LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 20 mai 2008), que M. X... a été engagé par la société Les Tanneries du Puy à compter du 14 décembre 1981 ; que revendiquant la classification d'agent de maîtrise, coefficient 205 de la convention collective nationale de l'industrie des cuirs et des peaux, le salarié a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'avoir dit que le salarié devait être classé dans la catégorie des agents de maîtrise au coefficient 207 et de l'avoir condamné au paiement de diverses sommes, alors, selon le moyen :
1° / qu'aux termes de l'annexe I du 27 octobre 1975 de l'avenant " techniciens et agents de maîtrise " du 4 janvier 1973 de la convention collective nationale de l'industrie des cuirs et peaux, relèvent de cette dernière catégorie, " les agents ayant de façon permanente une responsabilité de commandement et de surveillance du personnel " ; qu'il était constant que M. X... était un ouvrier " posté " alternant, une semaine sur l'autre, le travail en équipe le matin et l'après-midi ; qu'en retenant, pour dire que M. X... relevait de la catégorie des agents de maîtrise, que ce dernier exerçait certaines responsabilités de commandement " lorsqu'il est en poste les après-midi ", ce dont il résultait nécessairement qu'il ne les exerçait pas de façon " permanente " ainsi que le prescrivent les dispositions conventionnelles, mais uniquement pendant la moitié de son temps de travail, la cour d'appel a violé l'annexe I susvisée, ensemble l'article 12 de convention collective nationale de l'industrie des cuirs et peaux ;
4° / qu'à supposer que les motifs des premiers juges, qui ont retenu que le salarié " donne des ordres, répartit le travail aux ouvriers, et organise le travail ", aient été adoptés par la cour d'appel dans cette formulation, l'arrêt, qui s'est abstenu de préciser la consistance des " ordres ", de la " répartition " et de " l'organisation du travail " assumés par l'intéressé, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que selon l'annexe I du 27 octobre 1975 de l'avenant " techniciens et agents de maîtrise " du 4 janvier 1973 de la convention collective nationale de l'industrie des cuirs et peaux, on entend par agents de maîtrise, techniciens et assimilés, les agents ayant d'une façon permanente une responsabilité de commandement et de surveillance du personnel, ainsi que les agents qui, n'exerçant pas de commandement, ont une fonction d'importance équivalente en raison de la compétence technique, administrative ou commerciale exigée ou de la responsabilité assumée ;
Et attendu que la cour d'appel a relevé que le salarié avait reçu pour mission de contrôler systématiquement la conformité des marchandises produites, et en cas de non-conformité, d'informer la direction technique et le directeur de production des anomalies constatées, exerçait une certaine responsabilité de commandement sur les autres ouvriers, lorsqu'il était en poste les après-midi et a retenu que le fait que figurait un agent de maîtrise parmi le personnel chargé de cette mission de contrôle établissait que pour l'employeur, elle ne relevait pas de la compétence d'un simple ouvrier ; qu'en l'état de ces constatations, la cour d'appel a pu décider que les fonctions exercées par le salarié correspondaient à celles d'un agent de maîtrise coefficient 205 ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Les Tanneries du Puy aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mai deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société Les Tanneries du Puy.
AUX MOTIFS PROPRES QUE « la convention collective de l'industrie des cuirs et peaux, en son article 12, qui définit les différentes catégories d'ouvriers (à l'exception de ceux qualifiés O. H. Q) et dont l'annexe établit des nomenclatures précisant les travailleurs composant ces catégories, n'interdit pas à la société LES TANNERIES DU PUY de créer des classifications et des coefficients différents de ceux qu'elle établit, à la condition que les salaires correspondant à ces nouveaux classifications et coefficients soient supérieurs à ceux qu'elle prévoit ; qu'il ressort des bulletins de paie d'Eric X... qu'il perçoit, du fait de sa qualification D'OHQ3 et de l'attribution du coefficient 185, classification et coefficient créés par la société LES TANNERIES DU PUY, des salaires qui sont supérieurs au minima prévus par la convention collective ; qu'il apparaît ainsi que sa situation est améliorée par rapport à celle prévue par la convention collective, et que la société LES TANNERIES DU PUY n'a pas violé ses dispositions, spécialement celles de son article 12 ; cependant et en second lieu que selon l'annexe 1 du 27 octobre 1975 