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11/05/2010 | FRANCE | N°09-12102

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 11 mai 2010, 09-12102


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 6 janvier 2009), que la caisse d'épargne de Bourgogne Franche-Comté et la caisse régionale de crédit agricole mutuel de Champagne-Bourgogne (les banques) étaient porteurs d'effets impayés, tirés sur la société Le Cercle des Vins et remis à l'escompte par la société Goichot André et fils (la société Goichot) ; que par jugement du 29 octobre 2004, la société Goichot a été mise en redressement judiciaire, M. X... étant désigné en qua

lité de représentant des créanciers et M. Y... en qualité d'administrateur ; qu'u...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 6 janvier 2009), que la caisse d'épargne de Bourgogne Franche-Comté et la caisse régionale de crédit agricole mutuel de Champagne-Bourgogne (les banques) étaient porteurs d'effets impayés, tirés sur la société Le Cercle des Vins et remis à l'escompte par la société Goichot André et fils (la société Goichot) ; que par jugement du 29 octobre 2004, la société Goichot a été mise en redressement judiciaire, M. X... étant désigné en qualité de représentant des créanciers et M. Y... en qualité d'administrateur ; qu'un accord homologué par ordonnance du juge-commissaire du 10 décembre 2004 est intervenu entre la société Goichot, la société Le Cercle des Vins et les banques, prévoyant le règlement des impayés par la société Le Cercle des Vins en dation par transfert d'un stock de vins ; que les banques ont déclaré leurs créances qui ont été admises au passif de la société Goichot ;
Attendu que la société Goichot fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande tendant à ce que les créances des banques soient réduites pour tenir compte de la dation en paiement résultant du protocole d'accord du 2 décembre 2004, alors, selon le moyen :
1°/ que lorsque la marchandise est vendue en bloc, le transfert de propriété s'opère dès l'accord des parties ; qu'en l'espèce, selon les propres constatations de la cour d'appel, la dation en paiement prévue par le protocole du 2 décembre 2004 consistait dans le transfert en pleine propriété d'un stock de vins dont la nature, la quantité et le prix étaient précisés dans l'annexe 2 du contrat ; qu'il en résulte que la dation en paiement portait non pas sur une certaine quantité de vin à mesurer, mais sur un stock de vins individualisé, et emportait transfert de propriété dès l'échange des consentements ; qu'en retenant que la dation en paiement portait sur des choses de genre non individualisées et que le transfert de propriété et l'effet extinctif du paiement n'avaient pas été réalisés faute de livraison, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 1134, 1234 et 1586 du code civil ;
2°/ qu'aucune des parties n'invoquait dans ses conclusions d'appel l'article 2315 du code civil ; qu'en soulevant d'office le moyen tiré de ce qu'à supposer que le transfert de propriété ait eu lieu dès la signature du protocole, les dispositions de ce texte, relatif aux conditions de libération de la caution, n'étaient pas applicables au tireur d'un effet escompté, sans inviter les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a méconnu le principe du contradictoire et violé l'article 16 du code de procédure civile ;
3°/ que le transfert de propriété emporte transfert des risques ; qu'en l'espèce les établissements de crédit, devenus propriétaires du stock de vins dès l'accord du 2 décembre 2004, devaient supporter le risque de sa perte ultérieure ; qu'en retenant qu'à supposer que le transfert de propriété ait été effectué dès la signature du protocole, le paiement en résultant ne pouvait être pris en compte, dès lors que l'article 2315 du code civil était inapplicable et que les établissements de crédit avaient été évincés, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs inopérants et a violé les articles 1138, 1234 et 1586 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant retenu que le transfert de propriété ne s'opère qu'au jour où les marchandises sont individualisées et que les stocks de vins en vrac, objet de la dation en paiement, entraient dans cette catégorie, la cour d'appel en a exactement déduit que le transfert de propriété et l'effet extinctif de cette dation ne s'étaient pas réalisés de sorte que les banques étaient fondées à se prévaloir de leurs créances ; que le moyen, qui ne peut être accueilli en ses deuxième et troisième branches, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Goichot André et fils aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Goichot André et fils à payer à la caisse d'épargne et de prévoyance de Bourgogne France-Comté la somme de 1 500 euros et à la caisse régionale de crédit agricole mutuel de Champagne-Bourgogne la somme de 1 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.
Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour la société Goichot André et fils.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de la société GOICHOT ANDRE ET FILS tendant à ce que la créance de la Caisse d'épargne de Bourgogne Franche Comté soit réduite à la somme de 102.622,57 € et celle de la CRCAM de Bourgogne Champagne soit réduite à la somme de 25.239,41 € pour tenir compte de la dation en paiement résultant du protocole d'accord du 2 décembre 2004,
