La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/02/2010 | FRANCE | N°08-22007

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 16 février 2010, 08-22007


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 6 du code de procédure civile de Polynésie française ;

Attendu qu'aux termes de ce texte, le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'au mois d'octobre 1999, M. X... et son épouse Mme Y... (M. et Mme X...) ont souscrit auprès de la société société Axa assurances (la société Axa) des contrats consistant en des placemen

ts de fonds sur des supports à risque de type fonds communs de placement ; que leurs pl...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 6 du code de procédure civile de Polynésie française ;

Attendu qu'aux termes de ce texte, le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'au mois d'octobre 1999, M. X... et son épouse Mme Y... (M. et Mme X...) ont souscrit auprès de la société société Axa assurances (la société Axa) des contrats consistant en des placements de fonds sur des supports à risque de type fonds communs de placement ; que leurs placements ayant connu des pertes, M. et Mme X... ont, au mois d'août 2001, procédé au rachat des contrats initiaux afin d'investir sur un autre contrat, portant sur plusieurs supports en actions et leur permettant de moduler la prise de risque ; qu'après avoir fait le choix d'un support, dit Plannis euro, sécurisé par un taux minimum garanti, M. et Mme X... ont, au mois d'octobre 2001, opté pour un support, dit Axa France actions, plus dynamique mais plus risqué ; que la situation boursière ayant continué à se dégrader, M. et Mme X... ont, au mois de juin 2002, adressé à la société Axa deux ordres d'arbitrage aux fins de transfert de leurs placements du support Axa France actions sur le support Plannis euro ; que la société Axa a attesté de l'exécution de ces ordres le 25 juin 2002 ; qu'en réalité, ces ordres n'ont pas été exécutés, pour des raisons sur lesquelles les parties s'opposent ; que M. et Mme X..., reprochant à la société Axa d'avoir manqué à son obligation d'information et de conseil, ont demandé que celle-ci soit condamnée à leur payer des dommages-intérêts ;

Attendu que pour rejeter la demande de M. et Mme X..., l'arrêt relève qu'aux termes de leurs conclusions déposées le 27 octobre 2005, ceux-ci ont expressément reconnu avoir suivi les conseils de M. Z..., ingénieur patrimonial au service de la société Axa, aux fins de renoncer aux ordres d'arbitrage, et retient que par suite, ils ne sauraient revenir sur cet aveu judiciaire et reprocher à la société Axa de n'avoir pas exécuté les ordres d'arbitrage, qu'il importe peu que leur renonciation n'ait pas pris la forme d'un ordre écrit dès lors qu'il résulte suffisamment de cet aveu qu'ils étaient d'accord pour que les ordres d'arbitrage litigieux ne soient pas exécutés et que dès lors, la société Axa n'a commis aucune faute dans la gestion des ordres reçus de ses clients ;

Attendu qu'en statuant ainsi, sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations sur le moyen pris de l'existence d'un aveu judiciaire qu'elle relevait d'office, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 août 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Papeete ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Papeete, autrement composée ;

Condamne la société Axa assurances aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. et Mme X... la somme globale de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize février deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Balat, avocat aux Conseils pour M. et Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur et Madame X... de leurs demandes dirigées contre la Compagnie AXA ASSURANCES, en confirmant le jugement les ayant débouté de leur demande d'expertise ;

AUX MOTIFS QU' aux termes de leurs conclusions déposées le 27 octobre 2005, les époux X... ont expressément reconnu avoir suivi les conseils de Claude Z... aux fins de renoncer aux ordres d'arbitrage : « Attendu que l'ordre n'a pas été exécuté, monsieur Z... Claude croyant devoir passer outre dissuadait même l'exposant de procéder à cette mesure conservatoire, étant précisé que le produit "Planis euro" est sécuritaire, tandis que "Axa France Actions" est plutôt à risque. Attendu que ce mauvais conseil a été suivi, l'exposant s'en remettant – à tort – aux compétences de ce professionnel de la finance, et prélevant de temps en temps des sommes d'argent dont il avait besoin » ; que par suite, les époux X... ne sauraient revenir sur cet aveu judiciaire et reprocher à la compagnie d'assurances AXA ASSURANCES de n'avoir pas exécuté les ordres d'arbitrage ; qu'il importe peu que la renonciation des époux X... n'ait pas pris la forme d'un ordre écrit dès lors qu'il résulte suffisamment de cet aveu qu'ils étaient d'accord pour que les ordres d'arbitrage litigieux ne soient pas exécutés ; que ce partant, la compagnie d'assurances AXA ASSURANCES n'a commis aucune faute dans la gestion des ordres reçus de ses clients ;

ALORS, EN PREMIER LIEU, QUE le juge doit, en toutes circonstances, observer le principe de la contradiction ; que pour écarter la faute commise par la Compagnie AXA ASSURANCES dans la gestion des ordres reçus de ses clients, l'arrêt attaqué retient que, dans leur requête d'appel du 27 octobre 2005, les époux X... ont reconnu avoir renoncé aux ordres d'arbitrage du 20 juin 2002 sur les recommandations d'un conseiller d'AXA ASSURANCES, élément constituant un aveu judiciaire ; qu'en relevant ainsi d'office le moyen tiré de l'existence d'un aveu judiciaire, sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé l'article 6 du Code de procédure civile de Polynésie française et le principe de la contradiction ;

ALORS, EN DEUXIEME LIEU, QU' en tout état de cause, la déclaration d'une partie entachée d'erreur de fait ne peut être retenue contre elle comme constituant un aveu judiciaire ; que pour écarter la faute commise par la Compagnie AXA ASSURANCES dans la gestion des ordres reçus de ses clients, l'arrêt attaqué retient que, dans leur requête d'appel du 27 octobre 2005, les époux X... ont reconnu avoir été d'accord pour que les ordres d'arbitrage du 20 juin 2002 ne soient pas exécutés ; qu'en s'estimant liée par cet aveu judiciaire et en statuant comme elle l'a fait, bien que l'exécution des ordres d'arbitrage litigieux ait été acquise aux débats comme résultant des attestations d'exécution établies le 25 juin 2002 par la Compagnie AXA ASSURANCES, attestations régulièrement produites, la cour d'appel a violé les articles 1354 et 1356 du Code civil ;

ALORS, EN TROISIEME LIEU, QUE les époux X... ont soutenu dans leurs écritures que, ayant transféré leurs placements tout d'abord du support « Axa France Actions » sur le support « Plannis Euro » en exécution des ordres d'arbitrage du 20 juin 2002, la Compagnie AXA ASSURANCES a pris l'initiative ultérieurement de retransférer ces placements sur leur support initial « Axa France Actions » ; qu'en énonçant, pour écarter la faute commise par la Compagnie AXA ASSURANCES dans la gestion des ordres reçus de ses clients, que les époux X... reprochaient à celle-ci de n'avoir pas exécuté les ordres d'arbitrage du 20 juin 2002, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 3 du Code de procédure civile de Polynésie française ;

ET ALORS, EN DERNIER LIEU, QU' engage sa responsabilité le prestataire d'investissement qui n'établit pas la réalité de l'ordre qu'il prétend avoir strictement exécuté ; que les époux X... ont soutenu dans leurs écritures que la Compagnie AXA ASSURANCES avait, sans leur accord, réinvesti sur le support « Axa France Actions » les fonds qu'ils avaient arbitrés en faveur du support « Plannis Euro » ; que dès lors, en ne recherchant pas si la Compagnie AXA ASSURANCES rapportait la preuve, qui lui incombait, de l'ordre donné par les époux X... de transférer leurs placements sur le support « Axa France Actions », la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.533-18 du Code monétaire et financier et 1147 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur et Madame X... de leurs demandes dirigées contre la Compagnie AXA ASSURANCES, en confirmant le jugement les ayant débouté de leur demande d'expertise ;

