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02/03/2010 | FRANCE | N°09-13095

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 02 mars 2010, 09-13095


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 5 février 2009), que la société Sogefinancement (le prêteur), représentée par la Société générale (le mandataire) a consenti un prêt personnel à M. X... ; que celui-ci a, le même jour, par l'intermédiaire du mandataire, signé une demande d'adhésion à la garantie perte d'emploi de l'assurance groupe et versé la somme de 2 880 euros correspondant au montant de son adhésion ; que cette somme lui a été restituée le 29 mars

2005 ; qu'ayant perdu son emploi et s'étant vu refuser le bénéfice de l'assurance au...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 5 février 2009), que la société Sogefinancement (le prêteur), représentée par la Société générale (le mandataire) a consenti un prêt personnel à M. X... ; que celui-ci a, le même jour, par l'intermédiaire du mandataire, signé une demande d'adhésion à la garantie perte d'emploi de l'assurance groupe et versé la somme de 2 880 euros correspondant au montant de son adhésion ; que cette somme lui a été restituée le 29 mars 2005 ; qu'ayant perdu son emploi et s'étant vu refuser le bénéfice de l'assurance au motif de son âge, M. X..., invoquant un manquement du prêteur et de son mandataire à leur obligation de conseil et d'information, les a assignés en paiement des mensualités du prêt et en dommages-intérêts ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande tendant à voir condamner la société Sogefinancement et la banque, son mandataire à prendre en charge les échéances de remboursement du crédit, alors selon le moyen :

1°/ que le banquier qui propose à son client, auquel il consent un prêt, d'adhérer au contrat d'assurance de groupe qu'il a souscrit à l'effet de garantir, en cas de survenance de divers risques, l'exécution en tout ou partie de ses engagements, est tenu de l'éclairer sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d'emprunteur ; qu'en retenant que le banquier, souscripteur du contrat, avait manqué à son obligation d'information et de conseil envers l'adhérent puisqu'il ne pouvait, ni ne devait ignorer que sa demande indemnitaire ne serait pas satisfaite eu égard à son âge, ajoutant que cette faute restait caractérisée même si cette condition d'âge était mentionnée en caractères gras sur le formulaire d'adhésion et si l'adhérent avait reconnu avoir pris connaissance et accepter la notice d'information, et qu'un préjudice en découlait, tout en déboutant l'intéressé de sa demande indemnitaire, refusant ainsi de tirer les conséquences légales de ses propres énonciations, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

2°/ que le dommage consistant pour l'emprunteur à devoir payer les sommes dues à l'établissement de crédit sans pouvoir prétendre à une prise en charge par l'assureur ne constitue pas une simple perte de chance ; qu'en décidant que la faute commise par la banque avait seulement privé l'emprunteur d'une chance d'avoir pu adhérer à une autre assurance ou renoncer à contracter l'emprunt, quand le préjudice était d'ores et déjà réalisé puisque la victime était contrainte de rembourser les échéances du prêt malgré la perte de son emploi, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

3°/ que tout préjudice emporte réparation ; qu'après avoir constaté que le préjudice découlant de l'inexécution par le souscripteur de son obligation d'information n'était que la perte d'une chance d'avoir pu adhérer à une autre assurance, le juge ne pouvait refuser de l'indemniser au prétexte que l'emprunteur ne l'avait pas invoquée ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

4°/ que le débiteur de l'obligation de conseil doit s'en acquitter sans qu'il y ait lieu de prêter attention au comportement du créancier ou avis que des tiers peuvent lui fournir ; qu'en déclarant que l'adhérent ne pouvait ignorer le refus de son adhésion pour la raison que sa cotisation lui avait été restituée par un virement sur son compte, opération sur la signification de laquelle il ne pouvait se méprendre, quand le souscripteur n'était pas déchargé de son devoir d'information dont il lui appartenait de prouver l'exécution par la connaissance personnelle de l'adhérent de sa non assurance, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu que l'arrêt retient que la banque a manqué à son devoir d'information et de conseil envers M. X... puisqu'elle pouvait ni ne devait ignorer que la demande d'adhésion à la garantie perte d'emploi de celui-ci ne serait pas satisfaite eu égard à son âge et que cette faute reste caractérisée même si la condition d'âge était rappelée en caractère gras sur le formulaire d'adhésion signé par M. X... qui a reconnu avoir pris connaissance et accepter les termes de la notice d'information du contrat qui contenaient aussi cette condition d'âge ; qu'il retient encore que M. X..., qui n'a pu ignorer ce refus d'assurance puisque sa cotisation lui a été restituée le 29 mars 2005 par un virement opéré sur son compte, n'a ni contesté ce refus d'adhésion ni tenté de souscrire une autre assurance ni demandé la résolution du prêt ; que de ces constatations et appréciations, la cour d'appel qui a justement qualifié le préjudice de perte de chance, a pu en déduire que celui-ci ne justifiait pas d'un préjudice en lien avec la faute commise par la le prêteur et son mandataire ; que le moyen qui manque en fait en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à la société Sogefinancement et à la Société générale la somme de 1 250 euros chacune ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du deux mars deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. X...

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté un emprunteur (M. X..., l'exposant), ayant adhéré à un contrat d'assurance de groupe souscrit par le prêteur (la société SOGEFINANCEMENT), de sa demande tendant à le voir condamner, in solidum avec son mandataire (la SOCIETE GENERALE), à prendre en charge les échéances de remboursement du crédit ;

AUX MOTIFS QUE, en ayant, le 1er février 2005, fait signer par M. X... une demande d'adhésion à la garantie perte d'emploi gérée par la société ATLANTIC PREVOYANCE, le conseiller de clientèle de la SOCIETE GENERALE, représentant la société SOGEFINANCEMENT, avait effectivement manqué à ses obligations d'information et de conseil envers l'emprunteur puisqu'il ne pouvait ni ne devait ignorer que cette demande ne serait pas satisfaite eu égard à l'âge de (l'adhérent), supérieur à 55 ans lors de cette signature ; que cette faute restait caractérisée même si la condition d'âge – être âgé de moins de 55 ans – était expressément rappelée en caractères gras sur le formulaire d'adhésion signé par l'adhérent et si celui-ci, en ayant apposé sa signature, avait reconnu «avoir pris connaissance et accepter les termes de la notice d'information du contrat» qui contenaient aussi cette condition d'âge ; que, toutefois, le préjudice en découlant ne pouvait être, comme l'invoquait l'intéressé, le défaut de prise en charge par l'assureur des mensualités du prêt échues ou à échoir depuis avril 2006 puisqu'il était constant que la garantie perte d'emploi gérée par la société ATLANTIC PREVOYANCE ne pouvait, en tout état de cause, être souscrite par M. X... compte tenu de son âge, mais seulement la perte d'une chance, non alléguée par lui, d'avoir, si possible, adhéré à une autre assurance ou, le cas échéant, renoncé à contracter l'emprunt puisqu'il soutenait avoir fait de cette garantie une condition déterminante de son consentement à le faire ; qu'à cet égard, il y avait lieu de relever, de manière surabondante, que M. X..., même s'il contestait avoir reçu la lettre que la société ATLANTIC PREVOYANCE affirmait, sans cependant en rapporter la preuve, lui avoir adressée le 9 mars 2005 afin de l'informer que sa demande d'adhésion avait été refusée en raison de son âge à la date contractuelle d'entrée en assurance, n'avait pu, contrairement à ce qu'il soutenait, ignorer à partir, au plus tard, d'avril 2005, ce refus puisque sa cotisation de 2.880 € lui avait été restituée le 29 mars 2005 par un virement opéré sur son compte ouvert à la SOCIETE GENERALE dont il avait nécessairement pris connaissance à réception du relevé de ce compte et dont il n'avait pu davantage se méprendre sur sa signification, même si ce virement avait pour seul libellé «prime perso» ; qu'il n'établissait, ni ne prétendait avoir, après la restitution de sa cotisation, contesté ce refus d'adhésion, tenté de souscrire une autre assurance ou, encore, protesté auprès du prêteur et demandé la résolution du contrat de crédit ; que ne justifiant pas d'un préjudice en lien avec la faute commise par ce prêteur et son mandataire, M. X... devait être débouté de sa demande de dommages et intérêts ;

ALORS QUE, d'une part, le banquier qui propose à son client, auquel il consent un prêt, d'adhérer au contrat d'assurance de groupe qu'il a souscrit à l'effet de garantir, en cas de survenance de divers risques, l'exécution en tout ou partie de ses engagements, est tenu de l'éclairer sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d'emprunteur ; qu'en retenant que le banquier, souscripteur du contrat, avait manqué à son obligation d'information et de conseil envers l'adhérent puisqu'il ne pouvait, ni ne devait ignorer que sa demande indemnitaire ne serait pas satisfaite eu égard à son âge, ajoutant que cette faute restait caractérisée même si cette condition d'âge était mentionnée en caractères gras sur le formulaire d'adhésion et si l'adhérent avait reconnu avoir pris connaissance et accepter la notice d'information, et qu'un préjudice en découlait, tout en déboutant l'intéressé de sa demande indemnitaire, refusant ainsi de tirer les conséquences légales de ses propres énonciations, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ;

ALORS QUE, d'autre part, le dommage consistant pour l'emprunteur à devoir payer les sommes dues à l'établissement de crédit sans pouvoir prétendre à une prise en charge par l'assureur ne constitue pas une simple perte de chance ; qu'en décidant que la faute commise par la banque avait seulement privé l'emprunteur d'une chance d'avoir pu adhérer à une autre assurance ou renoncer à contracter l'emprunt, quand le préjudice était d'ores et déjà réalisé puisque la victime était contrainte de rembourser les échéances du prêt malgré la perte de son emploi, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

ALORS QUE, en outre, tout préjudice emporte réparation ; qu'après avoir constaté que le préjudice découlant de l'inexécution par le souscripteur de son obligation d'information n'était que la perte d'une chance d'avoir pu adhérer à une autre assurance, le juge ne pouvait refuser de l'indemniser au prétexte que l'emprunteur ne l'avait pas invoquée ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

ALORS QUE, toute hypothèse, le débiteur de l'obligation de conseil doit s'en acquitter sans qu'il y ait lieu de prêter attention au comportement du créancier ou avis que des tiers peuvent lui fournir ; qu'en déclarant que l'adhérent ne pouvait ignorer le refus de son adhésion pour la raison que sa cotisation lui avait été restituée par un virement sur son compte, opération sur la signification de laquelle il ne pouvait se méprendre, quand le souscripteur n'était pas déchargé de son devoir d'information dont il lui appartenait de prouver l'exécution par la connaissance personnelle de l'adhérent de sa non assurance, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 09-13095
Date de la décision : 02/03/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 05 février 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 02 mar. 2010, pourvoi n°09-13095


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Vincent et Ohl

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.13095
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