de l'avenant techniciens et agents de maîtrise du 4 janvier 1973, on entend par agents de maîtrise les agents ayant d'une façon permanente une responsabilité de commandement et de surveillance du personnel ; que selon la même annexe, les agents de maîtrise classés au premier échelon, correspondant au coefficient 205 (soit le coefficient revendiqué par Eric X...) exercent des fonctions qui répondent à la définition générale et qui se trouvent sous la direction d'un agent de maîtrise d'un échelon supérieur ou éventuellement d'un cadre ; qu'ils agissent aussi sur programmes définis et instructions précises, et font effectuer des travaux simples ; qu'Eric X... verse aux débats plusieurs attestations de témoins, rédigées dans les formes prévues par l'article 202 du nouveau code de procédure civile, desquelles il ressort qu'il est responsable d'une équipe l'après midi, et qu'à cette occasion, il peut demander à certains ouvriers de changer de machine afin de " gérer la priorité des peaux et organiser le travail dans le poste " ; qu'il ressort aussi de ces témoignages qu'Eric X..., depuis plusieurs années, donne le travail et les consignes du poste de nuit par écrit ; ES TANNERIES DU PUY intitulé " instruction technique des contrôles en mi-fini de l'adhérence, de la main, de la présentation et de l'unisson " (fiche I. T. C), qu'il a signé le 23 mars 2004 avec trois autres salariés, dont l'un, M. Pierro Y..., est agent de maîtrise, ainsi que cela ressort de la liste du personnel établie par l'entreprise ; qu'il ressort de cette fiche I. T. C qu'Eric X... a reçu pour mission de contrôler systématiquement la conformité des marchandises produites, et en cas de non conformité, d'informer la direction technique et le directeur de production des anomalies constatées ; qu'il résulte de ces pièces d'une part qu'Eric X... exerce une certaine responsabilité de commandement sur les autres ouvriers, lorsqu'il est en poste les après-midi, dès lors qu'il a autorité pour demander à ces derniers de changer régulièrement de machine, dans le cadre de l'organisation de leur travail, ou qu'il donne des consignes de travail par écrit, destinées à l'équipe suivante ; d'autre part qu'il surveille, fût-ce indirectement, le personnel de production, dans la mesure où lui a été confiée la mission de vérifier la conformité des peaux produites par celui-ci ; que le fait que figure un agent de maîtrise parmi le personnel chargé de cette mission de contrôle établit bien que pour la société LES TANNERIES DU PUY elle ne ressortit pas de la compétence d'un simple ouvrier ; que l'octroi à Eric X... d'une qualification créée (OHQ3) en vertu de laquelle, selon la définition proposée par la société LES TANNERIES DU PUY, un tel ouvrier peut être assimilé à un " chef d'équipe " disposant d'une polyvalence nécessaire pour tous les postes de son secteur, qui peut assister ainsi les opérateurs pour assurer le bon fonctionnement des opérations, et discerner les non conformités, est sans incidence sur la qualification à attribuer à l'intimé au seul regard des dispositions de la convention collective, spécialement de celles de son article 12, et de la définition des agents de maîtrise donnée par l'annexe 1 du 27 octobre 1973 ; en effet que les qualifications et coefficients créées par la société LES TANNERIES DU PUY ne résultent pas d'un accord d'entreprise, ou d'un autre accord collectif, et ne sont donc pas opposables à Eric X..., même si elles ne sont pas interdites par la convention collective ; que l'article 12 de la convention collective, qui définit les différentes catégories d'ouvrier, ne prévoit en aucun cas qu'un ouvrier puisse exercer une autorité sur d'autres ouvriers, ou qu'il puisse être amené à exercer une certaine surveillance du personnel en contrôlant la qualité des produits ; par ailleurs que le fait pour Eric X..., lorsqu'il est en poste l'après-midi, d'effectuer son travail conformément aux consignes laissées par l'agent de maîtrise du matin, n'est pas incompatible avec la définition de l'agent de maîtrise classé au premier échelon, puisque un tel agent se trouve, au regard de la définition donnée par l'annexe 1 du 27 octobre 1975, sous la direction d'un agent de maîtrise d'un échelon supérieur ; en outre qu'il ne ressort pas des pièces produites qu'Eric X... remplace épisodiquement un agent de maîtrise, dès lors qu'au regard des propres écritures de la société LES TANNERIES DU PUY, il alterne une semaine sur deux le travail en équipe le matin et le travail en équipe l'après midi, et qu'il est ainsi amené à exercer régulièrement les fonctions qui sont décrites par les témoins ; attendu en définitive que les pièces produites par Eric X... font ressortir qu'il exerce en réalité dans l'entreprise des fonctions qui répondent à la définition de l'agent de maîtrise subalterne ; qu'il est donc fondé à solliciter le bénéfice du coefficient 205 (...) dans ces conditions ; le jugement entrepris sera confirmé en toutes ses dispositions, sauf à réactualiser la créance d'Eric X..., au 30 novembre 2007 ; qu'eu égard au tableau établi par Eric X..., il convient en effet de fixer sa créance comme suit :- rappel de salaires : 2003 : 1. 