LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 16 février 2009), que M. X..., a concédé la licence de la marque A..., dont il est titulaire, à la société Centre national de recherche en relations humaines (la société Z...), agence matrimoniale, au nom commercial A... qui exploite le site internet www. A.... com ; qu'ayant appris que Mme Y..., qui exerce, en son nom personnel et sous le nom commercial Inter Union une activité d'agence matrimoniale, utilisait le site www. A.... fr, et après l'avoir mise en demeure de cesser ses agissements, M. X... et la société Z... l'ont assignée en contrefaçon de marque et en concurrence déloyale ;
Attendu que la société Z... et M. X... reprochent à l'arrêt de rejeter leurs demandes en contrefaçon et concurrence déloyale, alors, selon le moyen :
1°) que le simple fait matériel d'exploiter une contrefaçon est interdit et oblige à réparation ; qu'il ressort des propres constatations des juges du fond, que le site « A.... fr » exploitait la contrefaçon du nom « A... » ; que l'adresse internet « A.... fr » renvoyait au site commercial de Mme
Y...
; que celle-ci profitait ainsi directement de la contrefaçon de la marque « A... » ; qu'il devait nécessairement s'en déduire que Mme Y... exploitait matériellement la contrefaçon de la marque « A... », et qu'elle était ainsi responsable de faits de contrefaçon ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article L. 713-2 du code de la propriété intellectuelle ;
2°) qu'en retenant, pour débouter la société Z... et M. X... de leurs demandes, que l'explication donnée par Mme Y... sur l'existence d'une « initiative isolée » prise par la société Assist pour créer le lien internet reproché aurait été « plausible », la cour d'appel s'est déterminée par un motif hypothétique, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt retient que la société Assit a attesté avoir créé de sa seule initiative et sans mandat le lien internet reproché, ayant agi pour préparer une proposition commerciale ultérieure à Mme Y... ; qu'ainsi, en l'absence de preuve que cette dernière ait pu connaître l'existence même des faits argués de contrefaçon, avant d'en être informée par la société Z... et M. X..., la cour d'appel a, abstraction faite du motif surabondant justement critiqué par la seconde branche, fait une exacte application du texte susvisé ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Z... et M. X... aux dépens ;
Vu les articles 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991 et 700 du code de procédure civile, condamne la société Z... et M. X... à payer à la SCP Boulloche la somme globale de 2 500 euros ; rejette leur demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mai deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Tiffreau et Corlay, avocat aux Conseils, pour la société Centre national de recherches en relations humaines et M. X...
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR « débouté la SARL CENTRE NATIONAL DE RECHERCHE EN RELATION HUMAINE et Pierre-Alexis X... de leurs demandes en contrefaçon et concurrence déloyale »,
AUX MOTIFS QU'« (…) il n'est pas discuté que le site « A.... fr » exploite la contrefaçon du nom A... contenu dans le site « A.... com », et cela malgré sa terminaison au singulier ;
« les faits à l'origine du litige résident dans l'utilisation d'un système informatique faisant en sorte de diriger vers le site commercial de Nathalie Y..., exploitant de la société INTER UNION, tout internaute attiré par le site A.... fr ; ainsi Nathalie Y... profite directement de la contrefaçon plus haut rappelée et non contestée en elle-même ;
« les intimés en déduisent sa culpabilité et sa responsabilité ; le premier juge, considérant que la mauvaise foi est inopérante en matière de contrefaçon, a jugé qu'il appartenait à Nathalie Y... de vérifier que le nom A... utilisé par son site était bien disponible ou avait reçu l'accord de son titulaire ;
« la Cour ne partage pas cette analyse ; en l'espèce, la question posée n'est pas de déterminer si Nathalie Y... était de bonne ou mauvaise foi dans la commission de la contrefaçon reprochée mais de savoir si elle a commis la contrefaçon en cause, ou en a été complice, notamment par instigation, ce qu'elle conteste ;
« si les techniques de communication par internet modifient le fait, elles ne modifient pas le droit ; la charge de la preuve incombe au demandeur ; certes, le profit tiré de l'infraction par l'appelante constitue un élément incitant à penser qu'elle en était au moins l'instigatrice ; mais il s'agit du seul élément en sa défaveur et aucune preuve n'existe de ce qu'elle connaissait l'existence de ce lien ; à l'inverse, son explication de l'initiative isolée prise par la société qui avait créé son site est plausible ; cette société affirme, dans une attestation du 16 octobre 2006, avoir créé de sa seule initiative le lien reproché ; elle explique avoir agi ainsi pour préparer une proposition commerciale ultérieure, ce qui permet de comprendre le secret à l'égard de sa bénéficiaire ; non seulement cette affirmation est cohérente avec les faits mais encore il est prouvé, et non contesté, que le nom de domaine « A.... fr » est la propriété de la société ASSIST ;
« contrairement à ce qu'analysent les intimés dans leurs conclusions, la date du 1er septembre 2006 indiquée par la société ASSIST dans son attestation ne correspond pas à la proposition commerciale, envisagée pour plus tard, mais aux travaux fautifs ;
« la Cour ne découvre donc pas la preuve dans le dossier de ce que Nathalie Y... a participé de près ou de loin à la contrefaçon en cause avant d'en être informée par les intimés ;
« à partir de son information par les intimés, elle a connu l'existence du lien et savait donc qu'une contrefaçon était en cours à son profit ; cette notification a été faite par lettre recommandée reçue le 3 octobre 2006 ; la société ASSIST, par lettre du 16 octobre suivant, a accusé réception de sa demande téléphonique de suppression de l'infraction effectuée par téléphone le 4 octobre ; de fait, le dernier acte de contrefaçon reproché par les intimés date du 6 octobre ;
« l'étude de cette chronologie démontre que dès sa connaissance certaine de la contrefaçon Nathalie Y... est intervenue pour la faire cesser, ce qui a mis quelques jours, ce qui démontre sa célérité et ne permet pas de qualifier une attitude complice ;
« en ce qui concerne la concurrence déloyale, le premier juge a considéré qu'il appartenait à Nathalie Y... de mettre dans la cause la société ASSIST si elle l'estimait seule responsable ;
« hormis les cas limitativement énumérés de responsabilité pour fait d'autrui, chacun ne doit répondre que de sa propre faute ; il n'est pas prouvé que Nathalie Y... est auteur ou complice de la contrefaçon ; il est prouvé qu'elle a agi pour la faire supprimer dès sa connaissance ; elle ne peut être responsable pour la seule raison de n'avoir pas appelé dans l'instance celui qu'elle estimait en être l'auteur ; aucune acte de concurrence déloyale ne pouvant lui être reproché la décision déférée sera infirmée (…) »,
ALORS QUE 1°), le simple fait matériel d'exploiter une contrefaçon est interdit et oblige à réparation ; qu'il ressort des propres constatations des juges du fond, que le site « A.... fr » exploitait la contrefaçon du nom « A... » ; que l'adresse internet « A.... fr » renvoyait au site commercial de Madame
Y...
; que celle-ci profitait ainsi directement de la contrefaçon de la marque « A... » ; qu'il devait nécessairement s'en déduire que Madame Y... exploitait matériellement la contrefaçon de la marque « A... », et qu'elle était ainsi responsable de faits de contrefaçon ; qu'en jugeant le contraire, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article L. 713-2 du Code de la propriété intellectuelle,
ALORS QUE 2°), en retenant, pour débouter les exposants de leurs demandes, que l'explication donnée par Madame Y... sur l'existence d'une « initiative isolée » prise par la société ASSIST pour créer le lien internet reproché aurait été « plausible » (arrêt attaqué, p. 5, dernier §), la Cour d'appel s'est déterminée par un motif hypothétique, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.