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25/02/2010 | FRANCE | N°09-11308

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 25 février 2010, 09-11308


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, locataire d'un local commercial appartenant à Mme X..., la société Cardan service, devenue Welte Cardan services (la société Cardan), a reçu successivement un acte de cession du loyer au profit de la caisse d'épargne d'Alsace, une saisie-attribution pratiquée par la société UCB bail (la société UCB) au préjudice de Mme X... et des avis à tiers détenteur émis contre cette dernière par le comptable des impôts de Schiltigheim (le comptable des impôts) ; que

saisi par la société Cardan pour qu'il statue sur le concours entre ces diff...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, locataire d'un local commercial appartenant à Mme X..., la société Cardan service, devenue Welte Cardan services (la société Cardan), a reçu successivement un acte de cession du loyer au profit de la caisse d'épargne d'Alsace, une saisie-attribution pratiquée par la société UCB bail (la société UCB) au préjudice de Mme X... et des avis à tiers détenteur émis contre cette dernière par le comptable des impôts de Schiltigheim (le comptable des impôts) ; que saisi par la société Cardan pour qu'il statue sur le concours entre ces différents créanciers, un juge de l'exécution a, par jugement du 7 janvier 1997, dit, notamment, que le montant, hors taxes, des loyers devait être versé à la caisse d'épargne dans la limite de sa créance et que le solde des loyers et charges dus, TVA comprise, devait être versé à la société UCB, à concurrence des sommes pour lesquelles la saisie-attribution avait été pratiquée ; que le 8 février 2005, la société UCB a assigné la société Cardan devant un juge de l'exécution pour obtenir sa condamnation, sur le fondement de l'article 64 du décret du 31 juillet 1992, à lui payer la somme de 391 689, 65 euros ; que la société Cardan a appelé en garantie le comptable des impôts auquel elle avait versé le montant de la TVA ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société Cardan fait grief à l'arrêt de rejeter son appel en garantie contre le comptable des impôts, alors, selon le moyen, que la cour d'appel ne pouvait la débouter de cette demande en garantie en considérant que les paiements avaient été exécutés de façon fautive, sans rechercher si les versements opérés n'étaient pas le résultat d'une exécution forcée à la suite de la délivrance d'avis à tiers détenteur ; qu'ainsi l'arrêt est entaché d'une violation des articles 1235 et 1236 du code civil ;

Mais attendu que l'arrêt retient, souverainement, que la société Cardan a spontanément et volontairement payé au Trésor public le montant de la TVA sur les loyers, malgré l'intervention du jugement du 7 janvier 1997 qui lui faisait obligation d'en effectuer le versement entre les mains de la société UCB, et que la société Cardan ne rapporte aucune preuve de la prétendue contrainte qu'elle aurait subie de la part du Trésor public ;

D'où il suit que le moyen manque en fait ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 64 du décret du 31 juillet 1992 ;

Attendu qu'en cas de refus de paiement par le tiers saisi des sommes qu'il a reconnu devoir ou dont il a été jugé débiteur, la contestation est portée devant le juge de l'exécution qui peut délivrer un titre exécutoire contre le tiers saisi ;

Attendu que, pour la condamner à payer à la société UCB la somme de 391 689, 65 euros, l'arrêt retient que la société Cardan n'a jamais payé à la société UCB le montant de la TVA due sur les loyers, que ce refus de paiement doit être sanctionné, en application de l'article 64 du décret du 31 juillet 1992, par sa condamnation au paiement des causes de la saisie, soit la somme de 468 883, 30 euros (3 075 672, 89 francs), que la société UCB serait en droit de réclamer cette somme mais qu'elle se contente de solliciter celle de 391 689, 65 euros et qu'il ne peut que lui en être donné acte ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans constater que la somme réclamée correspondait à celle dont la société Cardan avait été jugée débitrice par le jugement du 7 janvier 1997 et que cette dernière estimait à 38 393, 78 euros, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du premier moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a confirmé la condamnation de la société Cardan à payer à la société UCB la somme de 391 689, 65 euros, l'arrêt rendu le 17 novembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives des sociétés Welte Cardan services et UCB bail ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq février deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Rouvière, avocat aux Conseils pour la société Welte Cardan services

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement du 1er février 2006 déclarant la SAS CARDAN SERVICE redevable de la somme de 391 689, 65 €.

