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10/02/2010 | FRANCE | N°09-60244

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 février 2010, 09-60244


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, après avis donné aux parties :
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance, Rouen 28 mai 2009), que M. X... salarié de la société Lohéac a été élu délégué du personnel en mars 2008 ; que l'activité de transport citerne de cette société a été confiée en juillet 2008 à la société Sterna, nouvellement créée, par un contrat de location-gérance précisant la liste du personnel transféré sur laquelle M. X... figurait ; que l'inspecteur du travail a refusé son tran

sfert ainsi que celui de dix-sept autres salariés protégés par décisions du 30 octobre...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, après avis donné aux parties :
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance, Rouen 28 mai 2009), que M. X... salarié de la société Lohéac a été élu délégué du personnel en mars 2008 ; que l'activité de transport citerne de cette société a été confiée en juillet 2008 à la société Sterna, nouvellement créée, par un contrat de location-gérance précisant la liste du personnel transféré sur laquelle M. X... figurait ; que l'inspecteur du travail a refusé son transfert ainsi que celui de dix-sept autres salariés protégés par décisions du 30 octobre 2008 contre lesquelles un recours hiérarchique à été formé ; que le personnel qui devait être repris par la société Sterna ayant été transféré le 1er janvier 2009, l'employeur a organisé des élections professionnelles en invitant les organisations syndicales représentatives à élaborer un protocole préélectoral en février 2009, qu'aucun protocole n'ayant pu être conclu, et aucun candidat ne s'étant présenté ni au premier tour fixé le 26 février 2009, ni au second tour, un procès-verbal de carence a été dressé le 12 mars 2009 ; que par décision postérieure du 30 mars 2009, le ministre des transports a annulé les décisions de l'inspecteur du travail et autorisé le transfert de dix salariés protégés dont M. X... ; que par lettre du 23 avril 2009, le syndicat CFDT a désigné M. X... comme délégué syndical de l'entreprise Sterna, désignation dont l'employeur a demandé l'annulation ;
Attendu que la société Sterna fait grief au jugement de la débouter de cette demande, alors, selon le moyen :
1°/ qu'aux termes de l'article 11-IV de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, «jusqu'aux résultats des premières élections professionnelles dans l'entreprise ou l'établissement, pour lesquelles la date fixée pour la première réunion de la négociation du protocole d'accord préélectoral est postérieure à la publication de la présente loi, est présumé représentatif à ce niveau tout syndicat affilié à l'une des organisations syndicales de salariés présumées représentatives au niveau national et interprofessionnel à la date de publication de la présente loi, ainsi que tout syndicat représentatif à ce niveau à la date de cette publication» ; qu'il est constant que les élections professionnelles se sont déroulées postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, à compter du 16 février 2009, que les organisations professionnelles ont été invitées à élaborer et signer un protocole d'accord préélectoral, qu'aucun protocole n'a été signé, qu'aucune liste syndicale n'a présenté de candidat au premier tour, ni au second et qu'un procès-verbal de carence a été établi et notifié à l'inspecteur du travail, le 12 mars 2009 ; qu'en retenant, pour écarter l'application de la loi nouvelle du 20 août 2008 subordonnant la désignation d'un délégué syndical à la condition que l'organisation ait obtenu au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections, que M. X... a conservé son mandat de délégué du personnel lorsque son contrat de travail a été transféré à la société Sterna, au lieu de se déterminer en considération de la négociation d'un protocole d'accord préélectoral postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi nouvelle pour en faire application, comme elle y était invitée par l'exposante, le tribunal d'instance a violé l'article 11-IV de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, ensemble les articles L. 2143-1 et L. 2143-3 du code du travail par refus d'application ;
2°/ que l'exposante a rappelé dans ses conclusions, que la représentativité du syndicat CFDT des transports routiers de Haute-Normandie devait être appréciée au regard des règles nouvelles de la loi du 20 août 2008 qui étaient applicables à la désignation de M. X..., sur le fondement de l'article 11-IV de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, dès lors que les élections professionnelles avaient été organisées postérieurement à son entrée en vigueur ; qu'en s'abstenant de répondre au moyen que l'exposante tirait des dispositions transitoires prévues à l'article 11-IV de la loi n° 2008- 789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, le tribunal d'instance n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ très subsidiairement, qu'en cas de modification dans la situation juridique de l'employeur, le mandat des délégués du personnel de l'entreprise, qui a fait l'objet de la modification, subsiste lorsque cette entreprise conserve son autonomie ; qu'en affirmant, pour décider que M. X... avait conservé son mandat de délégué du personnel, que «les entités économiques subsistent, même si elles ont perdu leur autonomie juridique», sans rechercher si l'entité transférée avait conservé son autonomie et son identité, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2314-8 du code du travail ;
