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12/05/2010 | FRANCE | N°09-13496

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 12 mai 2010, 09-13496


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 3 février 2009), que Daniel X..., embauché 1er septembre 2002 suivant contrat à durée indéterminée par la SARL Hyla (la société), en qualité de conducteur d'engin et bénéficiant du statut de cadre, est décédé le 5 septembre 2003 à la suite d'un accident du travail ; que la Carcept prévoyance, institution de prévoyance du transport (la Carcept) ayant refusé de verser le capital décès prévu au contrat d'assurance de groupe souscrit par la société au

motif que Daniel X... n'y avait pas adhéré, Mme Y..., sa veuve, agissant en son n...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 3 février 2009), que Daniel X..., embauché 1er septembre 2002 suivant contrat à durée indéterminée par la SARL Hyla (la société), en qualité de conducteur d'engin et bénéficiant du statut de cadre, est décédé le 5 septembre 2003 à la suite d'un accident du travail ; que la Carcept prévoyance, institution de prévoyance du transport (la Carcept) ayant refusé de verser le capital décès prévu au contrat d'assurance de groupe souscrit par la société au motif que Daniel X... n'y avait pas adhéré, Mme Y..., sa veuve, agissant en son nom personnel et en qualité de représentante légale de ses enfants mineurs a assigné la société d'expertise comptable Z... (la société Z...), chargée de la comptabilité de la société, son assureur la société Allianz IARD, anciennement dénommée Assurances générales de France, et la Carcept afin d'obtenir l'indemnisation de son préjudice ;
Sur le pourvoi principal :
Attendu que la Carcept fait grief à l'arrêt de la condamner in solidum avec la société Z..., et l'assureur de cette dernière à payer à l'ayant droit d'un salarié décédé la somme de 87 552 euros, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il appartient à l'employeur auteur d'une demande d'adhésion de choisir, sous sa seule responsabilité, l'étendue de la garantie qu'il entend obtenir en considération des dispositions de la convention collective lui faisant obligation d'assurer certaines catégories de son personnel contre le risque décès ; qu'en mettant à la charge des organismes de prévoyance, tenus uniquement d'éclairer les adhérents sur le contenu des garanties effectivement souscrites, une obligation précontractuelle d'information consistant à vérifier l'effectivité d'une adhésion à un régime obligatoire, à tout le moins, à renseigner les employeurs sur les conséquences d'un manquement à leurs obligations, quand ces derniers ne peuvent ignorer ni leurs obligations légales ni les conséquences d'un manquement à celles-ci, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil, ensemble l'article 7 de la convention collective nationale de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 ;
2°/ que le courrier adressé le 27 août 2002 par l'employeur à l'institution de prévoyance l'informait uniquement de l'embauche d'un salarié dans la catégorie cadre, sans préciser la nature des garanties auxquelles il entendait adhérer pour le compte de son salarié ; qu'en affirmant que, par ce courrier, l'employeur avait clairement exprimé sa volonté d'adhérer au régime de prévoyance décès, la cour d'appel a dénaturé ledit écrit en violation de l'article 1134 du code civil ;
3°/ qu'en énonçant qu'il s'agissait «plutôt» d'une négligence de l'organisme de prévoyance puisque le bulletin d'adhésion à la garantie facultative retraite cadre avait été «manifestement» adressé en même temps que le bulletin d'adhésion au régime obligatoire, sans vérifier cette affirmation, se prononçant ainsi par un motif hypothétique, la cour d'appel a privé sa décision de tout motif en méconnaissance des exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; qu'en affirmant d'un côté que l'institution de prévoyance avait eu connaissance de la volonté clairement exprimée par l'employeur d'adhérer à la garantie décès et qu'une négligence de cette institution aurait été à l'origine du défaut d'affiliation du salarié, et en reprochant de l'autre à l'entreprise d'avoir manqué à son obligation d'adhérer pour le compte de son salarié à ladite garantie obligatoire, ce dont il résultait qu'aucune négligence ne pouvait être imputée à la Carcept, la cour d'appel s'est contredite, ne satisfaisant pas ainsi aux prescriptions de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt retient qu'il était constant que la société était adhérente à la Carcept depuis 1989 au vu des contrats communiqués par celle-ci et qu'elle avait à ce titre la qualité de membre adhérent ; qu'il appartenait à l'organisme de prévoyance, dans le cadre de son obligation précontractuelle d'information, dans la mesure où elle avait connaissance de la volonté clairement exprimée d'affiliation de la société à la garantie prévoyance proposée par cet organisme au vu du courrier du 27 août 2002 et de sa propre réponse par l'envoi d'un bulletin pré-rempli d'adhésion le 19 novembre 2002, de s'assurer du caractère effectif de cette souscription et, à tout le moins, d'informer son adhérente des conséquences d'un défaut de souscription ;
Que de ces constatations et énonciations relevant de son pouvoir souverain d'appréciation des documents qui lui étaient soumis, hors toute dénaturation de ceux-ci, la cour d'appel a pu déduire l'existence d'une faute de la Carcept pour manquement à son obligatioin d'information et de conseil à l'égard de l'employeur ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en ses troisième et quatrième branches comme critiquant des motifs surabondants, n'est pas fondé en ses autres branches ;
Sur le pourvoi incident :
Attendu que la société Z... et son assureur font grief à l'arrêt de les condamner in solidum avec la société et la Carcept Prévoyance à payer à Mme X..., à titre personnel et en qualité de représentante légale de ses enfants mineurs, la somme de 87 552 euros, de fixer la part de responsabilité à la charge de la société Z... à 15 % du préjudice global et de les condamner à relever et garantir la société dans la limite du partage de responsabilité retenu alors, selon le moyen :
1°/ que l'expert-comptable n'est tenu d'informer son client que dans la mesure où ce client ignore effectivement l'information dont l'expert comptable est le débiteur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la société avait clairement exprimé à la Carcept sa volonté d'être affiliée à la garantie prévoyance cadre proposée par une lettre du 27 août 2002 ; qu'elle a également considéré que l'employeur ne pouvait ignorer son obligation d'affiliation ; qu'en décidant que la société Frédéric Z... était tenue d'attirer l'attention de son client sur les risques encourus en cas d'absence d'affiliation à la garantie obligatoire de prévoyance à compter de la date d'embauche de Daniel X..., soit le 1er septembre 2002, tandis qu'elle avait constaté que, dès le 27 août 2002, la société avait demandé son affiliation, en sorte qu'une information sur son obligation d'affiliation était inutile, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1382 du code civil ;
2°/ que l'obligation d'information et de conseil de l'expert-comptable a nécessairement pour limite la possibilité de connaître l'information dont il est débiteur envers son client ; qu'en l'espèce, la société Z... et son assureur, la société AGF, aujourd'hui dénommée Allianz, faisaient valoir que la société Z... avait eu l'assurance d'une souscription par l'employeur au régime de prévoyance obligatoire à la date du 15 décembre 2002 pour une effectivité au 1er janvier 2003 ; qu'il en résultait, comme M. Z... s'en est expliqué dans un courrier du 4 octobre 2004, qu'il n'était pas possible à l'expert-comptable de faire figurer dans les bordereaux récapitulatifs de cotisations pour l'année 2002 l'appel de cotisation régularisant la prévoyance cadre obligatoire 2002, puisqu'à cette époque aucune cotisation n'avait pu encore être perçue ; qu'en décidant néanmoins qu'il appartenait à la société Frédéric Z... de vérifier l'affiliation obligatoire à compter du 1er septembre 2002 et, dans le cadre de la présentation des comptes annuels pour l'année 2002, de vérifier les cotisations sociales et leur montant, sans rechercher si, au 31 décembre 2002, il était possible à l'expert-comptable de procéder à cette vérification en l'absence de régularisation dans les comptes pour l'exercice 2002 de la prévoyance cadre obligatoire 2002, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 382 du code civil ;
3°/ que l'expert-comptable n'est obligé envers son client que dans la limite fixée par la lettre de mission ; qu'en l'espèce, la société Frédéric Z... et la société AGF, aujourd'hui dénommée Allianz, faisaient valoir qu'à compter du 1er janvier 2003 la société avait elle-même établi ses bulletins de paie ; que l'expert-comptable n'était plus tenu que d'une mission d'établissement des comptes définitifs, avec la réalisation de situations intermédiaires ; que la société Z... et la société AGF faisaient valoir qu'en conséquence l'expert-comptable n'était plus en mesure, à compter du 1er janvier 2003, de s'assurer du paiement des cotisations afférentes à la garantie qui, au regard des informations qui lui avaient été confiées, avait été souscrite ; qu'elles soulignaient au surplus que l'expert-comptable ne pouvait percevoir, au titre de l'établissement d'une situation intermédiaire, le contenu de la cotisation versée trimestriellement à la Carcept au sein d'une présentation globalisée des comptes ; qu'ainsi, l'expert-comptable n'aurait pu contrôler la réalité de la souscription à la garantie obligatoire de prévoyance complémentaire qu'à l'occasion de l'analyse de fin d'exercice 2003, c'est-à-dire au mieux au début de l'année 2004 ; qu'en décidant néanmoins que la société Z... avait manqué à son obligation générale de conseil, au motif qu'il lui appartenait de vérifier l'effectivité de l'affiliation obligatoire de Daniel X... à compter du 1er septembre 2002 et, dans le cadre de la présentation des comptes annuels 2002 de vérifier les cotisations sociales et leur montant, sans rechercher si les termes de la mission confiée par la société à compter du 1er janvier 2003 ne permettaient pas à l'expert-comptable de vérifier si la perception des cotisations dans les bulletins de paie était effective, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient qu'il est manifeste que le défaut de mise en garde de l'employeur par son expert-comptable sur les conséquences du défaut d'affiliation obligatoire d'un cadre à un organisme de prévoyance constitue un manquement à l'obligation générale de conseil à laquelle les experts-comptables sont soumis à l'égard de leurs clients ; qu'il résulte de la lettre de mission du 25 septembre 1989 que la société Z... a été chargée de l'établissement de la paye et des charges sociales jusqu'au 31 décembre 2002 ; que, contrairement à ce qu'elle prétend, sa responsabilité est recherchée précisément sur cette période puisque l'embauche de Daniel X... a été effective au 1er septembre 2002 et qu'il lui appartenait à ce titre de vérifier l'affiliation obligatoire à compter de cette date et dans le cadre de la présentation des comptes annuels pour l'année 2002 de vérifier les cotisations sociales et leur montant ;
Que de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a pu déduire qu'en s'abstenant de vérifier le caractère effectif de l'affiliation et le paiement des cotisations et d'attirer l'attention de son client sur les risques encourus, l'expert-comptable avait commis une faute ;
D'où il suit que le moyen qui manque en fait en sa troisième branche, n'est pas fondé en ses autres branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société Carcept prévoyance institution de prévoyance du transport, la société Z... et la société Allianz IARD aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne, in solidum, la société Z... et la société Allianz IARD à payer à la société Hyla la somme de 2 500 euros ; rejette toutes les autres demandes présentées de ce chef ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour la société Carcept prévoyance institution de prévoyance du transport (demanderesses au pourvoi principal).
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné une institution de prévoyance (la CARCEPT PREVOYANCE, l'exposante), in solidum avec l'employeur (la société HYLA), un expert-comptable (la société Z...) et l'assureur de ce dernier (la société AGF), à payer à l'ayant droit (Mme Y... veuve X...) d'un salarié décédé la somme de 87.552 € ;
AUX MOTIFS propres et adoptés QU'il ressortait de l'article 9 des conditions générales relatif aux formalités d'affiliation à la CARCEPT PREVOYANCE que l'adhérent devait transmettre à cet organisme un état nominatif complet et un bulletin individuel d'affiliation accompagné le cas échéant des pièces justificatives comprenant un questionnaire de santé individuel s'agissant d'un contrat d'adhésion concernant un effectif inférieur ou égal à cinq salariés cadres ; qu'il était également prévu que la CARCEPT PREVOYANCE devait remettre à l'entreprise adhérente une notice d'information composée des conditions générales et les conditions particulières du contrat d'adhésion et que la responsabilité de la remise de cette notice aux salariés couverts reposait sur l'entreprise adhérente ; qu'il apparaissait, au vu du courrier du 27 août 2002, que la CARCEPT PREVOYANCE avait été informée de l'embauche de Daniel X... à compter du 1er septembre 2002 dans la catégorie salarié cadre et qu'elle avait adressé à la société HYLA un bulletin d'adhésion individuel par courrier du 19 novembre 2002 ; que, à défaut d'établir l'existence d'un contrat d'assurance garantissant le décès de Daniel X... à la date à