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24/03/2010 | FRANCE | N°08-44883

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 mars 2010, 08-44883


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bourges, 5 septembre 2008), que Mme X... a été engagée, en qualité de formatrice de formation initiale horticole, par l'Association de l'enseignement professionnel privé agricole du Cher du lycée agricole de Bengy-sur-Craon-Lignières (AEPPAC) par contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel du 3 septembre 2001 ; qu'ayant été licenciée le 21 janvier 2005, elle a saisi la juridiction prud'homale en sollicitant un rappel de salaire sur le f

ondement de la requalification de son contrat de travail en temps plein ;
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bourges, 5 septembre 2008), que Mme X... a été engagée, en qualité de formatrice de formation initiale horticole, par l'Association de l'enseignement professionnel privé agricole du Cher du lycée agricole de Bengy-sur-Craon-Lignières (AEPPAC) par contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel du 3 septembre 2001 ; qu'ayant été licenciée le 21 janvier 2005, elle a saisi la juridiction prud'homale en sollicitant un rappel de salaire sur le fondement de la requalification de son contrat de travail en temps plein ;
Attendu que l'AEPPAC fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande de requalification et de l'avoir condamnée à payer un rappel de salaire alors, selon le moyen :
1°/ que le salarié ne peut obtenir la requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet s'il n'a pas effectué régulièrement des heures complémentaires ayant pour effet de porter sa durée de travail au niveau de la durée légale du travail ou de la durée fixée conventionnellement ; qu'en l'espèce, sur toute la relation de travail liant les parties de septembre 2001 à avril 2005, la cour d'appel a constaté que la salariée, par l'accomplissement d'heures complémentaires, avait été amenée à effectuer un horaire de travail dépassant la durée fixée conventionnellement (78 heures) sur les seuls mois de novembre (89 heures 63) et décembre 2002 (82 heures 63), en sorte que le fait que la durée de travail effectuée par la salariée ait dépassé de quelques heures, de manière exceptionnelle, le niveau de la durée fixée conventionnellement, ne pouvait justifier la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet ; qu'en jugeant du contraire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article L. 212-4-3, devenu L. 3123-17, du code du travail ;
2°/ que la requalification d'un contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet ne donne pas automatiquement droit à un rappel de salaires ; que le salarié n'a droit à un rappel de salaires que s'il était tenu de rester constamment à la disposition de l'employeur durant les heures non travaillées dont il réclame le paiement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'en dehors de son temps de travail hebdomadaire de 11 heures, qui avait été effectif, la salariée, qui était informée en début de chaque année de son emploi du temps, pouvait librement s'organiser sans rester à la disposition permanente de son employeur et qu'elle était libre de refuser d'effectuer des heures complémentaires ; qu'en faisait néanmoins droit au rappel de salaires réclamé par la salariée pour des heures non travaillées du seul fait de la requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 212-4, devenu L. 3121-1, du code du travail ;
3°/ que le contrat de travail à temps partiel ne peut être requalifié en contrat de travail à temps complet qu'à compter de la période où, en effectuant des heures complémentaires, le salarié a eu un temps de travail équivalent à la durée légale du travail ou à la durée fixée conventionnellement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a fondé la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet sur le fait qu'aux mois de novembre et décembre 2002, les heures complémentaires avaient eu pour effet de porter la durée de travail effectuée par la salariée au-delà du niveau de la durée fixée conventionnellement ; qu'en prononçant toutefois cette requalification à compter de la conclusion du contrat de travail suivant l'écrit du 3 septembre 2001 et en allouant à ce titre le montant du rappel de salaires réclamé par la salariée calculé sur la base d'un horaire à temps complet à compter de son embauche, la cour d'appel a violé l'article L. 212-4-3, devenu L. 3123-17, du code du travail, ensemble l'article 12 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant constaté que le recours par l'employeur à des heures complémentaires avait eu pour effet de porter, au moins en novembre 2002, la durée de travail effectuée par la salariée au-delà de la durée du travail fixée conventionnellement, la cour d'appel a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'Association de l'enseignement professionnel privé agricole du Cher du lycée agricole de Bengy-sur-Craon-Lignières aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'Association de l'enseignement professionnel privé agricole du Cher du lycée agricole de Bengy-sur-Craon-Lignières à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de l'Association de l'enseignement professionnel privé agricole du Cher du lycée agricole de Bengy-sur-Craon-Lignières ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mars deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour l'Association de l'enseignement professionnel privé agricole du Cher du Lycée agricole de Bengy-sur-Craon-Lignières
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR requalifié le contrat de travail à temps partiel passé entre les parties suivant l'écrit du 3 septembre 2001 (et non 2000 comme énoncé par erreur par la Cour d'appel) en contrat de travail à temps complet et d'AVOIR, en conséquence, condamné l'exposante à payer à la salariée 28.023,71 € à titre de rappel de salaire ainsi que la somme de 3.415,70 € au titre du solde des salaires dus pendant la période de préavis augmentée de 341,57 € de congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QUE « il n'est pas discuté que les parties ne pouvaient recourir dans le contrat de travail au dispositif d'un temps partiel annualisé que la loi du 9 janvier 2000 avait abrogé ;Pour soutenir sa demande de requalification de son contrat travail en contrat à temps plein, Madame Muriel X... fait d'abord valoir qu'en l'absence dans son contrat écrit des mentions légales relatives à la répartition des heures de travail, elle devait en permanence se trouver à disposition de son employeur, d'autant qu'elle devait effectuer des heures complémentaires ;Mais comme le fait valoir l'association, le contrat de travail écrit précisait un temps de travail hebdomadaire de 11 heures qui a été effectif ainsi qu'en témoignent les bulletins de salaire ; si la répartition n'était pas indiquée dans le contrat, ce dernier renvoyait aux emplois du temps qui ont été communiqués à Madame Muriel X... en début de chaque année scolaire, de sorte qu'elle pouvait librement s'organiser sans rester à la disposition permanente de son employeur, le contrat ne prévoyant aucune heure complémentaire, Madame Muriel X... était libre de les refuser ;Au soutien de sa demande, Madame Muriel X... fait également valoir qu'elle a travaillé 92 heures en novembre 2002 et 82 h 63 en décembre 2002, soit au-delà de la durée légale de travail de 78 heures pour un professeur de sa catégorie, contrairement aux dispositions de l'article L212-4-3 du code du travail, ce qui doit entraîner la requalification de son contrat de travail en contrat à temps plein ;La convention collective nationale du travail des personnels de formation des établissements d'enseignement et centres de formation d'enseignement agricole privé relevant du conseil national de l'enseignement agricole privé, applicable à l'espèce, prévoit dans son article 20. 2 que les enseignants en formation initiale à temps complet sont tenus de fournir un service hebdomadaire de 18 heures pour les enseignements théoriques et de 20 heures pour les enseignements pratiques, soit 78 heures par mois dans le premier cas, et 87 heures par mois dans le second cas ;Il ressort de l'examen des bulletins de salaire de Madame Muriel X... de novembre et décembre 2002 et de janvier 2003 que Madame Muriel X... a effectué en novembre 2002 un service de 47 heures 63 plus 26 heures plus 16 heures, soit au total heures 63 ; en décembre 2002, son service a été de 9 heures plus 47,63 heures plus 16 heures plus 10 heures soit au total 82,63 heures ;Ainsi, l'employeur a eu recours à des heures complémentaires dont l'existence n'était pas prévue par le contrat de travail basé de façon erronée sur une annualisation du temps de travail ; au surplus, ce recours par l'employeur à des heures complémentaires a eu pour effet, au moins en novembre 2002, de porter la durée du travail effectué par la salariée au-delà du niveau de la durée du travail fixé conventionnellement, contrairement aux dispositions de l'article L212-4-3 du code du travail, devenu L3123-17 du code du travail ; il s'ensuit que le contrat de travail doit être requalifié en contrat de travail à temps complet, sans que puisse être opposé le seul fait que ces heures aient été payées à la salariée ;Du fait de cette requalification, l'association doit payer à Madame Muriel X... un rappel de salaire de 28 023,71 €, ainsi qu'il résulte de la feuille de calcul régulièrement établie et versée au débat par Madame Muriel X..., qui ne fait d'ailleurs l'objet d'aucune critique de la part de l'employeur » ;
1. ALORS QUE le salarié ne peut obtenir la requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet s'il n'a pas effectué régulièrement des heures complémentaires ayant pour effet de porter sa durée de travail au niveau de la durée légale du travail ou de la durée fixée conventionnellement ; qu'en l'espèce, sur toute la relation de travail liant les parties de septembre 2001 à avril 2005, la cour d'appel a constaté que la salariée, par l'accomplissement d'heures complémentaires, avait été amenée à effectuer un horaire de travail dépassant la durée fixée conventionnellement (78 heures) sur les seuls mois de novembre (89 heures 63) et décembre 2002 (82 heures 63), en sorte que le fait que la durée de travail effectuée par la salariée dépassé de quelques heures, de manière exceptionnelle, le niveau de la durée fixée conventionnellement, ne pouvait justifier la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet ; qu'en jugeant du contraire, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article L 212-4-3 devenu L 3123-17 du code du travail ;
2. ALORS QUE la requalification d'un contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet ne donne pas automatiquement droit à un rappel de salaires ; que le salarié n'a droit à un rappel de salaires que s'il était tenu de rester constamment à la disposition de l'employeur durant les heures non travaillées dont il réclame le paiement ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté qu'en dehors de son temps de travail hebdomadaire de 11 heures, qui avait été effectif, la salariée, qui était informée en début de chaque année de son emploi du temps, pouvait librement s'organiser sans rester à la disposition permanente de son employeur et qu'elle était libre de refuser d'effectuer des heures complémentaires ; qu'en faisait néanmoins droit au rappel de salaires réclamé par la salariée pour des heures non travaillées du seul fait de la requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L212-4 devenu L 3121-1 du code du travail ;
3. ALORS subsidiairement QUE, le contrat de travail à temps partiel ne peut être requalifié en contrat de travail à temps complet qu'à compter de la période où, en effectuant des heures complémentaires, le salarié a eu un temps de travail équivalent à la durée légale du travail ou à la durée fixée conventionnellement ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a fondé la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet sur le fait qu'aux mois de novembre et décembre 2002, les heures complémentaires avaient eu pour effet de porter la durée de travail effectuée par la salariée au-delà du niveau de la durée fixée conventionnellement ; qu'en prononçant toutefois cette requalification à compter de la conclusion du contrat de travail suivant l'écrit du 3 septembre 2001 et en allouant à ce titre le montant du rappel de salaires réclamé par la salariée calculé sur la base d'un horaire à temps complet à compter de son embauche, la Cour d'appel a violé l'article L 212-4-3 devenu L 3123-17 du code du travail, ensemble l'article 12 du code de procédure civile ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-44883
Date de la décision : 24/03/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bourges, 05 septembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 mar. 2010, pourvoi n°08-44883


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : Me Blanc, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.44883
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