LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la caisse primaire d'assurance maladie du Nord-Finistère du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le directeur régional des affaires sanitaires et sociales de Bretagne ;
Sur le moyen unique, pris en ses première, deuxième, quatrième, sixième et septième branches :
Vu les articles L. 461-1, L. 461-2, L. 461-5, R. 441-11 et R. 441-13 du code de la sécurité sociale, ensemble le tableau n° 57 des maladies professionnelles ;
Attendu, selon les trois premiers de ces textes, qu'une affection est présumée imputable au travail lorsqu'elle est contractée dans les conditions prévues dans l'un des tableaux de maladies professionnelles instaurés par l'article L. 461-1, alinéa 2 ; que le délai de prise en charge d'une maladie inscrite à un tableau de maladies professionnelles dans lequel l'affection doit avoir été médicalement constatée pour la première fois court de la date de cessation de l'exposition au risque ; qu'il résulte du quatrième de ces textes, que la caisse primaire d'assurance maladie, avant de se prononcer sur le caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie, doit informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments recueillis susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à compter de laquelle elle prévoit de prendre sa décision ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que M. X..., salarié depuis 1973 de la société Marc (la société) en qualité de monteur d'échafaudage, et qui était placé en arrêt de travail depuis le 4 octobre 2003, a adressé, le 1er avril 2004, à la caisse primaire d'assurance maladie du Nord-Finistère (la caisse), une déclaration de maladie professionnelle pour " douleurs épaule, cou, genoux et tendinite du bras " ; que la caisse a pris en charge les affections déclarées au titre du tableau n° 57 des maladies professionnelles par décision du 19 juillet 2004 ;
Attendu que pour déclarer cette décision inopposable à la société, l'arrêt retient que la déclaration lapidaire et sommaire de maladie professionnelle du 1er avril 2004 et les deux fiches de liaison du 28 juin 2004, qui ne donnent aucune indication sur l'origine et la nature des pathologies dont serait affecté M. X..., ne permettent pas de déterminer si ces pathologies remplissent les conditions de fond exigées par le tableau n° 57 des maladies professionnelles, et que la déclaration de maladie professionnelle ayant été faite le 1er avril 2004 en dehors du délai de quatre vingt dix jours qui expirait le 4 janvier 2004, le délai de prise en charge n'était pas respecté, de sorte que la caisse devait impérativement saisir le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles afin qu'il se prononce sur le caractère professionnel des pathologies de M. X... ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que les avis du médecin-conseil concluant à la reconnaissance du caractère professionnel des affections déclarées par M. X... au titre du tableau n° 57, peu important leur présentation, figuraient au dossier de la caisse, que la première constatation médicale des affections était du 4 octobre 2003, de sorte que le délai de prise en charge des maladies inscrites au tableau n° 57 avait été respecté et qu'il n'y avait pas lieu de saisir le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles pour avis, et que la société avait été informée de la clôture de l'instruction de la demande de prise en charge par lettre du 5 juillet 2004, à la suite de laquelle son représentant avait consulté le dossier de la caisse le 9 juillet 2004, de sorte qu'elle avait été mise en mesure de faire valoir ses observations avant la décision du 19 juillet 2004, la cour d'appel, qui a dénaturé les avis du médecin-conseil, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les troisième et cinquième branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 février 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;
Condamne la société Marc aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Marc ; la condamne à payer la caisse primaire d'assurance maladie du Nord-Finistère la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la caisse primaire d'assurance maladie du Nord-Finistère
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit que la décision de la CPAM du NORD FINISTERE de prendre en charge la maladie déclarée le 1er avril 2004 par Monsieur X... au titre de la législation professionnelle était inopposable à la société MARC
AUX MOTIFS PROPRES QUE sur les obligations de la caisse primaire au visa des articles R. 441-11 et suivants du code de la sécurité sociale ; que s'agissant de l'obligation d'information mise à la charge de la caisse primaire, il résulte des dispositions de l'article R. 441-11 alinéa 1 du code de la sécurité sociale que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie, avant de se prononcer sur le caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie, quelle qu'en soit la gravité des conséquences de l'accident ou de la maladie, doit informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à compter de laquelle elle prévoit de prendre sa décision ; que cette information pendant la durée de l'instruction du dossier doit permettre aux parties avant qu'une décision définitive soit prise par la Caisse, d'échanger à armes égales toutes informations utiles sur les circonstances de l'accident ou l'origine de la maladie, dans le respect d'un débat contradictoire et de trouver si possible une solution à l'amiable ; qu'à ce sujet la CNAM dans les circulaires du 19 juin 2001 et de l'année 2007 imposent aux caisses primaires :- de se prononcer au vu du contrôle de son service médical sur l'imputabilité de la maladie à l'activité professionnelle ou de la lésion au fait accidentel,- de respecter la procédure d'instruction prévue aux articles R. 441-11 du code de la sécurité sociale-de permettre à l'employeur d'avoir accès au dossier constitué par application de l'article R. 441-13, en particulier aux certificats médicaux, pièces administratives, rapport d'enquête et avis médicaux ; Sur l'opposabilité de la décision en date du 19 juillet 2004 prenant en charge la pathologie dont souffre la salariée au titre de la législation professionnelle ; qu'il résulte de l'examen des pièces du dossier d'instruction qui ont été versées aux débats que : la déclaration de maladie professionnelle en date du 1er avril 2004 établie par Monsieur X... salarié des Ets MARC fait mention au sujet de la pathologie de « douleurs des épaules, du cou, des genoux, tendinite du bras » et indique comme date de la première constatation médicale le 4 octobre 2003, le certificat médical initial établi également le 1er avril 2004 par le docteur en médecine JF Y...fait état de « douleurs diffuses articulaires », deux fiches de liaison médico-administrative ont été éditées le même jour juin 2004 pour la même pathologie, elles portent le nom du docteur F Z..., mais ne sont pas signées et ne comportent aucune indication exploitable sur la nature et l'origine des pathologies ; l'une porte la référence MP n° 057 AAM 750, l'autre la référence n° 057 ADM 765, la lettre en date du 5 juillet 2004 informant la société Ets Marc de la fin de l'instruction et de la possibilité de venir consulter le dossier pendant un délai de 10 jours à compter de l'établissement de ce courrier, n'a pas été adressée par pli recommandé, on ignore donc à quelle date elle a été réceptionnée, elle a été suivie d'un courrier en date du 19 juillet 2004 de la Caisse primaire informant l'employeur que la maladie constatée le 1er avril 2004 était reconnue maladie professionnelle au titre du tableau 57 ; que si l'on se réfère aux conditions requises par le tableau 57 des maladies professionnelles, la déclaration lapidaire et très sommaire de maladie professionnelle du 1er avril 2004 et les deux fiches de liaison du 28 juin 2004 qui ne donnent aucune indication sur l'origine et la nature des pathologies dont serait affecté Monsieur X..., ne permettent pas de déterminer si ces pathologies remplissent les conditions de fond telles qu'elles sont exigées par le tableau n° 57 des maladies professionnelles pour être prises en charge au titre de la législation professionnelle, alors que le tableau n° 57 des maladies professionnelles s'agissant des affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail est très précis : affections de l'épaule :
tendinopathie de la coiffe des rotateurs (délai de prise en charge 7 jours) enraidissement de l'épaule (délai de prise en charge 90 jours), affection du genou : compression du nerf (délai de prise en charge 7 jours) hygroma aigu des bourses séreuses (délai de prise en charge 7 jours) hygroma chronique des bourses séreuses (délai de prise en charge 90 jours) tendinite sous quadricipitale ou rotulienne et la tendinite de la patte d'oie (délai de prise en charge 7 jours) ; que si le délai de prise en charge, la durée de l'exposition au risque et la nature des travaux susceptibles de provoquer la maladie ne sont pas remplis, l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale impose à la caisse primaire de recueillir l'avis motivé du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) avant de prendre sa décision ; qu'or, si l'on s'en tient à la chronologie des faits, selon la déclaration de maladie professionnelle et le certificat médical initial, la première constatation médicale des affections est du 4 octobre 2003 date de son arrêt de travail qui s'est prolongé jusqu'au 25 janvier 2004, ce qui permet de constater que la déclaration de maladie professionnelle en date du 1er avril 2004 a été faite en dehors du délai de 90 jours qui expirait le 4 janvier 2004, que dans ces conditions la Caisse primaire devait impérativement saisir le CRRMP afin qu'il se prononce sur le caractère professionnel des pathologies de Monsieur X..., ce qui n'a pas été fait et ne permet pas de rendre la décision en date du 19 juillet 2004 opposable à la société Ets MARC, que le jugement sera confirmé.
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il résulte de l'article R. 441-11 du Code de la Sécurité Sociale que la caisse primaire d'assurance maladie, avant de se prononcer sur le caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie, doit informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments recueillis susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision, peu important que l'employeur ait préalablement formulé des réserves ; que l'avis du médecinconseil de la Caisse fait partie des éléments susceptibles de grief à l'employeur ; qu'il résulte des pièces versées aux débats que la CPAM du Nord-Finistère s'est bornée à communiquer à la SA MARC deux fiches de liaison médico-administrative qui, d'usage purement interne, désignent les maladies sous des numéros de code, ne mentionnent pas la qualité de leur signataire, ni même de manière claire l'avis de ce dernier ; que ces documents ne sauraient dès lors être assimilés à l'avis du médecin-conseil ; qu'il s'en déduit que la CPAM du Nord-Finistère n'a pas respecté les obligations que lui impose l'article R. 441-11 susvisé et que sa décision de reconnaître le caractère professionnel des maladies déclarées par M. X... est dès lors inopposable à l'employeur ; qu'il paraît inéquitable de laisser à la charge de la S. A. MARC les sommes engagées par elle dans le cadre de la présente procédure ; qu'il lui sera alloué de ce chef une indemnité de 1. 000 euros.
1° – ALORS QUE respecte le contradictoire la Caisse qui communique à l'employeur l'avis du médecin conseil sous forme de fiche de liaison médico-administrative mentionnant la reconnaissance d'une maladie professionnelle identifiée par son numéro, peu important que cet avis ne soit ni signé ni motivé ; que pour juger que la procédure d'instruction n'aurait pas été menée contradictoirement, la Cour d'appel a considéré, par motifs propres et adoptés, que les deux fiches de liaison médico-administrative émanant du Docteur Z... communiquées à l'employeur, qui n'étaient pas signées et se bornaient à désigner les maladies sous des numéros de code sans comporter d'indication sur l'origine et la nature des pathologies dont serait affecté le salarié, ne pouvaient être assimilées à l'avis du médecinconseil ; qu'en statuant ainsi, lorsque ces fiches de liaison médico-administratives qui mentionnaient la reconnaissance des maladies professionnelles constituaient un véritable avis du médecin conseil, peu important qu'elles ne soient ni signées ni motivées plus amplement, la Cour d'appel a violé les articles R. 441-11 et R. 441-13 du Code de la sécurité sociale.
2°- ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, les deux fiches de liaison médico-administrative éditées les 28 juin 2004 mentionnaient clairement que son signataire, le Docteur Florence Z... du Service Médical, avait conclu s'agissant de Monsieur X... à la « reconnaissance d'une maladie professionnelle inscrite au tableau » et identifiée par son numéro (57) selon la codification internationale médicale n° 057AAM750 et 0571DM765 ; qu'en affirmant par motifs propres et adoptés que ces documents ne donnaient aucune indication sur la nature et l'origine des pathologies dont était atteint le salarié et ne mentionnaient pas clairement la qualité et l'avis du signataire, la Cour d'appel a dénaturé ces fiches médico-administrative en violation de l'article 1134 du Code Civil et des articles R. 441-11 et R. 441-13 du Code de la sécurité sociale.
3°- ALORS QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a retenu que ni la déclaration de maladie professionnelle ni les fiches de liaison médico-administrative ne donnaient d'indication sur la nature et l'origine des pathologies du salarié ce qui ne permettait pas de déterminer si elles remplissaient les conditions de fond du tableau n° 57 ; qu'en se déterminant ainsi sans prendre en considération le certificat médical initial du 1er avril 2004, dont elle a constaté qu'il avait été régulièrement versé aux débats, et qui mentionnait précisément la nature des pathologies dont était atteint le salarié, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile et les articles L. 461-5, R. 441-11 et R. 441-13 du Code de la sécurité sociale.
4° – ALORS en tout état de cause QUE dès lors que la Caisse a informé l'employeur de la clôture de l'instruction et l'a invité, préalablement à sa prise de décision, à consulter le dossier pendant un délai imparti, le mettant ainsi en mesure de prendre connaissance des éléments susceptibles de lui faire grief et de faire valoir ses observations, elle a satisfait à son obligation d'information, peu important la teneur des pièces du dossier ; qu'en reprochant à la Caisse de ne pas avoir satisfait à son obligation d'information au prétexte inopérant que les documents de son dossier ne donnaient aucune indication sur la nature et l'origine des pathologies dont souffrait le salarié tout en constatant que par lettre du 5 juillet 2004, la Caisse avait informé l'employeur de la fin de l'instruction et de la possibilité de venir consulter le dossier pendant un délai de 10 jours à compter de l'établissement de ce courrier, de sorte que celui-ci avait été mis en mesure de connaître les éléments susceptibles de lui faire grief et de faire valoir ses observations, la Cour d'appel a violé l'article R. 441-11 du Code de la sécurité sociale.
5°- ALORS QUE si l'article R. 441-11 du Code de la sécurité sociale prévoit que la caisse primaire, avant de se prononcer sur le caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie, doit informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision, ces dispositions n'imposent pas à la caisse de devoir aviser l'employeur par lettre recommandée avec accusé de réception de sorte qu'elle satisfait à son obligation d'information par l'envoi d'une lettre simple ; qu'en reprochant à la Caisse de n'avoir informé l'employeur de la fin de l'instruction et de la possibilité de venir consulter le dossier que par lettre simple du 5 juillet 2004 et non par pli recommandé, la Cour d'appel a violé l'article R. 441-11 du Code de la sécurité sociale.
6°- ALORS QUE la caisse primaire d'assurance maladie peut reconnaître la maladie professionnelle sans saisir pour avis le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles lorsque la première constatation médicale de la maladie est intervenue dans le délai de prise en charge prévu au tableau ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a reproché à la Caisse d'avoir admis le caractère professionnel des maladies sans saisir le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelle au prétexte que le délai de prise en charge de 90 jours prévu au tableau n° 57 des maladies professionnelles était dépassé ; qu'en statuant ainsi lorsqu'il résultait de ses constatations que, selon la déclaration de maladie professionnelle et le certificat médical initial du 1er avril 2004, la date de la première constatation médicale des affections était du 4 octobre 2003, date de l'arrêt de travail du salarié, de sorte que le délai de prise en charge était nécessairement respecté, la Cour d'appel a violé les articles L. 461-1, L. 461-2, L. 461-5 du Code de la sécurité sociale, ensemble le tableau n° 57 des maladies professionnelles.
7°- ALORS QUE le délai de prise en charge des tableaux de maladie professionnelles est le délai pendant lequel, à compter de la cessation d'exposition au risque, l'affection doit être médicalement constatée et non le délai pendant lequel l'affection doit faire l'objet d'une déclaration de maladie professionnelle ; qu'en considérant en l'espèce que le délai de prise en charge prévu au tableau n° 57 des maladies professionnelles n'aurait pas été respecté au prétexte inopérant que la déclaration de maladie professionnelle serait intervenue plus de 90 jours après l'arrêt de travail du salarié, la Cour d'appel a violé les articles L. 461-1, L. 461-2, L. 461-5 du Code de la sécurité sociale, ensemble le tableau n° 57 des maladies professionnelles.