laquelle l'accident s'était produit, Mme X... ne pouvait prétendre aux garanties stipulées dans ce contrat ; qu'il était constant que la société HYLA était adhérente à la CARCEPT PREVOYANCE depuis 1989 au vu des contrats communiqués par celle-ci et qu'elle avait à ce titre la qualité de membre adhérent ; qu'il appartenait à l'organisme de prévoyance, dans le cadre de son obligation précontractuelle d'information, dans la mesure où elle avait connaissance de la volonté clairement exprimée d'affiliation de la société HYLA à la garantie prévoyance proposée par cet organisme au vu du courrier du 27 août 2002 et de sa propre réponse par l'envoi d'un bulletin pré-rempli d'adhésion le 19 novembre 2002, de s'assurer du caractère effectif de cette souscription et, à tout le moins, d'informer son adhérente des conséquences d'un défaut de souscription ; qu'il apparaissait d'ailleurs qu'il s'agissait plutôt d'une négligence de la CARCEPT PREVOYANCE puisque celle-ci avait pris en compte le bulletin d'adhésion à la garantie retraite, régime d'adhésion facultatif, bien que ce dernier eût été manifestement adressé en même temps que le bulletin d'adhésion au régime obligatoire ; qu'elle ne pouvait utilement se prévaloir de la liberté de choix de l'organisme d'affiliation quand il ressortait des documents précités que la société HYLA avait précisément fait le choix de cet organisme pour souscrire la garantie ; que la société HYLA ne contestait pas l'obligation à laquelle était tenue d'affilier son salarié au régime de retraite et de prévoyance des cadres en vertu de l'article 7 de la convention collective nationale des cadres ; que l'existence d'une affiliation à la date du 5 septembre 2003 n'était pas démontrée, ce qui caractérisait la faute de la société HYLA et justifiait de confirmer la décision de première instance en ce qu'elle avait retenu la responsabilité de cette société (arrêt attaqué, pp. 6 et 7 ; p. 8, alinéas 1 et 2) ; que le courrier du 27 août 2002 envoyé par la société HYLA, mentionnant seulement l'embauche de Daniel X... sans précision de la nature de l'adhésion sollicitée, n'établissait pas, en l'état de la liberté de choix de l'organisme d'affiliation, même pour une adhésion obligatoire, la volonté de la société HYLA de souscrire une garantie-décès auprès de cet organisme ; que la CARCEPT PREVOYANCE avait envoyé le 19 novembre 2002 un bulletin d'adhésion pour la nouvelle embauche d'un cadre ; que le 15 décembre 2002, la société HYLA avait renvoyé le bulletin pour l'adhésion facultative à la complémentaire «retraite cadre» ; que la CARCEPT PREVOYANCE avait pris acte de cette adhésion dès réception, émettant alors un appel de cotisations ; qu'il résultait de l'article 7 de la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 19 mars 1947 que l'employeur avait pour obligation de souscrire auprès d'une institution de prévoyance ou d'un organisme d'assurance un contrat comportant le versement d'une cotisation décès ; qu'il appartenait à la CARCEPT PREVOYANCE, à la réception du seul bulletin d'adhésion à un régime facultatif, d'informer la société HYLA, du caractère obligatoire de l'adhésion au régime décès ; que la liberté de choix de l'organisme d'affiliation n'était pas de nature à exonérer la CARCEPT PREVOYANCE de son devoir d'information consistant à informer son cocontractant des limites de son adhésion et à s'assurer de l'effectivité de l'adhésion au régime obligatoire (jugement entrepris, p. 6, alinéa 3 ; p. 8 ; attendus 1 et 2) ;
ALORS QUE, de première part, il appartient à l'employeur auteur d'une demande d'adhésion de choisir, sous sa seule responsabilité, l'étendue de la garantie qu'il entend obtenir en considération des dispositions de la convention collective lui faisant obligation d'assurer certaines catégories de son personnel contre le risque décès ; qu'en mettant à la charge des organismes de prévoyance, tenus uniquement d'éclairer les adhérents sur le contenu des garanties effectivement souscrites, une obligation précontractuelle d'information consistant à vérifier l'effectivité d'une adhésion à un régime obligatoire, à tout le moins, à renseigner les employeurs sur les conséquences d'un manquement à leurs obligations, quand ces derniers ne peuvent ignorer ni leurs obligations légales ni les conséquences d'un manquement à celles-ci, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil, ensemble l'article 7 de la convention collective nationale de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 ;
