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18/02/2010 | FRANCE | N°08-19044

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 18 février 2010, 08-19044


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué, que le 2 avril 2000, M. X... a été blessé au poignet au cours d'une soirée par M. Y..., assuré auprès de la société AGF IART, aux droits de laquelle vient la société Allianz IARD (l'assureur) ; que M. X... a obtenu d'une commission d'indemnisation des victimes d'infraction une indemnité en réparation de ses préjudices ; que le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions (le Fonds), ayant sollicité en vain de M. Y... et

de l'assureur le remboursement de l'indemnité allouée, les a assignés ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué, que le 2 avril 2000, M. X... a été blessé au poignet au cours d'une soirée par M. Y..., assuré auprès de la société AGF IART, aux droits de laquelle vient la société Allianz IARD (l'assureur) ; que M. X... a obtenu d'une commission d'indemnisation des victimes d'infraction une indemnité en réparation de ses préjudices ; que le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions (le Fonds), ayant sollicité en vain de M. Y... et de l'assureur le remboursement de l'indemnité allouée, les a assignés en paiement devant le tribunal de grande instance ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal et le second moyen du pourvoi incident :
Vu l'article L. 113-1 du code des assurances ;
Attendu que la faute intentionnelle visée par le second alinéa de ce texte implique la volonté de son auteur de créer le dommage tel qu'il est survenu ;
Attendu que pour exclure la garantie par l'assureur des dommages causés par M. Y..., l'arrêt énonce, par motifs propres et adoptés, que M. Y... a volontairement poussé la victime et a ainsi provoqué le dommage ; qu'il a déclaré avoir agi en raison de l'insulte proférée à son encontre par M. X... ; que cependant, une insulte n'est pas un motif suffisant pour engendrer une réaction sans proportion telle qu'une agression ; que M. Y... n'est pas intervenu pour se défendre mais à la suite d'un énervement et sous l'impulsivité due, notamment, ce qu'il reconnaît, à une consommation importante de boissons alcoolisées ; que M. Y... ne peut, pour se soustraire à sa responsabilité, déclarer, après la survenance des faits, ne pas avoir voulu les conséquences dommageables causées par la chute de M. X..., un tel raisonnement conduisant, de fait, à vider de tout effet la clause d'exclusion de garantie en cas de dommages intentionnellement causés ou provoqués prévue au contrat d'assurance ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si M. Y... avait eu l'intention d'occasionner à M. X... le préjudice que ce dernier a subi, tel qu'il s'est réalisé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
Et sur le premier moyen du pourvoi incident :
Vu les articles 706-11 du code de procédure pénale et 1251 du code civil ;
Attendu que pour condamner M. Y... à payer au Fonds une certaine somme en remboursement de l'indemnité payée à M. X..., l'arrêt énonce, par motifs propres, que, même à titre subsidiaire, la cour d'appel ne pourrait, ainsi que le solllicite M. Y..., retenir une quelconque part de responsabilité à l'encontre de M. X... qui n'a pas été régulièrement appelé à l'instance ; que toute demande présentée à son encontre doit en conséquence être déclarée irrecevable ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressort des productions que M. Y... n'avait émis aucune prétention contre M. X..., ce dont il résultait qu'il n'était pas tenu de le mettre en cause pour prétendre opposer au Fonds subrogé les exceptions qu'il aurait pu opposer à la victime subrogeante, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 juin 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Allianz IARD ; la condamne à payer au Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions la somme de 2 500 euros ;
Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de la SCP Boré et Salve de Bruneton ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit février deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils pour le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions, demandeur au pourvoi principal
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir confirmé le jugement attaqué en toutes ses dispositions et notamment celle ayant exclu la garantie, par la société ASSURANCES GENERALES DE FRANCE IART, des dommages causés par M. Y...,
Aux motifs propres que c'est par des motifs pertinents et appropriés et après avoir analysé complètement l'ensemble des faits qui lui étaient soumis et fait une exacte application de la règle de droit que le tribunal a considéré que Jean-Louis Y... a volontairement poussé Jean-François X... ; qu' il a intentionnellement recherché le dommage que celui-ci a subi ; que dès lors la garantie de la société IART-AGF n'est pas due ;
Et aux motifs adoptés que la faute intentionnelle de l'assuré susceptible d'exclure la garantie de l'assureur s'entend de la volonté de créer le dommage et non pas simplement de celle de réaliser l'acte cause du dommage ; qu'il convient donc de rechercher si M. Jean-Louis Y... a voulu occasionner le dommage et s'il en a envisagé consciemment la réalisation ; qu'il est constant que M. Y... a poussé volontairement la victime ; qu'il a ainsi provoqué le dommage ; qu'il déclare toutefois ne pas avoir voulu les conséquences dommageables causées par la chute et avoir agi ainsi en raison de l'insulte proférée à son encontre par M. X... ; que cependant, une insulte n'est pas un motif suffisant pour générer une réaction sans proportion telle qu'une agression ; que M. Y... n'est pas intervenu pour se défendre mais à la suite d'un énervement et sous l'impulsivité due, notamment, ce qu'il reconnaît lui même, à une consommation importante de boissons alcoolisées ; que M. Y... ne peut, pour se soustraire à sa responsabilité, déclarer, après la survenance des faits, ne pas avoir voulu les conséquences dommageables causées par la chute de M. X..., un tel raisonnement conduisant, de fait, à vider de tout effet la clause d'exclusion de garantie en cas de dommages intentionnellement causés ou provoqués prévue au contrat d'assurance,
Alors que la faute intentionnelle excluant la garantie de l'assureur implique à la fois un comportement volontaire source du dommage et la volonté de provoquer le dommage tel qu'il est survenu ; qu'en retenant la faute intentionnelle de M. Y... exclusive de la garantie de la société Assurances Générales de France IART sans relever d'élément de nature à démontrer que l'assuré avait la volonté de provoquer le dommage tel qu'il est survenu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 113-1 du Code des assurances.

Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour M. Y..., demandeur au pourvoi incident

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR condamné Monsieur Jean-Louis Y... à payer au FONDS de GARANTIE des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions la somme de 42.349,60 € au titre du remboursement des frais d'indemnisation de Monsieur X... ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'il convient en premier lieu de relever que même à titre subsidiaire cette cour ne pourrait, ainsi que le sollicite Jean-Louis Y..., retenir une quelconque part de responsabilité à l'encontre de Jean-François X... qui n'a pas été régulièrement appelé à la présente instance ; que toute demande présentée à son encontre doit être en conséquence déclarée irrecevable ; que par ailleurs c'est par des motifs pertinents et appropriés et après avoir analysé complètement l'ensemble des faits qui lui étaient soumis et fait une exacte application de la règle de droit, que le tribunal a considéré que Jean-François Y... a volontairement poussé Jean-François X..., qu'il a intentionnellement recherché le dommage que celui-ci a subi et que dès lors la garantie de la société IART AGF n'est pas due ; qu'il convient en conséquence de confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le fonds de garantie, qui est subrogé dans les droits de la victime, demande le remboursement de la somme qu'il a été amené à lui verser en raison des dommages qu'elle avait subis du fait de l'altercation survenue avec M. Jean-Louis Y... ; que ce dernier et la société ALLIANZ Group-AGF sont contraires sur les circonstances de survenance des faits, M. Jean-Louis Y... estimant qu'il s'agit d'un accident ; qu'il est constant que le 29 avril 2000, M. François X... a déposé plainte au commissariat de police de Rouen pour violences volontaires et a déclaré que lors d'une altercation survenue dans la nuit du 2 avril précédent, sur la voie publique à Rouen, M. Jean-Louis Y... l'avait poussé et qu'il avait chuté en arrière se cassant le poignet ; que M. Jean-Louis Y... a lui-même déclaré aux services de police qu'à la suite d'insultes proférées par M. X..., il l'avait bousculé des deux mains à hauteur de la poitrine ; que dans son jugement en date du 7 mai 2000, la commission d'indemnisation des victimes a relevé que la réalité de l'infraction n'était plus contestée et que l'insulte proférée ne justifiait pas l'agression physique commise ; qu'il ressort de l'ensemble de ces éléments qu'il n'est pas contestable que M. Jean-Louis Y... a volontairement poussé M. X... et que c'est cet acte qui a entraîné la chute de ce dernier et provoqué ses blessures ; que M. Jean-Louis Y... ne peut sérieusement soutenir qu'il s'agit d'un accident, par définition involontaire, même s'il n'a pas souhaité les conséquences dommageables de son acte ; qu'il y a donc lieu de juger que le principe de sa responsabilité civile est établi et que M. Jean-Louis Y... doit réparer le préjudice subi ;
ALORS QUE le débiteur est recevable à opposer au subrogé les exceptions et moyens de défense qu'il aurait pu opposer au créancier originaire, peu important que ce dernier, qu'il appartient au subrogé d'appeler en la cause s'il le juge utile, ne soit pas partie à l'instance ; qu'en jugeant irrecevable le moyen de défense invoqué par Monsieur Y... relatif à la part de responsabilité incombant à Monsieur X..., qui l'avait provoqué, aux motifs que ce dernier n'avait pas été régulièrement appelé à l'instance, quand il importait peu que ce dernier n'ait pas été partie à l'instance et qu'il appartenait non au débiteur, mais au subrogé, de l'appeler en cette instance s'il le jugeait utile, la Cour d'appel a violé les articles 706-11 du Code de procédure pénale et 1251 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR rejeté la demande de Monsieur Y... tendant à voir condamné la société AGF condamnée à le garantir de toutes les condamnations prononcées à son encontre au profit du Fonds de garantie ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'il convient en premier lieu de relever