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25/03/2010 | FRANCE | N°08-13798

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 25 mars 2010, 08-13798


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur la première branche du second moyen du pourvoi principal et la deuxième branche du moyen unique du pourvoi incident réunis :
Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu qu'ayant été victime d'un accident, le 26 août 1991, alors qu'il était passager d'un hélicoptère, M. X... a sollicité la condamnation de la société Phyt'Air, propriétaire de l'appareil, et de la société La Réunion aérienne, assureur de cette dernière, à l'indemniser de ses préjudices corporel et économique ;
Attend

u que, pour accueillir cette demande et condamner in solidum la société Phyt'Air et s...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur la première branche du second moyen du pourvoi principal et la deuxième branche du moyen unique du pourvoi incident réunis :
Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu qu'ayant été victime d'un accident, le 26 août 1991, alors qu'il était passager d'un hélicoptère, M. X... a sollicité la condamnation de la société Phyt'Air, propriétaire de l'appareil, et de la société La Réunion aérienne, assureur de cette dernière, à l'indemniser de ses préjudices corporel et économique ;
Attendu que, pour accueillir cette demande et condamner in solidum la société Phyt'Air et son assureur, ce dernier dans la limite de sa garantie contractuelle, à lui payer la somme de 1 994 426,62 €, l'arrêt attaqué retient que le préjudice de M. X... résulte notamment de sa cessation d'activité ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si, comme il le lui était demandé, la cessation d'activité invoquée, intervenue sept ans après l'accident, n'était pas la conséquence d'un choix personnel, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne in solidum la société Phyt'Air et la société La Réunion aérienne à payer à M. X... la somme de 1 994 426,62 euros, l'arrêt rendu le 21 février 2008, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Reims ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mars deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Blondel, avocat aux Conseils pour la société Phyt'Air (demanderesse au pourvoi principal).
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société PHYT'AIR, in solidum avec la société LA REUNION AREIENNE, celle-ci dans la limite de sa garantie contractuelle, à payer à M. Norbert X... la somme de 1.994.426,62 €, déduction faite des provision déjà versée, soit la somme résiduelle de 744.823,17 € ;
AUX MOTIFS, sur les pertes de gains professionnels temporaires, QUE selon le rapport d'expertise déposé par M. Antony Z..., expert-comptable, en date du 3 septembre 1999, M. Norbert X... exerçait une activité principale de prises de vues aériennes, notamment pour l'industrie ; que l'exploitation en parallèle d'un fonds de commerce de vente et de travaux photographiques à Château Thierry depuis 1979 était «faible et guère susceptible d'expansion compte tenu de la concurrence» ; qu'à la suite de l'accident du 26 août 1991, M. Norbert X..., ou plus précisément son épouse, a tenté de poursuivre l'activité de prises de vues aériennes en embauchant un salarié pour accomplir les prestations relatives à ladite activité photographique et a tenu le magasin ; que, toutefois, le «recours à un salarié s'est révélé un échec», «le chiffre d'affaires ne s'est jamais significativement redressé par rapport à la période antérieure à l'accident, les pertes se sont accumulées et M. Norbert X... a dû arrêter toute activité professionnelle le 30 avril 1998» ; que l'expert a chiffré la perte de revenus de 1991 à 1998 à la somme de 738.310.58 € (après déduction de la part de préjudice correspondant à la compensation d'activité de Mme X..., qui n'est pas dans la cause) ; que l'expert a tenu compte des observations de la société PHYT'AIR et de la société LA REUNION AEREINNE, tout comme il a su faire une appréciation pondérée des demandes formées par M. Norbert X... ; que son travail détaillé, renseigné, précis n'encourt donc aucune critique ; que d'ailleurs aucune des parties ne demande plus de nouvelle expertise ; que la demande formée par M. Norbert X... tendant à l'audition de l'expert en vue de fournir des éclaircissements, doit être rejetée dans la mesure où le rapport d'expertise déposé par M. Antony Z..., qui est particulièrement complet et clair, ne nécessité aucune explication orale complémentaire ;
ALORS QUE dans ses dernières conclusions d'appel (conclusions du 189 septembre 2007, p 12 et 13), la société PHYT'AIR faisait valoir que Monsieur X... avait déjà été indemnisé au titre de provision sur préjudice économique bien au-delà de ce que son activité déployée antérieurement à son accident (années 88, 89 et 90) lui avait procuré comme revenus et qu'ainsi il ne pouvait plus prétendre à recevoir à ce titre une nouvelle indemnisation ; qu'en ne répondant pas ce moyen péremptoire, la Cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société PHYT'AIR, in solidum avec la société LA REUNION AREIENNE, celle-ci dans la limite de sa garantie contractuelle, à payer à M. Norbert X... la somme de 1.994.426,62 €, déduction faite des provision déjà versée, soit la somme résiduelle de 744.823,17 € ;
AUX MOTIFS, s'agissant des pertes de gains professionnels futurs et incidence professionnelle, QUE l'expert Z... a chiffré à la somme de 859.050,21 € le préjudice résultant de la cessation d'activité de M. Norbert X..., incluant la perte des droits à la retraite de l'intéressé ; que cette somme, qui correspond à une juste réparation du préjudice subi à ce titre, doit être allouée à M. Norbert X..., aucune critique utile n'étant formuée par les parties sur ce point ; que l'expert a, en outre, retenu la réparation du préjudice résultant des charges financières personnelles de M. Norbert X... (20.885,52 €) et de la perte de valeur du fonds de commerce (30.489,80 €) ; que ces sommes déterminées à la suite d'une analyse approfondie de l'ensemble des éléments qui lui ont été soumis et des observations des parties, correspondant à une juste évaluation du préjudice subi à ce titre ; que la réparation totale de ce chef de préjudice s'établit donc à la somme de 910.425,53 € (859.050,21 € + 20.885,52 € + 30.489,80 €) ;
ALORS QUE, D'UNE PART, l'auteur d'une faute ne peut être condamné à réparation que si sa faute a contribué de façon directe à la production du dommage dont la réparation est demandée ; qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'elle y était invitée (dernières concl. p. 17 et 18), si la cessation d'activité de M. X..., intervenue huit ans après l'accident dont il avait été victime et qui n'avait pas entraîné une incapacité totale, n'était pas la conséquence exclusive d'un choix purement personnel, sans rapport direct avec l'accident du 26 août 1991, ce dont il résultait une absence de préjudice indemnisable au titre d'une perte de gains professionnels futurs avec incidence professionnelle, la Cour d'appel prive son arrêt de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, dans ses dernières conclusions d'appel (cf p. 18 et 19), la société PHYT'AIR faisait valoir que Monsieur X... ne pouvait prétendre à une indemnisation du fait de la perte de son fonds de commerce puisqu'il avait déjà été partiellement indemnisé de cette perte par la vente de négatifs et dans la mesure où il avait conservé son droit au bail ; qu'en ne répondant pas à ce chef péremptoire de conclusions, la Cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.
Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour la société La Réunion Aérienne (demanderesse au pourvoi incident).
La société La Réunion Aérienne fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'AVOIR, dans la limite de sa garantie contractuelle de 1.524.490 euros, condamnée in solidum avec la société Phyt'Air, à payer à M. X... la somme de 1.994.426,62 euros, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt et capitalisation des intérêts, soit une somme résiduelle de 744.823,17 euros après déduction des sommes déjà versées ;
AUX MOTIFS QUE selon le rapport d'expertise déposé par M. Antony Z..., expert-comptable, en date du 3 septembre 1999, M. Norbert X... exerçait une activité principale de prises de vues aériennes, notamment pour l'industrie ; que l'exploitation en parallèle d'un fonds de commerce de vente et de travaux photographiques à Château-Thierry depuis 1979 était « faible et guère susceptible d'expansion compte tenu de la concurrence » ; qu'à la suite de l'accident du 26 août 1991, M. Norbert X..., ou plus précisément son épouse, a tenté de poursuivre l'activité de prise de vues aériennes en embauchant un salarié pour accomplir les prestations relatives à ladite activité photographique et a tenu le magasin ; que, toutefois, « le recours à un salarié s'est révélé un échec», «le chiffre d'affaires ne s'est jamais significativement redressé par rapport à la période antérieure à l'accident, les pertes se sont accumulées et M. Norbert X... a dû arrêter toute activité professionnelle le 30 avril 1998 » ; que l'expert a chiffré la perte de revenus de 1991 à 1998 à la somme de 738.310,58 euros (après déduction de la part de préjudice correspondant à la compensation d'activité de Mme X..., qui n'est pas dans la cause) ; que l'expert a tenu compte des observations de la société Phyt'Air et de la société La Réunion Aérienne, tout comme il a su faire une appréciation pondérée des demandes formées par M. Norbert X... ; que son travail détaillé, renseigné, précis n'encourt donc aucune critique ;
1) ALORS QUE dans ses dernières conclusions d'appel (conclusions du 18 septembre 2007, p. 12 et 13), la société Phyt'Air faisait valoir que M. X... avait déjà été indemnisé au titre de provision sur préjudice économique bien au delà de ce que son activité déployée antérieurement à son accident (années 88, 89 et 90) lui avait procuré comme revenus et qu'ainsi il ne pouvait plus prétendre à recevoir à ce titre une nouvelle indemnisation ; qu'en ne répondant pas à ce moyen péremptoire, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