AUX MOTIFS QU' en vertu de l'article 1135 du Code civil, le contrat de placement Figures Libres conclu entre les parties, qui porte sur plusieurs supports en actions, emporte une obligation d'information à la charge de l'assureur qui ne saurait s'en affranchir qu'à l'égard de ses clients suffisamment avertis ; que pour s'exonérer de cette obligation, la compagnie d'assurances AXA ASSURANCES expose que Bertrand X..., de niveau Bac + 9, qui jouait en bourse en investissant des sommes importantes et en donnant des ordres de virement, était suffisamment averti des risques encourus ; que cependant, la qualité de médecin de Bertrand X... ne saurait suffire à lui conférer des aptitudes certaines pour mesurer les risques des placements réalisés ; que son parcours boursier n'est pas autrement démontré que par voie d'affirmation, la seule souscription de produits financiers proposés par une compagnie d'assurances n'étant pas révélatrice d'une connaissance des méandres de la bourse ; qu'en tout état de cause, l'intimée n'allègue pas que Valérie Y... avait, pour sa part, une quelconque expérience en la matière ; que l'obligation d'information de la compagnie d'assurances porte sur les risques encourus mais plus généralement sur la stratégie de placement dont les risques ne constituent qu'un volet, peu important que le client, qui détient la décision finale, subisse une moins-value nécessairement inhérente à l'aléa boursier ; qu'il résulte des pièces de la procédure et des explications des parties, que les époux X... ont choisi dès 1999 de réaliser des placements sur des supports à risque ; que tant en 2001 qu'en 2002, alors qu'ils voulaient opter pour un placement plus sécuritaire, la Compagnie AXA ASSURANCES les a informés de ce que leur placement initial s'inscrivait nécessairement dans la durée et que si le support « Axa France Actions » était exposé aux fluctuations du marché des actions françaises, la performance devait s'apprécier sur le long terme ; que ce principe qualifié d'élémentaire par la compagnie d'assurances n'est pas contredit par les appelants ; que ce faisant, AXA ASSURANCES a normalement rempli son obligation d'information ; que sans doute, le patrimoine des époux X..., qui avait déjà perdu 12 % entre 1999 et 2001, pouvait encore connaître des revers ; que les appelants déplorent une chute de plus de 20 % entre juin et octobre 2002 ; que cependant, les époux X... ne rapportent pas la preuve de ce que cette tendance baissière s'inscrivait dans une prévision connue des analystes financiers ; que ce partant, les époux X..., qui détenaient la décision finale en qualité de donneurs d'ordre, ne rapportent pas la preuve d'un défaut d'information imputable à la compagnie d'assurances AXA ASSURANCES ; que dans ces conditions, c'est à bon droit que le premier juge les a déboutés de leurs prétentions ; que le jugement entrepris sera confirmé dans toutes ses dispositions ;

ALORS QUE le prestataire d'investissement doit mettre en place toutes les mesures raisonnables pour obtenir, lors de l'exécution des ordres, le meilleur résultat possible pour ses clients en fonction de leur situation financière connue et de leurs objectifs d'investissement ; qu'ayant constaté que Monsieur et Madame X... avaient informé la Compagnie AXA ASSURANCES de leur volonté d'opter pour une placement sécuritaire, dénué d'aléa, et que leurs placements avaient été investis, au contraire, sur un support exposé aux fluctuations du marché des actions françaises, la cour d'appel qui a dit que la Compagnie AXA ASSURANCES avait normalement rempli son obligation d'information et son devoir de conseil, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a ce faisant violé l'article 1135 du Code civil, ensemble les articles L.533-13 et L.533-18 du Code monétaire et financier.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 08-22007
Date de la décision : 16/02/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Papeete, 28 août 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 16 fév. 2010, pourvoi n°08-22007


Composition du Tribunal
Président : Mme Tric (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Monod et Colin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.22007
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award