LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu la connexité, joint les pourvois n° Q 09-40.552 et K 09-65.089 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 19 novembre 2008), qu'après avoir travaillé pour la société Le Club qui exploite un bar-restaurant-pizzeria, pour des périodes de durées diverses entre 1984 et 1993, M. X... a été engagé en qualité de directeur par cette société par contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à compter du 1er avril 1993 ; que l'établissement principal ayant été fermé pour travaux en novembre 1997, il a été affecté à l'établissement pizzeria Vaporetto ; qu'une SARL Vaporetto a été créée entre la société Le Club et trois de ses salariés dont M. X..., laquelle a pris en location-gérance le fonds de la pizzeria Vaporetto ; que ce contrat de location-gérance a pris fin le 14 avril 2005 ; que M. X... a vainement demandé la reprise de son contrat de travail à la société Le Club ; qu'il a été licencié «pour ordre» par le liquidateur judiciaire de la société Vaporetto mise en liquidation judiciaire le 18 avril 2005 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes pour la période d'emploi de 1984 à 1998 puis de 1998 à 2005 ;
Ssur le premier moyen du pourvoi de M. X... :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande visant à faire constater que son ancienneté au sein de la société Le Club remontait au 1er mai 1984, alors, selon le moyen, qu'en l'absence de contrat écrit, la production de fiches de paie fait présumer l'existence d'un contrat de travail à durée indéterminée, et donc l'ancienneté du salarié, à compter du premier des jours de travail qu'elles mentionnent ; qu'en l'espèce, pour justifier de l'existence d'un contrat de travail antérieur au contrat formalisé le 1er avril 1993, le salarié versait aux débats de nombreuses fiches de paie établies par son employeur entre le 1er mai 1984 et le 4 janvier 1993 ; qu'en reprochant au salarié de ne pas prouver avoir travaillé de façon ininterrompue au service de son employeur depuis le 1er mai 1984 faute pour les bulletins de salaire produits de couvrir toute la période considérée sans solution de continuité, quand il appartenait à l'employeur de détruire la présomption d'existence d'un contrat à durée indéterminée depuis le 1er mai 1984, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel n'étant pas saisie d'une contestation de l'existence de relations de travail dans un lien de subordination entre 1984 et 1993 mais d'une discussion sur la prise en compte d'une ancienneté à compter de 1984 au regard de la production de divers bulletins de paie délivrés à M. X... durant certains mois des années de cette période, le moyen, qui est fondé sur la règle de preuve de l'existence d'un contrat de travail en présence de la production de bulletins de paie de nature à établir un contrat de travail apparent, est inopérant ;
Sur le second moyen du pourvoi du salarié :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande tendant à faire constater qu'il avait été licencié par la société Le Club en 1998 et d' avoir rejeté les demandes indemnitaires formulées à ce titre, alors, selon le moyen :
1°/ que les juges du fond sont tenus par les termes du litige tels qu'ils sont fixés par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, les parties s'accordaient pour considérer que le contrat de travail conclu entre M. X... et la SAS Le Club avait été rompu en 1998 ; que le débat portait seulement sur la qualification de cette rupture, le salarié prétendant avoir été licencié, l'employeur se prévalant d'une démission ; qu'en déboutant le salarié de ses demandes liées à la qualification de la rupture en un licenciement au prétexte que le contrat n'aurait pas été rompu mais transféré par application de l'article L. 1221-1 du code du travail, quand les parties indiquaient l'une et l'autre dans leurs écritures que la rupture était bel et bien intervenue, la cour d'appel a modifié l'objet du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que pour rejeter les demandes du salarié relatives à la rupture de son contrat de travail en mai 1998 par la société Le Club, la cour d'appel a retenu que la relation de travail s'était poursuivie par application de l'article L. 122- 12 devenu L. 1221-1 du code du travail avec la SARL Vaporetto et que le salarié ne pouvait donc pas prétendre avoir été licencié ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses propres énonciations que les moyens oralement présentés à l'audience étaient ceux développés par les parties dans leurs écritures, et que ces dernières n'invoquaient pas l'application de l'article L. 1221-1 du code du travail lors de la création en 1998 de la SARL Vaporetto mais la rupture pure et simple du contrat de travail, ce dont il se déduit que l'arrêt s'est prononcé sur un moyen relevé d'office sans qu'aient été provoquées les observations préalables des parties, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'abord, qu'en matière de procédure orale, les moyens retenus par le juge sont présumés, sauf preuve contraire non rapportée en l'espèce, avoir été débattus contradictoirement à l'audience ;
Attendu, ensuite, que la cour d'appel a retenu, qu'en application des dispositions d'ordre public de l'article L. 1224 –1 du code du travail, à la suite de la mise en location-gérance du fonds de commerce pizzeria Vaporetto, qui constituait une entité économique autonome dont l'activité s'était poursuivie, le contrat de travail de M. X..., employé en qualité de directeur, avait continué, peu important qu'ayant acquis des parts de la SARL il soit devenu associé minoritaire ; qu'elle a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
Sur le moyen unique du pourvoi de la société Le Club :
Attendu que la société Le Club fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à M. X... diverses sommes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée, si le fait que M. X... avait refusé d'être placé en chômage partiel à l'automne 1998, pendant le temps des travaux de réfection de l'établissement où il exécutait son contrat de travail, et qu'au lieu de cela, il avait accepté la location-gérance de la société Vaporetto, le fait que, s'il avait été consenti pendant les six premiers mois d'activités de poursuivre, à titre gratuit, le paiement d'une partie de son salaire, ensuite, à partir du 13 avril 1998, il était, cependant, entièrement sorti des effectifs de la société Le Club, le fait que son départ était libre et éclairé et le fait qu'il avait exploité la pizzeria Vaporetto de manière autonome n'indiquaient pas qu'il avait mis volontairement fin à ses relations de travail avec la société Le Club et si, partant, son départ des effectifs de cette société le 13 avril 1998 ne constituait pas une démission non équivoque mettant fin à son contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1237-1 du code du travail, ensemble les articles L. 1224-1 et L. 1232-1 du même code ;
2°/ qu'en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée, si le fait qu'à son départ des effectifs de la société Le Club, M. X... avait sollicité et obtenu son solde de tout compte et une indemnité au titre de ses congés payés non pris, sans émettre aucune observation, n'attestait pas de sa volonté non équivoque de démissionner de la société Le Club au 13 avril 1998, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1237-1 du code du travail, ensemble les articles L. 1224-1 et L. 1232- 1 du même code ;
3°/ qu'en affirmant que M. X... avait été lié par un contrat de travail à la société Vaporetto sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, s'il avait exécuté un travail sous l'autorité de cette entreprise, qui avait le pouvoir de lui donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner ses éventuels manquements, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail, ensemble les articles L. 1224-1et L. 1232-1 du même code ;
4°/ qu'en affirmant que M. X... n'avait pas été gérant de fait de la société Vaporetto sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si les prétendues fonctions techniques qu'il y exerçait ne prouvaient pas une participation effective de sa part à la gestion de l'entreprise, s'il ne s'immisçait pas dans la gestion de cette société et si ses fonctions s'exerçaient dans un réel état de subordination à l'égard du gérant de droit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail, ensemble les articles L. 1224-1 et L. 1232-1 du même code ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a retenu que le contrat de travail de M. X... avait été transféré à la société Vaporetto, n'était pas tenue d'effectuer des recherches que ses constatations rendaient inopérantes ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour M. X..., demandeur au pourvoi n°Q 09-40.552
