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31/03/2010 | FRANCE | N°09-81920

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 31 mars 2010, 09-81920


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Pascale,
- Y... Elyane, épouse Z...,
- A... Muriel, épouse B...,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'ANGERS, chambre correctionnelle, en date du 27 janvier 2009, qui, pour violences aggravées, a condamné les deux premières à quatre mois d'emprisonnement avec sursis et la troisième à deux mois d'emprisonnement avec sursis, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu le mÃ

©moire commun aux demanderesses, le mémoire en défense et les observations complémentaires produits...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Pascale,
- Y... Elyane, épouse Z...,
- A... Muriel, épouse B...,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'ANGERS, chambre correctionnelle, en date du 27 janvier 2009, qui, pour violences aggravées, a condamné les deux premières à quatre mois d'emprisonnement avec sursis et la troisième à deux mois d'emprisonnement avec sursis, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu le mémoire commun aux demanderesses, le mémoire en défense et les observations complémentaires produits ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 222-13 du code pénal et des articles 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré les prévenues coupables des faits visés à la prévention et a en conséquence condamné Pascale X... et Eliane Z... à une peine de quatre mois d'emprisonnement assortie du sursis et condamné Muriel B... à une peine de deux mois d'emprisonnement également assortie du sursis et à verser des dommages et intérêts aux parties civiles ;

"aux motifs que si, compte tenu des handicaps ci-dessus rappelés, certaines attitudes peuvent être admises, dans la mesure où elles sont destinées à permettre aux pensionnaires de s'alimenter normalement, ainsi le fait de bloquer le tête d'une personne qui refuse de s'alimenter, même si cette attitude qui ne pourrait être admise pour une personne normale, peut se concevoir dans la situation présente, pour autant tous les gestes décrits par les témoins qui ne sont pas justifiés et qui portent atteinte à la dignité des personnes ou leur infligent des violences inutiles, constituent des actes de violences pénalement répréhensibles ; (…) ; que les faits matériels qui ont été exposés ci-dessus sont établis ; qu'en effet, les témoignages recueillis permettent de retenir leur concordance et ainsi juger qu'ils ont été réellement commis ; que les personnes qui ont attesté ont été entendues dans le cadre de la procédure judiciaire et ont renouvelé leurs dénonciations ; que la thèse du complot, de la jalousie, ne permet de dénuer ces témoignages de vérité ; que les différents témoins qui ont agi dans le cadre de la procédure judiciaire étaient parfaitement conscients de leur responsabilité en cas de faux témoignages ; que ces témoignages sont circonstanciés, emprunts de prudence dans le choix des mots et ne portent pas de jugement de valeur sur la personnalité des prévenues contrairement à ces dernières ; que les faits rapportés sont précis et détaillés ; que s'il existe, en effet, des témoignages nombreux affirmant n'avoir jamais constaté une brutalité de leur part, cela ne permet pas de dire que les faits n'ont pas été réellement commis ; qu'ils peuvent avoir été commis hors la présence de ces personnes ; que les actes qui ont été ici caractérisés, apparaissent inutiles, constituent des violences en eux-mêmes, même si, compte tenu de leur pathologie, ils ont pu, pour certains handicapés ne pas être ressentis de la même façon qu'une personne indemne de ces pathologies ; qu'ils ont, par nature ce caractère de violence qu'elle soit physique ou psychique ; qu'il est également indifférent de relever qu'ils aient eu un retentissement ou non sur la victime ; que ces actes ont été commis volontairement, ce qui n'est pas contesté, seul le mobile allégué qui n'est pas de blesser ou porter atteinte à la dignité de la personne ; que le délit visé à la prévention est donc constitué ;

"1) alors que, tout jugement et arrêt doit contenir des motifs propres à justifier sa décision ; que la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; qu'en déclarant les prévenues coupables de tous les faits visés à la prévention y compris de violences pour avoir maintenu la tête des handicapés sous leur bras pour les nourrir, après avoir pourtant constaté que, compte tenu des handicaps affectant les personnes dont elles avaient la garde, certaines attitudes peuvent être admises, dans la mesure où elles sont destinées à permettre aux pensionnaires de s'alimenter normalement, ainsi le fait de bloquer le tête d'une personne qui refuse de s'alimenter, même si cette attitude qui ne pourrait être admise pour une personne normale, peut se concevoir dans la situation présente, ce dont il résultait que ces attitudes ne pouvaient être constitutives de violence, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, équivalant à un défaut de motif, et a ainsi violé les textes susvisés ;

