LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 19 novembre 2008), que pendant plusieurs années, la société LMG a entretenu des relations contractuelles avec la société John Deere ; que le dernier contrat conclu le 19 décembre 2003 pour une durée de trois ans devait prendre fin le 31 octobre 2006 ; que par courrier du 31 juillet 2006, la société John Deere a avisé la société LMG que le contrat ne serait pas renouvelé; que la société LMG a alors assigné la société John Deere en réparation du préjudice qu'elle estimait avoir subi à la suite de la rupture brutale des relations commerciales entre les parties ;
Attendu que la société John Deere fait grief à l'arrêt infirmatif d'avoir dit que le tribunal de commerce de Vannes était compétent pour connaître de la demande formée en application de l'article L. 442-6-1 5° du code de commerce par la société LMG et renvoyé l'affaire devant ledit tribunal de Vannes pour y être statué au fond , alors, selon le moyen :
1°/ que la nature délictuelle de la responsabilité encourue par l'une des parties au litige n'est pas exclusive, par principe, de l'application d'une clause attributive de juridiction valablement stipulée entre ces mêmes parties pour régir l'ensemble de leurs rapports ; que l'autonomie de la volonté permet aux parties contractantes de soumettre les différends qui seraient en relation avec leur contrat au seul tribunal qu'elles ont conventionnellement désigné, quelle que soit la nature de la responsabilité encourue ; qu'en écartant par principe en l'espèce le jeu de la clause attributive de juridiction contractuellement prévue par les parties – donnant compétence exclusive au tribunal de commerce d'Orléans pour connaître des "différends relatifs (…) à la résiliation ou la cessation du contrat" – au motif inopérant que l'action introduite par la société LMG sur le fondement de l'article L. 442-6-1-5° du code de commerce engage la responsabilité délictuelle de la société John Deere, la cour d'appel a violé ensemble les articles L. 442-6-1-5° du code de commerce, 46 et 48 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en écartant l'application de la clause attributive de juridiction contractuellement prévue par les parties au motif que la notion de "relations commerciales" dépasse la notion de "relations contractuelles" et que la "rupture des relations commerciales" ne serait pas la "cessation du contrat" et ne serait pas visée en l'espèce par la clause attributive de compétence, sans expliquer en l'espèce en quoi les "relations d'affaires communes" entretenues par les parties depuis de nombreuses années – matérialisées par une succession de contrats de distribution – n'auraient pas été des "relations contractuelles", la cour d'appel a privé sa décision de base légale, au regard de l'article L. 442-6-1-5° du code de commerce et 1134 du code civil ;
Mais attendu que des relations commerciales entre deux sociétés peuvent être établies même si elles ne sont pas liées par un contrat ou qu'elles peuvent se prolonger après la cessation de leur contrat ; qu'ayant relevé que les relations contractuelles entre les parties avaient pris fin le 31 octobre 2006 et constaté que la clause attribuant compétence exclusive au tribunal d'Orléans figurant dans le contrat liant les sociétés John Deere et LMG concernait tout différend ou litige relatif à la formation, l'interprétation, l'exécution, la résiliation ou la cessation du contrat, la cour d'appel en a déduit que cette clause contractuelle ne visait pas la rupture des relations commerciales entre les deux sociétés, sans écarter par principe le jeu de la clause attributive de juridiction contractuellement prévue par les parties au motif que l'action engagée par la société LMG aurait engagé la responsabilité délictuelle de la société John Deere, ni encourir le grief de la seconde branche ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société John Deere aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande, la condamne à payer à la société Loisirs Motoculture du Golfe, la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mars deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Thomas-Raquin et Bénabent, avocat aux Conseils pour la société John Deere.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le tribunal de commerce de VANNES est compétent pour connaître de la demande formée en application de l'article L 442-6-1 5° du Code de commerce par la société LMG contre la société JOHN DEERE et renvoyé l'affaire devant ledit tribunal de VANNES pour y être statué au fond ;
AUX MOTIFS QUE « la société LMG a engagé une action contre la société JOHN DEERE, sur le fondement de l'article L 442-6-1-5° du Code de commerce ; que la rupture brutale de relations commerciales établies engage la responsabilité délictuelle de son auteur ; que le tribunal compétent pour connaître du préjudice qu'elle cause, est, selon l'article 46 du Code de procédure civile, la juridiction du lieu du fait dommageable ou celle dans le ressort de laquelle le dommage a été subi ; que dans le contrat liant les deux parties, se trouve insérée, chapitre VII article 4, la clause suivante : « Tout différend et/ou litige relatif à la formation, l'interprétation, l'exécution, la résiliation ou la cessation du contrat sera de la compétence exclusive du tribunal de commerce d'ORLEANS, qu'il s'agisse d'une demande principale, d'un appel en garanti ou en intervention forcée, d'une assignation en référé, et ce, même en cas de pluralité de défendeurs » ; que cette clause n'est pas discutée dans son existence ou dans sa régularité, que toutefois, la société LMG ne conteste pas que la décision de ne pas renouveler le contrat ne peut donner lieu à indemnisation ; qu'elle entend obtenir réparation du préjudice qu'elle dit subir en raison de la brutalité de la disparition, sans préavis d'une durée suffisante, d'une situation créée par l'existence d'affaires communes entre les parties pendant de nombreuses années, que la notion de « relations commerciales » que vise l'article L 442-6-1-5° du Code de commerce dépasse la notion de « relations contractuelles » ; que la « rupture des relations commerciales » n'est pas la « cessation du contrat » et n'est pas visée par la clause attributive de compétence ; que la décision du premier juge sera infirmée » ;
ALORS QUE D'UNE PART la nature délictuelle de la responsabilité encourue par l'une des parties au litige n'est pas exclusive, par principe, de l'application d'une clause attributive de juridiction valablement stipulée entre ces mêmes parties pour régir l'ensemble de leurs rapports ; que l'autonomie de la volonté permet aux parties contractantes de soumettre les différends qui seraient en relation avec leur contrat au seul tribunal qu'elles ont conventionnellement désigné, quelle que soit la nature de la responsabilité encourue ; qu'en écartant par principe en l'espèce le jeu de la clause attributive de juridiction contractuellement prévue par les parties – donnant compétence exclusive au tribunal de commerce d'ORLEANS pour connaître des « différends relatifs (…) à la résiliation ou la cessation du contrat » – au motif inopérant que l'action introduite par la société LMG sur le fondement de l'article L 442-6-1-5° du Code de commerce engage la responsabilité délictuelle de la société JOHN DEERE, la Cour d'appel a violé ensemble les articles L 442-6-1-5° du Code de commerce, 46 et 48 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE D'AUTRE PART en écartant l'application de la clause attributive de juridiction contractuellement prévue par les parties au motif que la notion de « relations commerciales » dépasse la notion de « relations contractuelles » et que la « rupture des relations commerciales » ne serait pas la « cessation du contrat » et ne serait pas visée en l'espèce par la clause attributive de compétence, sans expliquer en l'espèce en quoi les « relations d'affaires communes » entretenues par les parties depuis de nombreuses années – matérialisées par une succession de contrats de distribution – n'auraient pas été des « relations contractuelles », la Cour d'appel a privé sa décision de base légale, au regard de l'article L 442-6-1-5° du Code de commerce et 1134 du Code civil.