LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon le jugement attaqué (Toulon, 12 août 2008), que Mmes Marie-Pierre et Patricia X... et M. Z... ont été engagés par l'association Centre d'orientation sociale Beauséjour (l'association), respectivement en qualité d'infirmière et d'aide-soignants ; que dans le cadre de la loi du 13 juin 1998 sur la réduction du temps de travail, un accord d'établissement a été conclu le 8 novembre 1999 répartissant le travail dans le cadre de cycles de quatre semaines pour les aides soignants, de six semaines pour le personnel de nuit et organisant la réduction du temps de travail sous forme de jours de repos ; que contestant le décompte des jours de RTT qui leur étaient accordés en faisant valoir que ceux-ci ne pouvaient inclure les jours de congés payés auxquels ils avaient droit, les salariés ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir paiement de diverses sommes ;
Attendu que l'association fait grief au jugement de l'avoir condamnée à payer diverses sommes à titre de rappel de salaires pour les jours de récupération non pris, et d'avoir ordonné la compensation entre les créances respectives des parties alors, selon le moyen :
1° / qu'elle faisait expressément valoir, sans être contestée, que les jours de réduction du temps de travail étaient accordés selon un système plus favorable que celui issu des dispositions légales et conventionnelles applicables à l'association, les salariés ayant vocation à bénéficier de deux jours de repos ouvrés toutes les quatre semaines d'une part, soit 26 jours de repos ouvrés sur l'année au lieu de 23, 5 jours, le nombre de jours de repos étant fixé une fois pour toutes sans pouvoir être reportés en cas de coïncidence avec la prise de congés payés d'autre part ; que les différents tableaux versés aux débats tant par l'employeur que par les salariés attestaient de la mise en place de ce système ; qu'en accordant aux salariés l'indemnisation des jours de réduction du temps de travail coïncidant avec des jours de congés payés, sans répondre au moyen soulevé par l'association, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2° / que le salarié ne peut prétendre à l'indemnisation de journées de réduction du temps de travail coïncidant avec ses congés payés que lorsque lesdites journées ont été acquises par l'accomplissement d'un nombre d'heures de travail excédant la durée légale du travail ; qu'en retenant, pour accorder aux salariés demandeurs le bénéfice de journées de réduction du temps de travail coïncidant avec des jours de congés payés, que selon « les dispositions légales (…), le jour de RTT octroyé permet au salarié de faire en moyenne 35 heures par semaine, en sorte que ce dernier ne pourait être supprimé lorsque le salarié se trouve en période de congé payé », sans constater que l'horaire légal aurait été dépassé et, par conséquent, que les journées de réduction du temps de travail auraient été acquises par les intéressés, le conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 212-7-1 et L. 212-8 du code du travail devenus les articles L. 3122-2, L. 3122-3, L. 3122-5 ;
3° / qu'aux termes de l'accord d'établissement relatif à la réduction du temps de travail en date du 8 novembre 1999, « la réduction du temps de travail (…) sera organisée sous forme de jours de repos ; le nombre de jours de repos de 7 heures 48 auquel peut prétendre un salarié est fixé à deux jours ouvrés toutes les quatre semaines de travail effectif » ; qu'en retenant « qu'aux termes de cet accord, les salariés doivent bénéficier d'un jour de RTT tous les 15 jours », le conseil de prud'hommes a violé l'accord susvisé ;
4° / qu'aux termes de l'article L. 212-7-1, alinéa 5, devenu l'article L. 3122-5 du code du travail, « lorsque sont organisés des cycles de travail, seules sont considérées comme des heures supplémentaires pour l'application des dispositions relatives au décompte et au paiement des heures supplémentaires (…), celles qui dépassent la durée moyenne de 35 heures calculée sur la durée moyenne du cycle de travail » ; qu'en postulant que « les salariés n'ayant pu bénéficier des repos compensateurs auxquels ils pouvaient prétendre, force est de considérer que ces derniers ont effectué un nombre d'heures supérieur à la durée légale du travail », sans rechercher si la durée de travail des intéressés avait effectivement été supérieure à 35 heures en moyenne, le conseil de prud'hommes a, de ce chef également, privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 212-7-1, alinéa 5, devenu l'article L. 3122-5 du code du travail ;
Mais attendu que les jours de récupération, qui sont acquis par le salarié au titre d'un accord d'aménagement et de réduction de temps de travail et représentent la contrepartie des heures de travail qu'il a exécutées en sus de l'horaire légal ou de l'horaire convenu, n'ont ni la même cause ni le même objet que les congés payés auquel il a droit, et ne peuvent en conséquence être réduits à due proportion des congés payés dont il dispose ;
Et attendu qu'ayant relevé qu'à la suite de l'organisation du travail dans le cadre d'un cycle de quatre semaines, les jours de repos compensaient les horaires hebdomadaires supérieurs à 35 heures au cours de ce cycle et s'analysaient en une récupération de ce dépassement d'horaire, le conseil de prud'hommes en a exactement déduit, sans encourir les griefs du moyen, que le nombre de ces jours de récupération ne pouvait être réduit à due proportion des congés payés dont disposaient les salariés ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'association Centre d'orientation sociale Beauséjour aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept février deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour l'association Centre d'orientation sociale Beauséjour
Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR condamné l'exposante à payer à :
- M. Z... Alban les sommes de 318, 64 euros à titre de « rappel de salaire sur RTT » des mois d'avril 2001, juin 2001, juillet 2003 et octobre 2004, 31, 86 euros au titre des congés payés afférents, 600 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens ;- Mme X... Marie-Pierre épouse Z... les sommes de 539, 60 euros à titre de « rappel de salaire sur RTT » des mois d'avril 2001, juin 2001, juillet 2001 et octobre 2001, 53, 96 euros au titre des congés payés afférents, et 600 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens ;- Mme X... Patricia les sommes de 489, 02 euros à titre de « rappel de salaire sur RTT » des mois octobre 2001, septembre 2002, septembre 2003 et septembre 2004, 48, 90 euros au titre des congés payés afférents, et 600 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens ;
ainsi que d'AVOIR ordonné la compensation entre les créances respectives des parties.