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la décision infirmative attaquée d'AVOIR rejeté la demande du salarié visant à faire constater que son ancienneté au sein de la SAS LE CLUB remontait au 1er mai 1984 ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur X... considérant qu'il a commencé à travailler pour la SAS LE CLUB à compter du 1er mai 1984 demande que son ancienneté soit calculée à partir de cette date, ce que conteste la SAS LE CLUB au motif qu'il s'agissant d'un emploi saisonnier intermittent avant la conclusion d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel le 1er avril 1993 ; qu'en effet les bulletins de salaire versés aux débats ne couvrent pas toute la période considérée de mai 1984 à mars 1993 et qu'il ne ressort pas des autres pièces produites une continuité dans l'emploi depuis le 1er mai 1984 jusqu'au 31 mars 1993 ; que notamment les années 1985 et 1986 ne sont pas travaillées en totalité (mars à septembre puis avril à octobre), que l'année 1987 est manquante et qu'au surplus, le dernier bulletin émis avant la conclusion du contrat écrit du 1er avril 1993 se rapporte à la période du 1er au 4 janvier 1993 ; que le contrat du 1er avril 1993 ne mentionne aucune reprise d'ancienneté au service de la S.A.S LE CLUB et que les bulletins de salaire émis à partir de cette date font état d'une entrée dans l'entreprise au 1er avril 1993 ; que dès lors Monsieur X... manque à établir une ancienneté ininterrompue au service de la SAS LE CLUB depuis le 1er mai 1984 de sorte que peut seule être prise en compte l'ancienneté acquise au litre du contrat de travail écrit du 1er avril 1993 ;
ALORS QU'en l'absence de contrat écrit, la production de fiches de paie fait présumer l'existence d'un contrat de travail à durée indéterminée, et donc l'ancienneté du salarié, à compter du premier des jours de travail qu'elles mentionnent ; qu'en l'espèce, pour justifier de l'existence d'un contrat de travail antérieur au contrat formalisé le 1er avril 1993, le salarié versait aux débats de nombreuses fiches de paie établies par son employeur entre le 1er mai 1984 et le 4 janvier 1993 ; qu'en reprochant au salarié de ne pas prouver avoir travaillé de façon ininterrompue au service de son employeur depuis le 1er mai 1984 faute pour les bulletins de salaire produits de couvrir toute la période considérée sans solution de continuité, quand il appartenait à l'employeur de détruire la présomption d'existence d'un contrat à durée déterminée depuis le 1er mai 1984, la Cour d'Appel a violé l'article 1315 du Code de procédure civile ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande du salarié tendant à faire constater qu'il avait été licencié par la SAS LE CLUB en 1998 et d'AVOIR en conséquence rejeté les demandes indemnitaires formulées à ce titre ;
AUX MOTIFS QU'il est constant qu'en 1998 M. X... a créé avec deux autres salariés de l'entreprise une S.A.R.L VAPORETTO, immatriculée le 8 juin 1998 au R.C.S d'Ajaccio pour un début d'activité au 15 avril précédent, dont le gérant est M. Y... et qui a conclu avec la S.A.S LE CLUB un contrat de location-gérance pour l'exploitation du fonds de commerce de pizzeria à l'enseigne VAPORETTO appartenant à la S.A.S. à effet du 15 avril 1998 ; que la société considère que le contrat de travail avec M. X... a alors pris fin par une démission de fait de l'intéressé ayant opté pour un exercice indépendant dans le cadre de la SA.R.L ; que M. X... pour sa part fait valoir que la cessation de la relation de travail avec la S.A.S LE CLUB s'analyse en un licenciement, dépourvu de cause réelle et sérieuse au cas d'espèce à défaut de toute lettre de rupture, et qu'il réclame en conséquence la condamnation de la S.A.S à lui verser les indemnités correspondantes ; que toutefois, en application de l'article L.1224-1 du Code du travail, en cas de modification de la situation juridique de l'employeur, notamment par transformation du fonds, mise en société, les contrats de travail en cours subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ; qu'au cas de l'espèce, le fonds de commerce de pizzeria "VAPORETTO" constitue une entité économique autonome, c'est-à-dire un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels et incorporels poursuivant un objectif économique propre, dont l'activité s'est poursuivie sans solution de continuité lors de la mise en location en gérance ; qu'il ressort aussi du dossier qu'après avoir été employé par la S.A.S en qualité de directeur, M. X... a conservé les mêmes fonctions au sein de la SA.R.L d'exploitation du fonds, tout en étant associé avec 1/3 du capital ; qu'en contrepartie, il a perçu un salaire avec remise des bulletins de paie correspondant, la situation d'associé minoritaire n'étant pas en elle-même une activité professionnelle susceptible d'être rémunérée, mais donnant seulement vocation à percevoir des dividendes ; qu'il s'en déduit que le contrat de travail de M. X... a été transféré à la S.A.R.L VAPORETTO, nonobstant la situation d'associé minoritaire de l'Intéressé, de sorte qu'il n'y avait pas lieu pour la S.A.S LE CLUB de procéder à un licenciement, étant rappelé que les dispositions de l'article L. 1224-1 ci-dessus sont d'ordre public et s'imposent aux parties, peu important donc la mention du contrat de location-gérance selon laquelle le VAPORETTO n'aurait pas employé de salarié à la date de sa mise en location en gérance ; qu'en conséquence M. X... sera débouté de sa demande en paiement d'indemnités de rupture du contrat de travail conclu avec la S.A.S LE CLUB le 1er avril 1993 ;
1) ALORS QUE les juges du fond sont tenus par les termes du litige tels qu'ils sont fixés par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, les parties s'accordaient pour considérer que le contrat de travail conclu entre Monsieur X... et la SAS LE CLUB avait été rompu en 1998 ; que le débat portait seulement sur la qualification de cette rupture, le salarié prétendant avoir été licencié, l'employeur se prévalant d'une démission ; qu'en déboutant le salarié de ses demandes liées à la qualification de la rupture en un licenciement au prétexte que le contrat n'aurait pas été rompu mais transféré par application de l'article L.1221-1 du Code du travail, quand les parties indiquaient l'une et l'autre dans leurs écritures que la rupture était bel et bien intervenue, la Cour d'Appel a modifié l'objet du litige et violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
2) ALORS au surplus QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que pour rejeter les demandes du salarié relatives à la rupture de son contrat de travail en mai 1998 par la société LE CLUB, la Cour d'Appel a retenu que la relation de travail s'était poursuivie par application de l'article L.122-12 devenu L.1221-1 du Code du travail avec la SARL VAPORETTO et que le salarié ne pouvait donc pas prétendre avoir été licencié ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses propres énonciations que les moyens oralement présentés à l'audience étaient ceux développés par les parties dans leurs écritures, et que ces dernières n'invoquaient pas l'application de l'article L.1221-1 du Code du travail lors de la création en 1998 de la SARL VAPORETTO mais la rupture pure et simple du contrat de travail, ce dont il se déduit que l'arrêt s'est prononcé sur un moyen relevé d'office sans qu'aient été provoquées les observations préalables des parties, la cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
Moyen produit par Me Spinosi, avocat aux Conseils, pour la société Le Club, demanderesse au pourvoi n° K 09-65.089
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société LE CLUB à verser à M. X... 4.496,84 € brut d'indemnité de préavis, 2.998,00 € d'indemnité de licenciement, 27.000,00 € de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 1.500,00 € en application de l'article 700 du Code de Procédure civile ;
Aux motifs que «il est constant qu'en 1998, M. X... a créé avec deux autres salariés de l'entreprise une S.A.R.L. VAPORETTO, immatriculée le 8 juin 1998 au R.C.S. d'Ajaccio pour un début d'activité au 15 avril précédent, dont le gérant est M. Y... et qui a conclu avec la S.A.S. LE CLUB un contrat de location-gérance pour l'exploitation du fonds de commerce de pizzeria à l'enseigne VAPORETTO appartenant à la S.A.S., à effet du 15 avril 1998 ;
Que la société considère que le contrat de travail avec M. X... a alors pris fin par une démission de fait de l'intéressé ayant opté pour un exercice indépendant dans le cadre de la S.A.R.L. ;
Que M. X... pour sa part fait valoir que la cessation de la relation de travail avec la S.A.S. LE CLUB s'analyse en un licenciement, dépourvu de cause réelle et sérieuse au cas d'espèce à défaut de toute lettre de rupture, et qu'il réclame en conséquence la condamnation de la S.A.S. à lui verser les indemnités correspondantes ;
… toutefois, qu'en application de l'article L. 1224-1 du Code du travail, en cas de modification de la situation juridique de l'employeur, notamment par transformation du fonds, mise en société, les contrats de travail en cours subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ;
Qu'au cas de l'espèce, le fonds de commerce de pizzeria «VAPORETTO» constitue une entité économique autonome, c'est-à-dire un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels et incorporels poursuivant un objectif économique propre, dont l'activité s'est poursuivie sans solution de continuité lors de la mise en location en gérance ;
Qu'il ressort aussi du dossier qu'après avoir été employé par la S.A.S en qualité de directeur, M. X... a conservé les mêmes fonctions au sein de la S.A.R.L. d'exploitation du fonds, tout en étant associé avec 1/3 du capital ;
Qu'en contrepartie, il a perçu un salaire avec remise des bulletins de paie correspondant, la situation d'associé minoritaire n'étant pas en elle-même une activité professionnelle susceptible d'être rémunérée, mais donnant seulement vocation à percevoir des dividendes ;
Qu'il s'en déduit que le contrat de travail de M. X... a été transféré à la S.A.RL. VAPORETTO, nonobstant la situation d'associé minoritaire de l'intéressé, de sorte qu'il n'y avait pas lieu pour la S.A.S. LE CLUB de procéder à un licenciement, étant rappelé que les dispositions de l'article L 1224-1 ci-dessus sont d'ordre public et s'imposent aux parties, peu important donc la mention du contrat de location-gérance selon laquelle le VAPORETTO n'aurait pas employé de salarié à la date de sa mise en location en gérance ;
… en conséquence que M. X... sera débouté de sa demande en paiement d'indemnités de rupture du contrat de travail conclu avec la S.A.S LE CLUB le 1er avril 1993 ;
… que le contrat de location-gérance de la pizzeria «VAPORETTO» a pris fin à l'initiative du bailleur le 14 avril 2005 ;
Que M. X... a alors fait valoir que son contrat de travail devait être repris par la S.A.S. LE CLUB, propriétaire du fonds de commerce reprenant l'exploitation ;
Que la S.A.S. LE CLUB s'y est opposée au motif que M. X... n'avait pas la qualité de salarié au sein de la S.A.R.L. VAPORETTO, ancien exploitant ;
… néanmoins que M. X... n'était pas gérant de la S.A.R.L. et que la preuve n'est pas rapportée que le contrat de travail en qualité de directeur de la pizzeria, pour lequel il a été rémunéré en contrepartie de l'exercice effectif d'un travail et a reçu des bulletins de salaire, présenterait un caractère fictif ;
Qu'il ne ressort pas non plus des pièces du dossier que M. X... aurait été le gérant de fait de la société ; que notamment, il n'est pas établi ni même allégué qu'il aurait bénéficié de la signature en banque, accompli des actes de disposition ou usé d'un quelconque pouvoir d'engager la société ; qu'il n'est démontré aucun acte effectif de gestion excédant ses attributions de direction courante de l'établissement et accompli par lui en lieu et place du gérant en titre ;
Que les fonctions techniques de directeur du restaurant, s'agissant en l'espèce du fonctionnement quotidien de la pizzeria, gestion des approvisionnements, rapports avec la clientèle et les fournisseurs, organisation du service, ne recouvrent pas ni n'absorbent celles qui ont trait à un mandat de gestion sociale et qu'elles sont normalement exercées sous la subordination et le contrôle du gérant de droit, étant au surplus relevé que M. X... ne possédait que le tiers du capital social ;
… ainsi que par application des dispositions de l'article L. 1224-1 ci-dessus lors de la résiliation du contrat de location-gérance, le contrat de travail de M. X... se trouvait transféré à la S.A.S. LE CLUB avec le retours du fonds de commerce auquel il était attaché, et que cette société, tenue de poursuivre les contrats de travail en cours, devait en assumer les obligations et, le cas échéant, procéder au licenciement si elle n'était pas en mesure de procurer du travail aux salariés concernés ;
