La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/02/2010 | FRANCE | N°08-41109

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 février 2010, 08-41109


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 15 janvier 2008) que la société Valaubrac, qui faisait partie du groupe Cauval industries et exerçait une activité de fabrication et de commercialisation de meubles de cuisine et de salles de bain dans ses établissements de Bozouls et de Thonon-les-Bains, a informé et consulté au début de l'année 2005 son comité central d'entreprise et le comité d'établissement de Thonon les Bains, sur sa décision de fermer ce dernier établissement, en présentant alors un projet de

licenciement collectif et un plan de sauvegarde de l'emploi ; que le ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 15 janvier 2008) que la société Valaubrac, qui faisait partie du groupe Cauval industries et exerçait une activité de fabrication et de commercialisation de meubles de cuisine et de salles de bain dans ses établissements de Bozouls et de Thonon-les-Bains, a informé et consulté au début de l'année 2005 son comité central d'entreprise et le comité d'établissement de Thonon les Bains, sur sa décision de fermer ce dernier établissement, en présentant alors un projet de licenciement collectif et un plan de sauvegarde de l'emploi ; que le 24 mars 2005, au cours de la procédure consultative, l'employeur a conclu avec un syndicat représentatif et des salariés mandatés par le comité d'établissement un accord d'établissement destiné à améliorer le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, qui a été approuvé par le comité d'établissement ; que des salariés licenciés pour motif économique ont saisi le juge prud'homal de demandes indemnitaires, soit au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, soit, en ce qui concerne M. X... et Mme Y..., représentants du personnel dont le licenciement avait été autorisé par l'administration du travail, au titre d'une violation de l'ordre des licenciements ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Valaubrac fait grief à l'arrêt d'allouer à soixante neuf salariés des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'ordonner le remboursement d'indemnités de chômage alors, selon le moyen :
1° / que la réorganisation invoquée au soutien d'une mesure de licenciement peut être justifiée cumulativement par des difficultés économiques et la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité auquel elle appartient quand elle fait partie d'un groupe ; qu'en l'état d'une lettre de licenciement invoquant ces deux éléments, les juges du fond, tenus par les termes de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, devront rechercher si la réorganisation n'est pas justifiée par la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient ; que la lettre de licenciement notifiée aux salariés se référait à une restructuration, entendue comme une réorganisation, justifiée à la fois par des difficultés économiques et des exigences tenant à la pérennité de l'entreprise ; qu'il incombait à la cour d'appel de vérifier si la réorganisation constatée n'avait pas été nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité du secteur d'activité auquel appartenait la société employeur ; qu'en décidant qu'il n'y avait pas lieu de rechercher si la suppression des emplois litigieux procédait d'une réorganisation nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de la société Valaubrac et du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient en l'état d'une lettre de licenciement invoquant à la fois des difficultés économiques et le maintien de la pérennité de l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-14-2 (devenu L. 1233-15, L. 1233-16) et L.. 321-1 (devenu L. 1233-3) du code du travail ;
2° / que les difficultés économiques comme la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise doivent être appréciées au regard du secteur d'activité du groupe auquel appartient l'entreprise concernée ; que le secteur d'activité ne peut être caractérisé par son seul objet, au sens le plus large et le plus général de ce terme ; que sa définition, ainsi que l'avait fait valoir la société Valaubrac dans ses conclusions d'appel, doit prendre en considération la spécificité des activités exercées, en procédant à des distinctions tenant notamment aux techniques de fabrication et de production, comme aux technologies employées ou aux circuits de distribution ; qu'en se bornant à relever que le secteur d'activité était caractérisé par son seul objet, retenu comme celui de l'ameublement, sans procéder autrement que par simples affirmations à l'examen des distinctions présentées comme permettant de caractériser la spécificité de l'activité exercée et sans s'expliquer précisément sur chacune d'elles ; la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 321-1 du code du travail (devenu L. 1233-3) ;
3° / qu'en se bornant à relever que le secteur d'activité était caractérisé par son seul objet, retenu de façon péremptoire comme celui de l'ameublement, sans justifier cette appréciation par des éléments de fait et de preuve, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
4° / que la société Valaubrac avait longuement exposé dans ses conclusions d'appel que la situation économique du groupe Cauval industries était extrêmement dégradée y compris au niveau des sociétés à l'étranger ; qu'en ne répondant pas au moyen développé par la société Valaubrac qui permettait d'établir au vu des comptes consolidés du groupe incluant les comptes des sociétés à l'étranger que l'ensemble du groupe connaissait des difficultés économiques, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu d'abord que la lettre de licenciement fixant les limites du litige auquel peut ensuite donner lieu cette mesure, la cour d'appel, qui a relevé que la lettre de licenciement faisait uniquement état de difficultés économiques affectant l'entreprise, n'avait pas à rechercher si la décision de l'employeur n'était pas nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe dont elle relevait ;
Attendu ensuite qu'après avoir exactement énoncé que les difficultés économiques doivent être constituées, lorsque l'entreprise appartient à un groupe, au niveau du secteur d'activité de ce groupe dans lequel intervient l'employeur, la cour d'appel, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, a retenu, en prenant en considération un faisceau d'indices relatifs à la nature des produits, à la clientèle auxquels il s'adressaient et au mode de distribution mis en oeuvre par l'entreprise, que celle-ci relevait du secteur d'activité de l'ameublement ; qu'ayant ensuite constaté que l'employeur ne fournissait aucune information sur la situation économique de ce secteur d'activité dans le groupe, à l'époque des licenciements, elle a pu en déduire que ces licenciements ne reposaient pas sur une cause économique ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt d'allouer à M. X... et à Mme Y... des dommages-intérêts, au titre d'une violation de l'ordre des licenciements alors, selon le moyen :
1° / que les critères relatifs à l'ordre des licenciements s'appliquent dans les entreprises ou les établissements ; qu'en retenant que les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements s'appliquent à l'ensemble du personnel de l'entreprise et en refusant d'examiner leur application au sein du seul établissement de Thonon-Les-Bains, quand il existait un accord d'établissement signé par une organisation syndicale représentative qui limitait le périmètre de la mise en oeuvre de ces critères à l'établissement, la cour d'appel a violé l'article L. 321-1-1 du code du travail (devenu L. 1233-5) ;
2° / que la loi n° 2003-6 du 3 janvier 2003 portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques prévoit la possibilité de conclure des accords pouvant fixer les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise lorsque l'employeur projette de prononcer un licenciement collectif pour motif économique d'au moins dix salariés sur une même période de trente jours ; que par conséquent, ces dispositions ne sont pas applicables en présence d'un accord conclu postérieurement à l'engagement de la procédure de consultation du comité d'entreprise ; qu'en statuant néanmoins au visa de cette loi, la cour d'appel en a violé les dispositions, ensemble les articles L. 321-4 (devenu L. 1233-10) et L. 321-1-1 du code du travail (devenu L. 1233-5) ;
3° / qu'à supposer applicable la loi n° 2003-6 du 3 janvier 2003 portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques qui prévoit la possibilité de conclure des accords pouvant fixer les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise lorsque l'employeur projette de prononcer un licenciement collectif pour motif économique d'au moins dix salariés sur une même période de trente jours, en précisant que ces accords ne peuvent déroger aux dispositions de l'article L. 321-4 du code du travail prévoyant la remise aux représentants du personnel des critères proposés pour l'ordre des licenciements ; rien n'interdit à l'employeur, autorisé par la loi à définir ces critères de façon