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16/06/2010 | FRANCE | N°09-40065

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 juin 2010, 09-40065


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L.1121-1, L.1234-1, L.1234-5, L.1234-9 et L.1152-2 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 10 avril 2000 en qualité de consultant par la société Conseillers en gestion et informatique (CGI), devenu ensuite chef de projet, a été licencié pour faute grave le 3 mai 2005 ;
Attendu que pour retenir la faute grave et débouter M. X... de ses demandes, l'arrêt retient que le salarié avait insinué qu'il avait été sanctionné pour cou

vrir des fautes de membres de la direction, avait refusé de rejoindre le troisi...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L.1121-1, L.1234-1, L.1234-5, L.1234-9 et L.1152-2 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 10 avril 2000 en qualité de consultant par la société Conseillers en gestion et informatique (CGI), devenu ensuite chef de projet, a été licencié pour faute grave le 3 mai 2005 ;
Attendu que pour retenir la faute grave et débouter M. X... de ses demandes, l'arrêt retient que le salarié avait insinué qu'il avait été sanctionné pour couvrir des fautes de membres de la direction, avait refusé de rejoindre le troisième étage en communiquant exclusivement par courriels et avait menacé l'employeur de poursuite pénale pour harcèlement moral ;
Qu'en statuant ainsi, sans relever des propos injurieux, diffamatoires ou excessifs et sans caractériser la mauvaise foi dans la dénonciation de faits de harcèlement moral, alors que la lettre de licenciement ne faisait pas grief d'une menace de poursuite pénale, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 novembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Conseillers en gestion et informatique aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Conseillers en gestion et informatique à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize juin deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux conseils pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté monsieur X... de toutes ses demandes tendant à obtenir la condamnation de la société Conseillers en Gestion et Informatique (CGI) à lui payer diverses indemnités à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité de préavis et de congés payés y afférents et d'indemnité conventionnelle de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE l'employeur fait grief au salarié d'avoir dénigré sa hiérarchie auprès de la direction générale, notamment en l'accusant de malhonnêteté, et d'avoir adopté une attitude de critique systématique, d'insolence et de déstabilisation de la société ; que le courriel, envoyé le 2 février 2005 par monsieur X... à Monsieur Y..., directeur général, après l'avertissement précité, est ainsi rédigé : « J'ai de sérieuses raisons de penser que ces personnes ont rejeté leur faute sur leur subordonné afin d'échapper à leurs responsabilités. Dans l'intérêt de l'entreprise, il me semble qu'il est urgent de régler cette situation » ; que si un salarié jouit dans l'entreprise de sa liberté d'expression, il ne peut abuser de cette liberté par des propos injurieux, diffamatoires ou excessifs ; qu'en l'espèce, en insinuant qu'il avait été sanctionné pour couvrir des fautes de membres de la direction, le salarié a jeté la suspicion sur ceux-ci et a abusé de sa liberté d'expression, étant observé qu'il n'avait pas saisi le conseil de prud'hommes pour contester, par des voies légales, l'avertissement qui lui avait été infligé ; que l'employeur fait grief au salarié d'avoir adopté un comportement d'insubordination lors de la nouvelle mission à laquelle il a été affecté, le 2 février 2005, dans le cadre du projet Ariane New Convergence, sous la direction de monsieur B..., directeur conseil ; qu'il précise que monsieur B... a été obligé d'en référer au directeur services conseil pour que monsieur X... quitte le cinquième étage et rejoigne les autres participants qui travaillaient au troisième étage ; que le compte-rendu de la réunion du 11 février 2005, qu'il produit, démontre ce fait ; que l'employeur reproche, également, au salarié d'avoir, après avoir rejoint l'équipe au troisième étage, décidé de communiquer avec elle exclusivement par courriels, alors qu'ils se trouvaient tous dans le même bureau ; que les courriels versés aux débats mettent en évidence que le salarié ne communiquait plus par la parole, et que son supérieur hiérarchique lui répondait : « Julien, je suis assis à côté de toi et au lieu de me parler et de me demander tu envoies des emails pour chaque problème que tu ne solutionnes pas … Les emails ne sont pas la solution. Tu es installé ici pour que tu puisses demander à l'équipe et te faire aider par l'équipe qui t'entoure. Je demande à Arnaud de te faire les premiers pas » ; que l'employeur invoque, enfin, des