures supplémentaires selon un forfait ne peut résulter que d'une convention individuelle conclue entre les parties déterminant le nombre d'heures supplémentaires inclus dans la rémunération, peu important l'existence d'un accord collectif sur ce point, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Sur le second moyen :
Vu les articles L. 1152-1 et 1154-1 du code du travail ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts au titre du harcèlement moral, l'arrêt retient que les pièces produites par M. X... sont dépourvues de force probante et que l'attestation rédigée par le délégué syndical ayant assisté ce dernier lors de l'entretien préalable au licenciement n'établit pas l'intention de nuire de l'employeur ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve du harcèlement moral sur le seul salarié, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande en paiement au titre des heures supplémentaires, des congés payés afférents, du repos compensateur et d'une indemnité au titre du harcèlement moral, l'arrêt rendu le 21 octobre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Entreprise Boyer aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Entreprise Boyer et la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande de rappel d'heures supplémentaires, congés payés afférents et repos compensateurs pour les années 2000 à 2004 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE l'emploi occupé par Monsieur X... comportait une grande part d'activité en dehors des bureaux de la société et de fréquents déplacements sur le territoire français, hors de tout contrôle de l'employeur ; que cette autonomie justifiait la classification du salarié au statut cadre et l'insertion au contrat de travail d'une clause spécifique de rémunération au forfait mois, conformément aux dispositions relatives à l'encadrement, de l'accord du 6 novembre 1998 relatif à la durée du travail dans le BTP complétant la convention collective du 30 avril 1951 stipulant que le salarié n'était pas soumis à un horaire de travail précis, que la rémunération forfaitaire était indépendante du nombre d'heures de travail accomplis pendant la période de paie considérée et que cette rémunération forfaitaire mensuelle était identique d'un mois sur l'autre ;
AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE le contrat de travail stipulait «un salaire mensuel forfaitaire brut de 17.000 F…rémunérant globalement les heures normales et les heures supplémentaires que le salarié pourrait être appelé à faire par nécessité de service (majoration correspondante incluse)» et «la rémunération ci-dessous est calculée pour tenir compte à la fois de l'horaire normal de l'entreprise et des dépassements de cet horaire…à consentir pour atteindre les objectifs qui ont été donnés et organiser son travail en tout autonomie » ; que le contrat de travail refusé par Monsieur X... faisait référence à un horaire de base de 39 h ; que le contrat définitif avait été modifié et le salaire augmenté ; que le contrat indiquait une classification B et une large autonomie de gestion de son temps de travail ; que Monsieur X... déclarait 70 heures de travail hebdomadaire, sur cinq jours, ce qui signifiait qu'il travaillerait en moyenne 14 heures par jour, sans compter les temps de repas et de pause pris à l'intérieur du temps de travail ; que cela reviendrait alors à être en infraction avec le code du travail ; qu'en conséquence, le contrat de travail devait être interprété comme un contrat de travail au forfait, aucune heure supplémentaire ni repos compensateur n'étaient dus ;
ALORS 1°) QUE la rémunération forfaitaire s'entend d'une rémunération convenue entre les parties au contrat de travail pour un nombre déterminé d'heures supplémentaires, soit pour une durée de travail supérieure à la durée légale ; que même si le principe en est posé par la convention collective, le paiement des heures supplémentaires selon un forfait ne peut résulter que d'un accord particulier entre l'employeur et le salarié, de sorte qu'en l'absence de convention individuelle de forfait conclue entre les parties, les dispositions d'un accord d'entreprise sur la rémunération forfaitaire ne sont pas applicables ; qu'en l'espèce, la stipulation incluse dans le contrat de travail aux termes de laquelle le salarié percevrait «un salaire mensuel forfaitaire brut de 17.000 F…rémunérant globalement les heures normales et les heures supplémentaires que le salarié pourrait être appelé à faire par nécessité de service (majoration correspondante incluse)» calculé « pour tenir compte à la fois de l'horaire normal de l'entreprise et des dépassements de cet horaire…à consentir pour atteindre les objectifs qui ont été donnés et organiser son travail en tout autonomie» , ne déterminait pas le nombre d'heures supplémentaires inclus dans cette rémunération et ne caractérisait donc aucune convention de forfait dûment conclue entre les parties ; qu'il s'en évinçait que les dispositions de l'accord du 6 novembre 1998 relatif à la durée du travail dans le BTP complétant la convention collective du 30 avril 1951 sur la rémunération forfaitaire étaient inapplicables ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 212-5 devenu L. 3121-22 et suivants du code du travail, ensemble l'accord du 6 novembre 1998 relatif à la durée du travail dans le BTP complétant la convention collective du 30 avril 1951 ;
ALORS 2°) QU'en n'ayant pas répondu aux conclusions de Monsieur X... faisant valoir, en s'appuyant sur ses bulletins de paie, qu'il avait été payé non sur une base forfaitaire mais, jusqu'à avril 2001, sur la base de 169 heures, puis ultérieurement sur une base de 164 heures outre 13 heures à taux majoré correspondant aux heures de la 36 à la 38ème, ce qui excluait l'existence d'une rémunération sur une base forfaitaire (p. 10), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS 3°) QUE la qualité de cadre et l'existence d'une liberté d'organisation ne suffisent pas à exclure le droit au paiement d'heures supplémentaires ; qu'en se fondant sur la circonstance inopérante que l'activité de Monsieur X... comportait une grande part d'activité en dehors des bureaux de la société, de fréquents déplacements sur le territoire français, hors de tout contrôle de l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 212-5 devenu L.3121-22 et suivants du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;
AUX MOTIFS QUE les pièces produites par Monsieur X... au soutien de sa demande étaient dépourvues de force probante ; qu'en effet la lettre qu'il avait adressée à l'employeur le 23 avril 2004 et dans laquelle il mentionnait certains griefs à l'égard de celui-ci et de Monsieur Y..., directeur des ressources humaines de la société Entreprise Boyer, ne pouvait être retenue comme élément de preuve en raison de son caractère unilatéral, donc subjectif ; que de plus les faits allégués n'étaient corroborés par aucune autre pièce ; que le certificat médical du 16 septembre 2004 du Docteur Z..., médecin traitant de Monsieur X..., indiquant suivre régulièrement son patient en consultation suite à des problèmes de santé en rapport avec une situation professionnelle conflictuelle depuis plusieurs mois (avril 2003) n'établissait aucunement que l'employeur en était la cause ; que l'attestation rédigée le 21 septembre 2004 par Monsieur A..., délégué syndical ayant assisté Monsieur X... lors de l'entretien préalable au licenciement, n'établissait pas l'intention de nuire de l'employeur ; que la demande de Monsieur X... devait donc être rejetée ;
ALORS 1°) QU'il résulte de l'article L. 122-52 du code du travail devenu l'article L. 1154-1de ce code, applicable en matière de discrimination et harcèlement, interprété à la lumière de la directive n° 2000/78/CE du 27 novembre 2000, portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail que, dés lors que le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement ; qu'en statuant comme elle a fait, en faisant reposer sur le seul salarié la charge de prouver le harcèlement moral invoqué, la cour d'appel a violé les articles L. 122-49 et L. 122-52 devenus 1152-1 et 1154-1 du code du travail ;
ALORS 2°) QUE l'existence d'un harcèlement moral n'est pas subordonnée à une intention de nuire de l'employeur ; qu'en l'espèce, en écartant le harcèlement moral ; après avoir relevé que le médecin traitant du salarié indiquait le suivre régulièrement suite à des problèmes de santé en rapport avec une situation professionnelle conflictuelle depuis plusieurs mois, en se fondant sur la circonstance inopérante que l'intention de nuire de l'employeur n'était pas établie, la cour d'appel qui, n'a pas recherché l'existence d'un harcèlement ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail ou de compromettre son avenir professionnel et si l'employeur apportait la preuve que ses décisions étaient justifiées par des éléments objectifs relevant de l'exercice de ses pouvoirs, a violé les articles L. 122-49 et L. 122-52 devenus les articles 1152-1 et 1154-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-45478
Date de la décision : 08/07/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 21 octobre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 jui. 2010, pourvoi n°08-45478


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Blanc, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.45478
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