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16/03/2010 | FRANCE | N°08-43839

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 mars 2010, 08-43839


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1221-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... et 54 de ses collègues ont été salariés de la société BTT placée en redressement judiciaire le 10 juin 1994 et qui a fait l'objet d'un plan de redressement par cession présenté par M. Alain Y... homologué par jugement du tribunal de commerce d'Epinal du 30 novembre 1994 au profit d'une société à créer devenue la société BTT-GAT ; que le 14 décembre 1994, un protocole d'accord a été sign

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1221-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... et 54 de ses collègues ont été salariés de la société BTT placée en redressement judiciaire le 10 juin 1994 et qui a fait l'objet d'un plan de redressement par cession présenté par M. Alain Y... homologué par jugement du tribunal de commerce d'Epinal du 30 novembre 1994 au profit d'une société à créer devenue la société BTT-GAT ; que le 14 décembre 1994, un protocole d'accord a été signé entre le gérant de la société BTT-GAT et les délégués syndicaux concernant la suppression de la prime d'intéressement de 6 % dont bénéficiaient les salariés par usage ; que la société BTT-GAT a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce d'Epinal du 21 octobre 2003 ; que les salariés ont été licenciés pour motif économique par le liquidateur par lettre du 3 novembre 2003 ; qu'estimant que leur véritable employeur était M. Alain Y... en qualité de co-employeur et de gérant de fait et lui reprochant la suppression unilatérale de la prime d'intéressement de 6 % ainsi que de n'avoir effectué aucune recherche de reclassement préalable à leur licenciement au sein du groupe Alain Y..., les salariés ont saisi la juridiction prud'homale de demandes aux fins de rappel de prime d'intéressement et de dommages et intérêts pour non-respect par l'employeur de son obligation de reclassement ;
Attendu que pour dire que les demandeurs, anciens salariés de la société BTT, reprise par M. Alain Y... et son groupe dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire de cette société devenue BTT-GAT, puis licenciés pour motif économique à la suite de la liquidation judiciaire de cette dernière société, étaient irrecevables à agir à l'encontre de M. Alain Y... et du groupe Alain Y... qui n'avaient pas, à leur égard, la qualité d'employeur, la cour d'appel a retenu que "les salariés ne peuvent en effet juridiquement invoquer la qualité de co-employeur de M. Alain Y..., personne physique, avec la société BTT-GAT, personne morale, dont la création a été une condition nécessaire posée par le tribunal de commerce dans son jugement du 30 novembre 1994 à la reprise de l'ancienne société BTT, et que "le fait que M. Alain Y... se soit comporté en gérant de fait, ce qu'ont justement admis les premiers juges, ne peut avoir pour effet un transfert des contrats de travail des salariés, les conséquences juridiques attachées à la gérance de fait étant strictement limitées sur le plan légal à la saisine du tribunal de commerce, soit d'une action en responsabilité pour comblement de l'insuffisance d'actifs, soit en l'état des textes lors de la liquidation judiciaire de la société BTT-GAT, d'une action en faillite personnelle intentée contre M. Alain Y..." ;
Mais attendu que l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs ;
Qu'en se déterminant comme elle l'a fait par des motifs inopérants, alors que les conditions mises à la cession dans le jugement arrêtant le plan n'avaient pas pour effet de priver les salariés de la possibilité de prouver que M. Y... s'était, abstraction faite de sa qualité de gérant de fait de la société BTT-GAT, comporté personnellement à leur égard en co-employeur, et qu'il lui appartenait de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, s'il en allait bien ainsi, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 mai 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Reims ;
Condamne M. Y... et le groupe Alain Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... et le groupe Alain Y... à payer aux 55 salariés la somme globale de 1 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize mars deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour M. X... et les 54 autres demandeurs.
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que les demandeurs, anciens salariés de la société BTT, reprise par Monsieur Alain Y... et son groupe dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire de cette société devenue BTT GAT, puis licenciés pour motif économique à la suite de la liquidation judiciaire de cette dernière société, étaient irrecevables à agir à l'encontre de Monsieur Alain Y... et du GROUPE ALAIN Y... qui n'avaient pas, à leur égard, la qualité d'employeur ;
AUX MOTIFS QU' il ressort des éléments du dossier que, contrairement à ce qu'ils soutiennent, les salariés ne peuvent juridiquement invoquer la qualité de co-employeur de Monsieur Alain Y... personne physique, avec la société BTT GAT, personne de droit moral, dont la création a été une condition nécessaire posée par le Tribunal de commerce dans son jugement du 30 novembre 1994 à la reprise de l'ancienne société BTT ; que cette affirmation est corroborée par l'acte de vente notarié en date des 11 août et 21 septembre 1995, à effet au 1 er décembre 1994, stipulant expressément que les 80 salariés de la société BTT seront repris par la société BTT GAT, en vertu des dispositions de l'article L 122-12 du Code du travail ; que le fait que Monsieur Alain Y... se soit comporté en gérant de fait, ce qui ressort clairement des pièces produites aux débats, ne peut avoir pour effet un transfert des contrats de travail des salariés, les conséquences juridiques attachées à la gérance de fait étant strictement limitées sur le plan légal à la saisine du Tribunal de commerce, soit d'une action en responsabilité pour comblement de l'insuffisance d'actifs, soit en l'état des textes lors de la liquidation judiciaire de la société BTT BAT, d'une action en faillite personnelle intentée contre Monsieur Alain Y... ; que s'agissant du groupe ALAIN Y..., dont les salariés n'invoquent la qualité de co-employeur qu'au visa du dispositif de leurs conclusions sans aucun développement sur ce point dans le corps de leurs écritures, un tel groupe constitué certes de diverses sociétés réunies en départements distincts sous l'égide de Monsieur Alain Y..., en peut être considéré comme co-employeur des salariés à défaut de pièces et éléments démontrant son intervention directe dans la conduite et l'exploitation de la société BTT GAT ; qu'en tout état de cause, il apparaît que par suite de la liquidation judiciaire de la société BTT GAT demeurée l'employeur des salariés, seul le mandataire liquidateur avait pouvoir de prononcer le licenciement de ceux-ci qui ne peuvent dès lors invoquer quelque défaut que ce soit de reclassement à l'encontre des personnes ou entités morales autres ;ALORS QUE l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination de leur convention mais des conditions dans lesquelles la prestation de travail s'est exécutée ; que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que le juge saisi d'un moyen portant sur la détermination de l'employeur doit rechercher l'existence du lien de subordination compte tenu des conditions de fait dans lesquelles l'activité professionnelle s'est exercée ; que dès lors, en ne recherchant pas, ainsi qu'elle y était invitée, si Monsieur Alain Y..., qui n'avait cessé de diriger les salariés de la société BTT même lorsqu'il n'en était plus juridiquement gérant ou co-gérant, ne s'était pas comporté comme leur employeur direct, et pas seulement comme un simple gérant de fait, en leur donnant des instructions, des ordres et en leur demandant des comptes la Cour d'appel a entaché sa décision d'un manque de base légale au regard de l'article L 1221-1 du Code du travail (ancien article L 121-1) ;
ALORS D'AUTRE PART QUE la qualité d'employeur de Monsieur Y... n'était invoquée qu'au travers du groupe Alain Y... dont il était l'unique propriétaire ; que dès lors, en se bornant à constater, pour écarter la qualité de co employeur dudit groupe, l'absence de pièces et éléments démontrant son intervention directe dans la conduite et l'exploitation de la société BTT GAT la Cour d'appel a modifié les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-43839
Date de la décision : 16/03/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale, 16 mai 2008, 05/00982

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 16 mai 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 mar. 2010, pourvoi n°08-43839


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : SCP Boulloche, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.43839
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