que même à titre subsidiaire cette cour ne pourrait, ainsi que le sollicite Jean-Louis Y..., retenir une quelconque part de responsabilité à l'encontre de Jean-François X... qui n'a pas été régulièrement appelé à la présente instance ; que toute demande présentée à son encontre doit être en conséquence déclarée irrecevable ; que par ailleurs c'est par des motifs pertinents et appropriés et après avoir analysé complètement l'ensemble des faits qui lui étaient soumis et fait une exacte application de la règle de droit, que le tribunal a considéré que Jean-François Y... a volontairement poussé Jean-François X..., qu'il a intentionnellement recherché le dommage que celui-ci a subi et que dès lors la garantie de la société IART AGF n'est pas due ; qu'il convient en conséquence de confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'article L. 113-1 du Code des assurances dispose : « les pertes et les dommages occasionnés ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police ; toutefois, l'assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré » ; que le contrat d'assurance stipule que ne sont jamais assurés « les dommages intentionnellement causés ou provoqués par l'assuré » ; que la faute intentionnelle de l'assuré susceptible d'exclure la garantie de l'assureur s'entend de la volonté de créer le dommage et non pas simplement de celle de réaliser l'acte cause du dommage ; qu'il convient donc de rechercher si M. Jean-Louis Y... a voulu occasionner le dommage et s'il en a envisagé consciemment la réalisation ; qu'il est constant que M. Y... a poussé volontairement la victime ; qu'il a ainsi provoqué le dommage ; qu'il déclare toutefois ne pas avoir voulu les conséquences dommageables causées par la chute et avoir agi ainsi en raison de l'insulte proférée à son encontre par M. X... ; que cependant, une insulte n'est pas un motif suffisant pour générer une réaction sans proportion telle qu'une agression ; que M. Y... n'est pas intervenu pour se défendre mais à la suite d'un énervement et sous l'impulsivité due, notamment, ce qu'il reconnaît lui-même, à une consommation importante de boissons alcoolisées ; que M. Y... ne peut, pour se soustraire à sa responsabilité, déclarer, après la survenance des faits, ne pas avoir voulu les conséquences dommageables causées par la chute de M. X..., un tel raisonnement conduisant, de fait à vider de tout effet la clause d'exclusion de garantie en cas de dommages intentionnellement causés ou provoqués prévue au contrat d'assurances ; qu'en conséquence la demande du Fonds de garantie à l'égard de la société ALLIANZ Group-AGF sera rejetée ;
1) ALORS QUE la faute excluant la garantie de l'assureur implique à la fois un comportement volontaire source du dommage et la volonté de provoquer le dommage tel qu'il est survenu ; qu'en retenant la faute intentionnelle de Monsieur Y... exclusive de la garantie de la société AGF sans relever d'éléments de nature à démontrer que l'assuré avait la volonté de provoquer le dommage tel qu'il est survenu, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 113-1 du Code des assurances ;
2) ALORS QU'en toute hypothèse la faute intentionnelle excluant la garantie de l'assureur implique, à tout le moins, un comportement volontaire et la conscience de son auteur du dommage qu'il va nécessairement provoquer ; qu'en excluant la garantie de la société AGF sans relever d'éléments de nature à démontrer que son assuré, Monsieur Y..., avait agi volontairement en ayant conscience de ce qu'il provoquerait un dommage, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 113-1 du Code des assurances.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 08-19044
Date de la décision : 18/02/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 20 juin 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 18 fév. 2010, pourvoi n°08-19044


Composition du Tribunal
Président : M. Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Delaporte, Briard et Trichet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.19044
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