LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... (la caution) s'est rendue caution des concours financiers consentis par la Banque calédonienne d'investissement (la banque) à la société Compagnie touristique calédonienne (la société), dont elle était la présidente du conseil d'administration ; que la société a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 19 août et 31 octobre 1998 ; que la banque a déclaré sa créance au passif, puis, le 18 mai 2005, a assigné la caution en exécution de ses engagements ;
Sur les premier et deuxième moyens :
Attendu que ces moyens ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le troisième moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour condamner la caution à payer une certaine somme à la banque au titre de l'autorisation de découvert consentie à la société, augmentée des intérêts conventionnels, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que Mme X... était parfaitement informée des dettes de la société et de l'étendue de ses engagements de caution et, par motifs propres, qu'elle ne pouvait nullement reprocher au premier juge d'avoir assorti cette condamnation des intérêts au taux conventionnel à compter du 20 août 1998, puisque c'est à cette date que la créance de la banque était arrêtée pour les besoins de sa production à la procédure collective ;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de Mme X... faisant valoir que, de 1997 à 1999, puis de 2005 à 2007, la banque ne lui avait adressé aucune lettre l'informant des sommes restant dues, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné Mme X... à payer à la Banque calédonienne d'investissement la somme de 3 696 848 francs CFP avec intérêts au taux conventionnel à compter du 20 août 1998 jusqu'à parfait paiement, au titre de la convention de découvert consenti sur le compte n° ..., l'arrêt rendu le 11 décembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Nouméa ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nouméa, autrement composée ;
Condamne la Banque calédonienne d'investissement aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux juin deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Richard, avocat aux Conseils pour Mme X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Madame Françoise X..., solidairement avec Monsieur Jean-Pierre Y..., à payer à la Société BANQUE CALEDONIENNE D'INVESTISSEMENT (BCI) les sommes de 724. 193 FCFP, avec intérêts au taux légal à compter du 2 septembre 2004, au titre du solde du prêt, 5. 000. 0000 FCFP, avec intérêts au taux légal à compter du septembre 2004, au titre de la contre-garantie de la caution bancaire « agence de tourisme » et 3. 696. 848 FCFP, avec intérêts au taux conventionnel à compter du 20 août 1998, au titre de la convention de découvert en compte courant ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE les premiers juges ont, par des motifs complets et pertinents que la Cour adopte, déjà amplement répondu au moyen tiré du prétendu défaut de mise en garde des cautions, ainsi que sur la qualité des cautions jugées professionnelles en matière de commerce et averties selon le sens donné à ce mot par la jurisprudence ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE Monsieur Y... a exercé les fonctions de directeur général de la Société CTC depuis sa création en 1994 jusqu'en juillet 1995, et Madame X... lui a succédé à ce poste à compter de cette date jusqu'à la liquidation judiciaire ; qu'ils avaient tous deux une parfaite connaissance du secteur d'activité et de la situation financière de leur société et ils ne démontrent pas, ni même n'allèguent que la BCI détenait des informations que les dirigeants sociaux auraient eux-mêmes ignorées ; que les engagements de caution de Madame X... n'étaient pas disproportionnés, au moment de leur souscription, par rapport à son patrimoine immobilier et à ses revenus déclarés de 737. 000 FCFP par mois ; que Madame X... et Monsieur Y... étaient parfaitement informés des dettes de la Société CTC et de l'étendue de leurs engagements de caution ;
1° ALORS QUE la qualité de « caution avertie », qui dispense le banquier de son obligation de mise en garde, suppose que la caution soit en mesure d'appréhender les risques et opportunités de son engagement ; qu'en se bornant, pour décider que Madame X... avait la qualité de caution avertie, à relever qu'elle avait connaissance du secteur d'activité et de la situation financière de la société cautionnée, la Cour d'appel, qui n'a pas caractérisé la prétendue qualité de caution avertie de Madame X..., a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