AUX MOTIFS QUE la demande formée par la société UCB BAIL à l'encontre de la société CARDAN SERVICE est fondée sur l'article 64 du décret du 31 / 07 / 1992 qui dispose « en cas de refus de paiement par le tiers saisi des sommes qu'il a reconnu devoir ou dont il a été jugé débiteur, la contestation est portée devant le juge de l'exécution qui peut délivrer un titre exécutoire contre le tiers saisi » ; Que le juge de l'exécution est donc parfaitement compétent pour statuer sur la demande de la société UCB BAIL qui n'est pas une demande de dommages-intérêts contrairement à ce que prétend la société CARDAN SERVICE ; Que le refus de paiement par le tiers saisi est sanctionné par la condamnation du tiers au paiement des causes de la mesure d'exécution ; Que les discussions élevées sur l'étendue de la dette de la société CARDAN SERVICE à l'égard de Madame A..., débiteur saisi, sont donc dénuées de tout intérêt à ce stade de la procédure ; Qu'à la suite de la saisieattribution du 28 septembre 1995, la société CARDAN SERVICE, tiers saisi, avait saisi le juge de l'exécution de SCHILTIGHEIM d'une difficulté, lui demandant notamment de statuer sur le concours entre les différents créanciers de Madame A..., à savoir la CAISSE D'EPARGNE, la société UCB BAIL et la Recette Principale des Impôts de SCHILTIGHEIM ; Que par jugement du 7 janvier 1997, confirmé par arrêt du 5 janvier 2004, le juge de l'exécution de SCHILTIGHEIM a notamment dit que « le solde des loyers et charges dus par la SARL CARDAN SERVICE à Madame A..., TVA comprise doit être versé à la société UCB BAIL à concurrence des sommes pour lesquelles la saisie-attribution est pratiquée » ; Que ce jugement étant définitif, il appartenait à la société CARDAN SERVICE de l'exécuter ; Qu'elle n'a jamais contesté avoir continué à payer la T. V. A sur les loyers au TRESOR PUBLIC, en exécution des avis à tiers détenteur, et non à la société UBC BAIL, de sorte qu'à tout le moins pour ce qui concerne la T. V. A. elle n'a pas payé ce qui était dû à UCB BAIL et que ce refus de paiement doit être sanctionné, en application de l'article 64 ci-dessus rappelé, par sa condamnation au paiement des causes de la saisie ; Qu'il convient de rappeler que la saisie-attribution du 28 septembre 1995 a été pratiquée par UCB BAIL pour avoir paiement d'une créance de 3. 075. 672, 89 francs ; Que UCB BAIL serait en droit de réclamer cette somme à la société CARDAN SERVICE, et qu'elle se contente de solliciter celle de 391. 689, 65 euros représentant ce qu'elle estime lui être dû par la société CARDAN SERVICE en vertu du jugement du juge de l'exécution du 7 janvier 1997 ; Qu'il ne peut que lui en être donné acte ; Que dès lors la prétention de la société CARDAN SERVICE tendant à voir limiter sa condamnation à la somme de 38. 393, 78 euros représentant la T. V. A. sur les loyers versée à tort au Trésor public ne peut qu'être rejetée ; Qu'enfin la société CARDAN SERVICE ne rapporte aucune preuve de la prétendue contrainte morale qu'elle aurait subie de la part du TRESOR PUBLIC, de sorte que son refus de paiement en qualité de tiers saisi au sens de l'article 64 du décret du 31 / 07 / 1992 est caractérisé ; Que selon la jurisprudence récente de la Cour de cassation (Civ. 3°-6. 12. 2006), le tiers dont les créanciers saisissants demandent la condamnation à leur payer les causes de la saisie est recevable à se prévaloir de l'absence de dette du débiteur saisi au jour de la saisie ; Que la société CARDAN SERVICE ne discute pas le montant de la créance de la société UCB BAIL à l'égard de Madame A... à la date à laquelle la saisie-attribution a été pratiquée, mais invoque soit des éléments postérieurs, soit relatifs à sa propre dette à l'égard de Madame A... ; Qu'il convient en outre de constater que la créance de la Société UCB BAIL à l'égard de Madame A... résulte d'un acte authentique revêtu de la formule exécutoire en date du 13 novembre 1990 et avenant du 13 août 1992 par lesquels Madame A... s'était portée caution solidaire de la SCI DU TRAVAIL ; Que les prétentions et moyens de la société CARDAN SERVICE ne peuvent qu'être rejetés et qu'il convient de confirmer le jugement sur la demande principale ;

1° / ALORS QUE le juge de l'exécution ne peut délivrer un titre exécutoire à l'encontre du tiers saisi qu'en cas de faute constituée par un refus de paiement par celui-ci des sommes dont il est débiteur ; que ne constitue pas un tel refus le fait par le tiers saisi de régler partiellement le créancier saisissant, le solde de la dette étant remis à un autre créancier dans le cadre d'une exécution forcée ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 64 du décret du 31 juillet 1992.

