LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel et les pièces de la procédure, que M. X..., de nationalité turque, en situation irrégulière sur le territoire français, a été interpellé le 10 décembre 2008 et a fait l'objet, le 11 décembre 2008, d'un arrêté de reconduite à la frontière et d'une décision de placement en rétention administrative qui lui ont été notifiés le même jour ; que par ordonnance du 12 décembre 2008, un juge des libertés et de la détention a ordonné la prolongation de son maintien en rétention ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'ordonnance de confirmer cette décision, alors, selon le moyen, que même si la requête d'appel doit être motivée, l'auteur de l'appel est en droit de formuler un moyen au cours de l'audience ; qu'aucune fin de non recevoir ne saurait lui être opposée en raison de l'absence d'une autre partie pourtant régulièrement convoquée à l'audience ; que si un moyen est articulé au cours de l'audience qui n'a pas été évoqué dans la requête, il appartient au juge, notamment par l'intermédiaire du greffier, d'alerter au plus vite la partie non comparante pour recueillir ses observations ; qu'en décidant le contraire pour déclarer irrecevable le moyen invoqué par M. X... lors de l'audience, en l'absence du préfet, pourtant régulièrement convoqué à l'audience, le premier président a violé les articles L. 552-9, R. 552-13 et R. 552-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Mais attendu qu'ayant relevé l'absence du préfet à l'audience, le premier président en a justement déduit que seuls les motifs énoncés dans la déclaration d'appel pouvaient être invoqués ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article L. 554-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Attendu, selon ce texte, qu'un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ ; que l'administration doit exercer toutes diligences à cet effet ;
Attendu que pour ordonner la prolongation du maintien en rétention de M. X..., l'ordonnance retient qu'il ne pouvait être reproché à l'administration de n'avoir pas mis en oeuvre les démarches nécessaires à l'exécution de l'arrêté de reconduite dont il pouvait faire appel ;
Qu'en statuant ainsi, alors que si la mesure d'éloignement ne peut être exécutée avant l'expiration du délai d'appel devant la juridiction administrative, les démarches nécessaires à sa mise en oeuvre doivent être entreprises dès le placement en rétention, le premier président a violé le texte susvisé ;
Vu l'article 413-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Attendu que les délais légaux de rétention étant expirés, il ne reste plus rien à juger ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 15 décembre 2008, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Rennes ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Foussard, avocat aux Conseils pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
L'ordonnance attaquée encourt la censure ;
EN CE QU'elle a maintenu la prolongation de la rétention administrative décidée le 12 décembre 2008 ;
AUX MOTIFS QUE « M. X... a fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière pris par le Préfet du MORBIHAN le 11 décembre 2008 ; qu'en exécution d'une décision prise par le Préfet le 11 décembre 2008, il a été placé en rétention administrative le même jour à compter de 16 heures 50 ; que par requête du 11 décembre 2008, le Préfet a saisi le juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de LORIENT d'une demande de prolongation pour une durée de quinze jours de la rétention administrative, requête à laquelle il a été fait droit par ordonnance dont appel ; qu'au soutien de son application, M. X... fait valoir que la préfecture n'a entamé aucune démarche pour assurer sa reconduite à la frontière ; que toutefois, il ne peut être reproché à l'administration de n'avoir pas mis en oeuvre les démarches nécessaires à l'exécution de l'arrêté de reconduite dont M. X... pouvait faire appel ; que le moyen soulevé par le conseil à l'audience ne peut donc être pris en considération dès lors qu'il n'a pu faire l'objet d'un débat contradictoire (…) » (ordonnance, p. 1, avant-dernier et dernier § et p. 2, § 1 à 4) ;
ALORS QUE même si la requête d'appel doit être motivée, l'auteur de l'appel est en droit de formuler un moyen au cours de l'audience ; qu'aucune fin de non-recevoir ne saurait lui être opposée en raison de l'absence d'une autre partie pourtant régulièrement convoquée à l'audience ; que si un moyen est articulé au cours de l'audience qui n'a pas été évoqué dans la requête, il appartient au juge, notamment par l'intermédiaire du greffier, d'alerter au plus vite la partie non comparante pour recueillir ses observations ; qu'en décidant le contraire pour déclarer irrecevable le moyen invoqué par M. X... lors de l'audience, en l'absence du préfet, pourtant régulièrement convoqué à l'audience, le juge du second degré a violé les articles L. 552-9, R. 552-13 et R. 552-15 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
L'ordonnance attaquée encourt la censure ;
EN CE QU'elle a maintenu la prolongation de la rétention administrative décidée le 12 décembre 2008 ;
AUX MOTIFS QUE « M. X... a fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière pris par le Préfet du MORBIHAN le 11 décembre 2008 ; qu'en exécution d'une décision prise par le Préfet le 11 décembre 2008, il a été placé en rétention administrative le même jour à compter de 16 heures 50 ; que par requête du 11 décembre 2008, le Préfet a saisi le juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de LORIENT d'une demande de prolongation pour une durée de quinze jours de la rétention administrative, requête à laquelle il a été fait droit par ordonnance dont appel ; qu'au soutien de son application, M. X... fait valoir que la préfecture n'a entamé aucune démarche pour assurer sa reconduite à la frontière ; que toutefois, il ne peut être reproché à l'administration de n'avoir pas mis en oeuvre les démarches nécessaires à l'exécution de l'arrêté de reconduite dont M. X... pouvait faire appel ; que le moyen soulevé par le conseil à l'audience ne peut donc être pris en considération dès lors qu'il n'a pu faire l'objet d'un débat contradictoire (…) » (ordonnance, p. 1, avant-dernier et dernier § et p. 2, § 1 à 4) ;
ALORS QUE lorsqu'il sollicite la prolongation de la rétention, le préfet, qui doit justifier de la nécessité d'une telle mesure, doit établir les diligences qu'il a accomplies pour mettre à exécution la mesure de reconduite à la frontière ; qu'en décidant le contraire en objectant qu' «il ne pouvait être reproché à l'administration de n'avoir pas mis en oeuvre les démarches nécessaires à l'exécution de l'arrêté de reconduite dont M. X... pouvait faire appel», le juge du second degré a violé les articles L. 552-1, L. 552-9 et L. 554-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.