unilatérale, de déterminer leur cadre d'appréciation dans un accord qui ne serait pas un accord collectif au sens de l'article L. 321-1-1 du code du travail ; qu'il en résulte que le cadre d'appréciation des critères retenus pour l'ordre des licenciements est valablement défini dans un accord d'établissement de fin de conflit et d'amélioration du plan de sauvegarde de l'emploi mis en oeuvre dans l'entreprise, accord signé par une organisation syndicale représentative, des salariés mandatés par le comité d'établissement et ratifié par le comité d'établissement ; qu'en refusant de tenir compte de l'établissement de Thonon comme périmètre de mise en oeuvre des critères relatifs à l'ordre des licenciements, la cour d'appel a violé l'article L. 321-1-1 du code du travail (devenu L. 1233-5) ;
Mais attendu qu'après avoir retenu, à bon droit, que les critères déterminant l'ordre des licenciements doivent être mis en oeuvre à l'égard de l'ensemble du personnel de l'entreprise et qu'un accord d'établissement, fût-il approuvé par le comité d'établissement, ne pouvait limiter l'application de ces critères aux seuls salariés de l'établissement concerné par les suppressions d'emplois, la cour d'appel a constaté que l'ordre des licenciements n'avait pas été appliqué à tout le personnel de l'entreprise ; qu'elle a ainsi, abstraction faite du motif erroné mais surabondant pris de l'application de la loi du 3 janvier 2003, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Valaubrac aux dépens ;
Vu l'article 37-2 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société Valaubrac à payer à la SCP Boré et Salve de Bruneton la somme de 1 500 euros pour la défense de Mme Z... ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Valaubrac à payer à MM. Ramazan A..., Ilhan A..., K..., L..., M... et N... ainsi qu'à Mmes B..., C... et D... la somme globale de 2 000 euros ; à Mmes E... et O..., chacune la somme de 1 500 euros ; à Mme F..., et MM. Philippe G..., P... et Q..., chacun la somme de 700 euros ; à M. H... la somme de 2 000 euros ; à Mmes I..., R... et Fabienne J... ainsi qu'à M. J... la somme globale de 3 000 euros ; à Mme Liliane G... la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix février deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour la société Valaubrac
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Valaubrac à payer 69 de ses salariés, des dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
AUX MOTIFS QUE … la lettre de licenciement indique notamment que « … les motifs de cette mesure sont la suppression de votre poste … dans le cadre de la fermeture totale et définitive du site de Thonon-les-Bains, consécutive aux difficultés économiques et financières auxquelles se trouve confrontée la société Espalux Expansion. … ; la diminution régulière des résultats de l'entreprise revêt désormais un caractère préoccupant, dans la perspective de l'arrêt de la relation commerciale avec un des principaux clients d'Espalux Expansion, qui représentait 30 % du chiffre d'affaires en 2004, qui remettait en cause la pérennité de l'entreprise faute de mesure de restructuration prise en conséquence. La situation de crise structurelle est en effet prévue en 2005 … Dès lors, les résultats prévisionnels de la société sont fortement déficitaires en 2005, avec un résultat d'exploitation négatif de 2, 3 millions d'euros. De façon globale, Espalux Expansion est aujourd'hui un acteur fragilisé sur le marché :- par sa taille en tant que fabricant dans un marché en forte concentration dominé par forts acteurs européens,- par la répartition de son chiffre d'affaires qui entraîne une forte pression sur ses marges de la part des clients de la grande distribution. La stratégie commerciale ne permettant pas à elle seule de rétablir l'équilibre économique d'Espalux Expansion, elle doit être accompagnée d'un re-dimensionnement de l'outil industriel comportant la fermeture d'un site. … » ; que les salariés soutiennent justement que les lettres de licenciement font état d'une réorganisation consécutive à des difficultés économiques, en sorte qu'il n'y a pas lieu de rechercher si la suppression des emplois litigieux procède d'une réorganisation nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de la société Valaubrac ; que les difficultés économiques s'apprécient dans le cadre de l'entreprise et non de l'établissement et, si l'entreprise appartient à un groupe, dans le secteur d'activité du groupe auquel elle appartient ; que la société Valaubrac (Espalux Expansion) expose qu'elle a pour activité la conception, la fabrication et la vente