Aux motifs que « reste à déterminer si l'appelante peut se prévaloir d'un paiement réalisé par la société Le Cercle des Vins, résultant de la dation prévue au protocole d'accord du 2 décembre 2004 ; qu'il n'est pas contesté que les banques intimées n'ont pu être mises en possession du stock de vins objet de la dation en paiement ou de la valeur correspondante ; qu'elles allèguent à bon droit que n'ayant pas renoncé à l'exercice de ce recours à l'encontre de la société GOICHOT ANDRE ET FILS, elles conservent la possibilité d'agir contre elle en sa qualité d'endosseur des effets ; que l'appelante répond que la dation en paiement a eu pour effet de transmettre la propriété de la chose donnée aux créanciers ce qui signifie que dès la régularisation du protocole d'accord, les établissements de crédit sont devenus propriétaires des vins en vrac, et que ce paiement fait au porteur légitime par le tiré accepteur libère complètement le tireur ; qu'elle ajoute que les intimées ont été extrêmement négligentes en se désintéressant de l'appréhension matérielle du vin et en s'abstenant de sauvegarder leurs intérêts dans le cadre de la procédure collective de la société Daniel Bernard ; que la dation en paiement est un paiement translatif ; qu'elle ne produit d'effet que lors de la remise effective de la chose, de la tradition, et non dès l'accord des parties ; mais que s'agissant de la dation en paiement de biens existants constituant des corps certains, l'obligation de livrer la chose est parfaite par le seul consentement de parties contractantes et rend le créancier propriétaire ; que des restrictions à cette règle existent toutefois s'agissant de choses fongibles ou de genre dont on ne peut devenir propriétaire qu'au jour où elles ont été individualisées, cette individualisation s'effectuant par la livraison ; que les stocks de vins en vrac, objet de la dation en paiement, entrent bien dans cette catégorie ; qu'ils ont certes été définis par leur quantité et leur nature dans le protocole d'accord, mais qu'ils n'ont pas été individualisés, n'ayant jamais été livrés ; que le transfert de propriété et l'effet extinctif n'ont donc pas été réalisés ; qu'en toute hypothèse, à supposer que le transfert de propriété ait été effectué dès la signature du protocole d'accord, les dispositions de l'article 2315 du code civil selon lesquelles « l'acceptation volontaire que le créancier a faite d'un immeuble ou d'un effet quelconque en paiement de la dette principale, décharge la caution, encore que le créancier vienne à être évincé », n'est pas applicable au tireur d'un effet escompté ; qu'or il n'est pas contestable que les établissements bancaires ont été évincés, ainsi qu'il résulte de la lettre de Maître Y..., administrateur de la société GOICHOT ANDRE ET FILS, en date du 7 janvier 2008 versée aux débats ;
Alors, d'une part, que lorsque la marchandise est vendue en bloc, le transfert de propriété s'opère dès l'accord des parties ; qu'en l'espèce, selon les propres constatations de la cour d'appel, la dation en paiement prévue par le protocole du 2 décembre 2004 consistait dans le transfert en pleine propriété d'un stock de vins dont la nature, la quantité et le prix étaient précisés dans l'annexe 2 du contrat ; qu'il en résulte que la dation en paiement portait non pas sur une certaine quantité de vin à mesurer, mais sur un stock de vins individualisé, et emportait transfert de propriété dès l'échange des consentements ; qu'en retenant que la dation en paiement portait sur des choses de genre non individualisées et que le transfert de propriété et l'effet extinctif du paiement n'avaient pas été réalisés faute de livraison, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 1134, 1234 et 1586 du code civil.
Alors, d'autre part, qu'aucune des parties n'invoquait dans ses conclusions d'appel l'article 2315 du code civil ; qu'en soulevant d'office le moyen tiré de ce qu'à supposer que le transfert de propriété ait eu lieu dès la signature du protocole, les dispositions de ce texte, relatif aux conditions de libération de la caution, n'étaient pas applicables au tireur d'un effet escompté, sans inviter les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a méconnu le principe du contradictoire et violé l'article du code de procédure civile.
Et alors, enfin, que le transfert de propriété emporte transfert des risques ;qu'en l'espèce les établissements de crédit, devenus propriétaires du stock de vins dès l'accord du 2 décembre 2004, devaient supporter le risque de sa perte ultérieure ; qu'en retenant qu'à supposer que le transfert de propriété ait été effectué dès la signature du protocole, le paiement en résultant ne pouvait être pris en compte, dès lors que l'article 2315 du code civil était inapplicable et que les établissements de crédit avaient été évincés, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs inopérants et a violé les articles 1138, 1234 et 1586 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 09-12102
Date de la décision : 11/05/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 06 janvier 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 11 mai. 2010, pourvoi n°09-12102


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Defrenois et Levis, SCP Delaporte, Briard et Trichet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.12102
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