La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/02/2010 | FRANCE | N°09-40581;09-40582;09-40583;09-40584;09-40585;09-40586;09-40587;09-40588;09-40589;09-40590;09-40591

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 février 2010, 09-40581 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité joint les pourvois n°s n° W 09-40.581 à H 09-40.591 ;

Sur le moyen unique, commun aux pourvois :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Chambéry, 16 décembre 2008), que la société Optelec, employant plus de cinquante salariés, a, le 20 mars 2006, présenté au comité d'entreprise un projet de réorganisation assorti de propositions de modification des contrats de travail de neuf salariés ; que ces salariés ont refusé les modifications proposées ; que la société a, le 31 ma

i 2006, présenté lors de la réunion de la délégation unique du personnel un projet prév...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité joint les pourvois n°s n° W 09-40.581 à H 09-40.591 ;

Sur le moyen unique, commun aux pourvois :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Chambéry, 16 décembre 2008), que la société Optelec, employant plus de cinquante salariés, a, le 20 mars 2006, présenté au comité d'entreprise un projet de réorganisation assorti de propositions de modification des contrats de travail de neuf salariés ; que ces salariés ont refusé les modifications proposées ; que la société a, le 31 mai 2006, présenté lors de la réunion de la délégation unique du personnel un projet prévoyant notamment la suppression de neuf postes ; qu'elle a licencié pour motif économique neuf salariés le 23 juin 2006, puis huit salariés le 27 juillet 2006 ; que onze salariés ont saisi la juridiction prud'homale d'une demande d'annulation de leur licenciement, en l'absence d'élaboration d'un plan de sauvegarde de l'emploi ;

Attendu que l'employeur fait grief aux arrêts de déclarer nuls les licenciements et de le condamner à verser aux salariés des dommages-intérêts en application de l'article L. 1235-11 du code du travail, alors, selon le moyen :

1°/ que la proposition faite par une société de modifier un élément essentiel du contrat de travail de salariés en raison de la suppression de leur poste pour motif économique conduit nécessairement à envisager leur licenciement pour motif économique ; que pour apprécier le délai de trente jours et le nombre de licenciements envisagés par l'employeur et l'obligation de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi, le juge doit tenir compte des propositions de mutation faite aux salariés ou de toute modification d'un élément de leur contrat de travail ; qu'en décidant qu'il n'y avait pas lieu de tenir compte de la date de la consultation des délégués du personnel pour envisager la mutation de neuf salariés, comme point de départ du délai sous prétexte qu'il s'agissait d'une mutation du personnel et non de l'examen des licenciements éventuels, la cour d'appel a violé les articles L. 1233-8, L. 1233-28 et L. 1233-61 du code du travail ;

2°/ que les juges du fond sont tenus de justifier leur décision par le visa et l'analyse des documents de la cause ; qu'en l'espèce la société Optelec a démontré que c'était lors de la réunion du 20 mars 2006, au cours de laquelle une mutation avait été proposée à neuf salariés, qu'avait été envisagée la première vague de licenciements notifiés le 23 juin 2006 ; qu'elle a visé les pièces justificatives versées aux débats ; qu'en affirmant purement et simplement sans préciser sur quel document elle se serait fondée, que l'employeur n'avait pas donné suite aux refus de mutation des salariés et que les salariés concernés par la proposition de mutation n'avaient pas été tous licenciés le 23 juin, certains l'ayant été le 27 juillet , la cour d'appel a statué par pure affirmation en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'en vertu de l'article L. 1233-61 du code du travail, dans les entreprises de cinquante salariés et plus, les employeurs qui projettent d'effectuer un licenciement pour motif économique sont tenus, lorsque le nombre de licenciements envisagés est au moins égal à dix dans une même période de trente jours, non seulement de réunir et de consulter le comité d'entreprise, mais d'établir et mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre ; qu'en outre, en vertu de l'alinéa 2, de l'article L. 1233-3 du même code, ces dispositions sont applicables à toute rupture du contrat de travail résultant d'une cause économique ;

Et attendu que, pour apprécier le nombre de licenciements envisagés par l'employeur, le juge doit tenir compte du projet tel qu'il est définitivement présenté ; que la cour d'appel, qui a constaté que la réunion du comité d'entreprise du 20 mars 2006 avait pour objet une consultation sur un projet de transfert de matériel et de mutation de salariés et non sur des licenciements éventuels, en a exactement déduit que cette date ne pouvait constituer le point de départ du délai de trente jours ;

D'où il suit que le moyen, inopérant en sa seconde branche comme critiquant un motif surabondant, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société Optelec aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer aux salariés la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix février deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit aux pourvois n° W 09-40.581 à H 09-40.591, par Me de Nervo, avocat aux Conseils pour la société Optelec.