de meubles de cuisine et de salles de bains et qu'elle est, avec sa filiale Kit Diffusion Franchise qui assure la gestion commerciale du réseau de franchise Mondial Kit, la seule société du groupe appartenant à ce secteur d'activité, depuis la fusion, intervenue en 2002, des sociétés Savoyarde du Meuble Mont-Blanc et Espalux Expansion, après que celle-ci eut été cédée, en 1992, au groupe Cauval Industries ; qu'elle ajoute que les autres sociétés de ce groupe ont pour activités, la fabrication de sièges (fauteuils, canapés) pour ce qui concerne les sociétés Cauval Industries, Diva, Nordica et Dummel, la fabrication de matelas, s'agissant des sociétés Compagnie Continentale Simmons, Cipal, Simmons Bedding et ses filiales, et enfin l'immobilier d'entreprise pour les sociétés Gecimmo et Fimmopress ; que la société Valaubrac en déduit qu'elle exerce une activité spécifique au sein du groupe Cauval Industries, caractérisant un secteur d'activité autonome par rapport aux trois autres secteurs d'activité que sont la fabrication de sièges, la fabrication de literie et le secteur immobilier, et conforte son argumentation par l'énumération des facteurs qu'elle estime distinctifs tels que le marché, la clientèle, le processus de fabrication, la concurrence, l'historique des diverses sociétés du groupe, les directions opérationnelles ou les lieux d'exploitation ; mais que le secteur d'activité économique est caractérisé par son objet, ainsi l'activité d'ameublement, sans qu'il y ait lieu de distinguer, voire de sous-distinguer comme le fait la société, entre les différentes composantes de celui-ci ; qu'en cet état, les critères tirés de l'historique des sociétés, de la direction opérationnelle et des sites d'exploitation sont inopérants, de même que la déclinaison des gammes de produits (entrée de gamme, moyen de gamme, haut de gamme), non exclusivement applicables aux seuls meubles de cuisine et de salle de bains ; que, contrairement à ce qui est allégué, la clientèle est globalement la même, en premier lieu celle des ménages, pour l'ensemble des produits que constitue cette catégorie de meubles, les sièges (canapés, fauteuils) et la literie ; que la société Valaubrac soutient qu'une partie importante de son réseau de distribution est différente de celui des autres sociétés du groupe Cauval Industries mais les lettres de licenciement fondent les difficultés économiques d'Espalux Expansion principalement sur la chute importante de son chiffre d'affaires avec Conforama, présenté ainsi comme son distributeur dominant, qu'elle a entendu compenser par des relations commerciales avec But, et les pièces produites révèlent que les sociétés exploitant ces enseignes sont toutes deux les principaux distributeurs des produits d'ameublement du groupe Cauval Industries, auxquels doivent être ajoutés les clients communs que sont les sociétés à l'enseigne Atlas et Fly ; que dès lors qu'une activité économique se caractérise par son objet, il n'importe que les opérations de fabrication des produits participant à la réalisation de celui-ci soient distinctes, que ces produits ne soient pas substituables, que les prix ne soient pas comparables ou que quelques concurrents soient différents selon les spécialités ; qu'enfin, il doit être tenu compte du fait, fût-il non déterminant à lui seul, que les trois spécialités litigieuses (fabrication de literies, de sièges et de meubles de cuisine et / ou de salle de bains) sont régies par la même convention collective nationale, celle de la fabrication de l'ameublement, de sorte que tous les salariés des sociétés du groupe participant à leur production, en tout cas sur le territoire national, sont soumis aux mêmes dispositions conventionnelles ; qu'il ressort des éléments contradictoirement débattus que les licenciements litigieux ont été notifiés entre le 2 mai 2005 et le 24 mars 2006, et que dès lors, les difficultés économiques doivent être appréciées au cours de cette période, non pas au regard de la seule situation de la société Espalux Expansion devenue Valaubrac, mais au niveau du secteur d'activité de l'ameublement du groupe Cauval Industries, issu de la fusion absorption, le 30 mars 2005, de la société du même nom par la société Parfival ; qu'il est établi, au vu de son organigramme, que ce groupe comprend une vingtaine de sociétés dont plusieurs d'entre elles ont pour objet le secteur d'activité de l'ameublement, en France ou à l'étranger, en sorte qu'il n'y a pas lieu de réduire le groupe aux seuls sociétés situées sur le territoire national ; que la société Valaubrac soutient désormais que le groupe Cauval Industries a connu des difficultés économiques contemporaines de celles affectant la société Espalux Expansion ; que ces difficultés n'ont pas été invoquées dans les lettres de licenciement qui fixent les limites du litige ; qu'en tout cas, l'argumentation de l'employeur ne permet pas d'apprécier les difficultés économiques alléguées dans le cadre du secteur d'activité du groupe auquel il appartient, à défaut notamment de précisions concernant les résultats de ce secteur d'activité à l'étranger ; que l'élément causal du licenciement économique collectif n'est donc pas établi ;