ET AUX MOTIFS QUE, sur la perte de gains professionnels futurs et l'incidence professionnelle, l'expert Z... a chiffré à la somme de 859.050,21 euros le préjudice résultant de la cessation d'activité de M. Norbert X..., incluant la perte des droits à retraite de l'intéressé ; que cette somme, qui correspond à une juste réparation du préjudice subi à ce titre, doit être allouée à M. Norbert X..., aucune critique utile n'étant formulée par les parties sur ce point ; que l'expert a, en outre, retenu la réparation du préjudice résultant des charges financières personnelles de M. Norbert X... (20.885,52 euros) et de la perte de la valeur du fonds de commerce (30.489,80 euros) ; que ces sommes, déterminées à la suite d'une analyse approfondie de l'ensemble des éléments qui lui a été soumis et des observations des parties, correspondant à une juste évaluation du préjudice subi à ce titre ; que la réparation totale de ce chef de préjudice s'établit donc à la somme de 910.425,53 euros (859.050,21 euros + 20.885,52 euros + 30. 489,80 euros) : que M. Norbert X... n'est pas fondé à demander, en outre, la réparation d'un prétendu préjudice résultant de la perte de chance liée à l'évolution de son chiffre d'affaires et des résultats nets qui en auraient découlé, dès lors que, dans son évaluation du préjudice, M. Antony Z... a déjà pris en considération l'ensemble des paramètres (page 38 à 40 de son rapport), en tenant compte non seulement d'une progression possible des résultats de l'entreprise mais aussi des observations pertinentes de l'ensemble des parties ; que M. Norbert X... n'est pas davantage fondé à demander les intérêts cumulés au titre des prélèvements non opérés et apports personnels, qui n'ont pas été retenus par l'expert, dans la mesure où il n'établit pas que les sommes qu'il aurait pu prélever auraient été épargnées et n'auraient pas été consommées pour la vie courante et où l'expert a déjà réparé le préjudice résultant de ses charges financières personnelles ; que la demande formée par M. Norbert X... au titre de la perte de revenus de son épouse du fait de la « cessation d'activité de l'entreprise familiale » n'est pas recevable puisque nul ne plaide par procureur et que Madame X... n'est pas partie à la présente procédure ;
2) ALORS QUE l'auteur d'une faute ne peut être condamné à réparation que si sa faute a contribué de façon directe à la production du dommage dont la réparation est demandée ; qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'elle y était invitée par la société Phyt'Air (dernières conclusions, p.17et18), si la cessation d'activité de M. X..., intervenue huit ans après l'accident dont il avait été victime et qui n'avait pas entraîné une incapacité totale, n'était pas la conséquence exclusive d'un choix purement personnel, sans rapport direct avec l'accident du 26 août 1991, ce dont il résultait une absence de préjudice indemnisable au titre d'une perte de gains professionnels futurs avec incidence professionnelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
3) ALORS QUE dans ses dernières conclusions d'appel (p. 18 et 19), la société Phyt'Air faisait valoir que M. X... ne pouvait prétendre à une indemnisation du fait de la perte de son fonds de commerce puisqu'il avait déjà été partiellement indemnisé de cette perte par la vente de négatifs et dans la mesure où il avait conservé son droit au bail ; qu'en ne répondant pas à ce chef péremptoire de conclusions, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
4) ALORS QUE le principe de la réparation intégrale interdit que la réparation du dommage excède le montant du préjudice ; que le préjudice économique lié à la cessation d'une activité professionnelle ne peut donner lieu à indemnisation que dans la proportion exacte de la perte de revenus en résultant ; qu'en indemnisant M. X... des conséquences de la cessation de toute activité professionnelle, quand ils constataient seulement que M. X... avait cessé son activité de photographie et sans rechercher, comme cela leur était pourtant expressément demandé, si M. X... était encore en mesure d'exercer une activité professionnelle d'où il aurait pu tirer des revenus, les juges d'appel ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
5) ALORS QUE la réparation de la perte d'une chance doit être mesurée à l'aune de la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si celle-ci s'était réalisée ; que pour chiffrer le préjudice économique de M. X... consécutif à la cessation de son activité professionnelle, les juges d'appel ont purement et simplement repris l'évaluation de l'expert Z..., fondée sur une projection des revenus que M. X... aurait tirés de son activité professionnelle compte tenu de l'évolution probable du chiffre d'affaires ; qu'en allouant ainsi à M. X... une indemnité correspondant à l'augmentation du chiffre d'affaires de son activité et non à la seule perte d'une chance de réaliser celui-ci, les juges d'appel ont violé l'article 1147 du code civil ;
6) ALORS QUE la faute de la victime qui a contribué à l'aggravation de son propre dommage est de nature à limiter son droit à réparation ; que dans ses écritures d'appel, la société La Réunion Aérienne faisait valoir, en s'appuyant sur les conclusions expertales, que la poursuite par M. X... de son activité pendant près de sept ans après l'accident, avait provoqué la perte totale de son fonds de commerce et par voie de conséquence son préjudice économique ; qu'en ne répondant pas à ce moyen péremptoire des conclusions de la société La Réunion Aérienne, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 08-13798
Date de la décision : 25/03/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 21 février 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 25 mar. 2010, pourvoi n°08-13798


Composition du Tribunal
Président : M. Charruault (président)
Avocat(s) : Me Blondel, Me Le Prado, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.13798
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