674, 79 euros ; 2004 : 2. 039, 64 euros ; 2005 : 2. 183, 76 euros ; 2006 : 2. 101, 41 euros ; 2007 (jusqu'au 30 novembre 2007) : 1. 960, 08 euros ; sous-total : 9. 959, 68 euros : ; indemnité compensatrice de congés payés : 995, 96 euros ; ; rappel demi-prime : 1. 095, 56 euros ; Total : 12. 051, 12 euros ; attendu en conséquence qu'il convient de condamner la société LES TANNERIES DU PUY à payer à Eric X... la somme de 12. 051, 12 euros, outre les rappels de salaires, indemnités compensatrices de congés payés et demi-prime correspondant à sa nouvelle classification à compter du 1er décembre 2007 ; attendu qu'il y a lieu également de condamner la société LES TANNERIES DU PUY à délivrer à Eric X... les bulletins de paye rectifiés en raison de son changement de classification, et ce à peine d'astreinte ; attendu qu'Eric X... sollicite la réparation du préjudice que lui a causé le défaut de paiement de l'intégralité de ses salaires et accessoires ; qu'il y a lieu d'en déduire qu'il demande pour le moins l'allocation de dommages-intérêts moratoires ; que toutefois, il n'établit pas avoir subi un préjudice distinct de celui qui sera réparé par l'allocation d'intérêts au taux légal ; par suite qu'il convient de condamner la société LES TANNERIES DU PUY à lui payer les intérêts moratoires produits par la somme de 12. 051, 12 euros à compter du 12 septembre 2006, date à laquelle il a formé oralement cette demande de dommages-intérêts devant le conseil de prud'homme, et en l'absence d'une sommation de payer antérieure » ;
1. ALORS QU'aux termes de l'annexe I du 27 octobre 1975 de l'avenant « techniciens et agents de maîtrise » du 4 janvier 1973 de la convention collective nationale de l'industrie des cuirs et peaux, relèvent de cette dernière catégorie, « les agents ayant de façon permanente une responsabilité de commandement et de surveillance du personnel » ; qu'il était constant que M. X... était un ouvrier « posté » alternant, une semaine sur l'autre, le travail en équipe le matin et l'après-midi ; qu'en retenant, pour dire que M. X... relevait de la catégorie des agents de maîtrise, que ce dernier exerçait certaines responsabilités de commandement « lorsqu'il est en poste les après-midi », ce dont il résultait nécessairement qu'il ne les exerçait pas de façon « permanente » ainsi que le prescrivent les dispositions conventionnelles, mais uniquement pendant la moitié de son temps de travail, la Cour d'appel a violé l'annexe I susvisée, ensemble l'article 12 de convention collective nationale de l'industrie des cuirs et peaux ;
3. ET ALORS QU'il résulte de l'annexe II de la convention collective nationale des cuirs et peaux relative à la classification des emplois, à laquelle renvoie l'article 12 de ladite convention, que relèvent de la catégorie des « OHQ », c'est à dire des « ouvriers hautement qualifiés », les ouvriers responsables de la totalité des opérations à accomplir dans le secteur spécifique du tannage (conduite des machines, réglage de scie, pesage-teinture, triage...), ainsi que ceux chargés de vérifier le travail effectué, dans le cadre de « contrôles de conformité », de « contrôles qualitatifs », ou encore de l'établissement de « rapports de réception et de rendement » ; que dès lors, en affirmant que l'article 12 susvisé excluait que des ouvriers « puiss ent exercer une autorité sur d'autres, ou... : être amené s à exercer une certaine surveillance du personnel en contrôlant la qualité des produits », pour en déduire que M. X... ne pouvait qu'occuper un poste d'agent de maîtrise, la Cour d'appel a violé ledit article ensemble les l'annexe II de la convention, ainsi que l'annexe I de l'avenant « techniciens et agents de maîtrise » de la convention collective nationale des cuirs et peaux ;
4. ET ALORS ENFIN QU'à supposer que les motifs des premiers juges, qui ont retenu que le salarié « donne des ordres, répartit le travail aux ouvriers, et organise le travail », aient été adoptés par la Cour d'appel dans cette formulation, l'arrêt, qui s'est abstenu de préciser la consistance des « ordres », de la « répartition » et de « l'organisation du travail » assumés par l'intéressé, a violé l'article 455 du Code de procédure civile.