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07/04/2010 | FRANCE | N°08-40376

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 avril 2010, 08-40376


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé verbalement le 21 juin 1995, en qualité d'agent d'entretien par la société Agence Bouet ; qu'estimant qu'il travaillait à temps complet et que des heures de travail ne lui avaient pas été payées, il a, le 5 avril 2004, saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur et de condamnation de ce dernier au paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat

; qu'il a quitté définitivement son emploi le 4 mai 2004; que par j...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé verbalement le 21 juin 1995, en qualité d'agent d'entretien par la société Agence Bouet ; qu'estimant qu'il travaillait à temps complet et que des heures de travail ne lui avaient pas été payées, il a, le 5 avril 2004, saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur et de condamnation de ce dernier au paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat ; qu'il a quitté définitivement son emploi le 4 mai 2004; que par jugement du 28 mars 2006, le conseil de prud'hommes a rejeté sa demande de résiliation judiciaire du contrat, dit que la rupture était imputable à la démission du salarié intervenue le 4 mai, et a ordonné une expertise aux fins de déterminer la perte de salaire subie par le salarié pour la période de 1999 à 2004 résultant de la différence entre la rémunération mensuelle effectivement perçue avec celle qu'il aurait dû percevoir sur la base d'un horaire à temps complet ;

Sur le premier moyen :

Vu les articles L. 1231-1, L. 1237-2 et L. 1235-1 du code du travail ;

Attendu que pour confirmer le jugement en ce qu'il a décidé que la rupture résultait de la démission du salarié le 4 mai 2004, la cour d'appel relève que le salarié se contente de produire ses courriers de protestation adressés à la société les 2 septembre et 1er octobre 2002, ainsi qu'une lettre envoyée à l'inspection du travail le 7 octobre 2001, alors qu'il a continué à travailler pour le compte de son employeur sans même continuer à exiger ni tenter d'obtenir la régularisation de sa situation par l'établissement d'un écrit, jusqu'à son départ définitif le 4 mai 2004 ; qu'à défaut de lettre de démission, M. X... sera déclaré démissionnaire de fait de son emploi à compter de cette date ;

Qu'en statuant comme elle a fait, alors qu'il ressortait de ses constatations que le salarié avait quitté l'entreprise le 4 mai 2004 après avoir saisi, en avril 2004, la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison du différend l'opposant à son employeur concernant le paiement d'heures de travail non payées, ce dont elle aurait dû déduire que le salarié n'avait pas manifesté une volonté non équivoque de démissionner, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Sur le second moyen :

Vu l'article L. 3171-4 du code du travail ;

Attendu qu'en cas de litige relatif à l'existence et au nombre d'heures de travail accomplies l'employeur fournit au juge des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ;

Attendu que, pour réformer le jugement ayant ordonné une expertise et débouter M. X... de ses demandes de rappel de salaire et congés payés afférents au titre de la période non prescrite du 6 avril 1999 au 4 mai 2004, l'arrêt retient que le salarié étaye celles-ci uniquement par ses bulletins de paie, alors qu'aux termes de l'article 146 du code de procédure civile il n'appartient pas au juge du fond de suppléer la carence des parties dans l'administration de la preuve ;

Qu'en statuant ainsi, alors, d'une part, que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et, d'autre part, qu'elle avait retenu que le contrat de travail était à temps plein et que le salarié avait fourni ses bulletins de paie correspondant à la période où il était rémunéré pour un travail selon un horaire variable, à temps partiel, la cour d'appel, qui a mis la charge de la preuve des heures effectivement réalisées au seul salarié, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de ses demandes d'indemnités de rupture, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de rappel de salaire et congés payés afférents pour la période du 6 avril 1999 au 4 mai 2004, l'arrêt rendu le 5 juin 2007, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Condamne la société Agence Bouet aux dépens ;

Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société Agence Bouet à payer à la SCP Didier et Pinet la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept avril deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que la rupture du contrat de travail est imputable à la démission de Monsieur Christian X... le 4 mai 2004 et d'avoir en conséquence débouté ce dernier de ses demandes dirigées contre la SARL Agence Bouet.

AUX MOTIFS PROPRES QUE sur l'imputabilité de la rupture du contrat de travail, Monsieur X... se contente de produire ses courriers de protestation adressés à la SARL Agence Bouet les 2 septembre et 1er octobre 2002 ainsi qu'une lettre qu'il a envoyée à l'inspection du travail le 7 octobre 2002 ; qu'il a pourtant continué à travailler pour le compte de cet employeur sans même continuer à exiger ni tenter d'obtenir la régularisation de sa situation par l'établissement d'un écrit, jusqu'à son départ définitif de l'Agence Bouet le 4 mai 2004 ; qu'à défaut de lettre de démission, Monsieur X... sera déclaré démissionnaire de fait de son emploi d'agent d'entretien à compter du 4 mai 2004.