"2) alors que, de simples abstentions ne peuvent caractériser le délit de violence volontaire ; qu'en déclarant les prévenues coupables de l'ensemble des faits de violence visés à la prévention notamment pour avoir laissé Yannick C... sur les toilettes pour le laver, lui donner des médicaments ou passer l'après-midi, simples actes d'abstention, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"3) alors que, l'infraction de violences volontaires n'est constituée, en l'absence de contact matériel avec le corps de la victime, que si les agissements du prévenu ont causé à celle-ci une atteinte à son intégrité physique ou psychique dûment constatée et caractérisée par un choc émotif ou une perturbation psychologique ; qu'en déclarant les prévenues coupables de l'ensemble des faits de violence qui leur étaient reprochés, notamment au titre d'actes n'ayant entraîné aucun contact physique avec les victimes et consistant à avoir crié sur les victimes, interdit à l'une d'entre elle de toucher l'eau, à l'avoir laissé sur les toilettes ou à s'être moqué d'elle lorsqu'elle se masturbait au motif qu'il est indifférent de relever qu'ils aient eu un retentissement ou non sur la victime, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"4) alors que, les violences légères ne sont pas réprimées quand elles sont infligées dans un but d'éducation, tant par les parents que par les maîtres et éducateurs ; que le devoir d'éducation justifie en effet la reconnaissance d'un pouvoir de correction tempéré et proportionné ; que les prévenues faisaient valoir que les actes qui leur étaient reprochés ne pouvaient être qualifiés de violences et pénalement réprimés, s'agissant de gestes inoffensifs, exercés dans un but éducatif dans le cadre du devoir d'éducation dont elles avaient la charge et pour maintenir l'ordre au sein du groupe Le Belem ; qu'en déclarant les prévenus coupables des faits visés à la prévention sans répondre à ce moyen, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale en violation des textes susvisés" ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, 222-13 du code pénal et des articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Elyane D... coupable des faits visés à la prévention, notamment d'avoir commis des violences n'ayant pas entraîné d'incapacité totale de travail sur Yannick C..., et l'a en conséquence condamnée à une peine de quatre mois d'emprisonnement assortie du sursis et à verser, solidairement avec les autres prévenues, à Marie-Cécile C... administratrice de Yannick C... la somme de 800 euros en réparation du préjudice subi par Yannick et celle de 500 euros en réparation de son préjudice propre ;