1 / ALORS QUE la réorganisation invoquée au soutien d'une mesure de licenciement peut être justifiée cumulativement par des difficultés économiques et la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité auquel elle appartient quand elle fait partie d'un groupe ; qu'en l'état d'une lettre de licenciement invoquant ces deux éléments, les juges du fond, tenus par les termes de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, devront rechercher si la réorganisation n'est pas justifiée par la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient ; que la lettre de licenciement notifiée aux salariés se référait à une restructuration, entendue comme une réorganisation, justifiée à la fois par des difficultés économiques et des exigences tenant à la pérennité de l'entreprise ; qu'il incombait à la cour d'appel de vérifier si la réorganisation constatée n'avait pas été nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité du secteur d'activité auquel appartenait la société employeur ; qu'en décidant qu'il n'y avait pas lieu de rechercher si la suppression des emplois litigieux procédait d'une réorganisation nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de la société Valaubrac et du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient en l'état d'une lettre de licenciement invoquant à la fois des difficultés économiques et le maintien de la pérennité de l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-14-2 (devenu L. 1233-15, L. 1233-16) et L. 321-1 (devenu L. 1233-3) du code du travail ;
2 / ALORS QUE les difficultés économiques comme la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise doivent être appréciées au regard du secteur d'activité du groupe auquel appartient l'entreprise concernée ; que le secteur d'activité ne peut être caractérisé par son seul objet, au sens le plus large et le plus général de ce terme ; que sa définition, ainsi que l'avait fait valoir la société Valaubrac dans ses conclusions d'appel, doit prendre en considération la spécificité des activités exercées, en procédant à des distinctions tenant notamment aux techniques de fabrication et de production, comme aux technologies employées ou aux circuits de distribution ; qu'en se bornant à relever que le secteur d'activité était caractérisé par son seul objet, retenu comme celui de l'ameublement, sans procéder autrement que par simples affirmations à l'examen des distinctions présentées comme permettant de caractériser la spécificité de l'activité exercée et sans s'expliquer précisément sur chacune d'elles ; la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 321-1 du code du travail (devenu L. 1233-3) ;
3 / ALORS QUE de surcroît, en se bornant à relever que le secteur d'activité était caractérisé par son seul objet, retenu de façon péremptoire comme celui de l'ameublement, sans justifier cette appréciation par des éléments de fait et de preuve, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
4 / ALORS QUE subsidiairement, la société Valaubrac avait longuement exposé dans ses conclusions d'appel que la situation économique du groupe Cauval industries était extrêmement dégradée y compris au niveau des sociétés à l'étranger (conclusions d'appel, pages 24 à 29) ; qu'en ne répondant pas au moyen développé par la société Valaubrac qui permettait d'établir au vu des comptes consolidés du groupe incluant les comptes des sociétés à l'étranger que l'ensemble du groupe connaissait des difficultés économiques, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Valaubrac à payer à Monsieur X... et Madame Y... une indemnité pour violation des règles d'application des critères de l'ordre des licenciement ;
AUX MOTIFS QUE les critères relatifs à l'ordre des licenciements, fixés en accord avec le comité d'entreprise, s'appliquent à l'ensemble du personnel de l'entreprise ; que le litige porte en l'espèce, non sur la détermination de ces critères, mais sur le cadre de leur mise en oeuvre ; qu'ils ont en effet été appliqués au niveau du seul établissement de Thonon-Les-Bains, en conformité des termes de l'accord de fin de conflit et d'amélioration du plan de sauvegarde de l'emploi signé le 24 mars 2005 par l'organisation syndicale CFDT et par les élus mandatés par le comité d'établissement ; qu'il n'est pas contesté que cet accord a été l'objet d'une ratification par le comité d'établissement de Thonon-Les-Bains le 25 mars 2005 et que le livre III a été modifié pour intégrer cette disposition, après avis conforme du comité central d'entreprise le 4 avril 2005 et par le comité d'établissement le 8 avril ; que cependant, les salariés font justement valoir que l'accord invoqué par la société Valaubrac n'a pas valeur d'accord collectif au sens des dispositions de l'article L. 321-1-1 du code du travail et qu'en outre, selon la loi de relance de la négociation collective en date du 3 janvier 2003, les dérogations aux dispositions des livres III et IV de ce code sont limitées à l'information et à la consultation du comité d'entreprise, à l'exclusion notamment, des obligations de l'employeur relatives à l'ordre des licenciements, de sorte que sont prohibés les aménagements conventionnels qui ont pour objet la limitation du cadre de mise en oeuvre des critères ;
1 / ALORS QUE les critères relatifs à l'ordre des licenciements s'appliquent dans les entreprises ou les établissements ; qu'en retenant que les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements s'appliquent à l'ensemble du personnel de l'entreprise et en refusant d'examiner leur application au sein du seul établissement de Thonon-Les-Bains, quand il existait un accord d'établissement signé par une organisation syndicale représentative qui limitait le périmètre de la mise en oeuvre de ces critères à l'établissement, la cour d'appel a violé l'article L. 321-1-1 du code du travail (devenu L. 1233-5) ;
2 / ALORS QUE subsidiairement, la loi n° 2003-6 du 3 janvier 2003 portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques prévoit la possibilité de conclure des accords pouvant fixer les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise lorsque l'employeur projette de prononcer un licenciement collectif pour motif économique d'au moins dix salariés sur une même période de 30 jours ; que par conséquent, ces dispositions ne sont pas applicables en présence d'un accord conclu postérieurement à l'engagement de la procédure de consultation du comité d'entreprise ; qu'en statuant néanmoins au visa de cette loi, la cour d'appel en a violé les dispositions, ensemble les articles L. 321-4 (devenu L. 1233-10) et L. 321-1-1 du code du travail (devenu L. 1233-5) ;
3 / ALORS QUE subsidiairement, à supposer applicable la loi n° 2003-6 du 3 janvier 2003 portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques qui prévoit la possibilité de conclure des accords pouvant fixer les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise lorsque l'employeur projette de prononcer un licenciement collectif pour motif économique d'au moins dix salariés sur une même période de 30 jours, en précisant que ces accords ne peuvent déroger aux dispositions de l'article L. 321-4 du code du travail prévoyant la remise aux représentants du personnel des critères proposés pour l'ordre des licenciements ; rien n'interdit à l'employeur, autorisé par la loi à définir ces critères de façon unilatérale, de déterminer leur cadre d'appréciation dans un accord qui ne serait pas un accord collectif au sens de l'article L. 321-1-1 du code du travail ; qu'il en résulte que le cadre d'appréciation des critères retenus pour l'ordre des licenciements est valablement défini dans un accord d'établissement de fin de conflit et d'amélioration du plan de sauvegarde de l'emploi mis en oeuvre dans l'entreprise, accord signé par une organisation syndicale représentative, des salariés mandatés par le comité d'établissement et ratifié par le comité d'établissement ; qu'en refusant de tenir compte de l'établissement de Thonon comme périmètre de mise en oeuvre des critères relatifs à l'ordre des licenciements, la cour d'appel a violé l'article L. 321-1-1 du code du travail (devenu L. 1233-5).


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-41109
Date de la décision : 10/02/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 15 janvier 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 fév. 2010, pourvoi n°08-41109


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, Me Haas, Me Hémery, Me Luc-Thaler, Me de Nervo, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.41109
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award