AUX MOTIFS QUE « (....) aux termes de l'article 10 de l'accord collectif d'établissement relatif à la réduction du temps de travail enregistré le 24 novembre 1999 : « pour les personnels travaillant de jour, la réduction du temps de travail conformément à l'accord de branche sera organisée sous forme de repos ; le nombre de jours de repos est de 7 heures 48 auquel peut prétendre un salarié est fixé à deux jours ouvrés toutes les 4 semaines de travail effectif et le cas échéant au prorata ; pour les personnels travaillant de nuit, la réduction du temps de travail conformément à l'article 13 de l'accord et le cas échéant au prorata ; pour les personnels travaillant de nuit, la réduction du temps de travail conformément à l'accord de branche sera organisée sous forme de repos ; le nombre de jours de repos de 10 heures auquel peut prétendre un salarié est fixé à un jour ouvré toutes les trois semaines complètes de travail effectif ; qu'aux termes de cet accord, les salariés doivent bénéficier d'un jour de RTT tous les 15 jours ; qu'il résulte des productions que l'employeur avait systématiquement refusé de décaler les jours de RTT lorsque ceux-ci coïncidaient avec une période de congés payés nonobstant les dispositions légales ; attendu en effet que le jour de RTT octroyé permettant au salarié de faire en moyenne 35 heures par semaine, ce dernier ne pouvait être supprimé lorsque ce dernier se trouve en période de congé payé ; que les salariés n'ayant pu bénéficier des repos compensateurs auxquels ils pouvaient prétendre, force est de considérer que ces derniers ont effectué un nombre d'heures supérieur à la durée légale du travail ; que l'article L. 3122-6 du Code du Travail prévoit : les heures effectuées au delà de 39 heures par semaine ainsi que, à l'exclusion de ces dernières, celles effectuées au delà de la durée résultant de l'application sur cette période de la durée légale du travail sont des heures supplémentaires (....) »
1. ALORS QUE l'employeur faisait expressément valoir, sans être contesté, que les jours de réduction du temps de travail étaient accordés selon un système plus favorable que celui issu des dispositions légales et conventionnelles applicables à l'association, les salariés ayant vocation à bénéficier de deux jours de repos ouvrés toutes les 4 semaines d'une part, soit 26 jours de repos ouvrés sur l'année au lieu de 23, 5 jours, le nombre de jours de repos étant fixé une fois pour toutes sans pouvoir être reportés en cas de coïncidence avec la prise de congés payés d'autre part ; que les différents tableaux versés aux débats tant par l'employeur que par les salariés attestaient de la mise en place de ce système ; qu'en accordant aux salariés l'indemnisation des jours de réduction du temps de travail coïncidant avec des jours de congés payés, sans répondre au moyen soulevé par l'association, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
2. ALORS en tout état de cause QUE le salarié ne peut prétendre à l'indemnisation de journées de réduction du temps de travail coïncidant avec ses congés payés que lorsque lesdites journées ont été acquises par l'accomplissement d'un nombre d'heures de travail excédant la durée légale du travail ; qu'en retenant, pour accorder aux salariés demandeurs le bénéfice de journées de réduction du temps de travail coïncidant avec des jours de congés payés, que selon « les dispositions légales (...), le jour de RTT octroyé permet au salarié de faire en moyenne 35 heures par semaine, en sorte que ce dernier ne pourait être supprimé lorsque le salarié se trouve en période de congé payé », sans constater que l'horaire légal aurait été dépassé et, par conséquent, que les journées de réduction du temps de travail auraient été acquises par les intéressés, le Conseil des Prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 212-7-1 et L. 212-8 du Code du Travail devenus les articles L. 3122-2, L. 3122-3, L. 3122-5 ;
3. ALORS QU'aux termes de l'accord d'établissement relatif à la réduction du temps de travail en date du 8 novembre 1999, « la réduction du temps de travail (...) sera organisée sous forme de jours de repos ; le nombre de jours de repos de 7 heures 48 auquel peut prétendre un salarié est fixé à deux jours ouvrés toutes les quatre semaines de travail effectif » ; qu'en retenant « qu'aux termes de cet accord, les salariés doivent bénéficier d'un jour de RTT tous les 15 jours »), le Conseil des Prud'hommes a violé l'accord susvisé ;
4. ALORS QU'aux termes de l'article L. 212-7-1, alinéa 5 devenu l'article L. 3122-5 du Code du Travail, « lorsque sont organisés des cycles de travail, seules sont considérées comme des heures supplémentaires pour l'application des dispositions relatives au décompte et au paiement des heures supplémentaires (...), celles qui dépassent la durée moyenne de 35 heures calculée sur la durée moyenne du cycle de travail » ; qu'en postulant que « les salariés n'ayant pu bénéficier des repos compensateurs auxquels ils pouvaient prétendre, force est de considérer que ces derniers ont effectué un nombre d'heures supérieur à la durée légale du travail », sans rechercher si la durée de travail des intéressés avait effectivement été supérieure à 35 heures en moyenne, le Conseil des Prud'hommes a, de ce chef également, privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 212-7-1, alinéa 5 devenu l'article L. 3122-5 du Code du Travail.