menaces et des poursuites pénales faites par le salarié, auquel il avait été reproché d'avoir pris un congé sans avoir respecté la procédure en vigueur dans l'entreprise ; qu'il produit un courriel que le salarié a envoyé à ce sujet et qui est rédigé comme suit : « Vos tergiversations concernant le fait de savoir si oui ou non j'ai prévenu quelqu'un sont j'en suis conscient, fondamentales mais j'ai déjà indiqué dans ma demande et en commentaire de celle-ci que j'avais fait une erreur de manipulation du système de gestion. D'autre part, je tiens à indiquer, à Alain B..., que je ne pouvais commencer mercredi matin, comme tu le souhaitais car j'avais un bilan médical de la sécu à effectuer. Tu étais donc au courant. Si vous persistez, je confirmerais que cela tourne au harcèlement moral. Etant donné ce que tu m'as dit l'autre jour en présence de témoins qui sont certainement prêts à témoigner Alain, je pense prendre très rapidement contact avec un avocat » ; que ce document démontre le grief invoqué ; qu'il résulte de ce qui précède que l'employeur justifie que le salarié a dénigré son employeur notamment et a réitéré des actes d'insubordination ; que ce comportement était de nature à rendre impossible le maintien de ce dernier pendant la durée du préavis et constituait une faute grave ; qu'il y a lieu d'infirmer le jugement déféré et de débouter le salarié de l'ensemble de ses demandes ;
1°) ALORS QUE l'usage par le salarié de sa liberté d'expression ne constitue une faute grave que s'il a dégénéré en abus ; qu'en affirmant qu'en insinuant dans le courriel adressé au directeur général qu'il avait été sanctionné pour couvrir des fautes des membres de la direction, monsieur X... avait jeté la suspicion sur ceux-ci et abusé de sa liberté d'expression, sans caractériser l'existence de propos excessifs, diffamatoires ou injurieux, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1121-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
2°) ALORS QUE ne constitue pas une faute grave rendant impossible le maintien du salarié dans l'entreprise le fait, pour un ingénieur informaticien, de ne pas spontanément rejoindre un bureau collectif lorsqu'il dispose d'un bureau personnel et de communiquer exclusivement par courriels avec les membres de son équipe ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L.1234-9 du code du travail ;
3°) ALORS QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige et interdit à l'employeur d'invoquer de nouveaux motifs et au juge d'examiner des griefs non invoqués dans cette lettre ; qu'en estimant que le grief tiré de «menaces de poursuites pénales faites par monsieur X... » était établi quand ce motif n'était pas visé dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;
4°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QU' un licenciement ne peut pas être légalement fondé sur le fait que le salarié aurait menacé l'employeur de prendre contact avec un avocat en raison du harcèlement moral dont il était victime ; qu'en jugeant que le grief tiré des menaces de poursuites pénales pour harcèlement moral était fondé, ce qui justifiait le prononcé du licenciement de monsieur X... pour faute grave, la cour d'appel a violé l'article 1152-2 du code du travail ;
5°) ALORS QUE pour apprécier la légitimité du licenciement pour faute grave, les juges doivent prendre en compte l'ancienneté du salarié et l'absence d'antécédents disciplinaires ; qu'en s'abstenant de prendre en considération l'ancienneté de monsieur X... dans l'entreprise et l'absence de reproche tout au long de sa carrière, pour apprécier la gravité des fautes qui lui étaient reprochées, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
6°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QU' il incombe aux juges de vérifier la cause exacte du licenciement sans être tenus par les motifs énoncés par l'employeur ; que dans ses conclusions d'appel, monsieur X... faisait valoir que les motifs véritables de son licenciement n'étaient pas ceux énoncés dans la lettre de rupture, et que son licenciement procédait en réalité d'une volonté de se débarrasser de lui, à faible coût, dès lors que son salaire ne correspondait plus aux grilles du marché; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si le licenciement n'avait pas été en réalité seulement motivé par une volonté d'écarter le salarié de l'entreprise en raison du montant de son salaire, jugé trop élevé, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1232-6, L. 1232-1, L. 1235-1, L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-40065
Date de la décision : 16/06/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 novembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 jui. 2010, pourvoi n°09-40065


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Potier de La Varde, Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.40065
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