Mais attendu que l'organisation dans l'entreprise d'élections ayant donné lieu à l'établissement d'un procès-verbal de carence, impliquant qu'aucune organisation syndicale ne s'est présentée au scrutin, il en résulte que ces élections, qui ne permettent pas d'évaluer l'audience syndicale, ne mettent pas fin à la période transitoire, instituée par les articles 11IV et 13 de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, laquelle prend fin au plus tard le 22 août 2012 ;
Et attendu que le tribunal a constaté que M. X... avait été désigné délégué syndical, après le procès-verbal de carence, par une organisation syndicale bénéficiant de la présomption de représentativité par affiliation à une organisation syndicale représentative au niveau national et interprofessionnel ; que par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, la décision déférée se trouve légalement justifiée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix février deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour la société Sterna
Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR écarté l'action que la société STERNA avait formée, afin de voir annuler la désignation de M. Bruno X... ès qualités de délégué syndical ;
AUX MOTIFS QUE selon l'article L 2143-3 du Code du Travail, chaque organisation syndicale représentative dans l'entreprise ou l'établissement de cinquante salariés ou plus, qui constitue une section syndicale, désigne parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants, dans les limites fixées à l'article L. 2143-12, un ou plusieurs délégués syndicaux pour la représenter auprès de l'employeur ; que la société LOHEAC S.A. a décidé d'une restructuration et a créé des filiales pour reprendre ses activités qu'elle a scindées, ainsi, l'activité de transports de containers a été confiée à la société ALCA, la société STERNA a repris l'activité de transports de citernes ; que la création des filiales a entraîné le transfert des conducteurs routiers de la société LOHEAC vers les deux entités, le transfert de 17 salariés, titulaires de mandats de représentants du personnel, dont celui de Monsieur X..., a été refusé par l'Inspecteur du Travail, en octobre 2008, puis, sur recours hiérarchique, autorisé par le Ministre de 1'Écologie, de l'Énergie, du Développement Durable et de l'Aménagement du Territoire par décisions des 30 mars et 1er avril 2009 ; que Monsieur X... a alors intégré la société STERNA, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 22 avril 2009, le Syndicat CFDT des Transports Routiers de Haute-Normandie a procédé à la désignation de Monsieur X... en qualité de délégué syndical auprès de la société STERNA ; qu'il n'est pas sans intérêt de noter que, lors de l'organisation des élections de février-mars 2009, le contrat de travail de Monsieur X..., n'avait pas été transféré à la société STERNA et qu'il n'a pu, de ce fait, être ni électeur, ni candidat ; qu'il résulte de l'article 5 de la Directive CEE 98/50 du 29 juin 1998 que si l'entreprise, l'établissement ou la partie d'entreprise ou d'établissement conserve son autonomie, le statut et les fonctions des représentants ou de la représentation des travailleurs concernés par le transfert subsistent, selon les mêmes modalités et conditions qu'avant la date du transfert..., sous réserve que les conditions nécessaires pour la formation de la représentation des travailleurs soient réunies ; que selon l'article L 1224-1 du Code du Travail, lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ; qu'il résulte des articles L 423-16, L 412-16, L 433-14, qu'en cas de modification dans la situation juridique de l'employeur telle que mentionnée à l'article L 1224-14, le mandat des représentants du personnel élu, le mandat du délégué syndical ou du délégué syndical central de l'entreprise qui a fait l'objet de la modification subsiste lorsque cette entreprise conserve son autonomie juridique, il en est de même lorsque la modification porte sur un établissement, peu important que l'entreprise ait perdu son autonomie juridique ; qu'en l'espèce, les entités économiques subsistent même si elles ont perdu leur autonomie juridique ; que la décision du Ministre de l'Écologie, de l'Énergie, du Développement Durable et de l'Aménagement du Territoire relève d'ailleurs que la société LOHEAC a conservé son fonds de commerce et qu'elle a conclu des contrats de location gérance pour son exercice et que ces conventions qui prévoient le transfert des personnels, matériels, clientèles, ont entraîné le transfert d'entités économiques autonomes avec poursuite de l'activité concernée, et dès lors, sont soumises aux dispositions de l'article L 1224-1 du Code du Travail ; que, dès lors, le mandat de Monsieur X... a perduré dans la nouvelle société STERNA, ce mandat, du 10 mars 2008 pour quatre ans, se poursuit jusqu'à son terme et la loi du 20 août 2008 n'est pas applicable ; que dès lors la désignation de Monsieur X... comme délégué syndical, par Syndicat CFDT des Transports Routiers de Haute-Normandie, au sein de la société STERNA n'est pas irrégulière et la demande d'annulation de la société STERNA sera rejetée ;
1. ALORS QU'aux termes de l'article 11-IV de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, «jusqu'aux résultats des premières élections professionnelles dans l'entreprise ou l'établissement, pour lesquelles la date fixée pour la première réunion de la négociation du protocole d'accord préélectoral est postérieure à la publication de la présente loi, est présumé représentatif à ce niveau tout syndicat affilié à l'une des organisations syndicales de salariés présumées représentatives au niveau national et interprofessionnel à la date de publication de la présente loi, ainsi que tout syndicat représentatif à ce niveau à la date de cette publication» ; qu'il est constant que les élections professionnelles se sont déroulées postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, à compter du 16 février 2009, que les organisations professionnelles ont été invitées à élaborer et signer un protocole d'accord préélectoral, qu'aucun protocole n'a été signé, qu'aucune liste syndicale n'a présenté de candidat au premier tour, ni au second et qu'un procès-verbal de carence a été établi et notifié à l'inspecteur du travail, le 12 mars 2009 (conclusions, p. 7) ; qu'en retenant, pour écarter l'application de la loi nouvelle du 20 août 2008 subordonnant la désignation d'un délégué syndical à la condition que l'organisation ait obtenu au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections, que M. X... a conservé son mandat de délégué du personnel lorsque son contrat de travail a été transféré à la société STERNA, au lieu de se déterminer en considération de la négociation d'un protocole d'accord pré-électoral postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi nouvelle pour en faire application, comme elle y était invitée par l'exposante, le Tribunal d'instance a violé l'article 11-IV de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, ensemble les articles L 2143-1 et L 2143-3 du Code du travail par refus d'application ;
2. ALORS QUE l'exposante a rappelé dans ses conclusions (p. 2 et 3), que la représentativité du syndicat CFDT des transports routiers de Haute-Normandie devait être appréciée au regard des règles nouvelles de la loi du 20 août 2008 qui étaient applicables à la désignation de M. X..., sur le fondement de l'article 11-IV de la loi n°2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, dès lors que les élections professionnelles avaient été organisées postérieurement à son entrée en vigueur ; qu'en s'abstenant de répondre au moyen que l'exposante tirait des dispositions transitoires prévues à l'article 11-IV de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, le Tribunal d'instance n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
3. ALORS très subsidiairement QU'en cas de modification dans la situation juridique de l'employeur, le mandat des délégués du personnel de l'entreprise qui a fait l'objet de la modification subsiste lorsque cette entreprise conserve son autonomie ; qu'en affirmant, pour décider que M. X... avait conservé son mandat de délégué du personnel, que «les entités économiques subsistent, même si elles ont perdu leur autonomie juridique», sans rechercher si l'entité transférée avait conservé son autonomie et son identité, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 2314-8 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-60244
Date de la décision : 10/02/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

SYNDICAT PROFESSIONNEL - Représentativité - Détermination - Critères - Résultats des élections professionnelles - Procès-verbal de carence - Effets - Prolongation de la période transitoire issue de la loi du 20 août 2008

L'établissement d'un procès-verbal de carence en suite d'élections organisées dans l'entreprise impliquant qu'aucune organisation syndicale ne s'est présentée au scrutin, il en résulte que ces élections qui ne permettent pas d'évaluer l'audience syndicale ne mettent pas fin à la période transitoire, instituée par les articles 11 IV et 13 de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, laquelle prend fin au plus tard le 22 août 2012


Références :

articles 11 IV et 13 de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Rouen, 28 mai 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 fév. 2010, pourvoi n°09-60244, Bull. civ. 2010, V, n° 39
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, V, n° 39

Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp
Avocat général : Mme Zientara
Rapporteur ?: Mme Morin
Avocat(s) : SCP Boullez, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.60244
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