LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 242-5 du code de la sécurité sociale ;
Attendu que si, aux termes de l'alinéa 3 du texte susvisé, le classement d'un risque dans une catégorie peut être modifié à toute époque, les dispositions de son premier alinéa imposent que le taux de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles soit déterminé annuellement pour chaque catégorie de risque par la caisse régionale d'assurance maladie ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'issue de la fusion, en 2002, de trois établissements de soins, la Clinique de l'Anjou (la clinique) a procédé, le 1er septembre 2006, au regroupement en un même établissement des activités de ces derniers ; qu'informée de ce regroupement, la caisse régionale d'assurance maladie des Pays de la Loire (la caisse) a notifié à la clinique un nouveau taux de cotisation prenant effet au 1er septembre 2006 ; que celle-ci a saisi d'un recours la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail ;
Attendu que, pour débouter la clinique de sa demande, l'arrêt, après avoir énoncé qu'aux termes de l'article L. 242-5, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale, le taux de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles est déterminé annuellement pour chaque catégorie de risques par la caisse régionale, l'alinéa 3 du même article précisant toutefois que le classement d'un risque dans une catégorie peut être modifié à toute époque, l'employeur étant tenu de déclarer à la caisse régionale d'assurance maladie toute circonstance de nature à aggraver les risques, retient que si le taux notifié est, en principe, déterminé pour une année, la caisse régionale d'assurance maladie est tenue, en cas de modification de la situation juridique et/ou géographique d'une entreprise ou d'un ou de plusieurs établissements en cours d'exercice, de notifier un nouveau taux si les circonstances l'exigent à compter de la date d'effet de la modification ;
Qu'en statuant ainsi, la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 avril 2009, entre les parties, par la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, autrement composée ;
Condamne la caisse régionale d'assurance maladie des pays de la Loire aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse régionale d'assurance maladie des Pays de la Loire ; la condamne à payer à la société Clinique de l'Anjou la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois juin deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour la clinique de l'Anjou
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
(principe de tarification annuelle)Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré mal fondé le recours de la SAS Clinique de l'Anjou contre la décision de la CRAM des Pays de la Loire en date du 28 septembre 2006 fixant son taux de cotisation à effet du le 1er septembre 2006, et de L'AVOIR en conséquence déboutée de toutes ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE :
«Aux termes de l'article L.242-5 alinéa j du Code de la Sécurité Sociale, le taux de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles est déterminé annuellement pour chaque catégorie de risques par la caisse régionale d'assurance maladie. L'alinéa 3 du même article précise que le classement d'un risque dans une catégorie peut être modifié à toute époque, l'employeur étant tenu de déclarer à la caisse régionale d'assurance maladie toute circonstance de nature à aggraver les risques. Aussi le taux notifié est-il en principe déterminé pour une année. Toutefois, en cas de modification de la situation juridique et/ou géographique d'une entreprise ou d'un ou plusieurs établissements en cours d'exercice, la caisse régionale d'assurance maladie est tenue de notifier un nouveau taux si les circonstances l'exigent à compter de la date d'effet de la modification.» (arrêt p.6)
1./ ALORS QUE, le taux de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles est déterminé annuellement pour chaque catégorie de risque par la Caisse régionale d'assurance maladie et seul le classement d'un risque dans une catégorie peut être modifiée à toute époque; qu'en notifiant à la Clinique de l'Anjou pour l'année civile 2006 un premier taux de cotisation de 1,44% par décision du 3 janvier 2006 avec effet au 1er janvier précédent, puis un nouveau taux de 1,79% par décision également rétroactive du 28 septembre 2006 à effet du 1er septembre 2006, quand seul le classement d'un risque dans une catégorie était susceptible d'être modifié à tout moment, la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification a violé le principe de tarification annuelle de l'article L.242-5 du code de la sécurité sociale ;
2./ ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE si par exception le classement d'un risque peut être modifié à toute époque il faut pouvoir justifier d'éléments nouveaux de nature à démontrer l'existence d'une modification de la nature du risque ; qu'en se contentant d'invoquer une modification de la situation juridique et/ou géographique de l'entreprise ou des établissements pour faire application d'un nouveau taux sans constater ni rechercher si la CRAM des Pays de la Loire avait changé de catégorie de risque le classement de l'établissement de la Clinique de l'Anjou et sans même énoncer en quoi la nature du risque aurait été modifiée, la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L.242-5 al.3 et D 242- 6-1 du code de la sécurité sociale ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(principe de tarification par établissement)Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré mal fondé le recours de la SAS Clinique de l'Anjou contre la décision de la CRAM des Pays de la Loire en date du 28 septembre 2006 fixant son taux de cotisation à effet du 1er septembre 2006, et de L'AVOIR en conséquence déboutée de toutes ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE :
«L'article D.242-6-1 du code de la sécurité sociale dispose que « le taux de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles est déterminée par établissement. La Cour rappelle qu'au sens de la législation sur la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles, un établissement est caractérisé par la disposition des lieux, l'organisation du travail et le nombre des opérations permettant de particulariser les risques encourus par son personnel et qu'une direction indépendante n'est pas exigée. Ainsi, si l'entreprise est constituée de plusieurs établissements, un taux sera notifié pour chacun des établissements ; si elle est constituée d'un établissement unique, un seul taux lui sera notifié. En l'espèce, la caisse régionale d'assurance maladie des Pays de la Loire a maintenu la notification de trois taux différents pour chaque établissement suite à la fusion de la clinique de l'Espérance, la clinique Saint Louis et la clinique Saint Martin le 29 novembre 2002. Or, suite au regroupement de ces trois établissements au sein du site constitué par la Clinique de l'Anjou le J septembre 2006, la caisse régionale d'assurance maladie, qui a tenu compte de ces nouvelles circonstances, a notifié un seul taux, à effet du 1er septembre 2006. Il apparaît au vu des pièces produites par les parties que le taux contesté a été notifié à effet du 1er septembre à la Clinique de l'Anjou constituée d'un seul et unique établissement situé 87 rue du Château d'Orgemont à ANGERS (49000). Ce taux n'est donc pas celui de l'établissement Clinique de l'Espérance et il ne peut donc être reproché à la Caisse régionale d'assurance maladie d'avoir pris en considération les éléments statistiques résultant de la réunion des trois établissements au sein de la Clinique de l'Anjou. Le moyen invoqué en ce sens n'est dès lors pas très pertinent. La Clinique de l'Anjou fait également valoir qu'en cas de reprise d'une entreprise par une autre, et dans la mesure où il n'y a pas d'établissement nouveau, cette reprise ne pourra avoir une incidence sur la tarification des établissements que lorsque l'année de reprise coïncidera avec une des trois dernières années connues, soit uniquement à compter de N+2. Cependant, en application de l'article D.242-6-7 du code de la sécurité sociale, les taux réels sont déterminés en fonction de la valeur du risque et de la masse salariale de chaque établissement. En conséquence, il appartient à la caisse régionale d'assurance maladie de tenir compte de l'ensemble des éléments statistiques des entreprises reprises par une autre dès que la reprise revient. Ainsi, la Cour considère-t-elle , au regard de son pouvoir souverain d'appréciation, qu'au vu des circonstances de l'espèce, c'est à bon droit que la caisse régionale d'assurance maladie des Pays de la Loire a notifié un taux à la Clinique de l'Anjou à effet du 1er septembre 2006 en tenant compte des éléments statistiques de la clinique de l'Espérance, de la clinique Saint-Louis et de la clinique Saint-Martin» (arrêt p.7).
1./ ALORS QUE, le taux de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles est déterminé par établissement, que pour justifier d'une réévaluation du taux de cotisations AT/MP de l'établissement de l'Espérance par décision du 28 septembre 2006 la CRAM des Pays de la Loire a décidé, sans fondement légal, de faire peser sur l'établissement de l'Espérance les éléments des établissements Saint-Louis et de Saint-Martin qui ont été préalablement fermés, de sorte que la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification a violé les dispositions de l'article D.242-6-1 du code de la sécurité sociale et le principe de tarification par établissement ;
2./ ALORS QUE pour valider la décision de la CRAM des Pays de la Loire ayant pris en considération pour la notification de son taux les éléments statistiques résultant de la réunion des trois établissements au sein de la Clinique de l'Anjou, la Cour relève, au vu des pièces produites, que le taux contesté a été notifié à effet du 1 er septembre 2006 à la Clinique de l'Anjou «constituée d'un seul et unique établissement situé 87 rue du Château d'Orgemont à ANGERS (49000)», et que ce taux n'est pas celui de l'établissement Clinique de l'Espérance ; qu'en se prononçant ainsi sans caractériser en quoi l'établissement de l'Espérance sis à la même adresse que la Clinique de l'Anjou et devenu l'établissement unique de la Clinique devrait se voir notifier un nouveau taux, la Cour a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article D 242-6-1 du code de la Sécurité sociale.
3./ ALORS QUE dans ses conclusions délaissées (mémoire p.2, 3, 6 à 8), la clinique de l'Anjou avait fait valoir que dès lors que les établissements de Saint-Louis et Saint-Martin avaient fermé et qu'il n'existait pas d'établissement nouveau, la CRAM des pays de la Loire ne pouvait régulièrement lui notifier au cours de l'année 2006 un nouveau taux de cotisation AT/MP sur le site rénové de la clinique de l'Espérance en négligeant d'une part, les éléments statistiques des trois dernières années (2002 à 2004) propres à cet établissement et en lui appliquant d'autre part, le poids de la valeur du risque et de la masse salariale des anciens établissements de Saint Louis et Saint Martin à compter de l'exercice 2002, quand le regroupement de l'activité sur un site unique à compter du 1er septembre 2006 ne pouvait avoir d'incidence pour le calcul du taux de cotisations qu'à compter de l'année N+2, soit en 2008 et que ce taux devait être déterminé à partir des éléments propres à cet établissement rénové et non au niveau de l'entreprise ; qu'en omettant de répondre à ce moyen pertinent la Cour a violé l'article 455 du code de procédure civile.