"aux motifs que si, compte tenu des handicaps ci-dessus rappelés, certaines attitudes peuvent être admises, dans la mesure où elles sont destinées à permettre aux pensionnaires de s'alimenter normalement, ainsi le fait de bloquer le tête d'une personne qui refuse de s'alimenter, même si cette attitude qui ne pourrait être admise pour une personne normale, peut se concevoir dans la situation présente, pour autant tous les gestes décrits par les témoins qui ne sont pas justifiés et qui portent atteinte à la dignité des personnes ou leur infligent des violences inutiles, constituent des actes de violences pénalement répréhensibles ; que sur le comportement d'Elyane Y..., épouse D..., comme les deux précédentes, plusieurs témoins ont indiqué qu'elle donnait des coups de pieds à Julien pour le faire avancer (…) ; qu'elle tire Julien par les cheveux pour lui relever la tête (…), lui donnait des coups de louche (D345) ; que, selon Antoine E... comme Pascale X..., Elyane D... tapait fortement Yohann F..., dans le dos s'il s'arrêtait de manger ; que toutes les trois sont mises en cause pour s'être acharnées sur les six victimes parties civiles en leur criant dessus pour les faire manger, en leur tapant sur les mains, en les alimentant de manière brutale et rapide, en leur frottant durement une cuillère sur les dents (D 7 ; D 10 ; D 11 ; D 12 ; D 13 ; D 15 ; D 16 ; D 20 ; D 22 ; D 23 ; D 24 (D 64) ; D 65) ; que toutes les trois n'ont pas respecté le protocole pour Yohann F... ; qu'ainsi Bérangère G... (D 11, D 343), Laurence H... (D 23) ont expliqué qu'Elyane D... et Muriel B... pour faire manger Patrice lui pinçaient le nez et lui mettaient le bras sous la gorge afin de pouvoir le contraindre ; qu'elles lui donnaient à boire sans respecter une pause entre chaque gorgée iI en avait partout sur les vêtements ; que plusieurs témoins ont également déclaré qu'elles ne respectaient pas l'hygiène concernant les pensionnaires en ne changeant pas toujours les couches, en changeant parfois les couches sans toilette préalable ce qui entraînait des rougeurs aux fesses notamment, surtout sur Olivier I... (D 11 D 12 D13 D 16 D 19 D 20 D 21 D 22 D 24 D 59) ; que leur agressivité est également relevée par les différents témoins qui parlent de manque de respect, de cris (…) ; que les faits matériels qui ont été exposés ci-dessus sont établis ; qu'en effet, les témoignages recueillis permettent de retenir leur concordance et ainsi juger qu'ils ont été réellement commis ; que les personnes qui ont attesté ont été entendues dans le cadre de la procédure judiciaire et ont renouvelé leurs dénonciations ; que la thèse du complot, de la jalousie, ne permet de dénuer ces témoignages de vérité ; que les différents témoins qui ont agi dans le cadre de la procédure judiciaire étaient parfaitement conscients de leur responsabilité en cas de faux témoignages ; que ces témoignages sont circonstanciés, emprunts de prudence dans le choix des mots et ne portent pas de jugement de valeur sur la personnalité des prévenues contrairement à ces dernières ; que les faits rapportés sont précis et détaillés ; que s'il existe, en effet, des témoignages nombreux affirmant n'avoir jamais constaté une brutalité de leur part, cela ne permet pas de dire que les faits n'ont pas été réellement commis ; qu'ils peuvent avoir été commis hors la présence de ces personnes ; que les actes qui ont été ici caractérisés, apparaissent inutiles, constituent des violences en eux-mêmes, même si, compte tenu de leur pathologie, ils ont pu, pour certains handicapés ne pas être ressentis de la même façon qu'une personne indemne de ces pathologies ; qu'ils ont, par nature ce caractère de violence qu'elle soit physique ou psychique ; qu'il est également indifférent de relever qu'ils aient eu un retentissement ou non sur la victime ; que ces actes ont été commis volontairement, ce qui n'est pas contesté, seul le mobile allégué qui n'est pas de blesser ou porter atteinte à la dignité de la personne ; que le délit visé à la prévention est donc constitué ;

"1) alors que, tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision ; que si les juges statuent d'après leur intime conviction, ils ne peuvent toutefois, à peine de nullité de leur décision, entrer en voie de condamnation sans avoir relevé l'existence de faits caractérisant l'infraction poursuivie ; qu'en condamnant Elyane D... pour avoir commis des actes de violences n'ayant pas entraîné d'ITT sur la personne de Yannick C... sans caractériser la moindre violence commise à son égard par la prévenue, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale en violation des textes susvisés ;

"2) alors que, les arrêts sont nuls quand ils ne contiennent pas les motifs propres à justifier le dispositif ; qu'il en est de même lorsqu'il a été omis de répondre à un chef péremptoire des conclusions ; qu'Elyane D... faisait valoir que c'est à tort qu'elle était poursuivie pour avoir maltraité Yannick C..., aucun témoin n'ayant jamais rapporté de tels faits ; qu'en déclarant néanmoins Elyane D... coupable de ces faits sans répondre à ce moyen péremptoire, la cour d'appel a violé les texte susvisés" ;

Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré les prévenues coupables, et a ainsi justifié l'allocation, au profit des parties civiles, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;

D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Castel conseiller rapporteur, Mme Ponroy conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Villar ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 09-81920
Date de la décision : 31/03/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 27 janvier 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 31 mar. 2010, pourvoi n°09-81920


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.81920
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