LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu, selon le jugement attaqué, que M. X... a été engagé en avril 2005 par la société Envain matériaux en qualité de chauffeur-livreur ;
qu'ayant été victime de deux accidents du travail, il a été pris en charge d'abord au titre d'un arrêt maladie, puis sous le régime des accidents du travail ; que contestant les sommes qui lui étaient versées de ces chefs, il a attrait son employeur devant le conseil de prud'hommes qui l'a débouté de ses demandes et l'a condamné à payer des dommages-intérêts pour procédure abusive ;
Qu'en statuant ainsi, sans caractériser l'existence d'une faute commise par M. X... faisant dégénérer en abus l'exercice du droit d'agir en justice, le conseil de prud'hommes a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné M. X... à des dommages-intérêts pour procédure abusive, le jugement rendu le 5 mai 2008, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Valenciennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Lille ;
Condamne la société Envain matériaux aux dépens ;
Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société Envain à payer à la SCP Thomas-Raquin et Bénabent la somme de 800 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mai deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Thomas-Raquin et Bénabent, avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est fait grief au jugement attaqué d'avoir condamné Monsieur X... à payer à la SA ENVAIN MATERIAUX la somme de 800 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ainsi que celle de 1000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE «C'est Monsieur Pierre X... qui fournit luimême le relevé détaillé des indemnités journalières versées par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Valenciennes ;
Que le 31 août 2007, la SA ENVAIN MATERIAUX établira une fiche de paie à Monsieur Pierre X... régularisant sa situation pour un montant de 61,55 € ;
Que Monsieur Pierre X... avait tout d'abord été classé en maladie «normale» puis en maladie «accident du travail» ce qui explique les régularisations ;
Que le Conseil de prud'hommes a vérifié tous les documents comptables : fiches de paie, relevés Caisse Primaire d'Assurance Maladie ; que sans confondre salaire brut et salaire net, Monsieur Pierre X... a bien touché toutes les sommes qui lui étaient dues ; que les documents sont détaillés et précis, suffisants à fonder la conviction du Conseil de prud'hommes ; que la convention collective est fournie ;
Que Monsieur Pierre X... a touché 5 402,50 € de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie et non 4 084,66 euros comme il le dit dans ses écritures ;
Qu'avant la saisine du Conseil de prud'hommes, la SA ENVAIN MATERIAUX a déjà fourni toutes les explications comptables à Monsieur Pierre X... ; qu'il en a été de même lors du référé ; que le demandeur ne pouvait ignorer aucune pièce du dossier ; qu'il ne pouvait valablement pas croire au succès de sa prétention, il y a une absence manifeste de fondement (article 32-1 du Code de procédure civile) ;
Qu'en conséquence : le Conseil de prud'hommes dit que Monsieur Pierre X... a été entièrement rempli de ses droits ; qu'il y a lieu de le débouter de sa demande de rappel de complément conventionnel de salaire ainsi que de celle de dommages-intérêts pour retard de paiement et résistance abusive ;
Qu'il a agi en justice d'une façon abusive ;
Que le Conseil de prud'hommes fait droit à la demande de la SA ENVAIN formulée au titre de la procédure abusive et ce pour un montant de 800,00 euros ;
Qu'il y a lieu de donner acte à la SA ENVAIN MATERIAUX du règlement de la somme de 61,55 euros au titre de la garantie conventionnelle de maintien de salaire et ce sur la fiche d'août 2007 ; qu'il paraît équitable de laisser à la charge de la partie demanderesse les sommes exposées par elle à l'occasion de la présente procédure et non comprise dans les dépens ; qu'il y a lieu de la débouter de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Que par contre, il paraît inéquitable de laisser à la charge de la partie défenderesse les sommes exposées par elle à l'occasion de la présente procédure et non comprises dans les dépens ;
Qu'il y a lieu de faire droit à sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile à hauteur de 1 000,00 €» ;
ALORS QUE l'exercice d'une action en justice constitue un droit et ne peut engager la responsabilité civile de son auteur qu'en cas de faute faisant dégénérer en abus le droit d'ester en justice ; qu'en l'espèce, pour condamner Monsieur X... à régler à son ex-employeur la somme de 800 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive, le Conseil de prud'hommes s'est borné à relever que l'ex-salarié victime de deux accidents du travail qui réclamait un rappel de salaire au titre de la garantie de maintien de salaire conventionnelle ne pouvait valablement croire au succès de sa prétention, son ex-employeur lui ayant fourni dès la procédure de référé toutes les explications comptables ; qu'en statuant ainsi, sans caractériser la faute de Monsieur X... de nature à faire dégénérer en abus son droit d'ester en justice, le Conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil.