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26/01/2010 | FRANCE | N°08-18354

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 26 janvier 2010, 08-18354


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 12 juin 2008), que le Crédit lyonnais et le Crédit foncier de France (les banques) ont consenti par acte notarié deux crédits, respectivement les 31 mai 1988 et 27 novembre 1991, à Mme X... et ses deux enfants, Guy et Margaret X... (les consorts X...) ; qu'à la suite du non paiement des échéances, les banques ont poursuivi les consorts X... en paiement et obtenu leur condamnation ; qu'en février 2004, ces derniers ont assigné M. Y..., leur notaire, et les banque

s pour manquement, le premier, à son devoir de conseil, et les sec...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 12 juin 2008), que le Crédit lyonnais et le Crédit foncier de France (les banques) ont consenti par acte notarié deux crédits, respectivement les 31 mai 1988 et 27 novembre 1991, à Mme X... et ses deux enfants, Guy et Margaret X... (les consorts X...) ; qu'à la suite du non paiement des échéances, les banques ont poursuivi les consorts X... en paiement et obtenu leur condamnation ; qu'en février 2004, ces derniers ont assigné M. Y..., leur notaire, et les banques pour manquement, le premier, à son devoir de conseil, et les secondes, à leurs obligations de conseil, d'information et de mise en garde ;

Sur le premier moyen :
Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt d'avoir déclaré prescrite l'action en responsabilité engagée en 2004 à l'encontre des banques, tendant à la réparation du préjudice causé par le manquement de ces dernières à leur obligation de conseil lors de l'octroi du prêt et de l'ouverture de crédit, alors, selon le moyen, que le point de départ de l'action en responsabilité contractuelle dirigée contre un établissement bancaire à raison d'un manquement à son devoir de mise en garde n'est pas le jour où le manquement a été commis, mais le jour où le dommage qui en est résulté pour le client, ou l'aggravation de ce dommage, se sont manifestés ; que la cour d'appel a violé les articles 1147 du code civil ;
Mais attendu que la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ; que le dommage résultant d'un manquement à l'obligation de mise en garde consistant en une perte de chance de ne pas contracter se manifeste dès l'octroi des crédits ; qu'ayant ainsi retenu que l'inexécution alléguée s'était manifestée, à la date de conclusion des contrats, la cour d'appel en a exactement déduit que l'action engagée en février 2004 à l'encontre des banques par les consorts X... était prescrite ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, en ce qu'il fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré prescrite l'action en responsabilité engagée en 2004 à l'encontre de M. Y..., rédacteur de l'acte, en réparation du préjudice causé par le manquement du notaire à son obligation de conseil lors de l'octroi par actes authentiques, d'un prêt le 31 mai 1988, et d'une ouverture de crédit le 27 novembre 1991 :
Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en confondant fait générateur du dommage et dommage lui-même, la cour d'appel a violé l'article 2270-1 du code civil ;
2°/ qu'en cas de manquement d'un établissement bancaire à son devoir de mise en garde, ou d'un notaire à son devoir de conseil, la manifestation du dommage ne peut pas résulter d'un simple incident de paiement, mais de la constatation de la déconfiture du débiteur et de ce que son patrimoine, dans son ensemble, ne peut satisfaire à des engagements financiers excessifs ; que, faute d'avoir recherché et constaté à quel moment précis ce diagnostic avait pu être fait par les consorts X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2270-1 du code civil ;

3°/ que la cour d'appel ne pouvait pas, sans priver sa décision de base légale au regard de l'article 2270-1 du code civil, infirmer le jugement qui avait écarté la prescription, sans s'expliquer sur le motif des premiers juges qui avaient retenu l'existence d'une aggravation du dommage lors du commandement de saisie immobilière du 30 décembre 1999 ;

Mais attendu qu'ayant constaté que des mises en demeure de payer avaient été adressées aux consorts X... dès 1992, ce dont il résultait que le dommage s'était révélé dès cette époque, la cour d'appel en a exactement déduit que l'action en responsabilité engagée à l'encontre du notaire était prescrite ; que le moyen, qui manque en fait dans sa troisième branche, ne peut être accueilli pour le surplus ;
Et sur le second moyen, en ce qu'il fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré prescrite l'action dirigée contre les banques en réparation du préjudice causé par leur manquement à leur devoir de conseil :
Mais attendu que le moyen critique un motif qui n'est pas le soutien du dispositif déclarant prescrite l'action engagée à l'encontre des banques ; que le moyen n'est pas recevable ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six janvier deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour les consorts X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

II est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré prescrite l'action en responsabilité engagée en 2004 par les consorts X... à l'encontre du Crédit Lyonnais et du Crédit Foncier de France, tendant à la réparation du préjudice causé par le manquement de ces établissements bancaires à leur obligation de conseil lors de l'octroi d'un prêt le 31 mai 1988 par le Crédit Lyonnais, et d'une ouverture de crédit le 27 novembre 1991 par le Crédit Foncier de France.
AUX MOTIFS QUE le point de départ du délai de prescription de dix ans doit être fixé à la date de l'inexécution de l'obligation ; que le manquement au devoir de conseil et de mise en garde reproché tend à remettre en cause les conditions d'octroi du prêt et ouverture de crédit au regard de la capacité financière des emprunteurs ; que l'inexécution alléguée s'est donc produite le jour de l'octroi du crédit ;
ALORS QUE le point de départ de l'action en responsabilité contractuelle dirigée contre un établissement bancaire à raison d'un manquement à son devoir de mise en garde n'est pas le jour où le manquement a été commis, mais le jour où le dommage qui en est résulté pour le client, ou l'aggravation de ce dommage, se sont manifestés ; que la Cour d'appel a violé les articles 1147 du Code civil et L.110-4 du Code de commerce.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait qrief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré prescrite l'action en responsabilité engagée en 2004 par les consorts X... à l'encontre d'une part du Crédit Lyonnais et du Crédit Foncier de France, d'autre part à l'encontre de Monsieur Y..., leur notaire, tendant à la réparation du préjudice causé par le manquement des établissements bancaires à leur obligation de mise en garde et par le manquement du notaire à son obligation de conseil lors de l'octroi par actes authentiques, d'un prêt le 31 mai 1988, et d'une ouverture de crédit le 27 novembre 1991 ;
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article 2270-1 du Code civil, les actions en responsabilité civile extra-contractuelle se prescrivent pour dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation ; que le fait générateur du dommage allégué s'est produit lors de la survenance du premier incident de paiement, caractérisant l'impossibilité pour les consorts X... de faire face à leurs obligations pécuniaires ; que des mises en demeure de payer ont été adressées en octobre 1992, et novembre 1993 ; que le dommage allégué s'est manifesté dès 1992, de sorte que l'action déposée le 18 février 2004 est prescrite ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en confondant « fait générateur du dommage » et dommage lui-même, la Cour d'appel a violé l'article 2270-1 du Code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en cas de manquement d'un établissement bancaire à son devoir de mise en garde, ou d'un notaire à son devoir de conseil, la manifestation du dommage ne peut pas résulter d'un simple incident de paiement, mais de la constatation de la déconfiture du débiteur et de ce que son patrimoine dans son ensemble ne peut satisfaire à des engagements financiers excessifs ; que faute d'avoir recherché et constaté à quel moment précis ce diagnostic avait pu être fait par les intéressés, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2270-1 du Code civil ;
ALORS, ENFIN, QUE la Cour d'appel ne pouvait sans à nouveau priver sa décision de base légale au regard du même texte, infirmer le jugement qui avait écarté la prescription, sans s'expliquer sur le motif décisif des premiers juges qui avaient retenu l'existence d'une aggravation du dommage lors du commandement de saisie immobilière du 30 décembre 1999.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 08-18354
Date de la décision : 26/01/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

PRESCRIPTION CIVILE - Délai - Point de départ - Action en responsabilité contractuelle

BANQUE - Responsabilité - Faute - Manquement à l'obligation de mise en garde - Action de l'emprunteur contre la banque - Prescription - Délai - Point de départ PRET - Prêt d'argent - Prêteur - Etablissement de crédit - Responsabilité - Manquement au devoir de mise en garde - Action de l'emprunteur contre l'établissement de crédit - Prescription - Délai - Point de départ

La prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ; le dommage résultant d'un manquement à l'obligation de mise en garde consistant en une perte de chance de ne pas contracter se manifeste dès l'octroi des crédits. Justifie légalement sa décision la cour d'appel qui retient que l'inexécution de l'obligation de mise en garde alléguée par l'emprunteur à l'encontre de deux banques ayant consenti un prêt le 31 mars 1988 et une ouverture de crédit le 29 novembre 1991 s'est manifestée à la date de conclusion des contrats et que l'action en paiement engagée en février 2004 contre les banques est prescrite


Références :

article 1147 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 12 juin 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 26 jan. 2010, pourvoi n°08-18354, Bull. civ. 2010, IV, n° 21
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, IV, n° 21

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Rapporteur ?: M. Gérard
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Vier, Barthélemy et Matuchansky, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.18354
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