Que le mandataire à la liquidation judiciaire de la S.A.R.L. VAPORETTO prononcée le 18 avril 2005 à la suite du non renouvellement du contrat de location-gérance a exactement indiqué à M. X... par lettre du 18 novembre 2005 : «Vous êtes donc dès la restitution du fonds au propriétaire, le salarié de la société LE CLUB» ;
… en conséquence que M. X... est fondé à obtenir de la S.A.S. LE CLUB l'indemnisation de la rupture du contrat de travail qu'elle a refusé irrégulièrement de poursuivre ;
Qu'au regard des demandes formées par M. X..., non discutées par l'employeur dans leurs éléments de calcul, ainsi que des pièces du dossier, notamment les bulletins de salaire, la S.A.S. LE CLUB sera donc condamnée à payer à M. X... les sommes suivantes :
-4 496,84 euros brut à titre d'indemnité de préavis,
-2 998 euros à titre d'indemnité de licenciement au regard d'une ancienneté de douze ans à la date de fin du contrat de travail,
-27 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sur le fondement de l'article L. 1235-3 du Code du travail, au regard de l'âge, l'ancienneté, la qualification et la rémunération du salarié, des circonstances de la rupture et de tous éléments de préjudice soumis à appréciation, étant précisé que M. X... sera débouté de sa demande infondée en paiement de dommages et intérêts supplémentaires en cumul avec l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse» ;
1. Alors que, d'une part, en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée, si le fait que M. X... avait refusé d'être placé en chômage partiel à l'automne 1998, pendant le temps des travaux de réfection de l'établissement où il exécutait son contrat de travail, et qu'au lieu de cela, il avait accepté la location-gérance de la société VAPORETTO, le fait que, s'il avait été consenti pendant les six premiers mois d'activités de poursuivre, à titre gratuit, le paiement d'une partie de son salaire, ensuite, à partir du 13 avril 1998, il était, cependant, entièrement sorti des effectifs de la société LE CLUB, le fait que son départ était libre et éclairé et le fait qu'il avait exploité la pizzeria VAPORETTO de manière autonome n'indiquaient pas qu'il avait mis volontairement fin à ses relations de travail avec la société LE CLUB et si, partant, son départ des effectifs de cette société le 13 avril 1998 ne constituait pas une démission non équivoque mettant fin à son contrat de travail, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1237-1 du Code du Travail, ensemble les articles L. 1224-1et L. 1232-1 du même Code ;
2. Alors que, d'autre part, en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée, si le fait qu'à son départ des effectifs de la société LE CLUB, M. X... avait sollicité et obtenu son solde de tout compte et une indemnité au titre de ses congés payés non pris, sans émettre aucune observation, n'attestait pas de sa volonté non équivoque de démissionner de la société LE CLUB au 13 avril 1998, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1237-1 du Code du Travail, ensemble les articles L. 1224-1et L. 1232-1 du même Code ;
3. Alors que, par ailleurs, en affirmant que M. X... avait été lié par un contrat de travail à la société VAPORETTO sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, s'il avait exécuté un travail sous l'autorité de cette entreprise, qui avait le pouvoir de lui donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner ses éventuels manquements, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du Code du Travail, ensemble les articles L. 1224-1et L. 1232-1 du même Code ;
4. Alors qu'enfin, en affirmant que M. X... n'avait pas été gérant de fait de la société VAPORETTO sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si les prétendues fonctions techniques qu'il y exerçait ne prouvaient pas une participation effective de sa part à la gestion de l'entreprise, s'il ne s'immisçait pas dans la gestion de cette société et si ses fonctions s'exerçaient dans un réel état de subordination à l'égard du gérant de droit, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du Code du Travail, ensemble les articles L. 1224-1 et L. 1232-1 du même Code.