LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 30 juillet 2008), que le 22 avril 1993, M. X..., artisan, et son épouse ont souscrit divers prêts auprès de la caisse de Crédit mutuel Champagnole-Morez (la banque) pour les besoins d'une activité professionnelle ; qu'à cette occasion, M. X... a adhéré au contrat d'assurance de groupe souscrit par la banque auprès de la société Assurances du crédit mutuel (l'assureur), à l'effet d'être garanti contre les risques décès, invalidité et perte d'emploi ; qu'il s'est trouvé en arrêt de travail à compter du 21 janvier 1996 ; que l'assureur, qui a pris en charge le remboursement des échéances des prêts à compter du 22 avril suivant, après expiration du délai de carence, a cessé ses versements le 27 juillet 1998, date à laquelle, d'après le rapport d'un expert judiciaire, M. X... ne se trouvait plus en incapacité temporaire totale ; que, le 25 octobre 2002, M. et Mme X... ont fait assigner devant le tribunal de grande instance la banque et l'assureur notamment en garantie, par celui-ci, des échéances du prêt et en paiement, par la première, d'indemnités ; que la banque, reconventionnellement, a demandé la constatation de la résiliation des contrats de prêts à compter de juillet 1998 et le remboursement des sommes restant dues ;
Sur le premier moyen :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande tendant à la condamnation de l'assureur à la garantir des condamnations prononcées à son encontre au profit de la banque, alors, selon le moyen :
1°/ que faute d'avoir précisé à quel titre et sur quel fondement l'assureur avait pu subitement et unilatéralement décider de cesser, à partir du 28 juillet 1998, de prendre à sa charge les échéances de remboursement des prêts contractés par M. et Mme X..., sachant qu'il ne pouvait alors connaître les conclusions du rapport d'expertise judiciaire de M. Y..., qui n'a été déposé que le 12 octobre 2004, et se trouvait donc à cette date en l'état des seules conclusions de son propre médecin-conseil, lequel avait conclu à la prise en charge des prêts, et des certificats médicaux de prolongation qui lui avaient été périodiquement adressés par M. et Mme X..., la cour d'appel ne justifie pas légalement sa décision au regard des articles 1134 et 1147 du code civil en ce qu'elle écarte tout manquement de l'assureur de nature à engager sa responsabilité ;
2°/ que tant à raison de l'obligation d'information qui pèse sur les professionnels de l'assurance que du devoir de loyauté qui doit présider à toute relation contractuelle, l'assureur ne pouvait, après avoir accepté de prendre en charge les échéances des prêts litigieux et invité M. et Mme X..., pour la poursuite de cette prise en charge, à lui adresser périodiquement des certificats médicaux attestant de l'incapacité de M. X... à exercer une activité professionnelle, décider subitement, quand cette obligation était pourtant satisfaite, de cesser brutalement cette prise en charge sans même en avoir préalablement averti les emprunteurs adhérents ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel viole les articles 1134, 1135 et 1147 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient que selon le rapport de l'expert, M. X... ne se trouvait plus en incapacité temporaire totale, selon la définition contractuelle, à partir du 28 juillet 1998, dans la mesure où il était apte à exercer une activité professionnelle, même en dehors de sa profession habituelle, de sorte qu'à compter de cette date il ne remplissait plus les conditions posées par le contrat d'assurance pour obtenir la mise en oeuvre des garanties ;
Que de ces constatations et énonciations, procédant de son appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve soumis aux débats, et portant notamment sur les engagements contractuels de l'assureur et l'état d'incapacité invoqué au regard de ceux-ci, la cour d'appel a pu décider que l'assureur n'avait commis aucune faute pour avoir cessé sa garantie, à la date rappelée, sans notification préalable ;
Et attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des productions, que Mme X... ait invoqué devant la cour d'appel l'absence de respect, par l'assureur, de son obligation d'information ;
D'où il suit que le moyen, nouveau, mélangé de fait et de droit, et comme tel irrecevable en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et attendu que les deuxième et troisième moyens ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de Me Blondel ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Blondel, avocat aux Conseils pour Mme X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme X... de sa demande tendant à ce que les Assurances du Crédit Mutuel fussent condamnées à la garantir des condamnations prononcées à son encontre au profit de la Caisse de Crédit Mutuel ;
AUX MOTIFS QUE les époux X... font grief aux ACM d'avoir unilatéralement cessé de prendre en charge les échéances de remboursement des prêts en raison de la déchéance du terme prononcée par le Crédit Mutuel, bien que, d'une part, tant que l'assuré continuait à adresser ses arrêts maladie, la prise ne charge devait être poursuivie ou, à tout le moins et avant toute décision, une expertise médicale devait être mise en oeuvre, d'autre part que la fin de la garantie aurait dû être précédée d'une notification préalable ; que, cependant, par des motifs que la cour adopte, les premiers juges ont exactement retenu que, selon le rapport de l'expert Y..., M. X... ne se trouvait plus en incapacité temporaire totale, selon la définition contractuelle, à partir du 28 juillet 1998, dans la mesure où il était apte à exercer une activité professionnelle même en dehors de sa profession habituelle, de sorte qu'à compter de cette date l'assuré ne remplissait plus les conditions posées par le contrat d'assurance pour obtenir la mise en oeuvre des garanties ; que le droit à garantie étant conditionné par l'existence d'un état d'incapacité temporaire totale et en cas d'évolution de la situation médicale n'ouvrant plus droit à garantie, aucune faute ne peut être reprochée aux ACM pour avoir cessé de prendre en charge les échéances des prêts sans notification préalable ;
ALORS QUE, D'UNE PART, faute d'avoir précisé à quel titre et sur quel fondement les Assurances du Crédit Mutuel avaient pu subitement et unilatéralement décider de cesser, à partir du 28 juillet 1998, de prendre à leur charge les échéances de remboursement des prêts contractés par les époux X..., sachant que la compagnie d'assurance ne pouvaient alors connaître les conclusions du rapport d'expertise judiciaire de M. Y..., qui n'a été déposé que le 12 octobre 2004, et qu'elle se trouvait donc à cette date en l'état des seules conclusions de son propre médecin conseil, lequel avait conclu à la prise en charge des prêts, et des certificats médicaux de prolongation qui lui avaient été périodiquement adressés par les époux X..., la cour ne justifie pas légalement sa décision au regard des articles 1134 et 1147 du code civil en ce qu'elle écarte tout manquement de la compagnie d'assurance de nature à engager sa responsabilité ;
ET ALORS QUE, D'AUTRE PART, tant à raison de l'obligation d'information qui pèse sur les professionnels de l'assurance que du devoir de loyauté qui doit présider à toute relation contractuelle, les Assurances du Crédit Mutuel ne pouvaient, après avoir accepté de prendre en charge les échéances des prêts litigieux et invité les époux X..., pour la poursuite de cette prise en charge, à leur adresser périodiquement des certificats médicaux attestant de l'incapacité de M. X... à exercer une activité professionnelle, décider subitement, quand cette obligation était pourtant satisfaite, de cesser brutalement cette prise en charge sans même en avoir préalablement averti les emprunteurs adhérents ; qu'en décidant le contraire, la cour viole les articles 1134, 1135 et 1147 du code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme X... de sa demande tendant à voir condamner la Caisse de Crédit Mutuel de Champagnole-Morez à lui verser, à titre de dommages et intérêts, une somme équivalente à celle réclamée à son encontre;
AUX MOTIFS QUE s'il est exact que la garantie chômage ne pouvait trouver application dans le cas de M. X..., qui était artisan, ce que ne pouvait ignorer la banque compte tenu de la nature d'un des prêts accordés, il n'en demeure pas moins que le refus de garantie opposé par les ACM concerne l'absence d'état d'incapacité temporaire totale et non une situation de chômage, de sorte que la relation de cause à effet entre le dommage allégué et la faute reprochée au titre du devoir d'information et de conseil n'est pas établie et qu'aucune indemnité ne peut être allouée à l'appelant ;
ALORS QUE, D'UNE PART, en ne recherchant pas, ainsi qu'elle y était invitée (cf. les dernières écritures de Mme X..., spéc., p.11 et 12, 4 premiers §), si M. X... n'aurait pu prétendre, dans le cas où il aurait été correctement assuré contre le risque de perte d'emploi, comme la banque le lui avait laissé croire, à la prise en charge des échéances des prêts qu'il avait contractés, sinon au titre de l'assurance incapacité, du moins au titre de cette assurance perte d'emploi et si, de ce point de vue, la faute commise par la banque, telle qu'elle est constatée par la cour, n'était pas en relation directe de cause à effet avec le préjudice résultant pour les époux X... de la déchéance du terme et de l'obligation de procéder eux-mêmes au remboursement, peu important à cet égard que le refus de garantie opposé par les Assurances du crédit mutuel ait concerné l'assurance invalidité et non l'assurance chômage, la cour ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article 1147 du code civil ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, pour justifier du refus de la compagnie d'assurances de prendre en charge le remboursement des prêts au titre de la garantie de perte d'emploi, Mme X... avait produit plusieurs correspondances échangées entre son mari et les ACM, desquelles il résultait que M. X... avait tenté de mettre en oeuvre cette garantie et que les assurances du Crédit Mutuel la lui avait refusé, motif pris de l'incapacité dans laquelle il se trouvait l'assuré de produire les documents qui lui étaient réclamés, telle une attestation établie par l'employeur, lesquels ne pouvaient être délivrés qu'à un salarié (cf. les pièces cotées n° 14 à 18 dans le bordereau de communication de pièces joint aux dernières écritures de Mme X...) ; qu'en affirmant, pour nier l'existence d'un lien de cause à effet entre le manquement imputé à la banque à son obligation de conseil et le préjudice dont il était sollicité réparation, que le refus de garantie opposé par les ACM ne concernait que l'absence de l'état d'incapacité temporaire totale et non point une situation de chômage, sans s'expliquer sur les éléments produits qui démontraient le contraire, la cour méconnaît ce que postule les articles 455 du Code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, violés ;
ET ALORS QUE, ENFIN, ne serait-ce qu'à raison du prélèvement des primes correspondantes, les époux X... avaient nécessairement subi un préjudice financier du fait de la souscription par ces derniers d'une assurance perte d'emploi à laquelle M. X... ne pouvait prétendre dès lors qu'il n'était point salarié mais artisan ; qu'en refusant néanmoins d'allouer aux époux X... la moindre réparation au titre du manquement du banquier souscripteur du contrat d'assurance groupe à son obligation de conseil, la cour viole, en tout état de cause, l'article 1147 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme X... de sa demande tendant au paiement d'une somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE les époux X... font grief au Crédit Mutuel d'avoir prononcé avec légèreté la déchéance du terme le 21 juillet 1997, cependant que celle-ci n'était pas acquise ; que Mme X... soutient en outre avoir été perturbée moralement par les mises en demeure adressées et procédures engagées par le Crédit Mutuel ; que le Crédit Mutuel ne critique pas le jugement du 8 février 2006 qui a constaté l'exigibilité à compter du 28 août 1998 des sommes dues par les époux X..., ni d'ailleurs celui du 29 janvier 2004 qui a dit que le Crédit Mutuel ne pouvait à la date du 21 juillet 1997 invoquer l'exigibilité des créances résultant des trois prêts consentis le 22 avril 1993 suite à la prise en charge des échéances des prêts par l'assurance entre le 5 novembre 1996 et le 5 juillet 1997 ; qu'en tout état de cause, à compter du 27 juillet 1998, l'arriéré et les échéances correspondant à la franchise contractuelle de 90 jours n'ont jamais été régularisées de sorte que l'article 14 du contrat de prêt, l'exigibilité immédiate des sommes dues était acquise après un retard de 30 jours dans le paiement d'un terme, sans formalité ni mise en demeure préalable ; que toutefois, comme l'ont relevé les premiers juges, la preuve n'est pas rapportée que la faute résultant de l'erreur commise par le Crédit Mutuel sur la date de la déchéance du terme présente un lien de causalité direct et certain avec un préjudice subi par les époux X... et que ceux-ci ont été, à juste titre, déboutés de leurs demandes de réparation ; que Mme X... ne justifie pas en quoi les procédures de recouvrement engagées par le Crédit Mutuel ont été abusives et qu'il y a lieu de la débouter de sa demande indemnitaire ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE les époux X... ne démontrent pas la réalité du harcèlement procédural qu'ils invoquent, l'envoi de mises en demeure et la délivrance de commandements aux fins de saisie immobilière de la part d'un organisme titulaire d'une créance ne suffisant pas à caractériser ce harcèlement ; que par ailleurs, ils ne précisent pas la nature du préjudice qu'a pu leur occasionner l'erreur commise sur la date de la déchéance du terme ;
ALORS QUE, D'UNE PART, en affirmant que la déchéance du terme était encourue de plein droit à la date du 28 août 1998, motif pris que les échéances correspondant à la franchise contractuelle de 90 jours n'auraient jamais été régularisées, sans s'expliquer sur les relevés de compte produits par Mme X... qui établissaient le contraire (cf. ses dernières écritures p.3, antépénultième alinéa, p.12 § 6 et la pièce n° 25, selon le bordereau annexé aux dites écritures), la cour entache sa décision d'un défaut de motifs, violant les articles 455 du code de procédure civile et 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
ALORS QUE, D'AUTRE PART, en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée, si le comportement particulièrement répréhensible de la Caisse de Crédit Mutuel, qui avait affirmé de façon mensongère que les trois mensualités correspondant aux 90 jours de carence n'avaient pas été payées, quand le contraire était attesté par ses propres relevés de compte, qui avait ensuite prononcé la déchéance du terme dès la date du 21 juillet 1997, cependant que les échéances du prêt étaient alors normalement prises en charge par les Assurances du Crédit Mutuel, et qui avait parallèlement engagé de multiples procédures d'exécution, et notamment des saisies-attribution dont le caractère abusif avait été reconnu par le jugement du 6 février 2004 qui en avait ordonné la mainlevée, n'était pas nécessairement à l'origine, du fait des tracas induits par un tel comportement, d'un préjudice au moins moral, la cour ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article 1147 du code civil.