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il ressort de la lecture des déclarations à l'audience de Monsieur X... que celui-ci indique percevoir actuellement le RMI et verse un contrat d'insertion renouvellement daté du 18 octobre 2005 ; que Monsieur X..., qui n'a pas indiqué lors de l'audience la demande de sa demande initiale de demande de RMI, n'a pas davantage remis au conseil les documents réclamés concernant les demandes initiales du RMI permettant à la juridiction de vérifier sa situation professionnelle au moment de ladite demande et susceptible, par conséquent, de déterminer la date de sa démission ; que dès lors, l'absence de production par le requérant des documents réclamés par la juridiction démontre sa volonté de dissimuler la réalité de ses déclarations auprès de la CAF susceptible de contredire ses intérêts, ce qui doit conduire la juridiction prud'homale à constater que Monsieur X... a, en réalité, pris l'initiative de la rupture du contrat de travail avec la SARL Agence Bouet, laquelle doit s'analyser en une démission du demandeur ; que la production d'une attestation de son médecin traitant, le Docteur Y..., indiquant que Monsieur X... serait en arrêt maladie depuis le 4 mai 2004 jusqu'au 31 janvier 2006, ne saurait, compte tenu du fait que Monsieur X... bénéficie depuis le 18 octobre 2005 d'un contrat d'insertion dans le cadre du dispositif du RMI exécutable à compter du 31 octobre 2005, établira le maintien de l'appartenance de Monsieur X... au sein de la SARL Agence Bouet ; que dès lors, en l'absence de production par le requérant de sa demande initiale de RMI présentée auprès de la CAF des Bouches du Rhône par le demandeur, il sera supposé qu'il sollicitait l'obtention du RMI dès le lendemain de son dernier jour de présence au sein de l'entreprise, de sorte que la date de sa démission sera fixée au 4 mai 2004, date de la dernière journée de présence du salarié au sein de l'entreprise défenderesse ; que, dès lors, il ressort de ces constatations que la demande de résolution judiciaire du contrat de travail de Monsieur X... pour manquement par l'employeur à ses obligations contractuelles et les demandes d'indemnité de rupture subséquentes seront rejetées ;

1°) ALORS QU 'en l'absence de volonté non équivoque de démissionner de la part du salarié, la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement ; que la volonté de démissionner ne peut résulter du seul comportement du salarié ; qu'en retenant dès lors, pour dire Monsieur X... démissionnaire, qu'il avait continué à travailler pour le compte de l'employeur sans demander la régularisation de sa situation tout en constatant que le salarié à temps partiel ne bénéficiait pas d'un contrat de travail écrit, qu'il avait saisi l'inspecteur du travail d'une réclamation, qu'il avait protesté auprès de l'employeur et qu'il se trouvait en arrêt maladie à la date de son départ, la cour d'appel a violé l'article L 122-5 du code du travail (ancien) devenu L. 1237-1 (nouveau).

2°) ALORS QU 'en retenant qu'en l'absence de production par Monsieur X... de sa demande initiale de RMI présentée auprès de la CAF des Bouches du Rhône, il sera supposé qu'il sollicitait l'obtention du RMI dès le lendemain de son dernier jour de présence dans l'entreprise, de sorte qu'il a démissionné, la cour d'appel s'est fondée sur un motif hypothétique et a violé l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de ses demandes de rappel de salaire et de congés payés afférents.

AUX MOTIFS QUE pour étayer ses demandes de rappel de salaire et de congés payés afférents, Monsieur X... produit contradictoirement ses bulletins de paie ; cependant, aux termes de l'article 146, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'appartient pas au juge du fond de suppléer la carence des parties dans l'administration de la preuve dont elles ont la charge ; le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a ordonné une mesure d'instruction et Monsieur X... sera débouté de ses demandes de rappel de salaire et de congés payés afférents.

ALORS QUE la preuve des heures effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties ; que le juge doit examiner les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié et que l'employeur est tenu de lui fournir ; qu'en déboutant Monsieur X... de sa demande quand il résultait de ses constatations qu'il avait fourni des bulletins de salaire, donc des éléments de nature à étayer sa demande, la cour d'appel, qui n'a pas vérifié les éléments que l'employeur était alors tenu de fournir, a violé l'article L 121-1-1 du code du travail (ancien) devenu L 1221-1 du code du travail (nouveau).


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-40376
Date de la décision : 07/04/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 05 juin 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 avr. 2010, pourvoi n°08-40376


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Ortscheidt

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.40376
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