2° / ALORS QUE l'acte de saisie rend le tiers saisi personnellement débiteur des causes de la saisie dans la limite de son obligation ; qu'il en résulte que le juge de l'exécution ne peut délivrer de titre exécutoire à l'encontre de ce tiers saisi que pour les sommes dont celui-ci est redevable à l'égard du débiteur saisi ; qu'en l'espèce, n'étant pas contesté que l'obligation de la société CARDAN SERVICE à l'égard de la société UCB BAIL se limitait au solde des loyers et charges dues à Madame A... TVA comprise, la cour d'appel ne pouvait statuer comme elle l'a fait sans constater que la somme de 391. 689, 65 € correspondait à ces éléments de saisie ; qu'en l'absence de recherche sur ce point, l'arrêt manque de base légale au regard des articles 43 de la loi du 9 juillet 1991 et 64 du décret du 31 juillet 1992.

3° / ALORS QUE les dispositions de l'article 64 du décret du 31 juillet 1992 n'impose pas au juge de l'exécution de délivrer un titre exécutoire contre le tiers saisi qui refuse de payer ; que dès lors, en affirmant qu'un tel refus doit être sanctionné, sur le fondement de ce texte, par la condamnation de la saisie, la cour d'appel a entaché l'arrêt d'une violation de ce texte ;

ALORS QU'EN affirmant que la société CARDAN SERVICE ne discute pas le montant de la créance de la société UCB BAIL à l'égard de Madame A..., créance résultant d'un acte authentique revêtu de la formule exécutoire, la cour d'appel a violé les dispositions des articles 43 de la loi du 9 juillet 1991 et 64 du décret du 31 juillet 1992 le tiers saisi étant irrecevable à discuter le montant de la créance du débiteur saisi.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il a rejeté l'appel en garantie formé par la société CARDAN SERVICE à l'encontre du trésor public de Schiltigheim.

AUX MOTIFS PROPRES QUE sur l'appel en garantie du Trésor public par la société CARDAN SERVICE que c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a relevé que la société CARDAN SERVICE avait spontanément et volontairement continué à payer la T. V. A. sur les loyers au trésor public ; Que malgré l'intervention du jugement du 7 janvier 1997 qui lui faisait obligation de la verser à la société UCB BAIL ne rapporte la preuve d'aucune contrainte morale de la part du Trésor ; Que ce faisant elle avait procédé à un paiement fautif et que, le Trésor public n'était pas tenu de le refuser tant que la dette fiscale de Madame A... n'était pas éteinte ; qu'il ne s'agissait pas d'un paiement indu et que le trésor ne saurait être tenu à rembourser la société CARDAN SERVICE dans le cadre d'un appel en garantie qui ne saurait prospérer ; Que les moyens soutenus par la société VARDAN SERVICE devant la Cour ne permettent pas d'infirmer cette décision ; Que par conséquent le jugement entrepris sera confirmé dans toutes ses dispositions ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE ces sommes ont dès lors été versées à tort mais spontanément et volontairement par la SAS CARDAN SERVICE au Trésor Public, lequel les a encaissés, la dette de Mme A... n'étant pas éteinte ; que le Trésor Public se refuse à les restituer en se fondant sur l'aspect fautif du paiement, l'absence d'enrichissement sans cause et le caractère particulier attaché à la TVA ; que bien que la position du Trésor Public soit de maintenir que la TVA appartient à l'Etat dès son inscription sur une facture, la SAS CARDAN SERVICE savait depuis le 7 janvier 1997, date de la décision du juge de l'exécution qu'elle devait reverser cette TVA entre les mains de la SA UCB BAIL ; qu'elle a néanmoins continué à verser au Trésor Public indiquant avoir fait cela sur les indications de Madame A... ; que ce faisant, la SAS CARDAN SERVICE a fait prévaloir de façon fautive les instructions de Mme A... sur un décision de justice ; que le Trésor Public n'est pas responsable de cette option adoptée librement par la SAS CARDAN SERVICE et ne saurait se voir appeler en garantie ; que par ailleurs, le paiement fait par erreur a bien pour effet de couvrir une dette dont la réalité (…) Trésor, ce remboursement ne pouvant se faire sur le fondement du remboursement de l'indu et la SAS CARDAN SERVICE n'indiquant pas le fondement juridique de sa demande ; que l'appel en garantie ne pouvant prospérer, la SAS CARDAN SERVICE sera condamnée aux entiers dépens de celui-ci.

ALORS QUE la cour d'appel ne pouvait débouter la société CARDAN SERVICE de sa demande en garantie dirigée contre le Trésor Public en considérant que les paiements avaient été exécutés de façon fautive, sans rechercher si les versements opérés n'étaient pas le résultat d'une exécution forcée à la suite de la délivrance d'avis à tiers détenteur ; qu'ainsi l'arrêt est entaché d'une violation des articles 1235 et 1236 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 09-11308
Date de la décision : 25/02/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 17 novembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 25 fév. 2010, pourvoi n°09-11308


Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne (président)
Avocat(s) : Me Foussard, Me Rouvière, SCP Defrenois et Levis

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.11308
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