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué D'AVOIR jugé que le licenciement de la salariée était nul et de nul effet en application des dispositions de l'article L 321-4-1 du code du travail (devenu L 1235-10 du même code) et d'avoir condamné la société Optelec à verser à la salarié des dommages-intérêts en application de l'article L 122-14-4 du code du travail devenu L 1235 -11 du même code.

AUX MOTIFS QU'il résulte des pièces versées aux débats que la société Optelec a procédé à 9 licenciements le 8 décembre 2005, licenciements qui n'ont pas fait l'objet de contestation ; le 20 mars 2006 le comité d'entreprise de la SA Optelec a été consulté sur un projet de transfert de l'usine d'Albertville et des machines qui y étaient affectées sur le site de l'usine d'Albertville et des machines qui y étaient affectées sur le site de Vallières et sur la proposition de mutation sur le site de Vallières concernant 9 salariés du site d'Albertville ; suite à cette réunion, 9 salariés dont l'intimée se sont vus proposer le 22 mars 2006, conformément aux dispositions de l'article L 321-1-2 du code du travail leur mutation à Vallières , qu'ils ont tous refusée sans que la SA Optelec n'en titre la moindre conséquence ; le 31 mai une nouvelle réunion extraordinaire de la délégation unique du personnel s'est tenue au cours de laquelle ont été évoqués la vente d'une partie des bâtiments d'Optelec et l'allègement des charges par la suppression de 9 postes ; le 6 juin 2006, les salariés concernés ont été convoqués à un entretien préalable au licenciement fixé au 14 juin suivant et ils ont été licenciés pour motif économique le 23 juin 2006 ; le 26 juin 2006, la délégation unique du personnel était à nouveau convoquée à une réunion extraordinaire fixée au 30 juin, l'ordre du jour prévoyant notamment sa consultation sur la suppression à Albertville de 8 postes de travail et la suppression d'un poste de secrétaire dans les bureaux et le 4 juillet 2006 les salariés concernés ont été convoqués à un entretien préalable à leur licenciement, licenciement qui interviendra le 27 juillet 2006 pour motif économique ; qu'en l'espèce, la régularité de la procédure de licenciement est mise en cause par la salariée qui soutient que la SA Optelec devait respecter les dispositions de l'article L 321-3 du code du travail et mettre en oeuvre un plan social conformément aux dispositions de l'article L 321-4-1 du code du travail ce que l'entreprise conteste ; qu'il n'est pas contesté que l'effectif de la SA Optelec était d'au moins 50 salariés à la date de l'engagement des procédures de licenciement et il convient, dès lors que l'entreprise a procédé à deux vagues de 9 et 8 licenciements successifs, de déterminer si elle devait ou non mettre en place un PSE ; que les dispositions de l'article L 321-2 devenu L 1233-8 et L 122-28 du code du travail distinguent les procédures de licenciement pour motif économique selon que le nombre de licenciements pour motif économiques envisagés est inférieur à 10 dans une même période de 30 jours ; ou selon que leur nombre est au moins égale à 10 pendant une même période de 30 jours ; que dans cette dernière hypothèse, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L 321-4-1 du code du travail devenu L1233-61 de ce même code aux termes desquelles « dans les entreprises de 50 salariés et plus , lorsque le projet de licenciement concerne dix salariés ou plus dans une même période de 30 jours , l'employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre » ; que si la société Optelec soutient que les dispositions susvisées ne sont pas applicables au motif qu'il s'est écoulé un délai de 31 jours entre le 31 mai 2006 et le 30 juin 2006, date de réunions respectives de la DUP ou qu'un délai supérieur à 30 jours s'est écoulé entre la date d'envoi de lettres de licenciement de la première vague (23 juin) et celles de la seconde vague (27 juillet) ces calculs mathématiquement justes sont juridiquement erronés ; qu'il est constant que le début de la période de 30 jours est constitué par la première réunion des représentants du personnel consulté sur un projet de licenciement pour motif économique, soit en l'espèce le 31 mai 2006 et pour apprécier si le délai de 30 jours est ou non expiré il convient de prendre en compte non pas la date de réunion du second comité d'entreprise (c'est-à-dire le 30 juin au cas d'espèce) mais la date à laquelle ce comité d'entreprise est convoqué (soit en l'espèce le 26 juin) pour donner son avis sur le projet ; que la SA Optelec n'est pas fondée à soutenir qu'il convient de se référer à la date du 20 mars 2006 correspondant à la première réunion extraordinaire du CE alors même que ce comité d'entreprise avait pour objet le transfert du matériel, la mutation d'une partie du personnel et non l'examen de licenciements éventuels et que contrairement à ce que soutient l'entreprise, l'ensemble des salariés concerné par le projet de mutation sur le site de Vallières n'a pas été licencié le 23 juin, certains des salariés n'ayant pas été licencié le 23 juin certains salariés n'ayant été licenciés que le juillet 2006 ; que la société Optelec n'est pas fondée à prétendre que ce n'est pas à la date du projet qu'il faut se placer pour vérifier a posteriori les conditions applicables aux licenciements pour motif économique mais à la date à laquelle interviennent les licenciements eux-mêmes ; qu'une telle interprétation est manifestement contraire aux dispositions de l'ancien article L 321-2 du code du travail devenu L 1233-78 et L 1233-28 qui visent l'éventualité d'un licenciement («les employeurs envisagent ) et les dispositions des alinéa 11 et 12 de l'article L 321-2 du code du travail devenus L1233-26 et L 1233-27 du même code dont la SA Optelec se prévaut, ont également pour objet que de soumettre les entreprises ayant déjà procédé (dans des conditions de délai et de nombre) à des licenciements ayant pour motif économique aux règles applicables au grand licenciement économique (+ de 10 salariés) lorsqu'un nouveau licenciement économique est envisagé ; que la société Optelec ayant envisagé de procéder à 17 licenciements sur une période de 30 jours (31 mai /26 juin) c'est donc à juste titre que le conseil de prud'hommes a jugé qu'il convenait d'établir un plan social et ,qu'à défaut le licenciement de la salariée était nul conformément aux dispositions de l'article L 321-4-1 du code du travail ; que conformément aux dispositions de l'article L 122-14-4 du code du travail, le montant de l'indemnité à laquelle la salariée a droit ne peut être inférieur aux 12 derniers mois de salaires ; qu'eu égard à son ancienneté dans l'entreprise et de sa situation justifiée par les pièces produite aux débats, il convient de condamner la société la SA Optelec à verser à la salariée la somme de 24.000 € en réparation du préjudice subi

1° ALORS QUE la proposition faite par une société de modifier un élément essentiel du contrat de travail de salariés en raison de la suppression de leur poste pour motif économique conduit nécessairement à envisager leur licenciement pour motif économique ; que pour apprécier le délai de 30 jours et le nombre de licenciements envisagés par l'employeur et l'obligation de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi, le juge doit tenir compte des propositions de mutation faite aux salariés ou de toute modification d'un élément de leur contrat de travail ; qu'en décidant qu'il n'y avait pas lieu de tenir compte de la date de la consultation des délégués du personnel pour envisager la mutation de 9 salariés comme point de départ du délai sous prétexte qu'il s'agissait d'une mutation du personnel et non de l'examen des licenciements éventuels, la cour d'appel a violé les articles L 1233-8, L 1233-28 et L 1233-61 du code du travail

2° ALORS QUE les juges du fond sont tenus de justifier leur décision par le visa et l'analyse des documents de la cause ; qu'en l'espèce la société Optelec a démontré que c'était lors la réunion du 20 mars 2006 au cours de laquelle une mutation avait été proposée à 9 salariés, qu'avait été envisagée la première vague de licenciements notifiés le 23 juin 2006 ; qu'elle a visé les pièces justificatives versées aux débats ; qu'en affirmant purement et simplement sans préciser sur quel document elle se serait fondée, que l'employeur n'avait pas donné suite aux refus de mutation des salariés et que les salariés concernés par la proposition de mutation n'avaient pas été tous licenciés le 23 juin, certains l'ayant été le 27 juillet , la cour d'appel a statué par pure affirmation en violation de l'article 455 du code de procédure civile


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-40581;09-40582;09-40583;09-40584;09-40585;09-40586;09-40587;09-40588;09-40589;09-40590;09-40591
Date de la décision : 10/02/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 16 décembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 fév. 2010, pourvoi n°09-40581;09-40582;09-40583;09-40584;09-40585;09-40586;09-40587;09-40588;09-40589;09-40590;09-40591


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me de Nervo, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.40581
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award