2°) ALORS QUE le juge ne peut méconnaître les limites du litige, telles qu'elles sont déterminées par les conclusions respectives des parties ; qu'en affirmant que les engagements de caution de Madame X... n'étaient pas disproportionnés, au moment de leur souscription, par rapport à son patrimoine immobilier et à ses revenus déclarés de 737. 000 FCFP ; bien que la BCI n'ait nullement fait état du patrimoine et des revenus de Madame X... au moment de la souscription de ses divers engagements, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation des articles 4 et 7 du Code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Madame Françoise X..., solidairement avec Monsieur Jean-Pierre Y..., à payer à la Société BANQUE CALEDONIENNE D'INVESTISSEMENT (BCI) les sommes de 724. 193 FCFP, avec intérêts au taux légal à compter du 2 septembre 2004, au titre du solde du prêt, 5. 000. 0000 FCFP, avec intérêts au taux légal à compter du septembre 2004, au titre de la contre-garantie de la caution bancaire « agence de tourisme » et 3. 696. 848 FCFP, avec intérêts au taux conventionnel à compter du 20 août 1998, au titre de la convention de découvert en compte courant ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE les premiers juges ont, par des motifs complets et pertinents que la Cour adopte, déjà amplement répondu au moyen de Madame X... tiré du prétendu soutien abusif de la banque à l'égard de la Société COMPAGNIE TOURISTIQUE CALEDONIENNE ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE Madame X... ne justifie pas d'une situation de la Société CTC qui aurait été irrémédiablement compromise à l'époque où elle a elle-même sollicité et obtenu de la banque les concours qui lui ont été octroyés ; que la banque n'a pas à s'immiscer dans la gestion de l'entreprise, ni à se substituer aux dirigeants sociaux pour assurer cette gestion qui relève de leur responsabilité et il n'est pas démontré en quoi la banque aurait manqué à son obligation à l'égard de la Société CTC ;
ALORS QUE commet une faute de nature à engager sa responsabilité à l'égard de la caution, la banque qui soutient abusivement l'activité du débiteur principal, dont la situation est irrémédiablement compromise, lui permettant ainsi d'accroître son passif ; qu'en se bornant à affirmer que Madame X... ne justifiait pas de ce que la situation de la Société CTC aurait été irrémédiablement compromise, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les comptes sociaux de la Société CTC au titre de l'année 1996 faisaient apparaître que sa situation était irrémédiablement compromise et si la banque n'en avait pas moins maintenu ses crédits au profit de cette dernière, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame Françoise X... de sa demande tendant à voir déchoir la Société BANQUE CALEDONIENNE D'INVESTISSEMENT (BCI) de son droit aux intérêts et de l'avoir condamnée à payer à celle-ci, en sa qualité de caution, les sommes de 724. 193 FCFP, avec intérêts au taux légal à compter du 2 septembre 2004, au titre du solde du prêt, 5. 000. 0000 FCFP, avec intérêts au taux légal à compter du 2 septembre 2004, au titre de la contre-garantie de la caution bancaire « agence de tourisme » et 3. 696. 848 FCFP, avec intérêts au taux conventionnel à compter du 20 août 1998, au titre de la convention de découvert en compte courant ;
AUX MOTIFS QUE pareillement ils ne peuvent nullement reprocher aux premiers juges d'avoir justement assorti leur condamnation, au paiement de la somme de 3. 696. 848 F au titre de la somme restant due et produite du chef de la convention de découvert bancaire, des intérêts au taux conventionnel à compter du 20 août 1998, puisque c'est à cette date que la créance de la BCI avait été arrêtée pour les besoins de sa production à la procédure collective de la société COMPAGNIE TOURISTIQUE CALEDONIENNE, alors que madame X... et monsieur Y..., qui avaient tous deux signé le 18 juin 1997 des actes de caution solidaire et indivisible, visant cette convention de découvert qui comportait le taux précis du T. E. G, s'étaient engagés y compris par écrit dans leur acte de caution, non seulement pour un principal de 3. 000. 000 F CFP mais encore pour les frais, intérêts et autres accessoires dus au titre de cette convention ;
ALORS QUE l'établissement de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, est tenue, au plus tard avant le 31 mars de chaque année, à peine de déchéance des intérêts, de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement ; qu'en condamnant néanmoins Madame X... au paiement des intérêts conventionnels, sans répondre à ses conclusions, faisant valoir que de 1997 à 1999, puis de 2005 à 2007, la BCI ne lui avait adressé aucune lettre l'informant des sommes restant dues, de sorte qu'elle devait être déchue des intérêts pour les années concernées, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie.