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02/03/2010 | FRANCE | N°09-10435

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 02 mars 2010, 09-10435


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Réunion (la caisse) a consenti à la société Partner, (la société) par lettre du 9 juillet 2002, une ouverture de crédit en compte courant et des avances sur cession de créances professionnelles ; qu'à compter du mois de juillet 2003, la caisse a mis fin aux avances sur cessions de créances, puis le 22 avril 2004, a mis en demeure la société de lui régler le montant du dépassement du crédit ainsi que le montant d

es impayés sur la ligne de mobilisation de créances professionnelles ; qu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Réunion (la caisse) a consenti à la société Partner, (la société) par lettre du 9 juillet 2002, une ouverture de crédit en compte courant et des avances sur cession de créances professionnelles ; qu'à compter du mois de juillet 2003, la caisse a mis fin aux avances sur cessions de créances, puis le 22 avril 2004, a mis en demeure la société de lui régler le montant du dépassement du crédit ainsi que le montant des impayés sur la ligne de mobilisation de créances professionnelles ; que la société a invoqué la responsabilité de la caisse pour rupture brutale des crédits consentis ; qu'à la suite de la mise en liquidation judiciaire de la société le 23 mars 2005, M. X..., désigné liquidateur, est intervenu volontairement à l'instance ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 313-12 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable ;
Attendu que tout concours à durée indéterminée consenti par un établissement de crédit à une entreprise ne peut être réduit ou interrompu que sur notification écrite et à l'expiration d'un délai de préavis fixé lors de l'octroi du concours ;
Attendu que pour débouter M. X..., ès qualités, de sa demande de dommages-intérêts, l'arrêt, après avoir relevé que la société pouvait raisonnablement considérer que les crédits énumérés dans la lettre du 9 juillet 2002 lui étaient acquis pour une durée indéterminée, retient que, s'agissant de crédits à durée indéterminée, la caisse conservait le droit de révoquer ses engagements à tout moment à condition toutefois de l'exercer sans abus ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la caisse était tenue de notifier à son client, par écrit, l'interruption de son concours, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article L. 313-12 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable ;
Attendu que pour rejeter la demande de dommages-intérêts formée par M. X..., ès qualités, au titre de la rupture de crédit notifiée par la caisse par lettre du 22 avril 2004, l'arrêt retient encore que cette rupture ne peut être considérée comme brutale puisque la ligne Dailly ne fonctionnait plus depuis plus de six mois et qu'elle apparaît dictée par des principes de bon sens, la faiblesse des résultats de la société après l'exercice 2002 pouvant légitimement susciter des craintes sur ses capacités de remboursement ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, quelle était la commune intention des parties pour la fixation du délai de préavis et, en cas d'impossibilité de l'établir, si la banque avait respecté un délai de préavis suffisant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 février 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée ;
Condamne la caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Réunion aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du deux mars deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire, avocat aux Conseils pour la société Partner et M. X..., ès qualités.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté Me X..., ès-qualités, de sa demande de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS QUE « par lettre du 9 juillet 2002, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA RE UNION a consenti au profit de la société PARTNER les crédits à court terme suivants : ouverture de crédit en compte courant à hauteur de 76.000 €, crédit documentaire : 228.000 €, avances sur cessions des créances SAPRIM, CORA, SCORE, SODEXPRO et CONTINENT dans la limite de 30.500 €, crédit documentaire exceptionnel de 610.000 € pour l'opération Noël 2002 ; que cette lettre précisait que le dossier des crédits d'exploitation serait réexaminé au plus tard le 30 avril 2003 ; qu 'à cette date, cependant, la banque n'émettait aucune réserve sur les crédits accordés le 9 juillet 2002 ; qu 'au contraire, l'ouverture de crédit en compte courant était maintenue, les relevés de compte datant du 30 novembre 2004 précisant le montant du découvert autorisé ; qu 'un crédit documentaire d 'un montant de 411.954, 49 € pour financer l'achat de jouets était accordé le 9 juillet 2003 ; que les avances sur cession de créances persistaient jusqu'au mois de juillet 2003 ; qu'ainsi, la société PARTNER pouvait raisonnablement considérer que les crédits énumérés dans la lettre du 9 juillet 2002 lui étaient acquis pour une durée indéterminée ; que, s'agissant de crédits à durée indéterminée, le banquier conservait le droit de révoquer ses engagements à tout moment à condition toutefois de l'exercer sans abus ; que la CAISSE DE CREDIT AGRICOLE a d'abord commencé par supprimer certains crédits en mettant fin au mois de juillet 2003 aux avances sur cessions de créances ; que même en présence d 'une convention-cadre, le banquier a toujours la faculté de refuser des créances lorsqu'elles lui paraissent douteuses ; qu'en l'espèce, le décompte de la dette de la société PARTNER au 22 avril 2004 fait état d'impayés sur la ligne DAILLY de l'ordre de 181.048, 71 €, ce qui établit que les créances cédées ne présentaient pas toutes un caractère certain ; que, dès lors, il ne peut être fait grief à la banque d'avoir refusé des avances sur de telles créances ; que le CREDIT AGRICOLE révoquera de manière formelle les crédits accordés par la banque (ligne Dailly et ouverture de crédit en compte courant) par une lettre du 22 avril 2004 en mettant la société PARTNER en demeure de rembourser les sommes prêtées (187.266,10 €) ; que cette rupture ne peut être considérée comme brutale puisque la ligne Dailly ne fonctionnait déjà +/- plus, de l 'aveu même de la société Partner, depuis plus de six mois ; que, de plus, elle apparaît dictée par des principes de bon sens puisqu 'en effet, l'activité de la société Partner étant totalement financée par des crédits bancaires, ses faibles résultats après l'exercice 2002 pouvaient légitimement susciter des craintes sur ses capacités de remboursement , que d'ailleurs, c 'est cette même analyse qui empêchera la société PARTNER de conclure avec d'autres partenaires financiers, ceux-ci ayant jugé les risques trop élevés » (arrêt pp. 4 et 5) ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le banquier ne peut réduire ou interrompre un concours que sur notification écrite et à l'expiration d'un préavis ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt que la CRCAM « a d'abord commencé par supprimer certains crédits en mettant fin, au mois de juillet 2003, aux avances sur cessions de créances » ; que la cour d'appel, qui n'a relevé aucune notification écrite préalable de rupture des crédits, ne pouvait dès lors débouter Maître X... de sa demande d'indemnisation pour cette rupture brutale, sans violer l'article L 313-12 du code monétaire et financier ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'une banque, comme tout commerçant, ne peut rompre un crédit à durée indéterminée octroyé à une entreprise, qu'à la condition de respecter un préavis suffisant ; qu'en l'espèce, pour exclure toute faute de la banque au titre de son refus d'exécuter ses engagements, s'agissant de crédits à durée indéterminée, la cour d'appel s'est bornée à énoncer que le banquier conserve le droit de révoquer ses engagements à tout moment à condition toutefois de l'exercer sans abus, et s'est bornée à constater que la CRCAM ne pouvait se voir reprocher d'avoir refusé des avances sur des créances qui lui paraissaient douteuses en 2003, qu'en ne recherchant pas, ainsi que l'y invitait Me X... ès-qualités (conclusions du 18 juin 2007, pp. 6 à 9), si un tel refus avait été précédé d'un préavis suffisant, dûment notifié à la SARL PARTNER, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 60 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984, devenu l'article L. 313-12 du code monétaire et financier et le principe posé par l'article L 442-6 du code de commerce ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE toute rupture de crédit consenti pour une durée indéterminée doit respecter un préavis suffisant ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait juger que la rupture formelle des crédits par la CRCAM, dans sa lettre du 22 avril 2004, n'était pas brutale, en se bornant à énoncer que « la ligne Dailly ne fonctionnait déjà +/- plus depuis plus de six mois », sans rechercher, ainsi que l'y invitait Me X... ès-qualités (conclusions du 18 juin 2007, pp. 6 à 9), si la banque avait respecté un préavis suffisant, dûment notifié à la SARL PARTNER, avant de rompre les crédits octroyés à cette société au titre des créances Dailly et de l'ouverture de crédit en compte courant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 60 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984, devenu l'article L. 313-12 du code monétaire et financier.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 09-10435
Date de la décision : 02/03/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 04 février 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 02 mar. 2010, pourvoi n°09-10435


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.10435
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