ALORS QUE, de deuxième part, le courrier adressé le 27 août 2002 par l'employeur à l'institution de prévoyance l'informait uniquement de l'embauche d'un salarié dans la catégorie cadre, sans préciser la nature des garanties auxquelles il entendait adhérer pour le compte de son salarié ; qu'en affirmant que, par ce courrier, l'employeur avait clairement exprimé sa volonté d'adhérer au régime de prévoyance décès, la cour d'appel a dénaturé ledit écrit en violation de l'article 1134 du code civil ;
ALORS QUE, de troisième part, en énonçant qu'il s'agissait «plutôt» d'une négligence de l'organisme de prévoyance puisque le bulletin d'adhésion à la garantie facultative retraite cadre avait été «manifestement» adressé en même temps que le bulletin d'adhésion au régime obligatoire, sans vérifier cette affirmation, se prononçant ainsi par un motif hypothétique, la cour d'appel a privé sa décision de tout motif en méconnaissance des exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, en toute hypothèse, la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; qu'en affirmant d'un côté que l'institution de prévoyance avait eu connaissance de la volonté clairement exprimée par l'employeur d'adhérer à la garantie décès et qu'une négligence de cette institution aurait été à l'origine du défaut d'affiliation du salarié, et en reprochant de l'autre à l'entreprise d'avoir manqué à son obligation d'adhérer pour le compte de son salarié à ladite garantie obligatoire, ce dont il résultait qu'aucune négligence ne pouvait être imputée à l'exposante, la cour d'appel s'est contredite, ne satisfaisant pas ainsi aux prescriptions de l'article 455 du code dé procédure civile.

Moyen produit par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils pour les sociétés Z... et Allianz IARD (demanderesses au pourvoi incident).
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir jugé que la société Frédéric Z... a engagé sa responsabilité à l'encontre de madame X..., d'avoir en conséquence condamné la société Z... et la compagnie AGF IART, aujourd'hui dénommée Allianz IARD, in solidum avec la SARL Hyla et la Carcept Prévoyance Institution de prévoyance du transport, à payer à madame X..., à titre personnel et en qualité de représentant légal de ses deux enfants âgés de 8 et 10 ans, la somme de 87.552 euros, d'avoir fixé la part de responsabilité à la charge de la société Z... à 15 % du préjudice global et d'avoir condamné la société Frédéric Z... à relever et garantir la société Hyla dans la limite du partage de responsabilité retenu ;
AUX MOTIFS QUE, en ce qui concerne l'expert-comptable, il est invoqué une faute délictuelle sur la base des obligations contractuelles de celui-ci à l'égard de la société Hyla, étant rappelé que la responsabilité délictuelle de l'auteur d'une faute contractuelle peut être recherchée par un tiers si cette faute lui a causé un dommage ; qu'il est manifeste que le défaut de mise en garde de l'employeur par son expert-comptable sur les conséquences du défaut d'affiliation obligatoire d'un cadre à un organisme de prévoyance constitue un manquement à l'obligation générale de conseil à laquelle les expertscomptables sont soumis à l'égard de leurs clients ; que la société Z... communique le document établi par le Conseil supérieur de l'Ordre des experts-comptables qui mentionne en ce qui concerne le personnel et les travaux à réaliser le contrôle des cotisations sociales ; qu'il résulte de la lettre de mission du 25 septembre 1989 que la société Z... a été chargée de l'établissement de la paye et des charges sociales jusqu'au 31 décembre 2002 ; que, contrairement à ce qu'elle prétend, sa responsabilité est recherchée précisément sur cette période puisque l'embauche de monsieur X... a été effective au 1er septembre 2002 et qu'il lui appartenait à ce titre de vérifier l'affiliation obligatoire à compter de cette date et dans le cadre de la présentation des comptes annuels pour l'année 2002 de vérifier les cotisations sociales et leur montant ; qu'il ne résulte pas des documents produits en appel (notamment des courriers) que la SARL Frédéric Z... ait conseillé à la société Hyla d'adhérer au régime obligatoire ; qu'il ressort même du courrier de monsieur Z... du 3 novembre 2008 que cette initiative émanait de la société Hyla contrairement à ce que l'expert-comptable avait indiqué dans son courrier du 4 octobre 2004 ; qu'en s'abstenant de vérifier le caractère effectif de l'affiliation et le paiement des cotisations et d'attirer l'attention de son client sur les risques encourus, l'expert-comptable a commis une faute qui justifie qu'il soit condamné in solidum avec la société Hyla et la Carcept Prévoyance à réparer le préjudice causé à madame X... ;
1°) ALORS QUE l'expert-comptable n'est tenu d'informer son client que dans la mesure où ce client ignore effectivement l'information dont l'expert-comptable est le débiteur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la société Hyla avait clairement exprimé à la Carcept sa volonté d'être affiliée à la garantie prévoyance cadre proposée par une lettre du 27 août 2002 ; qu'elle a également considéré que l'employeur ne pouvait ignorer son obligation d'affiliation ; qu'en décidant que la société d'expertise comptable Frédéric Z... était tenue d'attirer l'attention de son client sur les risques encourus en cas d'absence d'affiliation à la garantie obligatoire de prévoyance à compter de la date d'embauche de monsieur X..., soit le 1er septembre 2002, tandis qu'elle avait constaté que, dès le 27 août 2002, la société Hyla avait demandé son affiliation, en sorte qu'une information sur son obligation d'affiliation était inutile, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1382 du Code civil ;
2°) ALORS QUE l'obligation d'information et de conseil de l'expert-comptable a nécessairement pour limite la possibilité de connaître l'information dont il est débiteur envers son client ; qu'en l'espèce, la société Z... et son assureur, la compagnie AGF, aujourd'hui dénommée Allianz, faisaient valoir que la société Z... avait eu l'assurance d'une souscription par l'employeur au régime de prévoyance obligatoire à la date du 15 décembre 2002 pour une effectivité au 1er janvier 2003 ; qu'il en résultait, comme monsieur Z... s'en est expliqué dans un courrier du 4 octobre 2004, qu'il n'était pas possible à l'expert-comptable de faire figurer dans les bordereaux récapitulatifs de cotisations pour l'année 2002 l'appel de cotisation régularisant la prévoyance cadre obligatoire 2002, puisqu'à cette époque aucune cotisation n'avait pu encore être perçue ; qu'en décidant néanmoins qu'il appartenait à la société Frédéric Z... de vérifier l'affiliation obligatoire à compter du 1er septembre 2002 et, dans le cadre de la présentation des comptes annuels pour l'année 2002, de vérifier les cotisations sociales et leur montant, sans rechercher si, au 31 décembre 2002, il était possible à l'expert-comptable de procéder à cette vérification en l'absence de régularisation dans les comptes pour l'exercice 2002 de la prévoyance cadre obligatoire 2002, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
3°) ALORS QUE l'expert-comptable n'est obligé envers son client que dans la limite fixée par la lettre de mission ; qu'en l'espèce, la société d'expertise comptable Frédéric Z... et la compagnie AGF, aujourd'hui dénommée Allianz, faisaient valoir qu'à compter du 1er janvier 2003 la société Hyla avait elle-même établi ses bulletins de paie ; que l'expert-comptable n'était plus tenu que d'une mission d'établissement des comptes définitifs, avec la réalisation de situations intermédiaires ; que la société Z... et la compagnie AGF faisaient valoir qu'en conséquence l'expert-comptable n'était plus en mesure, à compter du 1er janvier 2003, de s'assurer du paiement des cotisations afférentes à la garantie qui, au regard des informations qui lui avaient été confiées, avait été souscrite ; qu'elles soulignaient au surplus que l'expert-comptable ne pouvait percevoir, au titre de l'établissement d'une situation intermédiaire, le contenu de la cotisation versée trimestriellement à la Carcept au sein d'une présentation globalisée des comptes ; qu'ainsi, l'expert-comptable n'aurait pu contrôler la réalité de la souscription à la garantie obligatoire de prévoyance complémentaire qu'à l'occasion de l'analyse de fin d'exercice 2003, c'est-à-dire au mieux au début de l'année 2004 ; qu'en décidant néanmoins que la société Z... avait manqué à son obligation générale de conseil, au motif qu'il lui appartenait de vérifier l'effectivité de l'affiliation obligatoire de monsieur X... à compter du 1er septembre 2002 et, dans le cadre de la présentation des comptes annuels 2002 de vérifier les cotisations sociales et leur montant, sans rechercher si les termes de la mission confiée par la société Hyla à compter du 1er janvier 2003 ne permettaient pas à l'expert-comptable de vérifier si la perception des cotisations dans les bulletins de paie était effective, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 09-13496
Date de la décision : 12/05/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 03 février 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 12 mai. 2010, pourvoi n°09-13496


Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.13496
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